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  • : Michel Sorin
  • : Le MRC 53 est la structure mayennaise du Mouvement Républicain et Citoyen, qui a pour but de rassembler la gauche républicaine à partir, notamment, des idées de Jean-Pierre Chevènement, l'un de ses fondateurs, qui n'est plus membre du MRC depuis 2015. Le MRC a pris le relais du Mouvement des Citoyens (MDC) après les élections de 2002. En 2022, le MRC est devenu membre de la Fédération de la Gauche Républicaine avec quatre autres organisations politiques.
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23 mai 2011 1 23 /05 /mai /2011 22:09

Les agriculteurs doivent être rémunérés correctement

 

Les pouvoirs publics ne peuvent laisser l’agriculture sous l’emprise des marchés mondiaux, comme ils l’ont décidé il y a quelques années au niveau de l’Union européenne. C’est une grave erreur, due à l’idéologie néolibérale, dont il faut maintenant se défaire. Cela passe par une nouvelle majorité à l’issue des prochaines élections nationales. Les citoyens ont leur mot à dire, non seulement au moment des votes, mais avant, dans les débats qui portent sur la politique alternative à proposer aux Français.

 

Dans le cadre de mes fonctions de secrétaire national du Mouvement Républicain et Citoyen (MRC), plus spécialement chargé de l’agriculture, j’ai été invité à participer à deux débats en Poitou-Charentes, l’un le 28 mai à 16h à Vouillé, près de Poitiers (Vienne) - salle de la Gorande - à l’initiative de Pierre Rousseau, qui préside l’Association Citoyenne Vouglaisienne, et l’autre le 8 juin à 20h30 à Surgères (Charente-Maritime) - salle du Lavoir - organisé par Serge Maupouet et le MRC17.

 

Voici le texte introductif que j’ai rédigé en vue du débat du 8 juin.

 

L’agriculture et la question alimentaire

 

Le monde ne tourne pas rond.

D’un côté, une hausse des prix alimentaires, à l’origine d’insurrections et émeutes de la faim, dans certains pays. De l’autre, des agriculteurs de plus en plus appauvris et en difficulté.

D’un côté, des agriculteurs surendettés, surexploités qui vendent à bas prix depuis des années les fruits de leur travail. De l’autre, des ouvriers, des employés, des chômeurs qui ont de plus en plus de difficultés à acheter des aliments dont le prix est trop élevé au regard de leur pouvoir d’achat.

D’un côté, de plus en plus de gens qui souffrent de la famine. De l’autre, cette aberration de cultiver de la terre pour mettre les céréales, transformées en éthanol, dans le carburant des voitures.

 

L’agriculture doit couvrir les besoins alimentaires essentiels des consommateurs locaux, régionaux et nationaux, selon les produits. Il faut rapprocher producteurs, transformateurs, distributeurs et consommateurs en respectant un bon équilibre des revenus dans la filière. La contrainte écologique (limiter les déplacements des produits) va dans le sens de la qualité (sanitaire et gustative) des produits. Ensuite, il y a l’Europe pour les échanges nécessaires. Au-delà, on entre dans le domaine du libre-échange commercial.

Le principe de la souveraineté alimentaire, adopté par le Canada et la Suisse, est valable pour tous les pays. C’est cette politique qu’il faut proposer au niveau européen.

 

L’agriculture française est en déclin, dépassée par l’Allemagne et les Pays-Bas. Au moment où s’engage un processus de discussion sur la nouvelle réforme de la Politique agricole européenne (PAC), les enjeux globaux de l’agriculture doivent être rappelés : production, type de développement, rémunération du travail, système agro-alimentaire et qualité des aliments.

 

Au niveau mondial, des moyens incitatifs devront être accordés à la branche Agriculture et Alimentation (FAO) de l’Organisation des Nations Unies (ONU) afin de contribuer à la réalisation de stocks de régulation des marchés et au développement des cultures vivrières, en lien avec les territoires.

 

Ces différents points serviront de base à un débat avec les citoyens présents, dans le but de préparer les éléments d’une politique agricole en vue des échéances électorales du printemps 2012. Le MRC souhaite qu’il y ait de larges échanges d’idées avec tous ceux qui veulent engager des discussions pour établir un projet commun à présenter aux Français.

 

Cet article est le 225ème publié sur ce blog dans la catégorie AGRICULTURE et PAC.

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18 mai 2011 3 18 /05 /mai /2011 18:09

La souveraineté alimentaire, but de la politique agricole

 

Frédéric Paré, qui coordonne la Coalition pour la souveraineté alimentaire (voir Souveraineté alimentaire contre néolibéralisme mondial en agriculture - 9 avril 2011), dans un message publié sur Facebook, a souligné l’évolution de la Suisse :

« Les Helvètes ont bien compris le lien entre l'agriculture et leur propre alimentation. C'est devenu une question nationale prioritaire, ralliant la gauche et la droite, les consommateurs, les socialistes, et même les capitalistes (étonnant). Tous, ils militent pour le protectionnisme de leur agriculture et acceptent son prix: des aliments un peu plus chers, mais de chez eux ».  

Ce patriotisme alimentaire n’a rien de nouveau mais il est cultivé intensément par une majorité politique à Berne (les élections fédérales auront lieu en octobre 2011). L’UDC exalte la patrie et cherche à satisfaire son électorat agraire. Les Verts et une partie des Socialistes portent aux nues les produits locaux pour leur bilan écologique.  

Tel est le message principal contenu dans le texte de Patrick Chuard, publié ce 18 mai sur le site Politblog : Patate, vos papiers !

La campagne pour les Fédérales irrigue l’agriculture d’un protectionnisme bienfaisant. Si une tomate est heureuse, c’est qu’elle a forcément poussé en Suisse. Si elles le pouvaient, les poules voteraient pour avoir du grain 100% indigène. Un bon steak de bœuf a forcément passé ses vacances dans notre pays.  Le meilleur beurre provient de nos alpages. La patate la plus vulgaire a intérêt à montrer ses papiers, traçabilité oblige. Un chou sans certificat de naissance est suspect, considèrent à l’unanimité les associations de consommateurs (pour des raisons de qualité), la grande distribution (pour doper ses prix et ses bénéfices) et la filière agricole (pour espérer placer ses produits indigènes).  

Ce patriotisme jardinier n’a rien de nouveau mais il est cultivé intensément par une majorité politique à Berne. L’UDC doit exalter la patrie et contenter son électorat agraire. Les Verts et une partie des Socialistes portent aux nues les produits locaux pour leur bilan écologique. Les partis centristes rament déjà suffisamment dans les sondages pour ne pas se mettre les consommateurs et les paysans à dos. Même au sein du PDC, qui a si ardemment milité derrière Doris Leuthard pour introduire le principe du Cassis de Dijon – ouvrir les vannes aux produits étrangers et casser l’îlot de cherté de la Suisse – des voix dénoncent aujourd’hui ces vils produits étrangers et ces satanés prix qui persistent à ne pas baisser.

 

Le lobby agricole devrait en théorie récolter les fruits de cette floraison identitaire, en espérant qu’elle ne meurt pas totalement après le scrutin d’octobre. Le mouvement de fond a été amorcé l’année dernière, par une alliance de gauche-droite de toutes les couleurs. Une majorité du Parlement a en effet accepté l’initiative sur la souveraineté alimentaire, signée Jacques Bourgeois*, directeur l’Union suisse des paysans. Les commissions du National et des Etats ne voulaient pourtant pas, au départ, de cette mesure aux relents de Plan Wahlen.

 

La motion d’Andreas Aebi** pour rééquilibrer les quotas de lait a quant à elle passé la rampe. En mars, plusieurs démarches de soutien au marché du lait ont été approuvées. Et les critiques ont mitraillé le projet d’accord de libre-échange dans le secteur agricole. Même l’initiative verte des cantons concernant «l’importation de denrées alimentaires produites dans des conditions sociales et écologiques inacceptables» a en partie passé la rampe.

 

Le nouveau paquet de la Politique agricole (PA) 2014-2017, en consultation jusqu’en juin, débarque sous les meilleurs auspices. On voit mal qui pourrait globalement contester les 13,6 milliards de francs d’aide prévus pour l’agriculture. Mais le diable se niche dans les détails: la belle alliance de la saison électorale promet quelques fissures sous des exigences contradictoires. Des associations professionnelles dénoncent de nouvelles règles trop contraignantes, tandis que les écologistes se navrent du peu de soutien accordé à l’agriculture biologique. L’Union suisse des arts et métiers (USAM) dénonce les facilités prétendument accordées aux paysans pour leur diversification. L’alliance pro-agricole de saison à Berne ne pourra pas dissiper des tensions récurrentes. Il en va de l’agriculture comme de l’armée: chaque citoyen de ce pays est un spécialiste autoproclamé de la question.

 

Rien de nouveau pour les paysans, habitués qu’ils sont à s’adapter aux exigences du moment posées par la Confédération, à la fois jardiniers du paysage et entrepreneurs responsables. L’adaptation ou la mort sont les seules alternatives pour une majorité d’exploitations agricoles: un quart d’entre elles ont disparu en quinze ans, passant au-dessous de la barre des 60’000. Et les surfaces agricoles disparaissent au rythme de dix terrains de football par jour. Or, «personne n’a envie de voir un jour ce pays réduit à des villes et des zones résidentielles pour pendulaires», résume une élue verte. Dans ce contexte, le patriotisme alimentaire est bon à prendre. Même s’il profite davantage à l’industrie et aux distributeurs qu’aux agriculteurs eux-mêmes, dénoncent les associations paysannes. Le repli identitaire arrange tout le monde. Patate, vos papiers !

 

Patrick Chuard, est journaliste à la rubrique Suisse de 24heures et de la Tribune de Genève.

Voir tous les articles par Patrick Chuard - Website : http://www.24heures.ch

 

* Jacques Bourgeois (voir L'Agri du 11 février 2011 : Evolution politique de la souveraineté alimentaire)

JACOUES BOURGEOIS, directeur de I'Union suisse des paysans, a déposé en 2010 une initiative parlementaire afin d’introduire la notion de souveraineté alimentaire dans la loi. Le point sur I'avancement du projet.

CH/Souveraineté alimentaire (11 mars 2010): La Chambre des cantons a donné suite jeudi, par 27 voix contre 13, à une initiative parlementaire du conseiller national Jacques Bourgeois (PLR/FR), qui demande de compléter la loi sur l'agriculture. Le texte du directeur de l'Union suisse des paysans prévoit notamment d'y inclure le principe de la souveraineté alimentaire comme but de la politique agricole.

Jacques Bourgeois - Souveraineté alimentaire (juin 2008) - Demande d’un débat sur la souveraineté alimentaire.

 

** UNITERRE - pour une agriculture durable : Uniterre s'est positionné en faveur d’un modèle de régulation permettant d’adapter les quantités de lait aux besoins du marché.

La motion Aebi a le grand avantage de redonner un certain poids aux producteurs lors des négociations avec l’industrie laitière et la grande distribution. En effet, elle permettrait aux producteurs de détenir le fond financier nécessaire à la gestion de ces surplus du marché laitier qui pèse fortement sur les prix. Ce fond de dégagement serait alimenté par une taxe sur les quantités supplémentaires (principe du pollueur payeur). La hauteur de cette taxe serait adaptée en fonction des tensions sur le marché. Selon les initiants, cette taxe, si elle est suffisamment élevée, permettrait réduire les quantités supplémentaires et stabiliser les pressions sur les prix. Elle ne donne par contre aucune garantie sur une éventuelle hausse du prix. > suite

 

Rappel : Réunions Apli : Paul Ecoffey, producteur de lait en Suisse, a témoigné - 22 janvier 2011 

 Crise du lait : le canton de Vaud (Suisse) proche du système canadien - 9 février 2010

 

Cet article est le 224ème publié sur ce blog dans la catégorie AGRICULTURE et PAC.

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17 mai 2011 2 17 /05 /mai /2011 09:07

L’idéologie néolibérale contre la souveraineté alimentaire

 

Frédéric Paré, qui coordonne la Coalition pour la souveraineté alimentaire (voir Souveraineté alimentaire contre néolibéralisme mondial en agriculture - 9 avril 2011), m’a mis sur la voie d’une décision de la Commission européenne qui montre bien que cette institution est inféodée au néolibéralisme. Les terres agricoles, si indispensables pour nourrir l’humanité, doivent-elles être vendues aux multinationales ?

 

Chronique de Gérard Le Puill : la terre, ce bien précieux (L’Humanité, 16 mai)

La Commission européenne vient d’autoriser la Lituanie et la Slovaquie à prolonger jusqu’en 2014 l’interdiction de vendre des terres aux investisseurs étrangers. Cette autorisation européenne avait déjà été accordée à la Hongrie et à la Lettonie. Mais l’information est tout de même révélatrice .Dans l’Europe des 27, les pays membres de l’Union ne disposent plus du droit souverain de ne pas brader leur terre nourricière.

Car la Commission a « exhorté les quatre pays à accélérer les efforts pour réaliser les réformes structurelles de leurs secteurs agricoles, avertissant que la date de 2014 constituait la dernière limite », nous indique l’agence Agra-Presse dans son numéro 3.299 du 2 mai.

Autrement dit, une Commission composée de technocrates peut décider, selon le regard qu’elle porte sur l’agriculture de tel ou tel pays européen, que la terre nourricière doit être vendue aux spéculateurs les plus offrant, quitte à  ce que ces derniers choisissent ensuite d’affamer le peuple d’un pays qui renoncerait ainsi à sa souveraineté alimentaire.

Le même jour, le Figaro indiquait que l’Argentine vient de présenter un projet de loi limitant les investissements étrangers à 20% des terres agricoles. « La question de la propriété de la terre est stratégique et vitale en ce XXIème siècle », a déclaré la présidente Cristina Kirchner en parlant d’une loi qui marque « une avancée très importante pour la souveraineté sur les ressources » du pays (…).

Terres ancestrales à vendre… Les achats de terres cultivables s’accélèrent dans le monde (La Croix, Olivier Tallès, 10 mars 2010)

D’après un rapport de l’ONU, les investisseurs étrangers ont acquis près de 20 millions d’hectares de terres arables dans les pays en développement. Ruée sur les surfaces agricoles. À Madagascar, une société indienne, Varun International, a loué, ces dernières années, 465 000 hectares de terres pour cultiver du riz destiné au marché indien. Au Mali, les autorités ont concédé 100 000 hectares aux Libyens, là encore pour la production de riz. Au Soudan, la Corée du Sud a acquis 690 000 hectares où sera planté du blé. En République démocratique du Congo, la Chine prévoit de créer la plus grosse plantation de palmiers à huile du monde sur des centaines de milliers d’hectares… Cette liste, non exhaustive, ne cesse de s’allonger à vitesse accélérée, selon une étude des Nations unies présentée cette semaine. « Depuis 2006, entre 15 et 20 millions d’hectares de terres agricoles ont fait l’objet de transactions ou de négociations » entre les pays en développement et des investisseurs étrangers, précise Olivier de Schutter, rapporteur spécial de l’ONU pour le droit à l’alimentation. Cette surface correspond à la totalité des terres agricoles de la France et au cinquième de celle de l’Union européenne.

Cette pression foncière s’exerce d’abord en Afrique subsaharienne, notamment au Cameroun, en Éthiopie, au Ghana, à Madagascar, en Tanzanie, au Soudan, là où la main-d’œuvre est peu coûteuse et le mètre carré bon marché. L’Europe de l’Est, l’Asie et l’Amérique latine sont aussi concernés, à l’image du Brésil, du Cambodge, de l’Ukraine, des Philippines ou du Pakistan. Les contrats négociés entre les multinationales ou les États et les autorités locales portent sur des acquisitions ou des locations de surfaces arables de plusieurs milliers d’hectares, et sur de longues périodes.

 

Course à la terre

La course à la terre s’est intensifiée après la flambée des prix des denrées alimentaires en 2007-2008. « Les pays pauvres en ressources, mais riches en réserves monétaires, se sont alors tournés vers l’acquisition ou la location de terres à grande échelle pour assurer leur sécurité alimentaire, insiste le rapport de l’ONU. Des investisseurs privés, y compris d’importants fonds d’investissement, ont ensuite acheté des terres pour des raisons purement spéculatives, convaincus que le prix du mètre carré continuerait d’augmenter. »L’arrivée massive d’investisseurs dans le foncier agricole n’est pas forcément une mauvaise chose pour l’économie locale. L’argent étranger peut déboucher sur des transferts de technologie, l’ouverture de routes ou encore la création d’emplois et de richesse, rappelle un document de travail du ministère des affaires étrangères français issu d’une concertation avec des ONG. Mais ces impacts positifs exigent au préalable le respect des droits des utilisateurs des terres convoitées, et la mise en terre de cultures améliorant la sécurité alimentaire.

Or, dans de nombreux pays, les agriculteurs ne détiennent pas de titres de propriété. Quand l’État les exproprie au bénéfice d’investisseurs étrangers, ils ne peuvent défendre leurs intérêts en justice. « Il existe un risque réel que les terres considérées comme vides ou en friche soient utilisées en réalité par des éleveurs », avertit aussi l’ONU. Le mépris des droits de propriété est une menace pour les populations fragiles, dégrade la sécurité alimentaire du pays, renforce la compétition foncière et les conflits, voire débouche sur des troubles sociaux. 

Règles internationales

Aujourd’hui, il n’existe aucun mécanisme contraignant pour protéger les populations autochtones, en dehors des déclarations de principe des Nations unies. Dans une série de propositions, les autorités françaises et les organismes de développement défendent une politique axée sur l’instauration de règles internationales. Ces règles prévoiraient notamment de lier l’achat de terres au partage des bénéfices entre les parties concernées et au respect de l’environnement. La France souhaite également interdire tout financement public d’un projet en contravention avec les besoins fondamentaux des agriculteurs locaux.   

 

Cet article est le 223ème publié sur ce blog dans la catégorie AGRICULTURE et PAC.

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25 avril 2011 1 25 /04 /avril /2011 22:11

L’alimentation c’est la santé, l’agriculture y contribue

 

Les conférences organisées par l’université rurale du pays de Craon, en Mayenne, sont de grande qualité. J’avais pu le vérifier en y participant, puis j’avais coupé depuis quelques années.

Bernard Gemin, ami lecteur de ce blog, m’ayant transmis le compte rendu de la conférence du 14 avril 2011, je crois bon d’en reprendre des extraits ici. C’est une façon de saluer le remarquable travail réalisé par Jean-Yves Laurent et l’équipe qui l’entoure (voir [ Université Rurale du Pays de Craon ] et Comptes rendus de conférences).

 

Environ 60 personnes ont participé - au centre administratif intercommunal de Craon - à la conférence de Valentin BEAUVAL, ingénieur agronome qui était encore récemment agriculteur près de Saumur (49), en Anjou, syndicaliste à la Confédération paysanne, spécialiste des questions agricoles internationales. Conférence organisée par l’Université Rurale du pays de Craon en partenariat avec l’Antenne Solidarité du diocèse de la Mayenne.

 

Thème de cette conférence : L’alimentation n’est-elle pas notre première médecine ? Comment l’agriculture peut-elle y contribuer ?

 

1. Faim et obésité, deux situations opposées mais trop fréquentes sur notre planète

 

Le monde a connu et connaît encore des famines. Les raisons en sont multiples : guerres, déplacements de populations, accidents et changements climatiques. La faim est encore très présente dans le monde : en Afrique mais également en Asie et, d’ailleurs, essentiellement dans le monde paysan (…)

L’obésité est une maladie des pays riches due essentiellement aux excès de sucres et graisses dans l’alimentation, le manque d’activité, la consommation de produits et plats préparés, le grignotage…

Depuis 1960, dans notre alimentation, la part de viande a diminué, surtout en viande bovine. La part de produits préparés à base de viande a plus que doublé. La part de poisson a doublé surtout en produits préparés. La part des œufs a diminué.

La part de légumes frais a diminué surtout en légumes secs. La part de conserves et produits préparés à base de légumes a augmenté

Les pays européens et d’Amérique du nord consomment beaucoup plus de viande que la moyenne du monde. L’Inde et l’Afrique beaucoup moins. Les chinois mangent beaucoup de fruits et légumes. Les indiens et africains, beaucoup de céréales

 

Le type de consommation n’est pas uniforme dans le monde. Il faut tenir compte que les peuples, de générations en générations, se sont adaptés au potentiel de production animale ou végétale  local (nature des terrains, climat,…). Exemple : les Inuits ont une forte consommation carnée, les Peuls une forte consommation lactée, les japonais une forte consommation de poissons,…

Mais les organismes humains se sont aussi adaptés. Par exemple, les européens, contrairement aux chinois, ne disposent pas d’enzyme capable de digérer le soja.

 

La planète produit actuellement environ 2,5 milliards de tonnes de céréales (en incluant les calories des tubercules). Environ 350 kg disponible par habitant et par an dont 150 kg consommés par les humains et 200 kg pour les animaux. 

En Inde, on consomme en moyenne 160 kg de céréales par an, des légumes, des produits laitiers et très peu de viande. En Chine, la consommation moyenne de céréales par habitant serait proche de la moyenne mondiale (370 kg, dont 200 kg utilisés en alimentation animale).

Vu leur régime alimentaire, un Américain et une partie des Européens consomment en moyenne 900 kg de céréales par habitant et par an…

Il faudrait 4 planètes si tous les habitants du Monde adoptaient le régime alimentaire des Américains.

 

Dans beaucoup de pays d’Asie (continent où vit 60 % de la population mondiale), chaque habitant ne dispose aujourd’hui en moyenne pour se nourrir que de 10 ares cultivables dont 5 ares pouvant être cultivés en céréales.

Quel rendement est  nécessaire pour un régime alimentaire à 350 kg de céréales par personne ? 70 Quintaux /ha. Pour rappel, aux USA, le rendement moyen est de 25 à 40 qx/ha, en Europe : de 50 à 80 qx/ha en conventionnel et 30 à 60 qx/ha en bio.

Dans la majorité des cas, on ne peut atteindre ces niveaux de rendement sans irrigation et sans une notable intensification, avec les risques environnementaux que cela induit souvent…

 

Et pour un modèle alimentaire de type USA ? Environ 90qx/ha. Ce chiffre s’explique par la consommation importante de viande dont la production nécessite beaucoup de consommation de céréales. NDLR Il faut environ 2 à 3 kg de céréales pour produire 1 kg de viande de volaille, 3 à 4  kg  de céréales pour produire 1 kg de viande de porc, 7 à 10 kg de céréales pour produire 1 kg de viande de bœuf (attention néanmoins pour la viande bovine, le bovin, comme l’ovin, est un ruminant qui peut aussi être alimenté uniquement à base d’herbe. Dans ce cas, il ne consomme pas de céréales et valorise des surfaces qui ne seraient pas forcément exploitables en céréales : montagne, marais,). Les porcs et volailles sont des monogastriques qui ne peuvent grossir qu’à base de céréales.

 

2. Comment définir une alimentation saine ?

 

Une alimentation répondant le mieux possible aux différents besoins de notre corps, que ce soit :

-          Sur le plan quantitatif : les calories nécessaires (venant principalement des glucides et lipides) ; les protéines ; les vitamines ; les minéraux, etc…

-          Sur le plan qualitatif : équilibre des acides aminés essentiels ; des acides gras essentiels (oméga3, 6); des vitamines ; des minéraux assimilables, …

-          Mais aussi, le moins possible d’éléments toxiques (phytosanitaires,…) pour l’organisme ni de déséquilibres alimentaires pouvant favoriser des problèmes cardiaques, des cancers, du diabète, …

-          Et bien sûr, une alimentation saine sur le plan sanitaire.

 

Que penser de la diététique ?

          Discipline importante mais elle rencontre plusieurs difficultés :

         Les humains ne sont pas des animaux de laboratoire et on ne peut faire sur eux les mêmes expériences que celles faites avec les souris ou les poulets. On manque donc d’expérimentations statistiquement validées.

         Les régimes alimentaires des sociétés humaines de notre planète sont très variés => Pas de normes universelles ! (comme pour les bovins)

         Les besoins alimentaires varient fortement d’une personne à l’autre et aussi en fonction de l’âge, du mode de vie, des activités physiques => Les normes moyennes n’ont qu’un sens limité.

 

          En lien avec les observations précédentes, que penser des régimes alimentaires pour maigrir ? de certains alicaments ? Etc…Il faut être très prudent

 

3. Ce que les études sur le cancer, les maladies cardiaques et le diabète nous enseignent :

 

          Le cancer coûte près de 11 milliards € de dépenses de santé en 2004 (France).

    Il y a des facteurs aggravants : mode de vie, mauvaise alimentation, facteurs environnementaux hors alimentation, …

On note une forte augmentation des cancers en occident :

Aux USA, 55 cas de cancer du sein pour 100.000 femmes en 1945 et 140 maintenant

   - Évolution semblable aux USA et en France pour cancers de la prostate ou du colon

   - En France, le nombre de cancers du cerveau serait triple pour les personnes nées en 1950 en comparaison de celles nées en 1910

Ces 3 formes de cancers seraient 4 fois moins nombreuses au Japon et 9 fois moins en Chine. Par contre, Hongkong et la ville chinoise de San Francisco auraient des chiffres proches de l’Occident. Et les grandes villes chinoises évolueraient dans le mauvais sens.

 

          Les maladies cardiaques (ou « pathologies cardiovasculaires ») :

Coût pour la société =  13,6 milliards d’euros sur un total de 107,6 milliards d’euros de soins en 2007

     Facteurs aggravants : mauvaise alimentation, manque d’exercice, génétique, …

 

          Le diabète : Près de 3 millions de personnes en France en 2010 (livre blanc sur le diabète publié en 2011). Coût pour la société = 12,5 milliards d’euros auxquels viennent s’ajouter 5 milliards d’euros de coûts « indirects » en 2007

     Facteurs aggravants : obésité ; vieillissement ; manque exercice

 

          Autres troubles liées à notre alimentation : hypertension, stérilité masculine (?) …

Þ      Les effets de tous ces polluants chimiques sur notre santé ont été peu étudiés (comparativement aux nombreuses études réalisées sur les microbes).

Þ       Une part importante de nos problèmes actuels de santé est liée à notre environnement, à nos modes de vie et régimes alimentaires et, selon de nombreux scientifiques, à certains produits chimiques auxquels nous sommes exposés.

 

4 - Ce qui a changé dans notre alimentation et nos modes de vie depuis la seconde guerre mondiale :

  1. Multiplication par 2 de la consommation de sucre et d’aliments à index glycémique élevé, ce qui accroîtrait les inflammations (=> lesquelles favoriseraient le cancer)
  2. Forte augmentation de la consommation de viande et réduction de la consommation de légumineuses
  3. Augmentation de la consommation d’huiles végétales hydrogénées et ratio « oméga3/oméga 6 » déséquilibré
  4. Réduction de l’exercice physique de personnes qui mangent trop, trop gras et trop sucré (=> trop de calories)
  5. Beaucoup plus de pesticides dans nos champs et d’antibiotiques dans nos élevages
  6. Moins de pâturages et une part très importante du lait et de la viande est produite avec le duo Maïs-Soja (=> le ratio oméga 6 sur oméga 3 aurait été multiplié par 7 pour le beurre, 12 pour le porc, 16 pour le bœuf, 20 pour les œufs, …)
  7. Développement des produits préparés par les industries agroalimentaires et les firmes de la restauration collective avec, en parallèle, beaucoup de sucre, de sel, d’acides gras saturés et x conservateurs et additifs chimiques, …

Dépenses de santé

          107,6 milliards d’euros de dépenses de soins en France en 2007 dont près de la moitié pour des maladies pouvant être favorisées par une mauvaise alimentation.

          A comparer aux 60 à 70 milliards d’euros = valeur de la production agricole française en 2009 (dont une partie est exportée).

          en France, en 2008, les dépenses totales de santé ont été d’environ 2300 euros par habitant soit 11% du PIB (elles étaient d’environ 1800 euros en 1990 – Aux USA, elles représentent aujourd’hui16% du PIB).

          En France en 2009, les dépenses alimentaires étaient de 2 640 euros par habitant (source INSEE)

          => Si on suit l’évolution des USA, nos dépenses de santé par habitant vont bientôt dépasser nos dépenses alimentaires. Est-ce raisonnable ? (…)

 

Résumé des préconisations de David Servan Schreiber, médecin (…)

 

5 -  Quelles formes d’agriculture peuvent contribuer à une alimentation plus saine ? (…)

Christian Rémésy, chercheur et nutritionniste, a développé dans le cadre de l’Inra une approche originale de la nutrition en approfondissant le rôle protecteur des produits végétaux. Il a exploré les bases d’une nutrition préventive, avant d’élargir sa démarche à l’alimentation durable. Il a notamment écrit « Que mangerons-nous demain ? »

 

Cet article est le 222ème publié sur ce blog dans la catégorie AGRICULTURE et PAC.

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19 avril 2011 2 19 /04 /avril /2011 21:59

Logique financière libérale et Europe puissance industrielle

 

Les relations entre l’Italie et la France sont piquantes en ce moment, que ce soit en matière d’immigration ou de « patriotisme économique ». Tenons-nous en aux opérations entre les poids lourds de l’industrie agroalimentaire, principalement dans le secteur laitier, que sont Lactalis (l’attaquant laitier français, dont le siège est à Laval et la propriété du capital entièrement dans les mains de la famille Besnier, le fondateur ayant commencé en collectant les bidons de lait dans les fermes mayennaises) et Parmalat (le fleuron de l’économie italienne, sur la défensive).

Voici ce qu’écrivait Mathilde Golla le 28 mars sur le site du Figaro : Parmalat : Lactalis assure avoir agi correctement

Plus intéressante est l’analyse de Thierry Pouch, responsable du Pôle Economie et Politiques Agricoles à l’Assemblée Permanente des Chambres d’Agriculture (APCA), dans La Lettre économique (n° 306, avril 2011) :

Bataille transalpine de titans autour de l’agroalimentaire

L’incertitude engendrée par la crise mondiale avait refroidi les ardeurs des entreprises en matière d’OPA amicales ou inamicales. La reprise des opérations de fusions-acquisitions en 2010 indique que les firmes ont repris confiance. Ce regain d’OPA ne laisse pas indifférent les gouvernements qui, pour certains, entendent défendre coûte que coûte l’outil national de production. Resurgit alors la notion de « patriotisme économique », dont l’un des aspects les plus visibles est la bataille qui s’est engagée autour de l’italien Parmalat.

 

Si les opérations de fusions-acquisitions d’entreprises (OPA) ont été en 2010 moins nombreuses dans l’UE comparativement aux États-Unis, elles traduisent un regain de confiance des entreprises dans la solidité de la reprise économique.

Certaines firmes avaient constitué durant la crise quelques réserves financières pour contenir les incertitudes liées à la rapidité de la reprise, et pour se préparer au redémarrage de leur activité. De plus, à ces réserves accumulées durant trois ans s’ajoutent désormais les bons résultats de l’année 2010. De quoi inciter certaines d’entre elles à absorber le ou les concurrents directs, afin d’atteindre une taille critique. C’est précisément ce qui se passe dans le secteur de l’agroalimentaire européen.

 

L’italien Parmalat, géant des produits laitiers et des boissons à base de fruits, est l’objet depuis quelques semaines d’une OPA inamicale lancée par le groupe français Lactalis, leader européen sur le marché des mêmes produits laitiers.

Les intentions de Lactalis ont fini par faire réagir l’Italie, et plus précisément le Ministre de l’économie, Giulio Tremonti, et la Confindustria, le patronat italien. L’affaire est d’autant plus préoccupante pour l’Italie qu’elle vient de voir passer son joaillier Bulgari sous la coupe de LVMH. Il s’ensuit un retour fracassant du « patriotisme économique », celui qu’avait précisément avancé en 2005 Dominique de Villepin, alors Premier Ministre français, lorsque celui-ci contrecarra le rachat de Suez par l’italien Enel.

Giulio Tremonti tente de mobiliser tous les acteurs concernés (firmes, banques, financiers divers) pour empêcher le français Lactalis d’absorber Parmalat, considéré comme le fleuron de l’économie italienne. Il est même question de provoquer une scission du groupe agroalimentaire, les activités « internes » étant prises en charge par des investisseurs nationaux, les activités « externes » par Lactalis (en attendant, l’AG des actionnaires a tout simplement été reportée). Mais dans la mesure où Parmalat est dotée d’une valorisation boursière de quelque 5 milliards d’€, la facture risque d’être lourde pour les italiens, et pour quelques entreprises déjà très endettées.

 

Ce retour du « patriotisme économique » fait écho à celui suggéré en 1933 par le célèbre économiste anglais, John Maynard Keynes. Il soulignait que l’internationalisation du capital n’était pas une réussite et que, face à l’influence des capitaux étrangers, il était indispensable de protéger les intérêts économiques nationaux. Ce que Keynes fustigeait, c’était le calcul financier de court terme. Le propos tenu par

Keynes est arrivé jusqu’à nous, et notamment au regard des menaces que fait peser la mondialisation sur les outils de production nationaux.

 

Sauf que, dans l’affaire Parmalat/Lactalis, il conviendrait d’évaluer et par conséquent de distinguer ce qui relève de la stricte logique financière de court terme, que condamnait le professeur de Cambridge, de ce qui anime Lactalis en matière de stratégie industrielle. Dans ce second cas, une opération de fusion-acquisition peut déboucher sur la formation d’un groupe d’envergure mondiale, capable d’affronter la concurrence et par conséquent de répondre aux intérêts économiques…en l’occurrence européens. Si l’UE entend encore jouer un rôle dans l’économie mondiale, renforcer sa puissance industrielle en constitue l’un des instruments possibles.

Une stratégie qui ne doit évidemment pas s’effectuer au détriment ni des salariés ni de l’emploi.

 

Cet article est le 221ème publié sur ce blog dans la catégorie AGRICULTURE et PAC.

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10 avril 2011 7 10 /04 /avril /2011 11:27

Créer une organisation transversale des producteurs

Les producteurs de lait se débattent dans des problèmes économiques dont ils ne savent comment s’en sortir. Le ministre de l’agriculture, Bruno Le Maire, met en œuvre la Loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche (LMAP).
Voici ce qu’on peut lire sur le site du ministère :

Adoptée le 13 juillet 2010, la loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche comporte huit titres pour un total de 96 articles. Pour Bruno Le Maire, ministre de l’alimentation, de l’agriculture et de la pêche, ce texte « doit permettre, au sortir de la crise terrible qu’ont connue les agriculteurs et les pêcheurs en 2009, de redonner un élan à celle qui reste la première agriculture en Europe. »

Cette loi s’inscrit dans une stratégie globale pour construire une nouvelle donne. Elle fixe comme enjeu majeur de garantir aux consommateurs une alimentation sûre et de qualité et poursuit deux objectifs : garantir le revenu des agriculteurs et des pêcheurs, et leur faire gagner en compétitivité. Elle sera, au niveau national, prolongée par des plans de développement des filières laitière, de l’élevage, des fruits et légumes, et des grandes cultures. Au niveau communautaire, elle trace la vision de la France pour la PAC de demain, celle d’une agriculture performante et durable sur des marchés régulés.

 

Filière laitière : Bruno Le Maire demande aux industriels de proposer des contrats équitables

Bruno Le Maire, Ministre de l’Agriculture, de l’Alimentation, de la Pêche, de la Ruralité et de l’Aménagement du Territoire, s’est rendu ce 1er avril à Fleury et à La Lande d’Airou dans la Manche à l’occasion de l’entrée en vigueur, dans le secteur laitier, des contrats prévus par la loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche du 27 juillet 2010 et de la nouvelle gouvernance par bassins dans cette filière.

 

A cette occasion, le ministre a rappelé les objectifs de la contractualisation qu’il devait porter à Aurillac devant l’Assemblée générale de la Fédération nationale des producteurs de lait (FNPL) le 17 mars dernier et a annoncé la nomination du futur médiateur des contrats Pierre LEPETIT, Inspecteur général des Finances.

 

Bruno LE MAIRE a également déclaré devant Henri BRICHART, Président de la FNPL, et les 300 producteurs de lait réunis à cette occasion : « Certains des contrats qui vous été proposés ne conviennent pas. Les industriels doivent revoir leur copie. Le médiateur que je vais nommer devra s’assurer du caractère équitable des contrats qui sont un instrument de liberté et de visibilité pour les producteurs. Je suis notamment choqué de voir proposé la réduction du droit d’association syndicale. »

 

Lors de ce déplacement du ministre, le 1er avril, dans la Manche, les membres de l’Association des producteurs de lait indépendants (Apli) ont pu avoir un très court entretien (deux minutes) avec Bruno Le Maire, grâce à la médiation efficace du député-maire d’Avranches, Guénhaël Huet.

 

APLI-La-Chapelle-d-Andaine-201009-003.jpgAndré Lefranc (Apli 50) a fait savoir qu’ils avaient remis au ministre une lettre et trois documents :

1-      1 -  Un document prouvant les anomalies, les disfonctionnements  et les pressions exercées sur le terrain.  Des témoignages venant de toute la France et signés par des producteurs démontrent clairement que le comportement observé est identique chez la majorité des transformateurs.

2-       Un document LMA (Loi de Modernisation Agricole ou Laminoir Moderne de l’Agriculture).  A partir d’analyses juridiques de contrats proposés ou de statuts de certaines coopératives, de situations en marge de toute légalité. Il dénonce la pression exercée y compris par des services de l’Etat, pour obliger les producteurs à signer le contrat proposé et une version moderne du vil manant du Moyen âge qu’on cédait ou échangeait avec la terre, le producteur laitier. En remerciement du droit qu’il lui a accordé de pouvoir suggérer comment gérer son exploitation et de sa gratitude envers son suzerain, le Transformateur, à prendre la décision, il se doit de produire à merci. Surtout ne parlons pas de mots indécents comme rémunération, coût de production…

3-       Un document Office du lait avec l’ OP France Milkboard qui est notre solution pour gérer la filière laitière. 

André Lefranc a noté une confidence du ministre selon laquelle l’office du lait Européen est sûrement l’avenir à long terme mais qu’il doit gérer le court terme. Par ailleurs, il informe qu’une première analyse des propositions de contrats de 5 groupes industriels a été réalisée par les journalistes de L'Eleveur laitier et sera publiée dans le numéro du mois d'avril du mensuel.

Pour sa part, le président de l’Apli, Pascal Massol, s’est exprimé ainsi dans l’entretien accordé à Jean-Paul Louédoc (Ouest-France, 9 avril) :

Mayenne Apli 180110 007Contrats lait : « Attention danger » dit l'Apli

 

Comment réagissez-vous aux contrats proposés par les laiteries privées à leurs producteurs ?

Depuis deux ans, nous disions aux éleveurs qu'ils n'avaient aucun intérêt à aller vers la contractualisation. On a aujourd'hui la preuve, après la lecture des contrats rédigés par les laiteries à la demande du ministre de l'Agriculture, que les éleveurs n'ont rien à y gagner et tout à perdre. Lactalis, qui ne voulait pas de la contractualisation, a forcé le trait en faisant dans la provocation. L'entreprise peut rompre le contrat en cas de grève, elle remet en cause l'appartenance à un syndicat et exige de donner son avis lorsque l'exploitant cède sa ferme à un collègue. Je ne peux pas imaginer que des producteurs puissent signer un document pareil. Je rappelle que la FNPL (Fédération nationale des producteurs de lait), affiliée à la FNSEA, a largement participé à l'élaboration de la contractualisation. Comme dit l'adage : qui sème le vent récolte la tempête.

Vous craignez une véritable « Berezina » pour les producteurs ?

Oui, à l'image de ce qui se passe en Suisse, où la contractualisation a servi de modèle pour la France. C'est l'arrivée du néolibéralisme dans l'agriculture. Je ne me fais aucune illusion : les coopératives laitières appliqueront les mêmes règles que les laiteries privées à leurs producteurs. En cas de litige dans le cadre d'un contrat individuel, vous devrez aller devant les tribunaux et ça peut prendre des mois, voire des années. Entre-temps, à qui allez-vous livrer votre lait ? Nous avons toujours dit à l'Apli qu'il fallait que les producteurs s'organisent avant que les laiteries nous organisent. Et c'est, malheureusement, ce scénario-là qui se réalisera si les éleveurs ne réagissent pas.

Comment organisez-vous la riposte ?

On continue à participer au montage de l'office du lait, où l'Apli est présente à travers France Milkboard, l'organisation de producteurs de l'EMB. Les militants de la Confédération paysanne, qui souhaitent comme nous des associations de producteurs pluralistes, pourraient rejoindre individuellement France Milkboard ou alors créer leur propre organisation via leur partenaire européen. Via Campesina. Notre objectif est de créer une OP transversale rattachée à aucune laiterie et capable de regrouper un tiers des producteurs pour peser dans les négociations. Ce sera même une organisation transfrontalière car des producteurs wallons veulent rejoindre l'Office du lait. Nous allons obliger l'Europe à légiférer là-dessus.

Cet article est le 220ème publié sur ce blog dans la catégorie AGRICULTURE et PAC.

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9 avril 2011 6 09 /04 /avril /2011 21:59

Le Québec montre la stratégie à suivre par région du globe

 

Frédéric Paré*, qui coordonne la coalition pour la souveraineté alimentaire au Québec, met à notre disposition des informations pertinentes. Par exemple, un court article qui résume ce que signifie la souveraineté alimentaire.

Sa force ? Repositionner les choix stratégiques agricoles au niveau régional pour faire face à l’instabilité des marchés commerciaux internationaux.

Ses armes ? Adapter les modes de production, sécuriser les droits d’accès au foncier, voir lancer une réforme agraire. Un brin utopique peut-être, elle a le mérite de replacer l’essence même de l’agriculture au cœur des débats : l’agriculture est là pour nourrir des populations avant de jouer un rôle commercial et stratégique.

 

Audrey Duplat, le 7 avril, dans Journal Europa, décrit ainsi la Souveraineté alimentaire

 

Souveraineté - du latin superus, qui signifie «supérieur» - est le droit exclusif d’exercer une autorité politique sur une zone géographique ou sur un groupe de peuples. Alimentaire, du latin alimentarius, est relatif à la manière de s’alimenter, à la nourriture.

Logiquement, donc, la souveraineté alimentaire est un «droit international qui laisse la possibilité aux pays ou aux groupes de pays de mettre en place les politiques agricoles les mieux adaptées à leurs populations sans qu’elles puissent avoir un impact négatif sur les populations d’autres pays». Le concept est posé sur la table internationale au Sommet Mondial de l’alimentation, en 1996, par Via Campesia (Mouvement Paysan International) comme un contre-pied aux politiques agricoles et commerciales néo-libérales, et il n’a pas fini de faire parler de lui.

Les droits des peuples

Car se nourrir reste pour beaucoup un luxe dépendant tant de l’offre alimentaire dont dispose un pays, que de la difficulté d’y accéder. Il y a deux semaines, la FAOdisait tout haut ce que certains appréhendent depuis des mois : une hausse des prix des denrées alimentaires est à craindre, faisant planer l’ombre d’une crise alimentaire, comme en 2008. En cause? Ce bon vieux changement climatique? L’éternelle violation de l’accès à Notre Mère la Terre? L’organisation des marchés agricoles soutenue par l’OMC? Un «metlingpot» dirait un bon belge. Rien de tout cela, un simple "accident" dirait un libéral impénitent. Une situation inacceptable, c’est entendu.

Que le monde politique se donne bonne figure en annonçant depuis l’an 2000 une volonté de réduire la pauvreté et la faim- l’un des huit Objectifs du Millénaire – n’est pas à dénigrer. Mais que plus d’une décennie se soit écoulée et que le nombre de sous-alimentés se soit accru, là le bât blesse. Sur 24.000 personnes qui meurent de faim chaque jour, 10.000 sont des enfants (FAO, 2010). A ce rythme, la Belgique est décimée en 400 jours. La sécurité alimentaire ne suffit pas, il faut un appui politique local pour faire entendre les «droits des peuples»: la souveraineté alimentaire. Sa force? Repositionner les choix stratégiques agricoles au niveau régional pour faire face à l’instabilité des marchés commerciaux internationaux. Ses armes ? Adapter les modes de production, sécuriser les droits d’accès au foncier, voir lancer une réforme agraire. Un brin utopique peut-être, elle a le mérite de replacer l’essence même de l’agriculture au cœur des débats : l’agriculture est là pour nourrir des populations avant de jouer un rôle commercial et stratégique.

Agriculture à visage humain

Cela n’est pas si simple, car même prise dans son plus simple élément, l’agriculture actuelle est une jonglerie perpétuelle. Le paysan endosse un rôle complexe dans lequel il doit fournir (de la nourriture), protéger (l’environnement), maintenir (l’emploi), participer (adaptation aux changements climatiques) et lutter (expropriation). Tout en répondant aux enjeux économiques internationaux. Et pas question de croire que la situation est limitée aux pays en développement. En 50 ans, la part des agriculteurs français est passée de 1 pour 3 personnes actives à 1 pour 30.

La nécessité d’une réforme du système est imminente, à l’instar de la présentation des nouvelles lignes directives de la Politique Agricole Commune (PAC) par le commissaire européen à l'agriculture Dacian Ciolos (prévue en 2013). Après cinquante ans, les objectifs de la PAC ne répondent plus ou mal aux enjeux de la société. Il se sera plus question d’une économie de marché per se, mais d’un retour à l’agriculture paysanne et soucieuse de l’environnement. Au Nord comme au Sud, le monde agricole est en quête de l’essentiel: subvenir aux besoins de la population. Élémentaire mon cher ...

 

Voir aussi État, bien commun et souveraineté alimentaire (Frédéric Paré, 6 octobre 2010)

* Frédéric Paré est le Coordonnateur de la Coalition pour la souveraineté alimentaire. Il s’agit d’un jeune regroupement de 80 organisations de la société civile dont l’objectif premier est de promouvoir des mesures publiques (nationales et internationales) visant le droit de tous les pays à établir leurs politiques agricoles et alimentaires dans l’optique de la réalisation des droits humains fondamentaux reliés à l’alimentation (droits à l’alimentation, droit à la santé, droit au développement, droit à un travail décent, droit à un environnement sain) et du droit des pays à fonder leur sécurité alimentaire sur leur propre territoire et ressources.

 

Cet article est le 219ème publié sur ce blog dans la catégorie AGRICULTURE et PAC.

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6 mars 2011 7 06 /03 /mars /2011 23:52

Appel à l’intelligence collective et à la participation des citoyens

 

Saluons l’initiative de la Mission Agrobiosciences - née de la volonté de la Région Midi-Pyrénées et du ministère de l’agriculture - d’organiser chaque année les Controverses de Marciac, dans le Gers. Voir les Actes des Controverses de Marciac.

 

En 2011, 17èmes Controverses de Marciac qui auront lieu les 3, 4 et 5 août.

Pour en savoir plus, télécharger le dossier de présentation des 17èmes Controverses de Marciac "La PAC et la société européenne : ouvrons le champ des questionnements, libérons les manières de faire"

 

Controverses de Marciac co-organisées par la Mission Agrobiosciences et la Communauté de Communes Bastides et Vallons du Gers.
 
La PAC et la société européenne : ouvrons le champ des questionnements, libérons les manières de faire

 

Dans le cadre de la réflexion actuellement menée par la Commission européenne autour de « La PAC à l’horizon 2020 » , les prochaines Controverses de Marciac proposent de contribuer au débat sur les devenirs agricoles, alimentaires et territoriaux européens.
Au-delà des approches techniques, sectorielles ou financières, elles ouvrent le champ des questionnements et des préoccupations de l’ensemble de la société européenne, depuis l’accès à l’alimentation jusqu’au devenir de la ruralité, en passant par les modèles de production, l’environnement, la santé, les emplois, la culture ou encore le rapport au vivant.
L’objectif n’est pas seulement de parler "de" la PAC, mais que celle-ci "nous " parle. Une visée qui nécessite d’ouvrir le champ des questionnements et de libérer les manières de faire et de penser.

 

Des contributions ouvertes à tous qui alimentent un forum dès février 2011,
Des cercles d’échange pour favoriser la prise de parole de chacun,
Des débats en plénière,
Une grande diversité de participants et d’approches,
Des séminaires croisés entre différents groupes de réflexion européens,
Des rencontres avec des auteurs d’ouvrages, des réalisateurs de documentaires,
Des regards décalés, des apéritifs sous les platanes, des concerts…

 

Dès maintenant, un exercice de co-construction
Tous les citoyens qui le souhaitent sont invités à faire parvenir à la Mission Agrobiosciences, sous la forme d’un texte (cf modalités pratiques), ce qui leur paraît être le défi majeur de la PAC de demain, les points qu’il convient de mettre en débat, et/ou un court commentaire critique sur la communication élaborée par la Commission Européenne.
Ces contributions nourrissent un forum spécifique sur le site de la Mission Agrobiosciences et feront l’objet d’une synthèse restituée lors des Controverses.

 

Cet été, une intelligence collective
Le succès et l’originalité des Controverses de Marciac résident depuis longtemps dans un dispositif permettant à chacun de s’exprimer, notamment à travers les « cercles d’échanges ». Ouvertes à tous les citoyens, elles favorisent la confrontation des regards, la reformulation des questions, la mise à jour des dissensus comme des points de convergence, grâce au va-et-vient constant entre les exposés de spécialistes, les apports du public et le retour critique d’observateurs.
Par ailleurs la diversité des formes d’échanges et des participants – des personnalités scientifiques, politiques et professionnelles aux côtés d’agriculteurs, de citoyens et de membres associatif, à l’échelle locale, nationale et internationale - permet de saisir l’éventail des savoirs, des pratiques et des réalités de terrain.

 

Un laboratoire d’idées
Le croisement des regards s’enrichit cette année d’une confrontation publique avec les participants de trois autres forums européens sur l’agriculture et les territoires, désormais jumelés aux controverses de Marciac :
la Magyar Agrarakadémia (Hongrie), le Foro de l’Institut des Etudes Sociales Avancées de Cordoue (Espagne) et les Rencontres de Gembloux (Belgique).

Appel à contribution : modalités pratiques
 Pour télécharger la communication de la Commission européenne, cliquer ici.
 Les contributions ne doivent pas excéder une page (environ 2000 signes)
 Date-limite d’envoi : 30 avril 2011
 Adresse d’envoi : lucie[@]agrobiosciences.com. Tél : (0033) 562 881 450.

 

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5 mars 2011 6 05 /03 /mars /2011 23:38

Projet de l’Apli ou industrialisation de l’agriculture ?

 

L’association des producteurs de lait indépendants (Apli) a organisé trois réunions en Mayenne, le 28 février à Javron, le 2 mars à Congrier et le 3 mars à Ernée, dans le but d’expliquer aux producteurs ce qu’est l’office du lait. Je suis allé à Ernée, comme j’étais allé à Saint-Hilaire-du-Harcouët, dans la Manche (voir Office du lait, gestion européenne de l'offre, contrats avec les laiteries - 23 janvier 2011).

 

Apli-Ernee-30311-002-T.jpgVenu en voisin du département du Maine-et-Loire (ferme près d’Angers, 90 hectares, 350 000 litres de lait, couple), Paul de Montvalon a pris le temps d’expliquer sa position en tant que président de l’office du lait, qui n’est encore qu’un projet, mais il prendra une grande importance quand il sera mis en place.

Je rapporte ici l’essentiel de son intervention prononcée devant une centaine de producteurs de lait.

 

Le but, c’est réunir tous les producteurs de lait. Notre projet est le seul projet européen. La filière laitière sera européenne ou ne sera pas. L’EMB (European Milk Board), qui regroupe les organisations nationales telles que l’Apli, permet les relations faciles avec les producteurs européens.

 

Deux possibilités :

- Industrialisation de l’agriculture, avec des conséquences terribles.

- Filière laitière durable et équitable avec tous les producteurs, en misant sur la qualité.

 

La première option a été choisie par certaines organisations professionnelles, en France et dans d’autres pays proches (contractualisation, énormes coopératives).

Evolution prévisible : 77 000 producteurs aujourd’hui en France, 50 000 en 2015, 20 000 en 2020-25). Conséquences irréversibles. En Mayenne, département laitier mais avec une production moyenne faible par exploitation, il faudra augmenter beaucoup la production par UTH. Disparition de nombreux producteurs.

 

Expérience de la contractualisation : Suisse (voir Réunions Apli : Paul Ecoffey, producteur de lait en Suisse, a témoigné - 22 janvier 2011). 

Jusqu’en 2006, production de lait pour les besoins du pays. En 2006, les industriels demandent une augmentation du quota laitier suisse (+ 2%) pour répondre aux besoins des consommateurs suisses. Pas d’impact sur les prix.

En 2008, même opération (+ 2%) à la demande des industriels et de la Fédération laitière suisse, sans incidence sur le prix du lait.

En 2009, les mêmes demandent l’abolition des quotas au 1er avril, la libéralisation du marché, la contractualisation, les organisations de producteurs liées aux industriels, des augmentations de volumes sans baisse de prix. La majorité des producteurs a donné son accord, pensant que cela se passerait comme en 2006 et 2008.

En réalité, c’était faire entrer le loup dans la bergerie. L’augmentation de 2% des volumes a été suivie d’une forte baisse des prix. De 600 euros les 1000 litres (pour un coût de production de 600 euros) à 420 euros.

La Fédération suisse laitière a envoyé les producteurs dans le mur. Les prix ont baissé sous la pression des industriels. Les Suisses, qui sont pourtant les meilleurs en génétique, ont de nombreux producteurs qui arrêtent la production. Seules les AOC, qui décident indépendamment, ont limité la casse.

A partir du 1er février 2011, segmentation du marché, trois quotas : quota A  marché national (420 euros), quota B marché européen (320 euros), quota C marché mondial (300 euros, il a été à 150).

Obligation de produire le quota C, sinon les quotas A et B diminuent autoritairement de 14%.

Actuellement, le prix moyen payé est 380 euros (coût de production : 600 euros). Les producteurs sont obligés de produire à perte, en important des fourrages.

C’est le système qui est prévu pour la France (triple quota, en limitant à 5 à 10% le quota C au début, 70% pour la A, 20% pour le B). Puis les excédents augmentent, le quota C aussi et le A diminue. C’est le système en cours (40% en C) pour les producteurs de Roquefort en Aveyron. La production augmente, le prix baisse.

Un homme politique, producteur de lait, a demandé la gestion nationale par les producteurs (une seule organisation de producteurs OP). Actuellement, en Suisse, sur l’équivalent de 5 départements français, il y a 38 OP, qui se font la guerre, poussées par les industriels. Sa motion a été combattue par les industriels et la fédération laitière. Les parlementaires suisses l’ont votée. Il reste à connaître la décision du Conseil d’Etat.

Si, en France, on ne fait rien, on subira le même sort que les Suisses.

 

L’industrialisation de l’agriculture : l’exemple du Danemark.

Quota moyen par entreprise : 1,1 million de litres (en Mayenne : 175 000 litres). Environ 10% d’exploitations en moins chaque année.

Jusqu’en 2007, le revenu était de 70 000 euros pour 110 vaches. En 2008, il tombait à 3 000 euros et en 2009, - 125 000 euros. Cela ne pourra continuer ainsi.

Les charges opérationnelles ont augmenté de 80% en deux ans. Le niveau d’emprunts est 2,6 millions d’euros. Les frais financiers (35 euros par 1000 litres en France) sont à 150 euros au Danemark. Sachant que le prix moyen de vente est 290 euros, il reste 140 euros pour toutes les charges et les salaires.

Le prix du foncier est très élevé (jusqu’à 32 000 euros l’hectare de terre). La durée d’amortissement des prêts est augmentée (prêts de carrière : paiement seulement des intérêts).

La filière laitière danoise est emportée dans une dérive de type subprime. Impossible de faire demi-tour. Une coopérative (ARLA) collecte 90% du lait danois. Elle veut coloniser l’Europe du nord (Suède, Allemagne). C’est l’intégration complète. Mais il y a 200 exploitations à vendre qui ne trouvent pas de repreneurs. Les Pays-Bas ont le même schéma que le Danemark.

C’est ce qui va nous tomber sur la tête, si on ne fait rien pour s’y opposer.

 

Aux USA, le système est dérégulé depuis 40 ans. Ils veulent le réguler (voir Politique laitière : les USA vers une gestion flexible des volumes de lait - 27 janvier 2011), alors que l’Europe fait l’inverse. Les producteurs qui ont régulé sont pénalisés. Comprenne qui pourra ! Au Canada, le prix du lait est indexé sur les coûts de production (620 euros les 1000 litres). Voir Eloge du système agricole canadien par Marcel Groleau (Québec, lait) - 25 janvier 2011.

 

Face à l’évolution des coûts de production (tourteau de soja à 450 euros la tonne) en France et des prix du lait, les producteurs ont rendez-vous avec l’Histoire. Ils vont montrer s’ils sont capables de se prendre en mains.

En 1983-84, une seule erreur a été faite, celle de laisser la gestion des volumes aux industriels et aux coopératives. Celles-ci se sont spécialisées dans la fabrication de beurre et poudre de lait, ce qui les incite à spéculer sur le marché mondial.

 

La régulation, c’est quoi ?

Ce n’est pas constituer des stocks afin d’équilibrer le marché. C’est intervenir avant les industriels. Ceux-ci ont un but : acheter la matière première le moins cher possible. Pour cela, ils ont intérêt à mettre le maximum de lait sur le marché (système de double ou triple quota) et à faire jouer la spéculation (qui est responsable de 70% de la flambée des matières premières) sur le beurre et la poudre de lait, par le biais du stockage. Ne pas se fier au coût marginal, qui est utilisé pour marginaliser les producteurs.

Sodiaal et Laïta (statut coopératif) veulent le double ou triple quota et, ce qui les intéresse c’est le prix du beurre et de la poudre de lait. En Nouvelle-Zélande, 90% du lait est transformé en beurre et poudre pour la spéculation.

Le directeur de la branche laitière de France Agrimer est aussi directeur de Sodiaal. Il joue avant-centre et a le rôle d’arbitre. Au niveau européen, il a été démontré que les statistiques d’Eurostat étaient fausses (Rasmussen).

Ceux qui signeront un contrat avec double quota s’engagent pour la vie. Le marché à terme du beurre et de la poudre de lait, contrairement à celui des céréales, est réservé aux industriels et aux financiers.

Il faut réguler avant les industriels et les empêcher d’envahir les pays en développement avec de la poudre de lait qui concurrence les commerçants locaux. Les stocks, dont le coût est énorme et qui ne rapportent qu’aux stockeurs, sont une mauvaise solution.

Ce qu’il faut, c’est gérer les volumes et garder les producteurs.

 

L’office du lait

L’office du lait, c’est l’agence de régulation européenne, qui tient compte des coûts de production (prix référent en Europe) et maintient les prix du lait à l’intérieur d’un « tunnel » (système European Milk Board), la fluctuation étant contenue entre + 1% et – 1%. C’est le même et unique prix pour toute l’Europe. Ce système est moins rigide que le système canadien.

Momagri et Arc, qui rassemblent diverses organisations, préconisent ce système de régulation et souhaitent que son principe s’applique à toutes les matières premières agricoles. Jusqu’à présent, il n’y a eu que du stockage (pas de régulation) sans résultat.

L’objectif est d’obtenir des lois, mais c’est difficile parce que les spéculateurs ne veulent pas de changement. Il faut faire pression sur les responsables politiques. S’il n’y avait pas eu la grève du lait, la contractualisation serait en place.

L’objectif, c’est de changer de système, ce n’est pas d’affaiblir la FNSEA ou la FNPL. Un office du lait est en création dans chaque pays de l’Union européenne. En dehors de la France, il n’est pas question de contractualisation. Nous allons servir de cobayes.

 

Les allemands ne sont pas en meilleure situation que nous. La méthanisation qui leur apporte un complément de revenu, ne concerne que 4% des exploitations et 2% des exploitations laitières. En Allemagne, la moyenne des troupeaux est 45 vaches. Les gros troupeaux et la méthanisation sont surtout dans l’est, mais certains vont arrêter le lait. Ils sont nombreux à adhérer au BDM, l’équivalent de l’Apli.

Sur l’ensemble de l’Allemagne, les adhésions à l’office du lait sont plus nombreuses qu’en France (26% contre un peu moins de 10%).

Le CNIEL n’est pas une interprofession. Contrairement à la Confédération paysanne, on ne veut pas y entrer, car on ne veut pas cautionner la cogestion entre les organisations professionnelles et les pouvoirs publics.

Nous voulons une véritable interprofession dans laquelle la grande distribution doit avoir une part de responsabilité. L’étude (lait UHT) sur la répartition des marges a montré que 52% de la marge est absorbée par les industriels, le reste c’est surtout la grande distribution.

Mais il est essentiel que les consommateurs soient partie prenante de l’interprofession. Dans le lait, actuellement, il y a beaucoup trop d’huile de palme (seconde composante dans Lactel), ce qui risque d’être une catastrophe pour la santé (crise de la vache folle à partir des produits laitiers ?). Les consommateurs devront pouvoir adhérer à l’office du lait en payant une cotisation. Les pouvoirs publics ne peuvent se désintéresser de l’interprofession, ce qu’ils font actuellement.

L’organisation de producteurs est France Milkboard et, au niveau européen, Milkboard United. L’OP doit être gérée par les producteurs (pas par des administratifs) et être ouverte à tous les producteurs. Tous les adhérents voteront pour élire leurs représentants. La démocratie, c’est l’élection. Rien à voir avec les Chambres d’agriculture qui sont des organismes administratifs.

Il sera appliqué une forte limitation du cumul des mandats. Je n’en ai qu’un, ce qui est amplement suffisant pour être efficace. Il y aura incompatibilité entre mandats dans la coopérative et dans l’organisation de producteurs. Le nombre de pouvoirs sera limité à un pouvoir par votant.

L’élection se fera au niveau du département, avec un autre vote au niveau du bassin laitier, afin d’éviter de trouver les mêmes. Toutes les familles de pensée seront représentées au conseil d’administration.

 

Concernant les Organisations de producteurs (OP), il y a deux projets : l’OP par industriel (les producteurs n’ont aucun pouvoir) et l’OP totalement indépendante (remettre les producteurs au centre de la filière).

Dans notre projet, rien ne change dans les relations entre les producteurs et leur laiterie, coopérative ou non. Tous les industriels (statut coopératif ou non) sont ensemble pour négocier un contrat collectif (même prix de base, même prix en fonction de la qualité, même gestion des volumes). On a besoin des industriels et de leurs groupements, mais il ne faut pas leur donner la clé des volumes. Il faut redonner de l’importance aux groupements de producteurs. Mais il ne faut pas accepter la cogestion, ni les doubles quotas.

Certains s’intéressent à ce que nous faisons. Le seul risque, c’est de réussir car, si nous laissons faire, nous sommes certains de tout perdre.

 

Concernant les contrats au 1er avril 2011, l’industriel a l’obligation d’en proposer à chaque producteur, mais les producteurs n’ont pas l’obligation de le signer. Il ne faut pas signer. Nous allons nous constituer en organisation de producteurs (au printemps) et négocier un contrat collectif. L’objectif est d’atteindre un minimum de 20% de producteurs.

 

Cet article est le 217ème publié sur ce blog dans la catégorie AGRICULTURE et PAC.

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4 mars 2011 5 04 /03 /mars /2011 21:43

Assurer la sécurité alimentaire en Afrique sub-saharienne

 

Arthur Riedacker a adressé à ses amis, le 3 janvier, non seulement ses vœux 2011, mais aussi un récapitulatif des travaux dans lesquels il est impliqué, sachant qu’il a fait valoir ses droits à la retraite (directeur de recherches INRA) après avoir été l’auteur de très nombreuses publications (voir Toutes Publications A. Riedacker).

Notre ami, que j’ai le plaisir de rencontrer lors des congrès et universités d’été du Mouvement Républicain et Citoyen (MRC) - il avait commencé à militer au PSU (dans la minorité opposée à Rocard), il y a plus de quarante ans - est chargé d’organiser la conférence-atelier qui aura lieu en juin 2011 à Cotonou (Bénin).

 

Conférence atelier sur la sécurité alimentaire, le développement durable et le climat, en Juin 2011* à Cotonou. Voir les informations en Français.

 

Objectifs de la Conférence : accroître la sécurité alimentaire des pays de l’Afrique Sub-saharienne, tout en limitant, d’ici 2050, les augmentations des émissions de gaz à effet de serre et en s’adaptant aux variabilités et aux changements climatiques.

 

Ce sera une activité majeure que d’organiser cette rencontre en 2011. C’est seulement en 2009, à Copenhague, 17 ans après l’accord sur la Convention sur le changement climatique et la conférence de Rio que se tint, dans ce cadre, la première journée sur l’agriculture. Jusqu’alors les débats avaient été monopolisés, ou presque, par les spécialistes des énergies fossiles et de la maîtrise de l’énergie.

 

Les petites îles n’acceptèrent de considérer également la préservation des forêts dans la lutte contre le changement climatique qu’en 2005, et cela pour la période post 2012 ! L’Institut Oikos avait alors insisté sur le fait qu’il ne devait pas y avoir d’accord post Kyoto sur le climat sans prise en compte de la sécurité alimentaire (le deuxième objectif ultime de cette convention) donc de l’agriculture.

 

Depuis, cette approche fait son chemin, malgré les inévitables pesanteurs et interférences tentant à faire oublier, au Nord, ce problème majeur que reste la sécurité alimentaire notamment en Afrique subsaharienne où la population va passer de 1 milliard à 2 milliards d’habitants d’ici 2050. Il faut espérer qu’à Soweto, en Afrique du Sud, où se tiendra fin novembre 2011 la prochaine conférence des parties sur le climat, on puisse aboutir à un accord qui prolongera le Protocole de Kyoto (avec les Etats Unis !) tout en incluant des actions pour l’agriculture dans les pays n’ayant pas encore effectué leurs révolutions agricoles, notamment en Afrique sub-saharienne.

C’est l’un des buts de cette conférence de Cotonou. Il serait en effet criminel d’appliquer à ces pays les recommandations de modération d’utilisation des intrants parfois justifiée dans les pays industrialisés : dans ces pays c’est l’insuffisance des intrants qui limite la production sur les terres déjà cultivées, dégrade les sols et interdit une agriculture durable. Elle empêche également la réduction des jachères ce qui entraîne inévitablement des conversions des prairies et des forêts au fur et à mesure que la population croît.

 

Agir pour l’agriculture en Afrique sub-saharienne (qui ne se limite pas au Sahel !) est donc non seulement utile pour la sécurité alimentaire et les sols agricoles de ces pays, mais également pour réduire les déforestations et mises en cultures de prairies, donc pour limiter les émissions de GES (gaz à effet de serre).

 

C’est d’ailleurs la première fois dans l’histoire récente que les pays développés ont intérêt, pour eux-mêmes, s’ils veulent réellement limiter ces émissions, à s’intéresser à cette approche en Afrique. Sinon comment arrivera-t-on, comme le recommandait le G8 en 2008 à Hokkaido10, à diviser par 2 les émissions mondiales de gaz à effet de serre d’ici le milieu du 20ème siècle ? Mais qui le dit avec suffisamment de force ?

Souvent même, croyant être écologiquement correct, on prône même l’inverse de ce qu’il faudrait faire. Augmenter les rendements dans ces pays tout comme maîtriser l’énergie dans les pays industrialisés ou émergents évitera à terme d’avoir à réaliser ultérieurement des investissements beaucoup plus coûteux pour, par exemple, capter le gaz carbonique à la sortie des usines et le stocker ensuite dans la croûte terrestre !

 

C’est en Hongrie, à Szeged en mai 2010, à l’occasion de la dernière conférence sur l’agriculture et le développement durable que j’ai été chargé d’organiser cette « conférence-atelier » avec le Professeur Firmin Adjahossou (un ami de longue date) de la Faculté des Sciences Agronomiques du Bénin. Cela avec le soutien des associations scientifiques et techniques pour le développement que sont CEFORID basée à Cotonou au Bénin, l’IASDA (Association Internationale sur le Développement Durable et l’Agriculture) basée à Göttingen en Allemagne, l’Association pour l’agriculture durable de l’Université de Hisar en Inde et l’Institut Oikos (Paris France).

 

Peut-être parviendra-on à faire reconnaître et accepter de considérer, qu’après le consensus de Washington de l’après seconde guerre mondiale et le consensus de Pékin de ces dernières années, le consensus du Malawi s’impose maintenant ; c'est-à-dire le droit de subventionner raisonnablement les intrants agricoles, notamment les engrais minéraux et organiques, dans les pays pauvres… et à faire bouger le credo actuel de la banque mondiale ! Plutôt que d’acheter des droits à polluer, ne vaudrait-il pas mieux subventionner les efforts pour y réduire la jachère et augmenter les rendements agricoles. En réduisant les augmentations de surfaces cultivées on réduit les émissions de GES pour la production agricole…

D’ailleurs l’Inde et la Chine, ou l’Union européenne et les Etats Unis, ont ils demandé le droit de subventionner directement ou indirectement leur agriculture ? (…).

Pour plus de détails www.oikos-foodsecurity.org

 

* La conférence prévue du 20 au 24 Juin  à Cotonou est reportée pour permettre une meilleure préparation. Merci de continuer à nous soumettre des contributions conformément aux objectifs de cette conférence.

 

Une nouvelle résidence en Ardèche dans le village d’Olivier de Serres

 

Universite-d-ete-MRC-2010-017-T1.jpgArthur Riedacker est heureux de confier à ses amis que son domicile, désormais, est situé sur la commune où est installé le domaine historique d’Olivier de Serres, auteur du « Théâtre d’Agriculture et Mesnage des champs » (1500 pages !) écrit en 1600.

C’est le premier ouvrage d’agronomie français. Du temps des grecs l’«oikos», comme le Pradel, comprenait le plus souvent quelques arpents de terres des vignes ou des oliviers, un verger, parfois des écuries et des terres. Olivier de Serres était en quelque sorte, comme on aurait dit au temps de Xénophon, un économe, un gestionnaire de domaine. Grâce à la luzerne il put commencer à supprimer les jachères. En développant la culture du mûrier il envisageait de contribuer à la réduction des importations de soie, et ainsi de limiter ce qu’on appellerait aujourd’hui le déficit de la balance commerciale de la France d’Henri IV. Ce dernier fit planter de nombreux mûriers aux Tuileries. On reparlera de la luzerne et des mûriers. Olivier de Serres était non seulement un des premiers agronomes français, un très fin observateur, mais aussi un économiste, un environnementaliste et un humaniste. Pour plus d’information voyez le site de l’Institut Olivier de Serres, dont je suis évidemment devenu membre (voir www.olivier-de-serres.org/index.php).

 

Cet article est le 216ème publié sur ce blog dans la catégorie AGRICULTURE et PAC.

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