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  • : Michel Sorin
  • : Le MRC 53 est la structure mayennaise du Mouvement Républicain et Citoyen, qui a pour but de rassembler la gauche républicaine à partir, notamment, des idées de Jean-Pierre Chevènement, l'un de ses fondateurs, qui n'est plus membre du MRC depuis 2015. Le MRC a pris le relais du Mouvement des Citoyens (MDC) après les élections de 2002. En 2022, le MRC est devenu membre de la Fédération de la Gauche Républicaine avec quatre autres organisations politiques.
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15 août 2008 5 15 /08 /août /2008 09:29

Un pas vers une coalition de gauche outre-Rhin

 

La gauche allemande hésite et se divise sur la stratégie d’alliance. Le SPD est écartelé entre son aile droite, qui défend les réformes libérales du gouvernement Schröder, et son aile gauche, qui remet en cause la grande coalition nationale avec les partis de droite CDU-CSU. Voir sur ce blog La gauche allemande, divisée, cherche la voie qui conduit au pouvoir - 11 août 2008.

 

Voici une information, publiée hier sur le site du quotidien Le Monde (Henri de Bresson), qui semble indiquer une avancée du SPD vers le rapprochement avec le parti qui le concurrence sur sa gauche, Die Linke (voir, plus loin, cet article du Monde).

 

On se souvient (voir Elections régionales en Allemagne : la gauche radicale entre au parlement de Hesse - 29 janvier 2008) que la présidente du SPD en Hesse (land de Francfort), tenant compte des résultats électoraux, avait souhaité passé un accord avec Die Linke afin de gagner la majorité dans cette région. Elle avait dû faire marche arrière en raison de l’opposition de son aile droite. Celle-ci aurait-elle changé d’avis, dans quelles conditions et selon quelles exigences ?

 

Le SPD est contraint de tenir compte des sondages et de la situation économique et sociale du pays. La crise économique fait sentir ses effets (voir Recul du PIB de l'Allemagne au deuxième semestre). Après la dérive néolibérale sous le gouvernement Schröder, les sociaux démocrates sont face à des choix difficiles. Une nouvelle donne, cette fois-ci, de gauche, n’est plus impossible en Allemagne. Avec des effets indirects sur les orientations de la gauche française…

 

 

Le SPD reparle d'une alliance avec la gauche radicale (en Hesse)

 

Mettant fin à huit mois de tergiversation depuis les élections régionales de janvier dernier, la fédération social-démocrate de Hesse a décidé mercredi 13 août de laisser sa présidente, Andrea Ypsilanti, 50 ans, tenter à nouveau sa chance pour se faire élire d'ici novembre ministre-président du Land avec un gouvernement de coalition social-démocrate/Vert toléré par le parti de la gauche radicale, Die Linke.

Le président du SPD, Kurt Beck, qui joue dans cette affaire sa crédibilité, avait laissé lundi aux sociaux-démocrates hessois la liberté de leur choix.

Le ralliement sous conditions de l'aile droite du SPD hessois à l'ouverture de négociations avec Die Linke a donné à Mme Ypsilanti la possibilité d'imposer sa ligne en dépit des très fortes oppositions qu'elle suscite dans le parti au niveau fédéral et dans de nombreuses autres fédérations. Les sociaux-démocrates bavarois, qui ont des élections régionales fin septembre, et peuvent espérer faire perdre sa majorité absolue au parti chrétien-social de Bavière, dominant dans le land, voient l'évolution hessoise d'un très mauvais oeil. Pour tenir compte de leur situation, il a été convenu que le congrès du SPD de Hesse, qui devra entériner le résultat des négociations de coalition à venir, n'aura lieu qu'en octobre.

NOUVELLE DONNE

L'arithmétique électorale actuelle, mesurée par les résultats des dernières élections régionales et les sondages, confronte les deux grands partis allemands, chrétiens et sociaux-démocrates, à des choix difficiles.

La confirmation de la percée du nouveau parti d'Oskar Lafontaine et Gregor Gysi, Die Linke - la Gauche -, rentré au Bundestag en 2005, crédité à un an des prochaines législatives de septembre 2009 de plus de 11 % dans les sondages, devant les Verts et les Libéraux, a bouleversé la donne politique. Contraints de s'allier au niveau fédéral aux chrétiens-démocrates dans la grande coalition d'Angela Merkel (CDU), les sociaux-démocrates sont divisés sur la manière de sortir de cette alliance qui jusqu'à présent a plutôt servi la chancelière.

A Berlin, le bourgmestre régnant Klaus Wowereit a bien mis en oeuvre depuis 2002, sans histoire, une coalition avec Die Linke. Mais ce modèle continue de faire l'effet d'un chiffon rouge non seulement pour la droite, qui en fait son cheval de bataille, mais aussi pour l'aile réformatrice du parti social-démocrate, celle qui avait porté l'ancien chancelier Gerhard Schröder et ses réformes sociales de l'agenda 2010, incarnée aujourd'hui par le vice-chancelier et ministre des affaires étrangères Frank Walter Steinmeier.

Soutenue par l'aile gauche du parti, traditionnellement forte en Hesse, la région de Francfort, Andrea Ypsilanti et sa main tendue à la gauche radicale sont devenues le symbole de la bataille engagée au sein du SPD pour la fin du tout libéral. Son programme prévoit en outre, pour convaincre les Verts d'accepter une coalition, de fortes incitations pour freiner en Hesse l'énergie nucléaire et le charbon et encourager les nouvelles énergies.

L'issue des négociations avec Die Linke reste ouverte. L'aile droite du parti hessois, sans laquelle Mme Ypsilanti devrait une seconde fois renoncer, comme en mars, à obtenir une majorité au parlement hessois pour démettre le ministre-président sortant, le chrétien-démocrate Roland Koch, et se faire élire, entend marchander son appui. Un échec signifierait toutefois de nouvelles élections régionales, qui seraient difficiles pour le SPD. Celui-ci avait obtenu 37 % des voix en janvier. Les sondages lui en donnent aujourd'hui dix de moins.

Pour consulter les articles parus sur ce blog, concernant les pays européens, cliquer sur Etats Union européenne.

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14 août 2008 4 14 /08 /août /2008 17:39

Mieux s’informer avant de définir les responsabilités

 

Le réquisitoire du juge Bruguière en 2006, qui fit porter la responsabilité du génocide des Tutsis au Rwanda sur le président actuel rwandais Paul Kagame, a donné lieu à une réplique : le rapport de la « commission nationale indépendante chargée de rassembler les preuves montrant l’implication de l’Etat français dans le génocide perpétré au Rwanda en 1994 ».

 

J’ai évoqué ce rapport (Génocide des Tutsis au Rwanda : la France visée par un rapport - 7 août 2008) sur ce blog et j’ai pu vérifier l’importance des clivages existants sur cette question. Chacun reconnaît le travail positif effectué en 1998 par la commission d’enquête parlementaire, présidée par Paul Quilès, alors président de la commission de la Défense à l’Assemblée nationale. Celui-ci en parle sur son blog (Rwanda: un rapport à charge - 7 août 2008, puis Rapport rwandais : pas sérieux ?  14 août).

Il renvoie à son intervention le 20 octobre 2007 au Sénat (cliquer ici).

Lien utile : http://www.assemblee-nationale.fr/dossiers/rwanda/rapport.asp 

 

J’ai relevé deux articles, l’un dans Le Monde, l’autre dans Libération, en faveur d’une prise en considération, sérieusement, du rapport rwandais :

 

- 11 août Un rapport rwandais à prendre au sérieux, par Jean-François Dupaquier

- 13 août France-Rwanda: œil pour œil (auteur : voir Patrick de Saint-Exupéry - Wikipédia).

 

Marianne, par contre, a publié des articles qui réfutent les allégations des auteurs de ce rapport, notamment :

- 10 août  Rwanda : qui est vraiment Kagame ?

La source des problèmes du Rwanda et du Burundi semble être la distinction qui a été faite entre hutu et tutsi, par l’administration belge lors de la colonisation.

 

Voir l’article paru sur ce blog, le 5 janvier 2008 sous le titre Génocide des tutsis en 1994 au Rwanda : Bernard Patureau milite pour le devoir de Mémoire et l’extrait suivant :

 

« 1934-1935 : le peuple rwandais fut soumis à un « recensement » unique en son genre. Il s'agissait plutôt d'un « échantillonnage », effectué au niveau des sous-chefferies, qui porta sur les hommes adultes et valides. Au cours de ce recensement, l'administration imposa comme critère d'appartenance à un groupe dit « ethnique » TUTSI le fait de posséder au moins dix têtes de bétail bovin. Le reste de la population fut assimilé à des groupes « ethniques » HUTU ou des TWA selon les professions. Le livret d'identité portant la mention du «groupe ethnique» de chaque citoyen fut introduit au Rwanda à cette époque. Ceci eut pour conséquence immédiate de figer chaque citoyen rwandais dans tel ou tel groupe ethnique HUTU, TUTSI ou TWA, contrairement à la réalité sociologique du pays ».

 

Le peuple ne faisait pas la distinction entre hutu et tutsi. Ce sont les élites, notamment intellectuelles, liées au pouvoir qui propageaient le sentiment de haine anti-tutsi, principalement dans les périodes de prise de pouvoir d’Etat ou de menace (groupes armés se constituant dans les pays voisins, ce qui fut le cas en 1990). Voir, sur ce point Assises rwanda 2001 Temoin de contexte: Claudine VIDAL ...). Claudine Vidal a été citée par Paul Quilès lors de son intervention au Sénat en 2007.

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13 août 2008 3 13 /08 /août /2008 15:21

Le socialisme est l’alternative au capitalisme

 

Les prises de position des leaders du PS en vue de leur congrès sont consternantes. On comprend pourquoi ils ont perdu la confiance des Français et, en premier lieu, des milieux populaires. Que voit-on ? Des tentatives de rapprochement par certains en évitant les autres. Des petites guerres internes qui ne sont pas à la hauteur des enjeux politiques du moment. Mais pas de renouveau de la pensée socialiste. Désespérant.

 

Pour bien comprendre, il faut partir du dépôt des contributions (voir  PS : 21 contributions à caractère général déposées pour le congrès - 3 juillet 2008), puis faire un arrêt, fin juillet, sur la situation du PS au moment où Paul Quilès rappelait ce que fut l’action de Jaurès en faveur du socialisme (voir Paul Quilès demande aux socialistes de relire Jaurès le rassembleur - 31 juillet 2008).

Voir aussi un blog (hébergé par Le Monde) PS : le grand troc avant le grand choix sans être obligé d’adopter, telle quelle, la proposition de solution.

 

Tout récemment, nous avons observé comment la gauche allemande se débat dans ses difficultés (voir La gauche allemande, divisée, cherche la voie qui conduit au pouvoir - 11 août 2008). Aujourd’hui, nous allons, à nouveau, écouter aux portes du principal parti de la gauche française.

 

D’un côté, Pierre Moscovici cherche à rassembler les anti-Royal et anti-Hollande, avec l’appui, lointain, de Dominique Strauss-Kahn, et, plus proche, de Martine Aubry et de Laurent Fabius.

De l’autre, Julien Dray fait de même avec les pro-Royal et pro-Hollande en tentant d’aller plus loin.

 

Ce qui est plus surprenant est le peu d’empressement des différents courants de gauche à se rassembler. La tactique peut l’expliquer, à condition qu’elle ne cache pas une forme de résignation.

Lire, à ce sujet, La droite proclame avoir gagné “la bataille idéologique” quand la gauche du PS se cherche encore et toujours … (blog citoyen, socialiste et républicain, de Xavier Dumoulin).

 

Les animateurs de Gauche Avenir ont exprimé leur inquiétude dans un article paru hier sur le site de Libération, rubrique Rebonds :

 

Pour que demain ne soit pas comme aujourd’hui

 

Quel décalage ! Le chômage augmente. La croissance ne cesse de chuter. La moitié des Français ne part pas en vacances. Nicolas Sarkozy annonce qu’il va poursuivre à marche forcée ses «réformes». Le moral de nos concitoyens est en berne et le mécontentement est profond. Pendant ce temps, les dirigeants socialistes s’engluent dans la préparation du congrès de Reims !

Les militants sont déboussolés, les sympathisants déçus, le peuple de gauche circonspect, voire quelquefois en colère. Plébiscité localement, le PS stagne nationalement. Il peine à incarner une opposition déterminée à Sarkozy. Il ne parvient pas à relayer efficacement les aspirations de sa base sociale et paraît peu crédible comme force de transformation sociale. Pire encore, au moment où le système craque de partout, certains de ses dirigeants semblent découvrir les vertus de l’économie libérale et du marché.

A cela s’ajoute l’exaspérant «feuilleton» socialiste de l’été, fait de petites intrigues, de mini rebondissements, de «téléphones qui chauffent», d’alliances de dernière minute. L’heure est, dit-on, à la recherche de «mini-synthèses». «Mini» : le terme est pertinent tant les textes proposés ressemblent à un sympathique enfilage de perles. Leur ligne : «Dorénavant, c’est comme avant»

Créer un «parti socialiste cohérent et solidaire», susciter une «dynamique de changement», «préparer une véritable alternative», vouloir une «une mutation politique maîtrisée», «être à la hauteur des défis du socialisme moderne dans la mondialisation». Qui au PS refuserait d’adhérer à cette sorte de minimum socialiste garanti ? Le problème – et il est de taille — c’est qu’aucune réponse n’est apportée aux insuffisances qui sont la cause depuis des années de nos défaites successives aux élections nationales.

Ce rassemblement sur des bases minimales, simple redistribution des cartes entre les mêmes mains, risque de devenir un scénario catastrophe. Il est indispensable de proposer pour le congrès de Reims une autre voie, fondée sur une nouvelle dynamique unitaire, tant entre socialistes qu’avec toute la gauche, sur un renouveau des analyses, des pratiques et des propositions, autour d’objectifs de transformation profonde d’un système en crise. Pour nos concitoyens, «changer la vie» n’est pas un slogan vide de sens, parce qu’ils n’en peuvent plus de subir des injustices criantes, des reculs sociaux mais aussi de ne pouvoir espérer.

Comment ne pas voir que la victoire future passe d’abord par la reconquête idéologique, indispensable tant les promoteurs du libéralisme se sont échinés à disqualifier toute remise en cause, toute recherche d’une autre politique. Une partie de la gauche européenne a malheureusement laissé croire que la politique n’était désormais qu’un arbitrage entre deux pragmatismes au sein d’un système incontestable*.

Renouer avec le combat pour la transformation sociale, c’est remettre en cause le libre échange généralisé, réorienter la construction européenne, défendre un retour efficace de l’intervention publique, inventer un nouveau compromis social favorable au monde du travail : face à l’urgence sociale et écologique, les remèdes homéopathiques ne suffisent plus.

Mais le succès électoral se bâtit aussi autour d’une stratégie claire. L’alliance au centre est une impasse, le cartel électoral de la gauche de gouvernement est insuffisant. Ce qu’il faut, c’est une nouvelle étape de l’unité de la gauche. Tout plaide aujourd’hui pour la préparation d’un parti de toute la gauche qui fédère les partis existants (PS, PC, Verts, MRC, PRG....) et surtout qui crée un mouvement d’entraînement de celles et ceux qui, de plus en plus nombreux, ne se reconnaissent pas dans le paysage actuel de la gauche.

La réalité est que le neuf ne peut venir que de la gauche et des forces contestatrices souvent portées par la jeunesse, que notre parti a trop souvent anesthésiées. Elles ne pourront peut-être pas relever seules le défi, mais, sans elles et sans le nouveau cap stratégique, celui de l’unité de la gauche, sans des propositions qui rompent avec l’accompagnement du libéralisme et du capitalisme financier, demain sera comme aujourd’hui.

La gauche n’a pas disparu. Contrairement à une partie de ses dirigeants prompts à traquer «l’archaïsme» et tentés par le renoncement, des millions d’hommes et de femmes continuent de croire en l’actualité de ses valeurs, à la pertinence de sa grille de lecture de la société, à sa mission historique, à ses luttes.

Les guerres picrocholines entre prétendants socialistes ne sauraient longtemps cacher le fait que ceux qui s’affrontent n’ont pas vraiment décidé d’incarner une vision d’avenir et qu’aucun leader ne s’impose de façon évidente. C’est probablement la raison pour laquelle ils tentent d’accréditer la thèse selon laquelle la «gauche du PS» serait totalement hors jeu. Cette affirmation est aussi peu fondée que celle concernant la prétendue disparition de la gauche dans le paysage politique français et elle risque de conduire aux mêmes impasses.

Celles et ceux qui ont déposé, en vue du congrès de Reims, des contributions souvent convergentes sur des choix clairement de gauche ont une responsabilité particulière. Ils ne doivent pas sous-estimer leur influence et montrer leur volonté de rassembler, pour que le PS sorte de son enlisement et qu’il adopte une stratégie capable de remettre la gauche en mouvement.

 * C’est aussi l’avis de l’UMP, qui considère que le choix est entre le capitalisme libéral et le capitalisme autoritaire (Voir Libéralisme et autoritarisme, le choc des modèles).

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12 août 2008 2 12 /08 /août /2008 16:33

Les provinces séparatistes de Géorgie, comme le Kosovo

 

Poutine avait prévenu : il ne laisserait pas passer le précédent kosovar sans agir en Géorgie. La Russie a préparé son intervention militaire et attendu les circonstances favorables.

 

Le président géorgien Saakachvili, de son côté, s’étant engagé à reconquérir les provinces dissidentes, l’Ossétie du Sud et l’Abkhazie, ne pouvait plus accepter les provocations qui minaient son autorité politique. Il comptait sur ses alliés américains et européens pour renégocier le statut de ces territoires.

La Russie va se servir de ses positions de force pour renforcer son influence sur les territoires qui ne sont pas intégrés à l’Alliance atlantique et à l’Union européenne.

Son objectif principal est de neutraliser l’Ukraine et la Géorgie (voir l’article paru sur ce blog le 9 août Guerre en Ossétie du sud : la fracture est-ouest passe en Géorgie). Elle veut reconquérir une partie de la puissance passée de l’URSS.

 

Je propose des liens avec des articles de presse, qui permettent de mieux comprendre les évènements de Géorgie.

 

D’abord, Le Monde, le 11 août :

 

Les dates-clés d'un conflit latent depuis 1989 

 

Cinq questions sur le conflit en Géorgie 

 

Géorgie, OTAN, Kosovo : la revanche russe, par Nathalie Nougayrède 

 

Puis, Marianne, le 11 août (la conclusion d’Eric Dupin) :

Les vraies raisons de la guerre en Géorgie 

(…) Au-delà de la question ossète, Moscou avait une autre raison stratégique pour s'en prendre à la Géorgie. Ce pays fait des pieds et des mains pour intégrer l'OTAN. Une perspective insupportable pour Vladimir Poutine, resté le véritable maître de la Russie. Une Géorgie déstabilisée serait, à coup sûr, dans l'incapacité de rejoindre l'alliance atlantique. Or Moscou cherche à réaffirmer son influence sur ce Caucase qui faisait partie de son empire à l'époque soviétique.


Restent de triviales considérations économiques qu'on ne saurait oublier. De par sa situation géographique, la Géorgie permet de contourner la Russie par voie d'oléoduc ou de gazoduc. Ce pays est devenu un axe de transport pétrolier avec l'inauguration de l'oléoduc Bakou (Azerbaïdjan)-Tbilissi (Géorgie)-Ceyhan (Turquie). La trop fameuse société russe Gazprom s'intéresse de très près à ce qui se trame sur le territoire géorgien…


Toutes les conditions étaient donc réunies pour que Moscou prenne le risque mesuré de provoquer des cris d'orfraie en Occident en donnant une bonne leçon à la Géorgie. Les Etats-Unis multiplient les protestations verbales et l'Europe cherche tant bien que mal à dégager les voies d'un compromis. En attendant, Poutine est à la manœuvre
.

 

Et, enfin, Rue89, le 11 août :

 

Guerre en Ossétie: Moscou tente de rompre son encerclement

 

 

Voir, aussi, les précédents articles sur La Russie parus sur ce blog.

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11 août 2008 1 11 /08 /août /2008 19:44

Lafontaine en Sarre pour une coalition de gauche

 

L’Allemagne est, à son tour, touchée par l’inflation et le ralentissement de la croissance, un mal qu’on nomme stagflation. Certes, son excédent commercial reste phénoménal, comparé au déficit français, mais les effets de la crise financière se font aussi sentir, comme ailleurs en Europe. Le quotidien économique La Tribune exprime, ce 11 août, ses craintes à ce sujet :

Encouragés par le débat récurrent sur le pouvoir d'achat et le niveau élevé de l'inflation, les syndicats allemands restent déterminés à obtenir d'importantes augmentations de salaires. IG Metall veut faire profiter les salariés du retour de la croissance outre-Rhin depuis 2006.

 

La crise énergétique constitue un autre élément qui suscite l’inquiétude et grossit les clivages politiques, en Allemagne comme ailleurs en Europe. Le quotidien Le Monde se fait l’écho, ce 11 août, des divergences au sein de la coalition au pouvoir, notamment au sein du SPD, sur la décision de faire appel, ou non, à l’énergie nucléaire.

Avec la crise énergétique, l'Allemagne remet en question la sortie du nucléaire

 

Cette remise en cause ne se limite pas aux questions énergétiques. Le bilan des réformes de l’ère Schröder est critiqué par une partie des militants de gauche. Le Monde titrait, le 7 août dernier :

 

Le SPD allemand se déchire sur le bilan des réformes menées sous l'ère Schröder

 

Les sociaux-démocrates allemands n'ont pas fini d'étaler leurs divisions au grand jour. La procédure d'exclusion engagée à l'encontre d'un membre éminent du SPD, Wolfgang Clement, puissant ministre de l'économie et du travail sous l'ex-chancelier Gerhard Schröder, vient raviver la chronique de ces désaccords à un an des élections législatives.

Tiraillé entre sa gauche et sa droite, au plus bas dans les sondages, le SPD, partenaire des unions chrétiennes-démocrates (CDU/CSU) au sein du gouvernement de grande coalition, n'avait vraiment pas besoin de ce nouvel épisode (…).

 

L'aile droite du SPD redoute l'impact de ces querelles sur les adhérents. Confronté à une baisse de ses effectifs depuis des années, le plus ancien parti allemand s'est fait dépasser pour la première fois par la CDU fin juillet (…).

D'ores et déjà, les sondages ne donnent aucune chance aux sociaux-démocrates et à leur leader, Kurt Beck, ministre-président de Rhénanie-Palatinat, contre la chancelière Angela Merkel (CDU) aux élections de 2009. Seul un électeur sur quatre voterait pour le SPD, selon un récent sondage TNS Forschung. Face à lui, Die Linke, un parti de gauche radicale rassemblant les déçus de la social-démocratie et les héritiers du Parti communiste d'ex-Allemagne de l'Est, ne cesse de gagner des points (…).


Le coprésident de Die Linke, Oskar Lafontaine, annonce sa candidature en 2009 aux élections en Sarre, avec la ferme intention de rassembler la gauche et de préparer l’union de la gauche au niveau national. Voici l’article paru ce 11 août sur le site du Monde et sous la signature de Marie de Vergès.

 

Le retour en Sarre d'Oskar Lafontaine sous les couleurs de Die Linke


L'ancien président des sociaux-démocrates allemands, Oskar Lafontaine, tente son grand retour dans la Sarre, mais sous une autre casquette. C'est sous les couleurs du parti de la gauche radicale Die Linke, dont il est coprésident, qu'il entre en campagne pour se faire réélire comme ministre-président de cette région frontalière de la France, fonction qu'il a déjà occupée pendant treize ans.

M. Lafontaine avait dirigé la Sarre entre 1985 et 1998 jusqu'à son entrée en 1998 dans le gouvernement Schröder, qu'il a quitté avec fracas quelques mois plus tard, démissionnant de toutes ses fonctions politiques, y compris de la tête du SPD. Depuis 1999, le Land est gouverné par le chrétien-démocrate Peter Müller (CDU), solidement réélu en 2004.

La candidature d'Oskar Lafontaine a été officialisée samedi 9 août à l'occasion du congrès régional de Die Linke dans la Sarre, à Neunkirchen, sous les "hourras" des militants. L'ambition de l'enfant terrible de la gauche allemande est claire : prendre la tête de la première coalition rassemblant le SPD et Die Linke dans une région de l'ouest de l'Allemagne. Une telle combinaison, qui divise profondément le SPD à un an des législatives de 2009, n'existe aujourd'hui qu'à Berlin.

Créé en juin 2007, le parti Die Linke rassemble les déçus de la social-démocratie et les héritiers du Parti communiste de l'ex-RDA. Cette année, il a confirmé son implantation en Allemagne de l'Ouest, entrant dans les parlements régionaux de Hesse, Basse-Saxe et Hambourg. Cette percée bouleverse le jeu des coalitions et a provoqué une crise au sein du SPD, allié à la droite au sein du gouvernement de grande coalition d'Angela Merkel.

Les élections en Sarre, en 2009, devraient constituer un test sur la capacité de Die Linke à fédérer ses voix avec le SPD. Ce scrutin régional aura une "signification politique au niveau fédéral", a assuré samedi M. Lafontaine.

Reste à savoir quelle stratégie choisiront les sociaux-démocrates. Aucun d'eux n'a oublié les conséquences de la sécession de leur ancien président qui a quitté le SPD en 2005 pour participer à la création de Die Linke. Le chef du SPD en Sarre, Heiko Maas, a exclu de participer à une coalition dirigée par M. Lafontaine mais a laissé planer le doute sur la possibilité d'une alliance "rouge-rouge". Crédité de 12 % à 13 % d'intentions de vote au niveau fédéral, Die Linke recueillerait dans la Sarre la voix de près d'un électeur sur cinq, selon les derniers sondages.


Sur ce même sujet, sont déjà parus sur ce blog les articles suivants :

26 03 08 - Le parti social-démocrate allemand (SPD), divisé sur le choix des alliances pour gouverner

27 02 08 - La social-démocratie européenne très concernée par les choix du SPD en Allemagne

29 0108 - Elections régionales en Allemagne : la gauche radicale entre au parlement de Hesse


Sur le site de Marianne, le 9 août dernier, Edouard Husson évoquait les problèmes du SPD, en soulignant l’incapacité de la gauche allemande à proposer une politique commerciale européenne qui ne soit ouverte qu’aux pays respectant une concurrence loyale. Lire Ma semaine allemande : le SPD en échec.

Les difficultés de la gauche en Allemagne, ses divisions et ses hésitations stratégiques, renvoient à celles de la gauche en France. J’y reviendrai prochainement.

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10 août 2008 7 10 /08 /août /2008 16:26

La finance mondiale n’a pas trouvé son maître

 

Le 9 août 2007, éclatait « la plus grave crise financière depuis 1929 ». C’est ce qu’affirme Jacques Attali dans un entretien avec des journalistes du quotidien Le Monde. « Depuis, elle affecte inexorablement l'économie mondiale (…). Cette crise démontre l'impossibilité de laisser la finance se réguler seule ».

 

 Pour l'économie, la crise est un tsunami qui approche (Jacques Attali, 8 août).

 

« Les douze mois noirs de la finance mondiale » (Le Monde, 8 août).

 

9 août 2007 : La Banque Centrale Européenne (BCE) injecte 94,8 milliards d’euros de liquidités et la Réserve Fédérale (FED) américaine 24 milliards de dollars.

1er octobre 2007 : La banque américaine Citigroup annonce qu’elle est touchée par la crise. Son bénéfice chute de plus de la moitié (- 57%) au 3ème trimestre.

28 novembre 2007 : Le fonds souverain d’Abu Dhabi acquiert 4,9% de Citigroup en injectant 7,5 milliards de dollars.

17 janvier 2008 : Merril Lynch annonce 9,8 milliards de dollars de pertes au 4ème trimestre.

18 janvier 2008 : George Bush annonce un plan de relance de 150 milliards de dollars.

22 janvier 2008 : La FED baisse son taux directeur de 0,75 point à 3,5%.

17 février 2008 : La banque britannique Northern Rock est nationalisée pour éviter un dépôt de bilan.

16 mars 2008 : JP Morgan Chase achète Bears Stearns pour 236 milliards de dollars.

8 avril 2008 : Le Fonds Monétaire International (FMI) chiffre le coût de la crise financière à quelque 1000 milliards de dollars.

Juillet 2008 : les deux institutions de refinancement hypothécaire Freddie Mac et Fannie Mae voient leur cours de Bourse s’effondrer.

30 juillet 2008 : George Bush annonce un plan de sauvegarde de l’immobilier de 300 milliards de dollars.

 

Le paysage financier a été bouleversé (Le Monde, 8 août) : un paysage bancaire ravagé, l'aversion pour les produits financiers sophistiqués, la fin du crédit pas cher, la perte de l'hégémonie des agences de notation, l'avènement des "fonds souverains" : tels sont les points développés dans cet article.

 

Un peu d’histoire de la finance, avec un article de Bertrand Groslambert, professeur de finance, dans Libération (Rebonds), le 4 août 2008.
 

Crises financières, l’éternel retour


La déréglementation de l’économie mondiale
crée ou recrée les conditions d’émergence de risques que l’on pensait cantonnés au siècle de la machine à vapeur.

Démarrant avec la fin de Bretton Woods en 1971, puis s’accélérant avec l’effondrement du communisme, l’économie mondiale est désormais caractérisée par sa globalisation. Le libéralisme économique, initié en 1975 par les «Chicago boys» au Chili et par Margaret Thatcher en 1979 au Royaume-Uni, s’est progressivement étendu au reste du monde. Les programmes d’ajustement du FMI l’ont imposé à la plupart des pays en voie de développement.

Aujourd’hui, le mode de régulation de l’économie mondiale nous renvoie, dans une certaine mesure, à l’époque de la reine Victoria, et à ses politiques du «laisser-faire». Les marchés financiers sont grandement dérégulés et les capitaux circulent à peu près librement autour du globe. Ainsi, les propos que tenait, en 1909, le célèbre magazine britannique The Economist, sont à nouveau d’actualité : «Pour peu que le gouvernement n’essaie pas d’influencer le système dans une direction particulière, nous avons désormais la possibilité d’investir où bon nous semble, et chaque émetteur, quelle que soit sa nationalité, a toutes opportunités pour satisfaire ses besoins à Londres.»

Cette ressemblance se retrouve aussi dans la fréquence des crises. Le XIXe siècle a été régulièrement secoué par les krachs boursiers et les récessions. Entre 1836 et 1839, plusieurs Etats américains, tels de vulgaires pays en développement, furent acculés à la faillite, incapables de rembourser leur dette. Tout au long du siècle, ils furent suivis sur le chemin de la banqueroute par de nombreux pays : Turquie, Egypte et Grèce en 1875-76, Australie et Canada en 1893, Brésil et Mexique en 1914. Durant cette époque, la révolution industrielle, avec son cortège de nouvelles technologies, donna naissance à de nombreuses bulles spéculatives qui, pour la plupart, s’achevèrent dans la panique et l’effondrement du système financier.

On peut citer, par exemple, la crise de 1857 aux Etats-Unis. Nourrie de la spéculation sur l’or en Californie, et renforcée par l’essor des chemins de fer, l’euphorie financière fut brutalement interrompue en août 1857 par la faillite d’un établissement financier new-yorkais. Il s’ensuivit une profonde récession, qui se propagea en Europe et en Amérique latine.

Depuis une trentaine d’années, on assiste au retour des crises financières : crise de la dette des pays en voie de développement dans les années 1980, effondrement du Chili en 1982, marasme japonais des années 1990, explosion du système monétaire européen en 1992, débâcle du peso mexicain en 1994, désastre asiatique de 1997, défaut russe et sauvetage en catastrophe du fonds LTCM à l’été 1998, effondrement de la bulle internet en 2000-2001, chaos argentin des années 2001-2002, crise des subprimes en 2007-2008.

Tout ceci démontre une volatilité accrue du système économique international. Les folies spéculatives et les crises brutales ayant accompagné le décollage économique de la révolution industrielle semblent à nouveau le lot d’une économie globalisée et dérégulée.

Est-ce à dire que, face aux aléas économiques, nous sommes aujourd’hui dans la même situation qu’à l’époque de l’étalon-or ? Probablement pas. La meilleure compréhension des mécanismes économiques et la création de banques centrales garantes de la stabilité et de la confiance dans le système financier laissent supposer que l’économie réelle est aujourd’hui mieux protégée des chocs conjoncturels. L’intervention, en mars, des autorités américaines pour sauver, à travers la banque Bear Stearns, l’ensemble du système financier en est une spectaculaire illustration.

Cependant, ce type de sauvetage pose le problème de la responsabilité des banques. Face : le banquier gagne ; pile : le contribuable perd. On peut penser que la nouvelle équipe, qui reprendra les commandes à Washington dans quelques mois, se penchera sérieusement sur la question. Le retour d’une réglementation encadrant plus strictement l’activité des banques et autres établissements financiers semble nécessaire si l’on veut éviter que l’argent public ne serve à cautionner les errements des spéculateurs. Sommes-nous à la fin du cycle de déréglementation ? Si ce n’est pas le cas, il est certain que d’autres crises se développeront.

Voir aussi  PCF : "La bourse ou la vie" (L’Humanité, entretien avec Alain Obadia, 2 juillet 2008), et, dans l’actualité, des informations qui prouvent la dégradation de la situation économique (Le Monde, 8 et 9 août 2008).

Paris compte sur la BCE pour soutenir l'économie

Le déficit commercial français continue de se creuser

Les craintes concernant l'économie font plonger l'euro

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9 août 2008 6 09 /08 /août /2008 20:15

La Géorgie, va-t-en-guerre, au-delà de ses forces ?

 

La Géorgie est la pointe avancée du Caucase vers l’Alliance atlantique, mais son fougueux président a-t-il bien mesuré le rapport des forces actuel ? Le président Saakachvili a voulu provoquer et tester les réactions de ses alliés américains et européens, face à la Russie. Il ne semble pas avoir compris que la Géorgie reste en dehors de l’OTAN.

 

L’union européenne, pas plus que les USA, ne désire une confrontation militaire avec la Russie. Celle-ci a une idée bien arrêtée sur la question. Voici ce qu’écrivait Bernard Guetta, dans Libération, le 23 avril 2008. 

 

« Le message du Kremlin »

 

Pour empêcher l’entrée de l’Ukraine et de la Géorgie dans l’Otan, la Russie menace de favoriser leur éclatement. Elle en aurait tous les moyens. Une crise couve en Europe, grave, mais parfaitement évitable. Une crise, une vraie, politique et potentiellement militaire. On peut la circonscrire, mais le temps presse car un engrenage s’est enclenché, mercredi dernier, quand la Russie a annoncé sa décision de «coopérer avec les autorités de fait» de l’Abkhazie et de l’Ossétie du Sud, les régions sécessionnistes de Géorgie.

C’était un message aux Occidentaux. La Russie vient de leur dire que, s’ils n’abandonnaient pas l’idée de faire entrer l’Ukraine et la Géorgie dans l’Otan, elle favoriserait l’éclatement de ces deux anciennes républiques soviétiques qui bordent ses frontières. Ce n’est pas une menace en l’air.

En Ukraine, au cœur du continent, la Russie n’aurait qu’à attiser les divisions qui s’étaient exprimées pendant la présidentielle de 2004, lorsqu’il avait fallu la «révolution orange», deux mois de manifestations, pour imposer la victoire du candidat proeuropéen sur celui des prorusses. A chaque scrutin, la carte électorale reflète cette fracture. L’Ukraine occidentale, dont l’Eglise est liée au Vatican, regarde vers l’ouest. L’Ukraine orientale, russophone, orthodoxe et dépendante de l’économie russe, ne veut pas rompre avec Moscou. Il y a deux Ukraine et ce n’est pas tout. Presqu’île de la mer Noire, grande base navale de l’URSS et, maintenant, de la Russie, la Crimée n’est ukrainienne que depuis que Khrouchtchev l’avait intégrée, dans les années 50, à la république socialiste soviétique d’Ukraine. Historiquement, la Crimée est russe. Economiquement, elle l’est restée et, si elle devait en faire un, son choix serait acquis d’avance.

Quant à la Géorgie, au sud, ce n’est pas qu’elle pourrait éclater si le Kremlin y poussait. Elle est déjà fracturée depuis que les Abkhazes et les Ossètes ont décidé de rompre avec elle après qu’elle eut déclaré son indépendance dans la foulée de l’effondrement soviétique. Entre deux capitales étrangères, ces peuples avaient préféré la plus lointaine, Moscou plutôt que Tbilissi, parce qu’ils ne sont pas géorgiens et voulaient défendre leur identité.

Ravie de pouvoir garder un pied en Géorgie, la Russie les avait aidés en armes et en argent. Elle les avait soutenus dans leurs guerres, mais elle n’a pas inventé ces séparatismes, pas plus qu’elle n’aurait à le faire en Ukraine. Elle les a seulement amplifiés pour s’en servir, un jour, de monnaie d’échange et, face à l’éventualité d’un élargissement de l’Otan jusqu’à ses frontières, elle transforme cette protection officieuse en «coopération» officielle, donnant à voir qu’elle n’est pas plus impuissante sur son flanc occidental que méridional.

Le Kremlin se sent d’autant plus fort que les Occidentaux lui ont offert un précédent avec l’indépendance kosovare. S’ils ont pu s’asseoir sur le droit international en approuvant cette modification unilatérale des frontières serbes, pourquoi la Russie ne pourrait-elle pas le faire en Ukraine et en Géorgie ? Pourquoi ne pourrait-elle pas y invoquer, à son tour, le droit à l’autodétermination de régions à l’identité tout aussi affirmée que celle du Kosovo ? Une machine infernale s’est mise en marche. Elle porte en elle des conflits en Europe et, surtout, un affrontement politique tous azimuts entre la Russie et l’Alliance atlantique.

L’époque se passerait de tels luxes. Devant de tels dangers, les arguments ressassés ne tiennent plus. Les Occidentaux ne peuvent plus continuer à dire que, la guerre froide enterrée, la Russie n’aurait rien à craindre de ce nouvel élargissement de l’Otan alors qu’on imagine aisément ce que serait la réaction américaine si le Mexique et le Canada devaient entrer dans un système de sécurité dominé par Moscou.

Les Russes ne peuvent plus, eux, faire semblant d’ignorer la profondeur des craintes que leurs nostalgies impériales entretiennent dans leurs anciennes possessions. Il faut dépasser les raisons des uns et des autres, ces réminiscences d’un siècle passé, et un bon moyen de le faire serait de s’accorder sur une neutralisation de l’Ukraine et de la Géorgie - sur une création de zones tampons qui serait la première pierre de l’entente cordiale à bâtir entre l’Occident et la Russie. Le Kremlin ne souhaiterait que cela.

Ce serait tellement l’intérêt des Européens que Paris et Berlin viennent de s’opposer à une entrée immédiate de Kiev et Tbilissi dans l’antichambre de l’Otan mais il faut, maintenant, avancer cette idée de neutralité. Nicolas Sarkozy présidera l’Union à compter de juillet. Il a l’oreille des Etats-Unis. Ce serait à lui de le faire.

Pour en savoir plus sur les évènements en cours, voici une revue de presse :

Tension au plus fort entre la Géorgie et l'Ossétie du Sud - Le Monde, Luc Vinogradoff, 7 août.

 

Conflit Est-Ouest au cœur du Caucase - Libération, Philippe Grangereau, Lorraine Millot, Marc Semo, 9 août. Les combats en Ossétie du Sud sont les premiers affrontements de l’après-guerre froide entre la Russie et la Géorgie, soutenue par Washington, dans une région stratégique riche en hydrocarbures.

 

Ossétie: comprendre la nouvelle guerre du Caucase

Rue89, David Servenay, 8 août.

Hasard ou ruse de guerre ? Les Géorgiens ont choisi la trêve olympique pour lancer une vaste offensive dans la nuit de jeudi à vendredi sur l’Ossétie du Sud. Selon les dernières dépêches, l’armée géorgienne a pris, puis reperdu, le contrôle de la capitale ossète. Des forces russes participent aux combats. D’où vient ce conflit ? Quels en sont les enjeux ? 

  

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8 août 2008 5 08 /08 /août /2008 20:29

Se garder des idées simples sur la Chine

 

Le spectacle présenté par les responsables de l’Etat chinois, c’est-à-dire du parti communiste chinois, ce 8 août 2008 à Pékin, en introduction aux Jeux Olympiques, a été qualifié de grandiose. Le mot n’est pas trop fort. C’est la preuve du savoir faire des dirigeants et de la capacité d’organisation de ce pays.

 

J’ai relu un petit livre, paru en 2003, « L’économie chinoise » (Françoise Lemoine, collection Repères, La Découverte), dont voici la conclusion.

 

« La politique économique suivie depuis un quart de siècle en Chine peut se prévaloir d’incontestables succès : amélioration du niveau de vie de la grande majorité de la population, essor spectaculaire des régions et métropoles côtières, ascension dans les échanges internationaux et montée en gamme des exportations, résistance aux chocs extérieurs.

 

Ces succès sont le fondement de la légitimité du régime politique et la base du consensus qui existe au début du XXIème siècle au sein du pouvoir politique sur la stratégie économique : poursuite des réformes et de l’ouverture, privatisations, renforcement des institutions et des instruments de régulation macroéconomique.

 

Au cours des prochaines années, la stabilité du pouvoir va encore être mise à rude épreuve par l’exode rural, la persistance du chômage et des inégalités sociales. Les autorités continueront donc à mettre tout en œuvre pour maintenir une croissance rapide. Elles le font déjà depuis 1997-1998, en menant une politique de relance budgétaire vigoureuse pour contrecarrer les effets d’une demande interne défaillante et de la détérioration de l’environnement international. Cependant, la situation des finances publiques n’est elle-même pas à l’abri d’une crise : si la dette publique est encore faible, elle augmente rapidement et s’y ajoutent les coûts de la restructuration du système bancaire et la dette implicite du système de retraite.

 

On souligne souvent le contraste entre les transformations économiques et sociales que connaît la Chine depuis un quart de siècle et la rigidité du système politique, où le parti communiste a conservé le monopole du pouvoir. Le Parti a néanmoins évolué et fait preuve d’une capacité d’adaptation : il recrute de nouvelles élites sociales, comme il l’a montré lors de son dernier Congrès en appelant les entrepreneurs privés à rejoindre ses rangs ; il autorise des expériences limitées d’élections directes au niveau des villages. Des formes de démocratisation interne du Parti peuvent ainsi contribuer à élargir son assise, à renforcer les processus de négociations internes, consolidant ainsi la légitimité de son pouvoir.

 

Tout aussi essentiel pour l’évolution interne du système politique et pour son image internationale est le développement de l’Etat de droit. La Chine est le lieu d’une intense activité législative. Les réformes économiques ont exigé l’établissement d’un cadre l égal et l’entrée à l’OMC rend nécessaire de nombreux changements législatifs et réglementaires pour mettre le droit économique chinois en conformité avec les normes internationales (droit de la concurrence, de la propriété intellectuelle, lois sur les investissements étrangers, etc.) pour garantir la transparence des règles et leur application. Pour Pékin, le renforcement et l’uniformisation du cadre légal sont aussi un moyen de réaffirmer le cadre central face aux pouvoirs provinciaux. Mais établir l’Etat de droit ne peut se réduire à assurer la régularité des actes administratifs, et suppose aussi l’indépendance du pouvoir judiciaire, y compris à l’égard du Parti ».

 

- Pour mieux connaître les réalités de la Chine, le site de Marianne (la chronique de Zola) apporte une contribution intéressante (Mon pays vu par les Français: une usine internationale nommée Made in China et Comment les Chinois contournent la censure du Net).

 

- Quant à l’actualité franco-chinoise, Pierre Haski sur Rue89 affirme que « c’est le plus grave échec de la diplomatie de Sarkozy depuis son élection, qu’il ne doit qu’à sa propre maladresse » … Lire l’article Sarkozy, Pékin et le dalaï lama: une Bérézina diplomatique.

 

Lire aussi les articles sur La Chine parus sur ce blog.

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7 août 2008 4 07 /08 /août /2008 15:11

La vérité historique ne s’arrête pas aux frontières

 

La France était du côté des auteurs du génocide des Tutsis en 1994 au Rwanda. C’est une tache qui ne sera jamais effacée dans l’histoire de notre pays. Encore faut-il que la lumière soit faite sur l’ensemble des responsabilités.

 

Il est logique que le pouvoir en place à Kigali (accusé par la justice française d’avoir commandité l’assassinat du président rwandais Juvénal Habyarimana, une mort qui fut, le 6 avril 1994, le signal déclencheur du génocide) prenne les moyens de la contre-attaque.

 

En tant que citoyens, nous avons le droit de savoir la vérité sur ces faits et de connaître les raisons qui ont pu conduire à ce génocide. Si, comme on le découvrira, les pouvoirs publics français ont été à l’origine de décisions dans un sens favorable aux auteurs du génocide, il serait encore plus grave, pour l’honneur de la République, de vouloir le nier et de refuser une enquête objective et contradictoire concernant ces évènements.

 

J’ai eu le privilège d’accéder à des informations qui m’ont été communiquées par l’une de mes connaissances de mes années étudiantes (voir les articles parus sur ce blog classés dans la catégorie L'Afrique et, notamment Génocide des tutsis en 1994 au Rwanda : Bernard Patureau milite pour le devoir de Mémoire -  5 01 08 et Des informations et un film à voir sur Arte concernent le génocide des tutsis au Rwanda - 11 02 08).

 

On peut comprendre que les responsables politiques n’aient pas envie de traiter ce sujet, mais la gravité des accusations est telle qu’ils doivent avoir le courage, désormais, de le traiter à fond. C’est ce que demande Rémy Ourdan, journaliste au Monde, dans l’article, ci-après, paru hier sur www.lemonde.fr et, ce 7 août, dans l’édition papier.

 

Le génocide au Rwanda, un devoir de vérité

 

Le verdict est sans appel : "La France a participé à la mise en exécution du génocide" des Tutsis du Rwanda. Le récit des années de guerre de la France au Rwanda (1990-1994) rédigé par les sept rapporteurs rwandais est terrifiant. Complicité dans la préparation et l'exécution du génocide. Complicité aux plus hauts échelons politiques, diplomatiques et militaires, entraînement des soldats et des milices hutues, livraisons d'armes et de munitions. Et, sur le terrain, participation aux tueries ou passivité complice face aux tueries, assassinats, viols, tortures, pillages.

La "Commission nationale indépendante chargée de rassembler les preuves montrant l'implication de l'Etat français dans le génocide perpétré au Rwanda en 1994", nommée par Kigali, détaille la participation de la France au "crime des crimes". Si ce que décrit ce document est vrai, rien ne s'oppose à ce que des responsables français rejoignent les dirigeants hutus sur le banc des accusés des tribunaux chargés de juger les auteurs du génocide.

Mais l'affaire n'est pas si simple. L'histoire de la Commission rwandaise est ancrée dans dix-huit ans d'affrontements – militaires, diplomatiques puis judiciaires – entre Paris et le mouvement de Paul Kagamé, le chef de la rébellion tutsie devenu président du Rwanda.

Ce travail ne commença d'ailleurs que lorsque M. Kagamé fut accusé par le juge Bruguière d'avoir commandité l'assassinat du président rwandais Juvénal Habyarimana, une mort qui fut, le 6 avril 1994, le signal déclencheur du génocide. Or Kigali, dont neuf dirigeants sont visés par des mandats d'arrêt internationaux, avait prévenu que, sans abandon des accusations du juge Bruguière, la France devait être prête à voir ses dirigeants mis en cause, en retour, pour le génocide de 1994. On est davantage dans la tractation politique que dans le devoir de justice… Cette lutte de près de deux décennies entre la France et Paul Kagamé n'est toutefois pas une raison pour rejeter le rapport de la Commission rwandaise, ou présumer que les témoins cités, survivants du génocide ou ex-compagnons d'armes des soldats français, mentent.

Le récit, dense, précis, avec des noms, des lieux, des dates, relate l'histoire d'une guerre dans laquelle François Mitterrand engagea la France, presque sans réserve. L'histoire d'une guerre qui vit l'armée et les services de renseignements français être, de la première attaque du Front patriotique rwandais (FPR) en octobre 1990 à l'organisation au Zaïre, après le génocide, d'une rébellion hutue, les très fidèles compagnons d'hommes qui ont perpétré, en cent jours au printemps 1994, l'extermination de la communauté tutsie du Rwanda.

Quels que soient les doutes sur la véracité des témoignages, recueillis dans un pays où le FPR a instauré une dictature et peut orienter les récits, voire en fabriquer, comme la justice internationale le soupçonne d'ailleurs de l'avoir fait par le passé, la France ne peut pas ne pas répondre aux accusations.

D'abord parce que le rapport rwandais évoque des faits précis – parfois appuyés par des documents inédits – sur l'engagement français, les relations avec les génocidaires, les "coups tordus", les livraisons d'armes, les aides financières, qui contredisent des témoignages de responsables français entendus par la Mission d'information parlementaire à Paris en 1998. Ensuite parce qu'en ce qui concerne les crimes au Rwanda, Paris ne peut pas décréter que ses soldats, pris dans l'engrenage d'une guerre terrifiante aux côtés de tueurs implacables, n'ont pas commis les assassinats, viols et violences dont ils sont accusés.

L'attitude de la France, qui affirme depuis 1994 qu'elle n'a rien à se reprocher, n'est pas tenable. Par ailleurs, la tractation diplomatique – retrait des accusations Bruguière contre retrait des accusations rwandaises –, dont on sent qu'elle est une tentation tant à Paris qu'à Kigali, ne pourrait faire disparaître les terribles soupçons qui pèsent sur la France. Le droit à la justice des tutsis rwandais ne sera jamais pleinement satisfait. Les tueurs hutus se comptent par centaines de milliers. Certains de leurs soutiens ne seront jamais jugés.

Mais il existe en revanche, envers les victimes et les survivants, un devoir de vérité. Paris ne peut pas rejeter ces récits sans enquêter en profondeur et sans répondre point par point à chacune des centaines d'accusations. L'enjeu est d'établir avec exactitude les responsabilités dans le dernier génocide du XXe siècle. La France, qui tient et qui a contribué à ce que la lumière se fasse sur le génocide des juifs d'Europe durant la seconde guerre mondiale, ne peut pas refuser de se confronter aux effroyables récits rwandais, au motif que ses dirigeants étaient, disent-ils, animés de louables intentions, et qu'une aventure africaine a mal tourné.

Voir aussi les autres articles du Monde sur le même thème : France-Rwanda : de l'alliance à la rupture diplomatique et Génocide rwandais : Paris dénonce des "accusations inacceptables".

 

Le site Rue89 s’exprimait ainsi, le 5 août, sur le même sujet (possibilité de télécharger le rapport) : Génocide rwandais: politiques et militaires français à la barre?

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6 août 2008 3 06 /08 /août /2008 21:16

Une option moderne, progressiste, démocratique

 

La crise du service public en France est très liée à la construction européenne. L’ancien ministre, Anicet Le Pors, explique pourquoi dans un texte qu’il a écrit pour le comité départemental pour la promotion et la défense des services publics de l’Allier. Ce texte est important car il rappelle l’évolution historique du concept, sa confrontation avec la conception économique et financière du service d’intérêt économique général (SIEG), véhiculée par les institutions européennes.

 

Voici des extraits de ce texte, dont l’ensemble est à lire sur le blog de Anicet LE PORS (25 juin 2008).

La conception française du service public - Comité départemental pour la promotion et la défense des services publics – Moulins, 25 juin 2008 

(…) La demande de service public n’a cessé de croître au cours des dernières décennies, en relation avec la crise de l’État-providence, les atteintes à la cohésion sociale, le développement de l’exclusion, notamment dans les domaines de la sécurité, de la justice, de la solidarité sociale et de la diffusion du savoir. Seul le service public peut développer sur le long terme les politiques publiques nécessaires en ces domaines.

La réponse libérale a consisté en une assez large dérégulation. Un transfert de pouvoir réglementaire a été opéré en faveur d’autorités administratives indépendantes (Commission des opérations de bourse, Commission nationale de l’informatique et des libertés, Conseil supérieur de l’audiovisuel, Autorité de régulation des télécommunications) sans que l’activité réglementaire globale diminue pour autant. Des services administratifs ont été transformés en établissements publics administratifs, en établissements publics industriels et commerciaux et, souvent, en sociétés commerciales à capitaux d’État, mixtes ou privés (Service des poudres, Service d’exploitation des tabacs et allumettes, Groupement industriel des armements terrestres, Imprimerie nationale, Direction des constructions navales). De nouvelles catégories d’établissements publics ont vu le jour (La Poste et France Télécom). Dans le même temps, la faible croissance a mis en difficulté les budgets sociaux et a conduit, malgré la pénurie des moyens, à multiplier les organismes de transferts sociaux et de solidarité.

Cette évolution générale a amené les pouvoirs publics à engager une réflexion sur la refondation et les perspectives du service public. Cette réflexion s’est développée dans plusieurs rapports officiels visant, soit à compléter les principes traditionnels (égalité, continuité et adaptabilité) par de nouveaux principes (neutralité, laïcité, transparence, participation et déontologie), soit à séparer la doctrine du service public jugée toujours fondée, du mode d’organisation susceptible de prendre des formes et des statuts variés, soit à concevoir une large réorganisation des structures administratives et gouvernementales.

En dernier lieu a été lancée l’opération de Révision générale des politiques publiques (RGPP). Sous couvert de modernisation, un récent Conseil de modernisation des politiques publiques qui s’est tenu le 14 décembre dernier a, parmi les 96 mesures de réforme de l’État qu’il a retenues, prévu : la suppression du Haut conseil du secteur public, du Comité d’enquête sur les coûts et les rendements des services publics, du Conseil national de l’évaluation, du Haut Conseil à la coopération internationale, de huit des neuf centres interministériels de renseignements administratifs (CIRA). On sait par ailleurs les menaces de démantèlement qui pèsent sur le CNRS (…). 

Un certain nombre de facteurs ont pesé au cours de la dernière période sur l’avenir de la fonction publique et de ses statuts : tentatives de réformes statutaires pour constituer de plus grands ensembles de fonctionnaires par fusion de corps existants, adoption d’une loi organique sur les loi de finances (LOLF) instaurant une gestion par programmes, développement de la contractualisation, etc.    Le nouveau président de la République, Nicolas Sarkozy a annoncé le 19 septembre 2007 ce qu’il a appelé une véritable « révolution culturelle » qui revient à opposer le contrat à la loi, la notion de métier à celle de fonction, l’individualisation des rémunérations à la recherche de l’efficacité sociale. Si ces réformes étaient appliquées, elles mettraient en place une fonction publique d’une conception toute différente de celle qui existe aujourd’hui. C’est pourquoi j’ai parlé d’une « forfaiture » s’inscrivant dans une « dérive bonapartiste » de l’exercice du pouvoir.

Il s’agit d’une offensive amorcée de longue date pour remettre en cause le statut général des fonctionnaires élaboré entre 1981 et 1984 avec le concours des organisations syndicales de fonctionnaires et sur la base d’une concertation sans précédent, non seulement sur les principes mais aussi sur les projets de loi eux-mêmes. Je veux rappeler notamment la loi Galland du 13 juillet 1987 qui a réintroduit dans la fonction publique territoriale le système de la liste d’aptitude (« reçus-collés »), remplacé les corps par des cadres d’emplois, encouragé le recours aux contractuels, développé les emplois fonctionnels, dénaturé le fonctionnement des organismes paritaires, etc. Puis il y a eu en 1990 la mise à l’écart progressive de la fonction publique de La Poste et de France Télécom, suivis de bien d’autres services ou établissements administratifs ; la loi Hoëffel de 1994 prolongeant la déstabilisation ; le rapport annuel du Conseil d’État de 2003 esquissant une théorisation d’un autre modèle de fonction publique érigeant, par exemple, le contrat en « source autonome du droit de la fonction publique » ; la loi dite de « modernisation » de la fonction publique du 2 février 2007 tentant par diverses mesures de gommer l’interface entre la fonction publique et le privé ; la loi sur la « mobilité » actuellement en discussion au Parlement qui dans une grande confusion développe la précarité de l’emploi public et crée les condition d’un clientélisme étendu. Ces dernières initiatives peuvent être analysées comme des entreprises de déstabilisation avant la mise sur pied d’une tout autre fonction publique, alignée sur la conception libérale européenne dominante, copiée sur le modèle de l’entreprise privée. Le livre blanc rédigé par Jean-Ludovic Silicani est dernier avatar de cette offensive régressive.

Le XXI° siècle « âge d‘or » du service public ?

La RGPP a été lancée à grand renfort de médiatisation et de communication mais sans débat sur les véritables enjeux. Le projet de loi qui se propose de mettre à bas le statut général des fonctionnaires sera, de la même façon, passé en force en 2009 si le rapport des forces n’y fait pas échec. Ainsi qu’il a été indiqué, dans un contexte où le pouvoir supprime tous les instruments qui pouvaient donner à la décision publique une forme et un minimum de rationalité, la RGPP ne correspond à aucune démarche méthodologique sérieuse, il s’agit avant tout de détruire l’existant avant de mettre en place l’édifice minimum qui laisse libre cours aux lois du marché se substituant à l’expression de la volonté générale. La RGPP traduit aussi une ignorance et un mépris pour ce qui fonde le pacte républicain, les valeurs qui ont été forgées par notre histoire à travers des contradictions fortes et des luttes de grande intensité. Dans ces conditions, l’ambition du mouvement social doit être de se placer résolument sur le terrain déserté par le président de la République et son gouvernement par inculture et esprit de caste : l’histoire, la science et la démocratie.,

Cette démarche ne doit pas se limiter à la défense des acquis, aussi légitimes soient-ils. La défense du service public dans notre pays n’est pas seulement justifiée par le souci de préservation de l’héritage démocratique légué par les générations antérieures, mais surtout parce qu’il s’agit d’options modernes, progressistes et démocratiques. S’il est vrai que la mondialisation libérale tend à occuper l’ensemble du champ des échanges marchands, la mondialisation n’est pas seulement celle du capital pour importante qu’elle soit. Elle concerne tous les domaines de l’activité humaine, et notamment ceux présentant le caractère de service public (communications, transports, échanges culturels, solidarité humanitaire, etc.).

Notre époque est caractérisée par une prise de conscience croissante de l’unité de destin du genre humain, de la finitude de la planète, d’un « en commun » à définir politiquement, qui donnerait son vrai sens à la mondialisation à venir. Ainsi la protection de l’écosystème, la gestion de l’eau, celles des ressources du sol et du sous-sol, la production de nombre de biens et de services posent-ils avec force, et poseront de plus en plus, l’exigence de l’appropriation sociale des biens publics correspondants. La mise en commun et la convergence des démarches devraient conduire au développement de coopérations approfondies à tous les niveaux : national, international, mondial.
Dans cette recherche commune d’universalité, le XXI° siècle pourrait ainsi être l’ « âge d’or » du service public.

Voir aussi les autres articles parus sur ce blog, classés dans la catégorie Services publics, dont certains sont empruntés à Anicet Le Pors..

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