Du boulot pour les multinationales, sous le contrôle de l’Etat
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La Chine est-elle en faillite ? (12 juillet 2012)
Participez à la conquête de l'ouest... chinois (19 juillet 2012)
(…) Car oui, la Chine est en train de se lancer à la conquête de l'ouest. Le développement des régions du centre, du nord et de l'ouest chinois figure au coeur de son 12e plan quinquennal 2011-2012. Et les premiers résultats commencent à apparaître. Ces régions continentales, parfois enclavées, où des villes de 30 millions d'habitants dormaient paisiblement, sont en train de connaître des croissances à deux chiffres. A l'heure où l'on glose abondamment sur la fin du "miracle chinois", de nouveaux eldorados se rappellent à nous. Pour essayer d'y voir plus clair, je me suis replongé dans l'histoire de la croissance chinoise. Après cette courte plongée historique, je vous conseillerai les secteurs qui profiteront de cette nouvelle ruée vers l'ouest.
L'Asie joue au billard depuis 40 ans
L'Asie est la seule région où des pays ont réussi sur les 50 dernières années à se hisser aux niveaux de richesse des pays développés. Cette croissance a été construite sur un facteur en particulier : le coût du travail.
Je suis arrivé en Chine en apportant avec moi les mémoires de Zhao Ziyang. Cet homme politique a été Premier ministre pendant les années 1980, période où s'est construite la croissance chinoise. Economiquement (et politiquement) libéral, il avait la confiance du père du modèle chinois actuel, Deng Xiaoping. Un chapitre entier est consacré aux premières années de son gouvernement. L'ancien Premier ministre explique qu'historiquement, les pays développés ont été amenés à déplacer leurs industries vers les régions où le coût du travail était faible. Voici ce qu'il écrit : "du point de vue asiatique, ce sont d'abord les Etats-Unis qui ont délocalisé leurs industries à main-d'oeuvre vers le Japon [...] Puis les Etats-Unis et le Japon ont délocalisé une partie de leurs industries de fabrication vers les "quatre petits dragons" (Taiwan, la Corée, Hong Kong et Singapour), qui se sont développés à leur tour. Le mouvement s'est ensuite déplacé vers les pays de l'ASEAN" (Malaise, Indonésie, Philippines, Singapour, et Thaïlande). Et le Premier ministre chinois continue en expliquant que ce mouvement "n'allait pas s'arrêter, et qu'il représentait une occasion à saisir". La Chine l'a saisi, et a vu son PIB être multiplié par 18 entre 1980 et 2010. Aujourd'hui, le phénomène se déplace à nouveau. Non pas vers un autre pays, mais vers l'ouest du pays.
La croissance n'est pas à gauche, elle est à l'ouest !
Le balancier est en train de s'inverser entre l'est et l'ouest. Alors que les régions du Guangdong, le Jiangsu et le Zhejiang, toutes à l'est, ont connu une croissance de 10% en 2011, une ville comme Chong Qing, au centre, a connu 16,4% de croissance. 30 ans après, le centre est ainsi en train de reproduire le modèle de croissance des régions côtières. C'est vers ces régions que convergent actuellement les industries textiles ou de la petite électronique, industries grosses consommatrices de travail.
Comme il y a 30 ans à l'est, les besoins en matières premières, infrastructures, transports sont encore énormes. Et ceux-ci restent encore largement ignorés. Danny Quah, professeur d'économie à la London School of Economics, soulignait en mars dernier que "beaucoup d'étrangers qui admirent les hauts gratte-ciels des villes de l'est ne savent pas que certains villages éloignés dans l'ouest de la Chine n'ont pas de connexion avec le réseau routier ou au réseau d'électricité". Ce développement va rapidement attirer les multinationales qui, il y a 30 ans, se sont ruées le long du littoral chinois.
Trois secteurs en particulier profiteront de cette croissance à venir de l'ouest.
Car c'est bien la construction qui va profiter en premier lieu de la croissance de ces régions. Et dans son sillage, c'est le marché du fer, absorbé à 40% par le bâtiment, qui va repartir.
L'ouest construit désormais en dur
Alors que le marché de l'acier a reculé ces six derniers mois, les analystes s'attendent à une reprise cet été. Ce rebond sera notamment soutenu par l'avancée de plusieurs travaux d'infrastructures dans ces régions. Cet optimisme sur le marché de l'acier est partagé par exemple par le centre d'analyse Gavekal. Celui-ci indique que "l'immobilier soutiendra la demande d'acier dans les trois prochains mois. Cela indique que la demande touchera un point bas par rapport à l'an dernier à la mi-2012, et connaîtra 15% de croissance en fin d'année". Et dans les années à venir, un deuxième secteur lié aux métaux reprendra du tonus, l'exploitation minière.
La Chine met en valeur ses ressources minières
"Vampire du milieu" pour certains, la Chine n'est en pas moins bien dotée en ressources naturelles. Le problème, c'est que ces ressources sont difficiles d'accès. Les régions minières sont pour la plupart situées à l'ouest, dans des espaces montagneux ou désertiques. C'est pourquoi le développement de l'ouest va permettre de désenclaver ces zones. Le gouvernement a ainsi lancé en 2011 un vaste plan de mise en valeur des ressources minières. D'ailleurs, le gouvernement n'a pas le choix. Le ministère des Terres et Ressources vient d'annoncer que sur 45 métaux analysés, la Chine pourrait avoir des difficultés d'approvisionnements pour 25 d'entre eux d'ici 2020.
Une région en particulier est en train de faire le bonheur des investisseurs, le Yunnan. Selon Li Lianju, membre du ministère des Terres et Ressources, "entre 2010 et 2020, encore 500 tonnes d'or et 200 milliards de m3 de gaz non-conventionnel devraient être produits [dans cette région]". Le plus intéressant pour nous, c'est que les investissements étrangers commencent à être les bienvenus dans les mines chinoises. Si l'on a vu mardi dernier qui seront les acteurs étrangers des gaz de schiste, certains noms d'autres contrées sont en train d'émerger dans le secteur minier. Ainsi le canadien Asia Now Resources a fait une entrée remarquée dans les mines d'or. Vous pouvez retrouver la cotation de cette petite minière sur le Toronto Stock Exchange.
Le transport connectera l'ouest à l'est
Enfin, rien ne sera possible sans un solide réseau de transport. Ni la construction ni l'exploitation minière ne décolleront sans être reliées aux régions de la côte. Or les besoins sont gigantesques. Le plan de développement des régions de l'ouest couvre 6,85 millions de km2, ou 71% du territoire chinois ! Les premiers programmes d'infrastructures doivent s'étendre jusqu'en 2015. Ainsi, 15 000 km de voies ferrées seront construites dans les régions de l'ouest d'ici cette date. Le secteur autoroutier devrait également prendre son essor, renforçant la demande d'acier (…).
Cet article est le 17ème sur ce blog dans la catégorie Asie.