Le chantier de la refonte des systèmes de retraite
Lors du congrès du Mouvement Républicain et Citoyen, le 21 juin 2008, au Kremlin-Bicêtre (94), Gérard Beillard a présenté le projet d’amendement à la motion d’orientation porté par le MRC 53, concernant les retraites. Voici le texte qu’il a lu à la tribune du congrès.
« Remettre le système de retraite dans la logique de solidarité »
Michel Sorin m’a demandé de présenter cet amendement sur les retraites, car j’ai travaillé la question et fait des propositions au comité MRC de la Mayenne.
Je suis ouvrier dans une entreprise de textiles à Laval, et je participe pour la première fois à un congrès politique. J’ai accepté de prendre la parole ici, même si ce n’est pas évident, mais je compte sur votre indulgence. Je tiens à représenter le monde du travail à ce congrès, et plus particulièrement les milieux populaires, ceux qui subissent la précarité des revenus et les handicaps de toutes natures.
Quand j’ai lu la motion et son annexe, j’ai été surpris qu’il n’y ait rien sur les retraites. C’est pourtant une revendication de première importance des syndicats dans la période actuelle et un point sensible au niveau des citoyens. Le républicain de gauche que je suis n’accepte pas la logique de grignotement des pensions de ceux qui sont en situation défavorisée.
Notre Mouvement, qui représente la gauche républicaine, se doit de parler clair sur cette question des retraites, car le grand parti de toute la gauche que nous appelons de nos vœux devra prendre position en se situant dans une logique alternative, fondée sur la solidarité.
Notre amendement s’intitule « Remettre le système de retraite dans la logique de solidarité ». Il prend place dans l’annexe de la motion, le projet républicain, après les deux paragraphes « Rééquilibrer les revenus du travail et du capital » et « Garantir les protections sociales » de la partie « 1-2 Revaloriser le travail ».
Voici le texte de l’amendement :
Remettre le système de retraite dans la logique de solidarité
Le système de retraite est un enjeu de société. Si nous voulons promouvoir une politique alternative aux politiques libérales, fondée sur l’intérêt général et respectant un humanisme républicain et socialiste, nous devons faire en sorte de pérenniser le système par répartition, c’est-à-dire garantir les retraites pour toutes les générations.
Pour cela, le gouvernement de la gauche devra procéder à une refonte du système de façon à le remettre dans une logique de solidarité :
- Prise en compte de la pénibilité et des conditions de travail, ouvrant des droits qui auront pour effet de réduire le nombre de trimestres de cotisation pour ceux qui seront concernés.
- Revalorisation des pensions à hauteur du SMIC de ceux qui, tout en ayant cotisé régulièrement, perçoivent des pensions inférieures au SMIC - pour des raisons liées à la maladie, l’invalidité, la précarité de l’emploi (CDD, intérim, temps partiel subi).
- Mise à contribution de tous les revenus du travail (l’intéressement inclus), de manière à élargir l’assiette des cotisations sociales.
- Indexation des pensions sur l’évolution des revenus du travail, et non sur les prix.
Nous avons limité nos propositions à ces quatre points de réforme du système. Dans la rédaction initiale, il y avait d’autres aspects, notamment la stricte mise en œuvre de l’égalité de rémunération homme-femme, la suppression d’exonérations de cotisations patronales concernant les contrats d’emploi précaire et la garantie d’un taux de remplacement de 75% du salaire, à moduler selon les salaires.
Nous avons préféré aller à l’essentiel, qui est de changer de logique de système, de passer de la logique libérale à la logique de solidarité. Et de revaloriser les petites retraites, celles des salariés en situation de précarité et de faibles revenus, pour des raisons indépendantes de leur volonté, qui subissent l’équivalent de la « double peine ». Ils sont touchés par les inégalités croissantes et ont envie de se révolter.
Regardons les réalités en face : certaines directions d’entreprises utilisent des méthodes inacceptables, comme les pressions individuelles sur les salariés afin de les pousser à la démission, certes avec indemnités mais cela débouche sur la précarité.
Il faudrait un traitement à part pour les postes de travail en équipes, qui font faire des taches répétitives et pénibles. Les conséquences sont graves : la durée moyenne de vie de celles et ceux qui les ont occupés est plus faible.
Nous ne comprenons pas que les pouvoirs publics acceptent la multiplication des licenciements des salariés après cinquante ans alors qu’on s’achemine vers l’allongement au-delà de quarante années de la durée des cotisations ouvrant droit à une retraite à taux plein.
Il faut maintenir à quarante ans la durée de cotisation pour tous, encourager l’emploi des seniors et compenser les effets de la précarité de l’emploi sur les petites retraites.
La question des retraites est un bon test de la volonté et du courage de l’engagement réel de la gauche en faveur d’une politique de solidarité et de justice sociale, prenant en considération le besoin de dignité des êtres humains.
En conclusion, nous souhaitons que cet amendement soit pris en compte par notre congrès. Cela facilitera notre tache de rassemblement des républicains de gauche autour de Jean-Pierre Chevènement et nous serons plus crédibles auprès des citoyens et de nos partenaires des autres partis de gauche. Nos propositions doivent sortir des sentiers battus. Cette motion le fait sur de nombreux points, tels que le capitalisme financier et l’analyse de la mondialisation. Elle doit le faire aussi sur la question des retraites.