Après les articles de presse locaux (Courrier de la Mayenne, Ouest-France, 14 décembre) évoquant le choix de Jean-Pierre Chevènement de soutenir Ségolène Royal en vue de l’élection présidentielle 2007, il importe de préciser ce qui a rendu possible cette décision, qui a surpris beaucoup de monde. La vraie raison a été passée sous silence. C’est la volonté de la candidate du PS de se mettre d’accord avec le MRC et son candidat qui a conduit à un accord politique fondamental entre les deux partis de gauche et, par conséquent, au retrait de la candidature de Jean-Pierre Chevènement. Il ne s’agit pas d’un ralliement au PS, mais d’un accord entre deux formations politiques qui veulent mettre la gauche à la hauteur de ses responsabilités en 2007. L’accord entre le PS et le MRC ouvre la voie à une
nouvelle politique pour la France et pour l’Europe La candidate des Verts a estimé que « l’engagement pris par le PS vis-à-vis du MRC de poursuivre le programme nucléaire devait rester dans le tiroir » (Le Figaro, 17 décembre). En fait, elle a mis le doigt sur l’un des points de programme que Jean-Pierre Chevènement et le Mouvement Républicain et Citoyen ont réussi à infléchir et clarifier dans le projet du PS. Qu’est-il écrit dans l’accord entre le PS et le MRC … sur l’énergie ? « En matière énergétique, il sera indispensable de faire face aux prix durablement élevés du pétrole et du gaz en favorisant les énergies sans émission de gaz à effet de serre parmi lesquelles l’énergie nucléaire, domaine dans lequel les atouts industriels exceptionnels de la France doivent être préservés, le développement d’acteurs énergétiques publics puissants capables d’assurer la sécurité de nos approvisionnements, ainsi que les économies d’énergie ». La lutte contre le réchauffement climatique a pris une telle importance que la priorité dans les choix énergétiques est de réduire les énergies émettant des gaz à effet de serre, ce qui oblige à développer toutes les autres sources d’énergies durables, dont l’énergie nucléaire. En outre, c’est l’un des atouts de la France et aucun gouvernement ne pourrait s’en priver. Le PS a fait son choix et la candidate des Verts prend son désir pour la réalité. … sur l’Europe ? Mais le premier obstacle sur le chemin d’un accord PS - MRC était la réorientation de la construction européenne. Chacun peut constater, à la lecture du texte signé par François Hollande et Georges Sarre avec l’assentiment de Ségolène Royal et de Jean-Pierre Chevènement, que ce dernier a réussi à infléchir sensiblement et clarifier l’orientation floue du projet socialiste. D’abord, sur le respect de la volonté populaire pour construire l’avenir de l’Europe. Qu’est-il écrit ? « Le PS et le MRC se sont prononcés différemment lors du référendum sur le Traité constitutionnel européen. Ils prennent acte du vote des Français le 29 mai 2005, refusent toute ratification du texte rejeté sauf introduction dans un simple traité institutionnel de dispositions ne posant pas de problème de fond (…) ». Il est clair que la candidate du PS, soucieuse de se rapprocher de l’électorat populaire, lequel avait fait défaut le 21 avril 2002 et voté NON le 29 mai 2005, a opté pour une remise en cause de la politique européenne soutenue jusqu’à présent par son parti. Elle l’a fait savoir à Porto devant les socialistes européens. C’est un choix délibéré. Jugeons sur pièces. « Le MRC et le PS entendent réorienter la construction européenne pour la mettre au service de l’emploi et de la croissance concertée. Pour cela ils proposent de réformer le pacte de stabilité pour en faire un pacte de croissance, d’instituer un gouvernement économique de la zone euro, capable de mettre en œuvre cette priorité à la croissance, de réformer les statuts de la Banque centrale européenne pour inscrire dans ses missions la recherche d’un haut niveau d’activité et d’emploi. La lutte contre l’euro cher sera une de nos priorités ». … sur les délocalisations et le libre-échange ? Et s’il faut un troisième exemple de la qualité de ce texte commun, prenons le problème des délocalisations et des suppressions d’emplois liées à la mondialisation libérale. Qu’est-il écrit ? « Nous agirons pour changer les règles de l’OMC, exiger des normes sociales et environnementales, lutter concrètement contre les délocalisations et les destructions massives d’emplois, en protégeant l’industrie européenne et en renforçant le tarif extérieur commun par une clause antidumping social ». Jean-Pierre Chevènement est capable de compromis, à condition que ce soit pour créer une dynamique positive. Il n’aurait pas accepté de retirer sa candidature sans la conviction de pouvoir peser sur l’orientation future de la politique de la gauche.