Vers la refondation républicaine de la gauche
Dimanche soir, sur ce blog, je faisais part des principales décisions prises par le MRC lors de son Conseil national (article paru le 6 avril, renvoyant vers les sites de Chevènement www.chevenement.fr et du MRC www.mrc-france.org pour prendre connaissance des textes publiés).
Ce 8 avril, je vais présenter (voir, ci-après) la 3ème partie du texte d’orientation soumis par Jean-Pierre Chevènement à la réflexion du Conseil national, lequel a approuvé à l’unanimité la proposition de le communiquer aux fédérations départementales pour que les militants s’en saisissent en vue du congrès de juin.
Auparavant, sans accorder une importance excessive à cette déclaration, notons les propos du secrétaire national du PS lors du point de presse, tels qu’ils ont été rapportés par la dépêche de l’AFP, publiée hier.
Accord du PS avec le MRC pour « une accélération du travail commun » à gauche
Le PS s'est déclaré lundi d'accord pour une "accélération du travail commun à gauche", au lendemain de la prise de position du MRC de Jean-Pierre Chevènement en faveur de "la constitution d'un grand parti de la gauche".
"Nous partageons avec lui la préoccupation que la gauche se réunisse et se mette au travail autour de ses comités de liaison ou de structures fédératrices dès que cela sera possible", a affirmé le secrétaire national Bruno Le Roux lors du point de presse hebdomadaire du parti.
"Nous partageons cette nécessité d'accélération du travail commun à gauche. Nous prendrons avec lui et avec d'autres les initiatives permettant d'accélérer ce travail commun à gauche", a ajouté le responsable PS.
Réuni dimanche, le conseil national du Mouvement républicain et citoyen (MRC) a exprimé "la volonté du MRC de s'inscrire dans un processus de refondation républicaine par la création d'un grand parti de toute la gauche", en soulignant que "cette refondation ne saurait en aucun cas être confondue avec une adhésion au PS". Président d'honneur du MRC, M. Chevènement avait pris position en ce sens au lendemain du second tour de l'élection présidentielle de 2007.
Texte d’orientation (3ème partie) présenté par Jean-Pierre Chevènement le 6 avril au Conseil national du PS
Vers la refondation républicaine de la gauche
1. Trente-sept ans après le Congrès d'Epinay, la gauche française doit prendre un nouveau départ comme elle a su le faire à différentes étapes de son histoire : 1905 -1920 - 1946 - 1971. Le cycle d'Epinay est désormais révolu. Ce qui ne signifie pas que les objectifs originels - rassembler la gauche, reconquérir les couches populaires - aient perdu de leur pertinence. Mais le monde a changé. Avec l'effondrement de l'URSS, le communisme a perdu son étoile polaire. Confronté au néo-conservatisme libéral, le Parti socialiste peine à trouver ses marques. C'est une refondation de toute la gauche qu'il faut préparer, avec toutes ses sensibilités et toutes ses cultures : social démocrate, républicaine, communiste, radicale, écologiste, etc.
2. L'objectif d'un grand parti de toute la gauche doit être clairement affirmé. Seule une nouvelle structure pourra accueillir la masse des sympathisants aujourd'hui sans repères et l'élan des nouvelles générations. Une Fédération ou une confédération pourrait sans doute constituer une étape intermédiaire mais en réalité le temps presse : seule la création d'un grand parti de toute la gauche, déjà relayée par certains responsables socialistes, faisant écho à nos propres propositions, peut créer l'électrochoc nécessaire. Ce nouveau parti devra rassembler largement et sans sectarisme toutes les sensibilités. Du dialogue en son sein d'une sensibilité critique voire utopique, et d'une sensibilité plus gestionnaire doit naître une dynamique féconde. Rien ne serait plus contreproductif que de vouloir construire un parti révolutionnaire à côté d'un parti social-libéral. Ce serait donner un boulevard à la droite conservatrice.
3. Au départ il faudra cependant ouvrir le débat sur la nature de la globalisation et du capitalisme financier aujourd'hui dominant, car dès les premiers temps du mouvement ouvrier, au XIXe siècle, aucune vision socialiste n'a jamais pu se développer que sur la base d'une critique préalable du capitalisme de l'époque. Il en va de même aujourd'hui. A partir d'une telle analyse du capitalisme financier d'aujourd'hui et de ce qu'on appelle la « globalisation », un débat fructueux pourra naître et se développer.
4. Chaque parti actuel de la gauche apportera son meilleur au parti futur. Les communistes, dont l'Histoire tourmentée a eu sa grandeur, doivent savoir tourner la page, ouverte au début du dernier siècle, par le Congrès de Tours. Ils trouveront dans un parti de toute la gauche un cadre plus efficace pour faire mûrir les espérances révolutionnaires. Il en va de même pour les écologistes qui n'ont pas rompu avec la tradition des Lumières, pour les radicaux sincères et pour les hommes et femmes de progrès qui n'entendent pas tourner le dos au message qui fut jadis celui du général de Gaulle.
S'agissant du MRC, héritier du MDC mais aussi, avant 1993, du CERES et de « Socialisme et République », les raisons qui avaient motivé sa création : refus de l'alignement sur l'Hyperpuissance américaine dans la première guerre du Golfe et rejet de l'Europe libérale de Maastricht, n'ont pas disparu, même si nos critiques depuis 2003 (deuxième guerre du Golfe) et 2005 (rejet de la Constitution européenne), sont plus largement partagées.
Pour que les choses soient dites clairement, nous ne sommes pas prêts à adhérer au PS. Tout s'est passé en effet comme si celui-ci avait mené à notre égard – consciemment ou non – une véritable campagne d'éradication au lendemain du 21 avril 2002, cherchant à nous transformer en bouc émissaire commode d'un échec dont son candidat était en fait le principal responsable.
Nous n'admettons pas d'avoir été ainsi « criminalisés » pour avoir porté un projet différent sur l'Europe, la politique industrielle, la République ou l'indépendance de notre politique étrangère.
Bref, nous entendons non seulement nous faire respecter mais conduire des débats de fond sans lesquels il n'y aura pas de refondation républicaine de la gauche. Le MRC se place dans cette perspective de refondation exclusivement. Il n'entend donc pas acquiescer à une version de l'Histoire qui n'a pas d'autre objet que de soustraire à la critique une orientation social-libérale qu'il a toujours combattue. Pas plus qu'hier nous n'accepterons de servir de caution.
5. Pour notre part, nous respectons le PS en tant qu'organisation, et nous n'entendons pas nous ingérer dans des choix de personnes qui lui incombent. Le débat d'idées au sein de la gauche en revanche est légitime et nous y contribuerons. Pour ce qui nous concerne, nous aspirons à la confrontation loyale des idées, au sein d'un grand parti de toute la gauche, avec le seul souci du fond. C'est ce qui a beaucoup manqué à la gauche depuis un certain temps et c'est avec cette loyauté élémentaire à l'égard des idées, et par conséquent des personnes, que nous aimerions la voir renouer dans son ensemble.
Le MRC propose donc un cadre de discussion ouvert à l'ensemble des femmes et des hommes de gauche et de progrès pour jeter les bases d'un grand parti de toute la gauche. Cette refondation est urgente. Sinon la gauche risque de se trouver confrontée à des divisions persistantes, au risque d'une nouvelle défaite.
Pour mobiliser l'ensemble de ses forces et susciter l'adhésion des hésitants, nous lançons un appel pour que la gauche se réunisse et se mette d'accord, non sur une simple perspective d'alternance dépourvue de contenu politique, mais sur un projet républicain réellement alternatif. C'est possible.
Le projet républicain du MRC est sur la table. Cette contribution à notre prochain Congrès a pour but d'ouvrir le débat non seulement au MRC mais également au sein de la gauche tout entière, en tout cas parmi ceux qui font de sa refondation leur perspective.