Devant le palais de justice de Laval, le 22 février 2018, ils ont manifesté leur colère
Les conditions météorologiques ne favorisaient pas la participation. Une cinquantaine de militants ou sympathisants de la Confédération paysanne étaient présents devant le palais de justice de Laval afin d’exprimer leur sentiment d’injustice en voyant le traitement de faveur réservé au leader mondial de la transformation laitière, Lactalis. Voir Histoire - Lactalis et Cinq choses à savoir sur Emmanuel Besnier
Le syndicat paysan avait choisi de manifester à Laval parce que cette entreprise est lavalloise depuis sa création. Voir les explications données par Dominique Morin, secrétaire général de la Confédération paysanne en Mayenne (Ouest-France, 22 février 2018) :
« Les paysans ont un sentiment d’injustice »
La Confédération paysanne appelle à manifester ce jeudi devant le tribunal de Laval contre « l’impunité » dont jouirait Lactalis. Trois questions à Dominique Morin.
Pourquoi appelez-vous à manifester ?
Laval est le siège social de Lactalis, mais on ne veut pas manifester devant ses grilles pour éviter aux éleveurs des représailles. Les paysans ont un fort sentiment d’injustice face à l’impunité que les pouvoirs publics accordent à certains industriels dont Lactalis est le symbole. Ils ont l’impression d’avoir affaire à une justice à deux vitesses : très dure sur le respect des réglementations administratives et environnementales qui touchent les paysans et très laxiste par rapport aux industriels.
Comment se traduisent ces injustices concrètement ?
Quand un agriculteur se trompe de quelques hectares sur sa déclaration Pac (Politique agricole commune), il peut immédiatement voir ses aides amputées de 5 %. A côté de ça, le numéro 1 mondial du lait ne publie pas ses chiffres. Et en toute impunité. Aujourd’hui, plus de 50 % des agriculteurs travaillent pour moins de 1000 €/mois. Après 44 ans de cotisation, la retraite est de 800 €. C’est totalement injuste.
Qu’attendez-vous des pouvoirs publics ?
Une prise de conscience. S’ils se préoccupent des 500 postes de l’usine de Craon, on ne les entend pas sur les 250 emplois agricoles au moins qui disparaissent chaque année en Mayenne depuis trente ans. Aujourd’hui, les producteurs ont de plus en plus de travail, donc de volume de lait, et de moins en moins de revenus disponibles. Actuellement, négocier le prix du lait s’apparente à accepter les tarifs de Lactalis. On demande aux pouvoirs publics de créer une loi afin de garantir un revenu pour les paysans.
La Confédération paysanne s’exprimait ainsi au niveau national. Voir (22 février) sur son site :
Lactalis : la justice doit se saisir du revenu paysan !
Le revenu des producteurs de lait est dramatiquement bas et les perspectives se montrent peu rassurantes pour les semaines à venir. Les Etats généraux de l'alimentation devaient permettre « plus de transparence pour une meilleure rémunération des producteurs ». Pourtant, une entreprise reste la championne de l'opacité : Lactalis ! Les enquêtes et les scandales se multiplient : comptes non publiés depuis des années malgré une obligation légale, lait infantile impropre à la consommation après une contamination aux salmonelles, deux milliards d'euros de montages fiscaux au Luxembourg…
Face à l'impunité de Lactalis, la Confédération paysanne a organisé ce midi une manifestation devant le tribunal de grande instance de Laval, sur les terres du géant de l'agro-industrie. Si ce dernier vient de publier une partie minime de ses comptes, il reste beaucoup de chemin à parcourir jusqu'à la transparence qui nous permettra de comprendre où passe la valeur. Il faut donc continuer à exiger l'application de la loi. Cette même loi qui s'applique sans détours lorsqu'il s'agit de prononcer les liquidations judiciaires pour des paysannes et paysans.
Voir aussi (26 janvier 2018) :
C'est avec une immense colère que la Confédération paysanne a découvert aujourd'hui le montage financier décrit dans le magazine "l'ebdo" qui a permis à Lactalis de cacher 2 milliards d'euros au Luxembourg.
Alors que les paysans qui livrent cet ogre ne s'en sortent pas, la société écran luxembourgeoise "Nethuns" aurait permis d'engranger près de 2 milliards d'euros de bénéfices, par un mécanisme complexe de factures internes. De ces 2 milliards, la moitié aurait été redistribuée à des bénéficiaires cachés, l'autre moitié en plus-value nette d'impôts à BSA, la holding belge de la famille Besnier.
Alors que le combat pour le revenu des paysans fait rage en France, de telles révélations sont édifiantes et éclairantes ! Lactalis, champion de l'opacité, doit des explications aux paysans. Nous demandons à Emmanuel Macron de mettre ses discours en actes et de demander des comptes au géant lavallois ! Il faut que parquet financier ouvre une enquête.
La Confédération appelle dès à présent les producteurs et productrices de lait à faire monter la pression pour que toute la lumière soit faite sur ce détournement du fruit du travail des paysans !
Voici des extraits du quotidien Ouest-France, le 23 février, rendant compte de la manifestation.
« Qu’ils prennent leurs responsabilités »
Hier après-midi, les agriculteurs manifestaient devant le palais de justice de Laval pour dénoncer l’impunité de Lactalis.
« Il faut que la transparence soit présente sur tous les maillons de la chaîne ». Perché sur son escabeau, Nicolas Girod, secrétaire national de la Confédération paysanne, porte la voix des producteurs de lait (…).
« Les paysans disparaissent »
Derrière lui, le tribunal de grande instance de Laval, symbole de leurs revendications. « C’est là que les faillites sont prononcées pour nous paysans. Pas loin, il y a le tribunal de commerce, où Lactalis devrait publier tous ses comptes. Pour nous, ce n’est pas acceptable que, d’un côté, les paysans disparaissent, et que, de l’autre, Lactalis ne publie pas ses comptes en toute impunité, et garde les profits de ce que nous produisons » (...).
Producteur de lait dans le Jura, Nicolas Girod entend bien réveiller les pouvoirs publics sur ces questions. « Maintenant, il faut qu’ils prennent leurs responsabilités ».
Rappel articles concernant Lactalis :
- (7 février 2018, CiViQ) : La persistance de salmonelles dans l'usine de Craon fait chuter Lactalis
- (8 février 2018, MRC 53) : Les leçons à tirer de l'affaire des laits infantiles contaminés Lactalis
- (20 février 2018, MRC 53) : Lactalis et contamination des laits infantiles : les contrôles en question
Cet article est le 3057 ème sur le blog MRC 53 - le 441ème, catégorie AGRICULTURE et PAC