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  • : Michel Sorin
  • : Le MRC 53 est la structure mayennaise du Mouvement Républicain et Citoyen, qui a pour but de rassembler la gauche républicaine à partir, notamment, des idées de Jean-Pierre Chevènement, l'un de ses fondateurs, qui n'est plus membre du MRC depuis 2015. Le MRC a pris le relais du Mouvement des Citoyens (MDC) après les élections de 2002. En 2022, le MRC est devenu membre de la Fédération de la Gauche Républicaine avec quatre autres organisations politiques.
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Articles RÉCents

19 mars 2011 6 19 /03 /mars /2011 15:28

La France du nucléaire doit aussi balayer devant sa porte

 

Tout ce qui permet de clarifier le débat sur la question de l’énergie nucléaire est utile. Car, dans une vraie République, c’est le peuple qui doit avoir le dernier mot en ce qui concerne les choix énergétiques de la nation.

C’est pourquoi j’accueille avec intérêt l’article paru hier sur le site Marianne2, reprenant le texte du blog Economique et Social. Celui-ci met en cause des carences constatées au Japon, mais il ne se limite pas à cela. Il cherche à comparer avec l’organisation de la filière nucléaire française. Autrement dit, c’est un complément indispensable à l’article paru hier sur le blog du MRC 53 : Discipline, sang-froid et dignité sont une règle de vie pour les Japonais - 18 mars 2011.

Mauvaise estimation du risque sismique, technologie peu sûre, carburant dangereux, exploitant obscur de la centrale, seraient, pour le blog Économique et Social, les vraies causes d'un accident nucléaire à Fukushima.
La France étant un pays fortement nucléarisé, il est légitime de se demander quelles sont les raisons de l’échec cuisant du Japon sur le nucléaire et si ces raisons peuvent exister en France.

MAUVAISE PROTECTION CONTRE LES SÉISMES

La première chose qui choque c’est que la centrale de Fukushima était construite pour ne résister qu’à un séisme de magnitude 7. Or le séisme qui a eu lieu était de magnitude 8,9 ! Cela n’a l'air de rien, mais si l’on regarde la définition de la magnitude qui n’est pas linéaire, cela revient à avoir sous-estimé les séismes d’un facteur 80 environ. Il y a bien eu sous-estimation de la puissance possible des séismes dans cette région. Ce constat n’est pas nouveau déjà en 2006 : Ishibashi Katsuhiko faisait partie du comité d'experts établissant les normes sismiques des centrales nucléaires japonaises avait démissionné pour protester contre l’inconscience du comité. « À moins que des mesures radicales ne soient prises pour réduire la vulnérabilité des centrales aux tremblements de terre, le Japon pourrait vivre une vraie catastrophe nucléaire dans un futur proche. » Avait-il annoncé de manière presque prémonitoire dans un article daté du 11 août 2007 dans l’Herald Tribune. Tout le monde à l’époque au Japon avait ignoré ses avertissements, il a finalement eu raison.

Son avertissement était pourtant basé sur des faits avérés : en août 2005, un séisme avait affecté la centrale d'Onagawa (nord de Fukushima). Le pire est qu’il a eu raison bien avant 2011. Le 16 juillet 2007, un séisme de magnitude 6,8 a endommagé sérieusement la centrale de Kashiwazaki-Kariwa. De forts séismes ont eu lieu en mars 2007 puis en 2008.

Ishibashi Katsuhiko est sismologue et professeur à l
'université de Kobe.

WikiLeaks révèle selon le quotidien britannique Telegraph que l
'AIEA avait également averti le Japon en 2009 qu'un séisme important pouvait poser « un problème sérieux » à ses centrales nucléaires. Le gouvernement japonais n’avait pas réagit autrement qu’en créant une sorte de hot-line… Déjà en 2006 le gouvernement japonais s'était opposé à l'ordre d'un tribunal de fermer une centrale dans l'ouest en raison de sa résistance insuffisante à un séisme. L'Agence de sécurité nucléaire et industrielle Japonaise avait estimé que le réacteur était « sûr » et que « toutes les analyses sur sa sécurité avaient été effectuées de façon appropriée », indique le câble.

Rappelons que le sud de la France aussi est soumis aux séismes. Le 11 juin 1909, un séisme d’une magnitude 6 a été enregistré en France (séisme de Lambesc).

CHOIX D
'UNE TECHNOLOGIE ÉCONOMIQUE, MAIS MOINS SURE

Le réacteur de Fukushima est un réacteur à eau bouillante contrairement à ceux de la France qui sont à eau pressurisée. La différence est essentielle, car dans le cas des réacteurs français il y a un circuit primaire et secondaire. Dans le cas de la centrale Fukushima, il n’y a qu’un seul circuit fermé de refroidissement.

Ceci est moins cher car si cela évite la construction d’un circuit secondaire, mais également d’une tour de refroidissement. Cette dernière est remplacée par de l’eau de mer ce qui implique une installation en bord de mer. Bords de mer qui peuvent être frappés par des tsunamis. Dans de telles conditions, des systèmes techniques auraient dû être mis en place pour résister à une double catastrophe: séisme et tsunami.

Il est également clair que la centrale n’était pas protégée contre une double défaillance : coupure d’électricité et panne de générateur diésel. Ceci est tout à fait regrettable pour une centrale si dangereuse.

UN CARBURANT TOXIQUE

Le carburant du réacteur 3 est du MOX. Or ce combustible est une belle saleté. Composé d’uranium et de plutonium, issu de déchets nucléaires recyclés, le MOX considéré comme « bien plus réactif que les combustibles standards » par Jean-Marie Brom, ingénieur atomique, directeur de recherche au CNRS. « Le plutonium, qui n’existe pas à l’état naturel, est un poison chimique violent. Le mieux aurait été de ne pas en mettre du tout ». L’inhalation d’un micro-gramme de plutonium est suffisante pour provoquer un cancer du poumon !

Le MOX fut inventé dans les années 1960 et testé par les États-Unis qui le rejetèrent le considérant dangereux et peu rentable. À l’origine, le Japon avait prévu de fabriquer son propre MOX, mais des incidents à répétition dans son usine de fabrication avaient conduit le Japon à jeter l’éponge et un contrat de fourniture de MOX a été passé avec l’opérateur nucléaire français AREVA… Le MOX est produit par l’usine Mélox du site nucléaire de Marcoule dans le Gard qui produit 140 tonnes de MOX par an ! Sa construction fut décidée par Monsieur Jospin.

Le réacteur de troisième génération EPR que la France est en train de construire marche à l’uranium enrichi ou au MOX.

UN EXPLOITANT OPAQUE

Tepco est le quatrième producteur mondial d
'électricité, jugé très efficace avec un taux de coupure parmi les plus faibles du monde. Pourtant, comme toutes les entreprises du secteur nucléaire du monde, reste très opaque dans sa gestion des risques. Accusés de fausses déclarations dans les rapports d'inspection gouvernementales avaient poussé la direction à démissionner en 2002. En 2007, la NISA, l'Agence de sureté industrielle et nucléaire, avait estimé à 97 incidents, dont 19 critiques, les accidents dissimulés aux autorités entre 1978 et 2002. Cette constatation concernait toutes les entreprises d’électricité japonaises, mais en particulier Tepco. En juillet 2007, le séisme avait provoqué un incendie et une fuite radioactive à la centrale de Kashiwazaki-Kariwa, la plus grande du monde et gérée par Tepco. Encore une fois l’entreprise est contestée pour avoir tardé à donner des informations précises sur les deux incidents. Enfin concernant le séisme de mars 2011, Tepco est encore critiqué : elle aurait refusé l’aide des américains le 12 mars pour finalement être acculée à la demander d’elle-même plusieurs jours plus tard. Cette attitude leur a valu une remarque acide du premier ministre japonais le 15 mars : « Alors que les explosions étaient filmées par toutes les télévisions, il vous a fallu plus d'une heure pour en informer le gouvernement ». Tout est dit. Le premier ministre a également reproché à Tepco d’avoir évacué très tôt ses employés de la centrale en ne laissant que les employés des filiales de Tepco gérer l’accident ! Il avait alors conclu : « Vous êtes les seuls face à ces problèmes. Quitter la centrale est impossible. Soyez prêts à tout. Si vous vous retirez maintenant, ce sera la fin de Tepco. »

Sur ce point, nous ne sommes manifestement pas mieux lotis.

Plus d
'articles du Blog Économique et Social.

 

Cet article est le 12ème sur ce blog dans la catégorie Asie.

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18 mars 2011 5 18 /03 /mars /2011 23:53

La compagnie d’électricité Tepco, mal préparée à une crise grave

 

Le niveau d’inquiétude a baissé au Japon, même si La centrale de Fukushima fait toujours face à «d'énormes difficultés» (Libération, 18 mars).

L'opérateur Tepco a annoncé que l'électricité pourrait bientôt être rétablie pour relancer les circuits de refroidissement dans les réacteurs. Toutefois, cette entreprise est l’objet de critiques. Voir Tepco, une entreprise trop sûre d'elle-même (Le Monde, Philippe Mesmer, 16 mars).

 Ce qui est remarqué, c’est le comportement du peuple nippon. Voir Philippe Béchade* Vendredi 18 Mars 2011 dans La Fed et la Bank of Japon arrosent le marché de liquidités mais ça ne va pas refroidir la centrale de Fukushima. Extrait.

(…) Aucun communiqué ne contient les mots catastrophe, perte de contrôle des processus de fusion nucléaire, dégâts irréversibles, équipes d'intervention désemparées, activité radiologique létale. Cela ne ferait qu'ajouter au traumatisme et au désespoir.

La presse nippone évite soigneusement de se montrer plus explicite, toute comme elle évite, (par tradition culturelle) de présenter des images de victimes décédées. Les morts appartiennent à leurs proches, les exhiber constitue un outrage.

Les équipes de presse étrangère sont également surprises du sang-froid, de la dignité mais aussi de la résignation apparente de la population.

C'est une constante chez le peuple japonais : afficher son impatience ou sa colère équivaut à perdre la face, c'est un aveu d'impuissance. Dans un pays où la politesse et le respect des règles -- mais aussi de soi et des autres -- constitue une sorte d'impératif catégorique, l'incivisme, le vol, le pillage sont des déviances presque inconcevables.

La discipline dans tous les actes de la vie courante est respectée sans acrimonie : elle n'est pas perçue comme arbitraire mais nécessaire.

L'éducation à la japonaise, c'est un peu comme passer en permanence un permis de bien se conduire. Et ce n'est pas une catastrophe aussi considérable que celle du 11 mars 2011 qui pourrait excuser le triomphe du chacun pour soi et l'instauration de la loi de la jungle.

La dignité nippone, c'est ce qu'il reste quand tout le reste s'est désintégré (…).

* Philippe Béchade rédige depuis dix ans des chroniques macroéconomiques quotidiennes ainsi que de nombreux essais financiers. Intervenant quotidien sur BFM depuis mai 1995, il est aussi la 'voix' de l'actualité boursière internationale sur RFI depuis juin 2002.

En France (voir Japon : le séisme et le tsunami à l'origine d'un grave accident nucléaire - 15 mars 2011), le danger nucléaire a déclenché des réactions et des contre-réactions. .

 

Michèle Rivasi, qui maîtrise bien le sujet (elle était venue en Mayenne, à mon initiative, il y a une dizaine d’années - réunion publique à Bonchamp), actuellement députée écologiste au Parlement européen, a publié plusieurs articles sur son blog (Rue89, 13 mars, voir Michèle Rivasi).

 

Pour sa part, l'UFAL (Union des Familles Laïques) a réagi à l’organisation d’une veillée anti-nucléaire au Trocadéro. Voir, 14 mars, Veillée anti-nucIaire au Trocadéro : une insulte au peuple japonais

 

La position du MRC (17 mars) : Japon: au-delà des polémiques, assurer la protection des populations

 

Cet article est le 11ème sur ce blog dans la catégorie Asie.

 

 

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15 mars 2011 2 15 /03 /mars /2011 18:33

Un drame humain d’une ampleur exceptionnelle

 

On se doutait, au vu des premières informations concernant le séisme au Japon, le 11 mars, qu’il s’agissait d’un évènement dramatique mais on pensait que ce pays était bien préparé, ce qui est la réalité par rapport à beaucoup d’autres. Mais qui pouvait imaginer la suite ? Et, surtout, ce tsunami qui, pour la première fois de l’histoire des tsunamis, a été filmé (voir, Le Monde, 15 mars Les vidéos du tsunami, Scènes d'horreur dans le Nord-Est, Des villes sans aucun sauveteur").

 

On peut s’étonner que des centrales nucléaires aient été construites sur des zones à grand risque sismique mais se rassurer en pensant que toutes les précautions avaient été prises. Par un courriel de Jocelyne Galy, amie Facebook, j’apprends qu’en 2006, un sismologue japonais avait averti les autorités de l’insuffisance des recommandations en matière de normes sismiques concernant les centrales nucléaires japonaises. Cette information a été publiée ce 15 mars par Mediapart :

 

Japon: la catastrophe nucléaire avait été prévue

 « A moins que des mesures radicales ne soient prises pour réduire la vulnérabilité des centrales aux tremblements de terre, le Japon pourrait vivre une vraie catastrophe nucléaire dans un futur proche. » Cet avertissement est tiré d'un article paru le 11 août 2007 dans le quotidien International Herald Tribune/Asahi Shimbun (l'article est à lire ici). Son auteur est le sismologue Ishibashi Katsuhiko, professeur à l'université de Kobe (sa biographie est à lire ici).

Ishibashi Katsuhiko faisait partie du comité d'experts chargé d'établir les normes sismiques des centrales nucléaires japonaises. Il en avait démissionné pour protester contre la position du comité. Il estimait que les recommandations fixées par le comité étaient beaucoup trop laxistes.

En d'autres termes, le professeur Katsuhiko avait prévu ce qui est en train de se produire à la centrale de Fukushima. Il avait prévenu les autorités de son pays que les centrales japonaises souffraient d'une «vulnérabilité fondamentale» aux séismes. Mais ses avertissements ont été ignorés tant par le gouvernement que par Tepco (Tokyo Electric Power Company), premier producteur privé mondial d'électricité, qui exploite un tiers des centrales nucléaires japonaises, dont celle de Fukushima.

Katsuhiko a lancé son alerte en 2006, année où les normes de sécurité anti-sismiques japonaises ont été renforcées. Selon le sismologue, ce renforcement était encore très insuffisant. Les faits lui ont donné raison dès l'année suivante. Le 16 juillet 2007, un séisme de magnitude 6,8 a provoqué des incidents sérieux à la centrale de Kashiwazaki-Kariwa, la plus importante unité de production d'électricité nucléaire au monde. Cette centrale se trouve sur l'île de Honshu, la principale île du Japon, comme presque toutes les centrales nucléaires japonaises, qui encerclent les trois plus grandes villes du pays, Tokyo, Nagoya et Osaka.

Avant le séisme de juillet 2007, un autre s'était produit en août 2005, affectant la centrale d'Onagawa, au nord de Fukushima ; encore un autre en mars 2007, dont l'épicentre était à 16 kilomètres de la centrale de Shika. Et cela s'est répété l'année suivante, avec une secousse de magnitude 6,8 à l'est de Honshu, près d'Onagawa et de Fukushima. Même s'il n'y a pas eu de dégâts importants, Tepco a signalé alors trois fuites de liquide radioactif à Fukushima Daini.

Ainsi, l'accident qui vient de se produire à Fukushima ne peut être considéré comme une véritable surprise, même s'il a pris de court les opérateurs de la centrale comme les autorités. Cet accident est la reproduction, en beaucoup plus grave, d'événements qui se sont répétés au moins depuis 2005.

Ishibashi Katsuhiko avait analysé le risque, expliquant que, dans les différents cas, «le mouvement sismique à la surface du sol causé par le tremblement de terre était plus important que le maximum prévu dans la conception de la centrale». Lors du séisme qui a affecté la centrale de Kashiwazaki-Kariwa, le pic d'accélération sismique était plus du double de la valeur que la centrale était censée supporter. «Ce qui s'est passé à Kashiwara-Kariwa ne devrait pas être qualifié d'inattendu», écrivait le sismologue.

 

Le débat nucléaire, relancé sans délai par les écologistes

Cet accident nucléaire provoqué par le tsunami a des retombées politiques, notamment en France, à l’initiative des écologistes qui veulent « sortir du nucléaire ». C’était prévisible, même si le délai de décence n’a pas été respecté par certains, très pressés d’en découdre sur ce qui est leur raison d’être, le combat antinucléaire. Le débat aura lieu. C’est un point qui fait clivage à gauche. Il devra être traité à fond afin que le projet présenté aux électeurs en 2012 soit crédible.

Voir Les anti-nucléaires surfent sur le séisme japonais (Marianne2, Jack Dion, 15 mars)

Informations sur le Japon

               Jean-Robert Pitte : « Le Japon est profondément optimiste » (Marianne2, Régis Soubrouillard, 15 mars)

Voir aussi Japon : l'industrie et l'emploi durement touchés par la crise mondiale - 26 décembre 2008.

 

Cet article est le 10ème sur ce blog dans la catégorie Asie.

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13 novembre 2010 6 13 /11 /novembre /2010 18:32

Les USA, le Japon et l’Europe, dépendants de la Chine

 

Le capitalisme occidental aurait-il perdu la bataille des métaux stratégiques face à la Chine ? Il semble bien que oui, au vu de l’évolution des exportations chinoises de « terres rares », ces 17 métaux aux propriétés spécifiques utilisés de plus en plus dans l’industrie innovante de haute technologie.

La Chine, en juin dernier, a montré sa détermination en décidant, au niveau de l’Etat, de mettre en œuvre un plan de mise en valeur rationnelle du secteur de production des « terres rares ».

 

L’essentiel du problème était présenté dans l’article Minerais (terres rares), sociétés minières : la Chine à la manoeuvre - 9 octobre 2009. Des éléments nouveaux sont apparus.

Voir Terres rares : la Chine frappe à nouveau. Elle persiste, et signe (Isabelle Mouilleseaux, 28 juillet 2010) et Terres rares : nouvelle machine de guerre chinoise ? (Isabelle Mouilleseaux, 29 septembre).

 

Dans la presse, récemment, deux articles à lire :

- La Chine et les "terres rares" : bataille mondiale pour les métaux précieux (La Tribune, 10 novembre)

Les cours des « terres rares » s'envolent et les industriels commencent à sérieusement s'en inquiéter. « Les dirigeants du G20 doivent travailler de concert afin de trouver des solutions rapides, pragmatiques et durables pour un approvisionnement stable et sûr en terres rares », écrivent dans une lettre adressée au G20 plusieurs organisations patronales. La lettre, datée du 3 novembre, compte 37 signataires allant des Chambres de commerce américaines aux fédérations patronales européennes Business Europe en passant par le japonais Nippon Keidaren.

Contrairement à ce que laisse penser leur appellation, « les terres rares » constituent un groupe de métaux assez répandus dans l'écorce terrestre. Ces 17 substances métalliques recensées et découvertes au début du XIXe siècle dans des minerais - d'où le nom de terre - sont essentielles pour les secteurs de l'électronique et de l'automobile, où elles entrent dans la fabrication d'écrans plats, de lasers ou de voitures hybrides. Elles sont également utilisées dans les énergies propres ou la raffinage pétrolier.

Si ces métaux rares sont présents un peu partout sur terre la production en est extrêmement concentrée. La Chine est assise sur 36 % des réserves mondiales de métaux rares, suivie de l'ex-Union soviétique (22 %), des États-Unis (13 %) et de l'Australie (5 %). Mais la Chine assure à elle seule plus de 95 % de la production mondiale de terres rares soit 120.000 tonnes par an.

C'est évidemment cette situation de quasi monopole sur fond de flambée des cours qui inquiètent les industriels. Les prix ont bondi de 69 % depuis mai 2010 et de plus de 300% depuis leur plus bas de 2008. Or, la Chine a commencé à réduire de 5 % à 10 % ses exportations de terres rares depuis 2006 afin de garantir à ses industriels un approvisionnement régulier de ces métaux stratégiques. En septembre 2010, un incident diplomatique entre la Chine et le Japon portant sur l'arraisonnement d'un bateau de pêche chinois avait rapidement dérapé sur le sujet des terres rares, Tokyo accusant Pékin d'avoir décrété un embargo sur ses exportations de terres rares (...).

- Comment la Chine a gagné la bataille des métaux stratégiques (Olivier Zajec, Le Monde Diplomatique, novembre 2010 p14-15). Un camouflet pour la logique économique à courte vue.

Des métaux indispensables à la fabrication des appareils de haute technologie - les « terres rares » -, une production mondiale dominée par la Chine, une restriction des exportations : le « grand jeu » géopolitique commence. Pour asseoir son contrôle sur ces minéraux stratégiques, la Chine a mis en œuvre ce que le capitalisme occidental rejette : une politique industrielle de long terme.

On attendait plutôt les exploitations à ciel ouvert de Mongolie-Intérieure, ou les mines profondes du bush australien. Mais c’est en plein cœur des brouillards de la mer de Chine orientale que la problématique des « terres rares », ces métaux à haute valeur ajoutée technologique, a une fois de plus émergé dans l’actualité. Le 7 septembre 2010, un chalutier chinois, hasardant ses filets dans les eaux territoriales japonaises, est cerné par les garde-côtes. Il tente de fuir, et ce faisant éperonne un bâtiment militaire nippon. L’équipage est arrêté. L’incident se déroule non loin de l’archipel des Senkaku (Diaoyu pour les Chinois). Eparpillées à cent soixante-dix kilomètres au nord-est de Taïwan, ces huit îles presque désertes appartiennent à Tokyo, mais Pékin en revendique la souveraineté depuis les années 1970. Revendications autrefois émises recto tono, mais qui s’affirment désormais avec plus d’âpreté, reflétant l’évolution progressive du rapport de force entre une Chine en ascension, à l’étroit dans ses eaux peu profondes, et un Japon sur la défensive.

Par l’escalade diplomatique qu’elle a suscitée, la collision du 7 septembre révèle l’étendue du répertoire coercitif dont dispose la Chine dans la défense d’une zone hautement stratégique pour elle. La détention du capitaine du bateau chinois, prolongée par décision d’un tribunal japonais le 19 septembre, a amené le ministère des affaires étrangères à menacer : « Si le Japon continue dans cette attitude imprudente, il goûtera à son propre fruit amer. » De Pékin à Shanghaï, suscités ou spontanés, protestations « patriotiques » et autodafés de drapeaux nippons se multiplient. Jusqu’à ce que le « fruit amer » ne prenne finalement tout son sens aux alentours du 20 septembre, sous la forme d’un coup d’arrêt des exportations de terres rares chinoises vers les ports japonais. Rien d’officiel, mais de Hongkong à Tokyo en passant par Londres, les courtiers en matières premières le confirment : les chargements sont retardés, voire bloqués. L’effet est spectaculaire.

En portant le bras de fer sur le terrain des ressources énergétiques, Pékin met en lumière une faiblesse rédhibitoire du Japon et de bien d’autres puissances désireuses d’acquérir ces précieux minerais.

Une stratégie d’étranglement

Les terres rares sont un groupe de 17 métaux aux propriétés uniques, utilisés de plus en plus massivement dans l’industrie innovante et de haute technologie. Lasers, téléphones portables, écrans à cristaux liquides, en contiennent, et les performances nouvelles des dernières générations de terminaux de « connexion de masse », de l’iPhone aux tablettes tactiles, reposent en partie sur les propriétés de ces éléments. Les nouvelles industries « vertes » connaissent aussi cette dépendance : batteries de véhicules hybrides, panneaux solaires, ampoules basse consommation ou turbines d’éoliennes sont tributaires des métaux « dopants » que sont le néodyme, le lutécium, le dysprosium, l’europium ou le terbium, également porteurs de promesses en termes de catalyse pour le raffinage du pétrole. Enfin, l’industrie de défense utilise les terres rares pour des systèmes aussi cruciaux que les missiles de croisière, les munitions guidées, les radars ou les blindages réactifs.

La demande mondiale en terres rares croît de plus de 10% par an. Elle est passée en une décennie de quarante mille à cent vingt mille tonnes annuelles. L’industrie américaine, japonaise ou européenne, ne peut déjà plus s’en passer, comme le résume l’analyste Cindy Hurst dans une récente étude pour le département américain de la défense : « Sans les terres rares, une grande partie de la technologie moderne serait profondément différente, et bien des applications ne seraient pas même possibles. Par exemple, nous ne connaîtrions pas l’avantage de la miniaturisation des téléphones et des ordinateurs portables ». En général, plus un modèle industriel est innovant, (résistant, léger, de taille réduite, « écocompatible »), plus sa dépendance aux terres rares augmente (…)

 

Cet article est le 9ème sur ce blog dans la catégorie Asie.

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23 juin 2010 3 23 /06 /juin /2010 22:53

Le parti communiste reste maître du jeu et suit son rythme

 

Des informations en provenance de Chine ne doivent pas faire illusion. Certains veulent y voir une ouverture au capitalisme mondial. Peut-être, mais le pouvoir politique maîtrise bien l’évolution qu’il a décidée, suite aux diverses pressions venant de l’extérieur et de l’intérieur.

Après avoir indiqué divers liens vers des articles de presse, je proposerai de prendre connaissance des actes du séminaire de la Fondation Res Publica, qui portait sur le parti communiste chinois, le 22 février 2010.

 

Lu dans la presse

 

Monnaie, salaires, la Chine veut-elle changer de croissance ? (Philippe Cohen, Marianne2, 23 juin)

Le gouvernement chinois a annoncé qu'il laissait le yuan décrocher du dollar ce qui, venant après quelques hausses de salaire, laisse espérer à certains un changement de modèle de l'Empire du milieu. Un diagnostic imprudent.

 

L'assouplissement du yuan, un plan machiavélique ? (Marie de Vergès, Le Monde, 23 juin)  

La Chine prouve qu'elle souhaite rester maître du jeu. Plus de "flexibilité", d'accord, mais selon ses modalités.

 

Grèves et salaires en hausse : le « Made in China » à un tournant (Harold Thibault, Rue89, 18 juin)

Chez Honda, Foxconn ou Toyota, une nouvelle génération de travailleurs migrants demande une vie meilleure. Un mouvement de fond et une remise en cause du miracle économique chinois qui mettent gouvernement central et intérêts locaux au pied du mur.

En Chine, la grève des ouvriers de Honda illustre le malaise social (Brice Pedroletti, Le Monde, 31 mai)  

En bloquant l'usine qui fournit l'ensemble des boîtes de vitesses des modèles de Honda fabriqués en Chine, les ouvriers grévistes de Honda Auto Parts Manufacturing à Foshan, à une trentaine de kilomètres de Canton, ont frappé dans le mille. Le constructeur japonais a été forcé d'arrêter, mercredi 26 mai, ses chaînes d'assemblage dans ses quatre sites en Chine.

 

Les réflexions de la Fondation Res Publica

 

Voir les actes du séminaire du 22 février 2010  "Qu'est-ce que le communisme chinois ?" en ligne sur le site de la Fondation Res Publica.

Séminaire présidé par Jean-Pierre Chevènement avec : Jean-Paul Tchang, financier, spécialiste de la Chine, entourés de Marie-Françoise Bechtel, conseiller d’État, et Alain Dejammet, ambassadeur de France.

 

La France et l’Europe dans les tenailles du G2 ?, colloque organisé par la Fondation Res publica le 18 janvier 2010.

 

Voir aussi La Chine, consciente de sa force, impose sa gouvernance au monde - 29 décembre 2009.

 

Cet article est le 8ème sur ce blog dans la catégorie Asie.

 

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29 décembre 2009 2 29 /12 /décembre /2009 22:38

Un Etat-parti pour la future 1ère puissance mondiale

 

La Chine se signale à l’attention du monde par des décisions, qui sont autant de pierres jetées dans le jardin des bien-pensants, européens et américain. Ces jours-ci, le compte est bon (voir, ci-après).

 

Pendant vingt ans, elle a fait semblant de s’adapter à la logique du libéralisme, parce que cela correspondait à ses intérêts du moment. La crise du système capitaliste la propulse au rang de puissance économique stabilisante de l’économie mondiale, en raison de sa croissance autour de 10%, alors que l’Europe se traîne autour de 1%.

 

Voir sur ce blog La Chine, vingt ans après Tiananmen, a les clés de l'avenir du monde - 5 juin 2009.

 

Voir aussi La Chine : scénario pour le futur, l’intervention de Claude Martin, Ambassadeur de France, au colloque de la Fondation Res Publica - présidée par Jean-Pierre Chevènement - le 8 septembre 2008, sur le thème L'Asie vue d'Europe. Il conclut ainsi :

 

(…) Que pouvons-nous faire ?

Je suis convaincu que la Chine est très peu sensible aux pressions extérieures. Le fait que ces pressions s’exercent d’une façon qui lui pose des problèmes de face et apparaissent comme des ingérences dans son vif débat intérieur ont plutôt pour effet de la crisper, de jouer en faveur des plus conservateurs (…).
Enfin, j’ai dit à plusieurs reprises que la Chine cède aux pressions extérieures du plus fort - lorsqu’elles sont habilement conduites et ménagent sa face - en concédant l’effort qui lui coûte le moins. Dans l’éventail des partenaires de la Chine, l’Europe apparaît faible, dispersée. Notre message eût été plus efficace si les deux ou trois plus grands partenaires européens de la Chine avaient parlé d’une seule voix. Sinon, l’avenir de la Chine sera décidé par la Russie, les Etats-Unis et le Japon.

 

La Chine détient dans son sous-sol des armes stratégiques et est déjà le 1er exportateur mondial :

 

Minerais (terres rares), sociétés minières : la Chine à la manoeuvre -  9 octobre 2009

La Chine restreint ses exportations de matières premières stratégiques (Le Monde, 29 décembre 2009).

La Chine, premier exportateur mondial devant l'Allemagne (Les Echos, 29 décembre 2009). Selon les calculs de Pékin, les entreprises chinoises ont généré cette année 9% de toutes les exportations de la planète.

La Chine manie tour à tour l’habileté et la répression vis-à-vis de son opposition démocratique.  

Pékin inflexible face au plus célèbre dissident chinois (Le Monde, 25 décembre 2009).

Liu Xiaobo, auteur de la Charte 08, un appel à la démocratisation du régime, a été condamné à onze ans de prison.


La Chine se permet d’exécuter un ressortissant britannique, malgré les recommandations pressantes et répétées de clémence de la part de l’ancienne puissance coloniale.

En exécutant un citoyen anglais, la Chine confirme son arrogance envers le reste du monde (Marianne2, Régis Soubrouillard, 29 décembre 2009). Ce matin, Pékin a procédé à l'exécution du Britannique Akmal Shaikh, condamné pour trafic de drogue. La Chine n'avait pas procédé à l'exécution d'un européen depuis 1951. Après la condamnation du dissident Liu Xiaobo, le régime affirme son intransigeance et sa puissance.

 

La Chine ne cède rien à Barack Obama, sachant que les USA sont en position de faiblesse.

 

Pékin reste insensible aux demandes d'Obama (Les Echos, 18 novembre 2009). Les discours louaient les perspectives de coopération fructueuse entre les présidents chinois et américain. Les visages tendus de Hu Jintao et de Barack Obama disaient tout le contraire.

(…) Barack Obama est apparu plus encadré par ses hôtes, qui ne lui ont accordé ni marge d'initiative, ni engagement symbolique susceptible d'être présenté en trophée à son retour devant une opinion publique américaine très méfiante à l'égard de l'émergence de la Chine. « Le leadership chinois ne s'inquiète plus trop de la pression américaine. Du fait de la crise financière et de l'héritage de George W. Bush sur les dossiers nord-coréen, afghan ou pakistanais, les Etats-Unis ont désormais beaucoup plus besoin de la Chine que la Chine des Etats-Unis », résumait, hier, Yu Wanli, un expert de l'université de Pékin, reprenant une représentation désormais partagée par une large partie de l'opinion chinois.

 

Obama n'a pas convaincu la Chine, dommage pour nous (Marianne2, Guillaume Duval, Alternatives économiques, 23 novembre 2009).

L'économie chinoise est essentiellement tournée vers l'exportation, et le gigantesque plan de relance du gouvernement s'inscrit dans cette voie. Mais alors, comme le dit Guillaume Duval d'Alternatives Economiques, les déficits commerciaux de l'Europe et des Etats-unis vont encore s'aggraver. Que faire?

(…) Ces dernières années, les surplus commerciaux croissants de l'économie chinoise ont été le pendant des déficits, eux aussi croissants, des Etats-Unis. Ils sont donc une des causes profondes de la crise dont nous sommes peut-être en train de sortir lentement : les Américains se sont endettés de façon de plus en plus excessive pour consommer davantage que ce qu'ils produisent avec l'argent chinois − l'argent que les Chinois leur prêtent parce que, eux, consomment moins que ce qu'ils produisent, et cela également dans des proportions croissantes.

Pour l'instant, la Chine, un pays de 1,4 milliard d'habitants, a toujours une structure économique de « petit pays », plus proche de celle des Pays-Bas que des Etats-Unis ou de l'Europe : aux Etats-Unis ou en Europe, le commerce extérieur à la zone pèse en effet de l'ordre de 20 % du produit intérieur brut (PIB), tandis qu'en Chine il dépasse les 80 %… Pour espérer rééquilibrer l'économie mondiale, et donc limiter le risque d'une prochaine crise, il serait indispensable de réorienter l'économie chinoise en priorité vers son marché intérieur.

Ce n'est cependant pas du tout la voie que sont en train de prendre les autorités chinoises. Le plan de relance fantastique lancé début 2008, et qui a rencontré un certain succès à court terme, reste essentiellement un plan de relance des exportations chinoises. Il a été associé en particulier à une politique de réancrage du yuan, la monnaie chinoise, sur le dollar, alors qu'au cours des années précédentes, les autorités chinoises l'avaient laissé se réévaluer quelque peu. Et cela alors que le dollar baisse par rapport aux autres monnaies, et notamment à l'euro.

Manifestement, le lobby des industries exportatrices est infiniment plus puissant à Pékin que celui des paysans chinois de l'intérieur, qui aimeraient bien profiter un peu eux aussi de la croissance et avoir enfin un système de santé qui fonctionne, des mécanismes de protection sociale… Il faut dire que la Chine présente cette situation extraordinaire d'être à la fois la dernière grande dictature communiste au monde et un paradis ultralibéral où, notamment, les syndicats libres sont interdits…

A l'occasion de la visite en Chine de Barack Obama, de nombreuses voix se sont élevées pour souligner l'ampleur de la menace que cette stratégie fait peser sur l'économie mondiale et exhorter le président américain à la fermeté sur ce dossier. C'est notamment le cas du prix Nobel d'économie américain Paul Krugman dans une de ses chroniques du New York Times. Dominique Strauss Kahn, le patron du Fonds monétaire international (FMI), a lui aussi rappelé son souhait d'une réévaluation du yuan.

Comme d'habitude, on ne peut que déplorer l'absence totale des autorités européennes dans ce débat essentiel pour l'après-crise : les Européens, qui courtisent chacun pour leur compte les autorités chinoises en vue de décrocher des contrats pour leurs champions nationaux, sont totalement incapables de définir une position commune sur ce dossier, comme sur beaucoup d'autres. Et cela alors même que le déséquilibre commercial de l'Union vis-à-vis de la Chine est en train de devenir plus important encore que celui des Américains, sous la pression de la hausse de l'euro à l'égard du dollar, et donc du yuan…

 

Colloque de la Fondation Res Publica : La France et l'Europe dans les tenailles du G2 ?

Poursuite du programme de colloques de la Fondation Res Publica lundi 18 janvier 2010 à 18h à la Maison de la Chimie (28, rue Saint Dominique 75007 Paris). En voici le programme.

 

Avec la participation de :

  • André Kaspi, Professeur émérite à l’Université de Paris-I
  • Jean-Luc Domenach, Directeur de recherche à Sciences-Po
  • Jacques Mistral, Professeur des Universités, directeur des études économiques à l’IFRI
  • Antoine Brunet, Président d’AB Marchés, ancien chef stratégiste à HSBC France
  • Jean-Pierre Chevènement, Président de la Fondation Res Publica

A noter que le président de la Fondation a déclaré qu’il allait travailler dur sur la question de la Chine et du parti communiste chinois. Voir Jean-Pierre Chevènement invité du Rendez-vous des politiques sur France Culture - L'émission dure 55 minutes, est podcastée sur le blog de Jean-Pierre Chevènement.

 

Cet article est le 7ème sur ce blog dans la catégorie Asie.

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9 octobre 2009 5 09 /10 /octobre /2009 22:09

La haute technologie industrielle, dépendante de la Chine

 

Ces minerais ou métaux qui se font appeler « terres rares » ne sont pas si rares, mais on ne les trouve qu’en Chine, ou presque (95%), et ils sont indispensables aux industries de pointe, dites « vertes ». Voir Terres rares - Wikipédia.

 

Deng Xiaoping, en personne, en 1992, aurait dit (RFI - Terres rares, 7 sept. 2009) :

 

« Le Moyen Orient a le pétrole et nous avons les terres rares ». Des propos cités volontiers par ceux qui dénoncent l’hégémonie rampante de la République Populaire sur ces matières premières. Les dernières annonces faites à Pékin leur donnent raison.

Prétextant un risque de pénurie, les autorités chinoises envisagent de restreindre les quotas d’exportation pour ne pas léser leur industrie et de suspendre les exportations de 2 terres rares parmi les plus recherchées. Il est vrai que si le pays remplace toutes les ampoules au tungstène par des modèles basse consommation, comme il en a l'intention, sa demande en terbium va exploser. Le négoce voit surtout dans cette déclaration une manœuvre pour relever les cours de ces métaux moins demandés, en ce moment, en raison de la crise
(…).

 

Le 5 juin, j’écrivais sur ce blog La Chine, vingt ans après Tiananmen, a les clés de l'avenir du monde. Je ne connaissais pas, alors, les « terres rares ». Les Chinois vont probablement nous amener à nous y intéresser.

 

Mon quotidien régional en a parlé le 29 septembre. Voir ouest-france.fr - La Chine monopolise les terres rares (Hervé Babonneau).

 

Mais ma première source d’informations, en ce qui concerne les matières premières, est la lettre de La Chronique Agora, « l’Edito Matières Premières & Devises », dont la rédactrice est Isabelle Mouilleseaux. Voici ce qu’elle écrivait dans sa chronique, le 28 septembre :

 

Terres rares : un marché stratégique sur le point d'imploser


Aujourd'hui, parlons d'un marché hautement stratégique, et sur le point d'imploser par "assèchement foudroyant". Le marché des terres rares-- elles sont au nombre de 15 -- est très confidentiel. Vous n'en avez peut-être même jamais entendu parler. Et pourtant, nous ne pouvons nous en passer. Elles sont omniprésentes dans notre vie quotidienne. Dans votre poche, dans votre attaché-case, dans votre salon, dans vos déplacements, dans votre bureau... Elles sont partout. Et sont un composant clé des technologies vertes et du futur.


La Chine, maître du jeu

Or aujourd'hui, nous sommes dans une situation alarmante. En effet, la demande de terres rares est explosive, notre dépendance totale et l'offre est sur le point de s'assécher violemment. Voici pourquoi. La Chine, c'est 95% de la production mondiale : elle alimente à elle seule toute la planète en terres rares. En 10 ans, elle a éradiqué la quasi-totalité de ses concurrents occidentaux par une guerre de prix destructive ; très peu ont survécu. Elle est devenue totalement "maître du jeu".


Plus qu'accro

Malheureusement pour nous, notre industrie technologique et stratégique est totalement "accro" et dépendante des approvisionnements chinois. La demande en terres augmente de 10% à 20% l'an et elle a doublé en sept ans. Et ce rythme de hausse est en train de devenir exponentiel. D'une valeur annuelle de 1,25 milliard de dollars actuellement, ce marché devrait peser trois milliards en 2015. Fois trois !


Tollé général !

Jusqu'ici, le robinet des terres rares coulait à flot, il n'y avait donc pas de soucis à se faire - mais la tendance est en train de s'inverser : la Chine veut nous couper les vivres -- tollé général ! Elle a besoin de ses terres pour assurer son propre développement -- implacable. Pékin évoque donc l'idée de bannir carrément l'exportation de cinq des 15 terres rares. Quant aux autres, la Chine veut imposer des restrictions pour limiter ses exportations à 35 000 tonnes par an. Une baisse de 50% depuis 2004 ! Au moment même où la demande croît fortement.


Nous voilà dans de beaux draps

Pourquoi ? Sans terres rares, pas d'iPod ni de PDA, pas d'écrans plasma ni LCD. Impossible de produire une voiture hybride ou à pile à combustible ; pas d'ampoules écologiques basse consommation pour réduire votre facture énergétique non plus. Sans terres rares, les rendements du diesel que vous mettez dans votre automobile plongeraient. Impossible de construire des voitures "légères", moins énergivores et plus économes. Quant à la révolution technologique laser, basée sur la fibre optique, elle ne serait plus qu'un lointain souvenir... et la liste est très loin d'être exhaustive ! En clair, les propriétés de ces terres sont aussi irremplaçables que vitales aux technologies vertes et du futur.


Que va-t-il se passer à votre avis si nous en arrivions là ?

Pas besoin d'être Einstein pour le deviner. D'abord, le prix des terres rares va s'envoler, le marché virant au déficit. Ensuite les très rares producteurs occidentaux qui ont survécu à l'effroyable guerre des prix chinoise vont voir soudainement les clients se ruer à leurs portillons ; prêts à tout pour arracher à prix d'or quelques centaines de kilos de terres rares.


Il va nous falloir réagir vivement

Américains et Australiens, qui ont des réserves de terres rares dans leurs sous-sols, lancent des projets tous azimuts. Les investisseurs flairent la bonne affaire. Sauf qu'entre le lancement du projet et le début de l'extraction, il peut se passer cinq à huit ans, voire jusqu'à 10 ans.


Pendant ce temps,
un autre risque, tapi dans l'ombre, nous menace directement : la politique chinoise de rachat "systématique" de minières stratégiques à la sécurisation de ses approvisionnements. L'Australie, qui regorge de matières premières dans ses sous-sols, est son terrain de jeu de prédilection. Pas un mois sans qu'on entende parler d'une OPA ou d'une prise de participation chinoise dans une minière australienne. Et force est de constater que le regard chinois se tourne actuellement vers les sous-sols australiens riches en terres rares....


Voir un autre article de La Chronique Agora, paru le 3 juin 2008 L'appétit de la Chine n'a plus de limites (Emmanuel Gentilhomme).

L’appétit de fer de la Chine a aussi alimenté la chronique d’Isabelle Mouilleseaux (1er octobre) : Le fer a le vent en poupe. Merci la Chine !

Cet article est le 6ème sur ce blog dans la catégorie Asie.

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5 juin 2009 5 05 /06 /juin /2009 22:52

Une économie centralisée coopérant avec le capitalisme

 

Nous n’avons pas oublié ce qui s’est passé, il y a vingt ans, place Tiananmen à Pékin. Ce pays, qui occupe une place géostratégique sans égal, continue d’être dirigé de manière autoritaire par le Parti Communiste Chinois. Depuis le 4 juin 1989, les espaces démocratiques ont diminué en Chine, mais l’économie a pris son envol.

Le pouvoir politique n’aime pas être questionné à propos de la répression du mouvement étudiant en 1989. Voir Il y a 20 ans, la répression sur la place Tiananmen (images rappelées sur le site du Nouvel Observateur, 4 juin).

 

Et Pierre Haski, qui dirige Rue89, a fourni, le 4 juin, un document intéressant (extraits) :

 

20 ans après Tiananmen : le spectre de la réforme politique

François Mitterrand déclarait, au lendemain du massacre de Tiananmen : "un régime qui tire sur sa jeunesse n'a pas d'avenir". Vingt ans plus tard, le régime chinois est toujours en place, et a fait de la Chine une puissance économique et politique majeure. Mitterrand a-t-il donc eu tort ?

A voir la nervosité du pouvoir chinois à l'approche de ce vingtième anniversaire, avec une censure draconienne d'internet , l'éloignement de quelques malheureux dissidents de la capitale, et une surveillance policière tous azimuts, on peut se demander si le régime chinois est si sûr de lui et de son avenir.

Aucune menace réelle ne justifie aujourd'hui un tel verrouillage, alors que la jeunesse actuelle a eu le cerveau vidé de toute référence au Printemps de Pékin, que le reste du monde se tait pour ne pas provoquer l'ire de Pékin, et que la population chinoise s'inquiète plus des conséquences de la crise mondiale que de réclamer des comptes sur le passé.

Le refus de tourner la page de 1989

Alors pourquoi cette obstination à ne pas vouloir tourner la page de 1989, à refuser de reconnaître les morts de 1989 malgré l'exemplaire mobilisation des Mères de Tiananmen , et à refuser de revenir sur le jugement de "mouvement contrerévolutionnaire" porté à l'époque, et qui continue de pénaliser la vie de nombreuses personnes ? (…)

Cette nervosité permanente se comprend mieux quand on découvre les mémoires d'outre-tombe de Zhao Ziyang, le Secrétaire général du Parti communiste chinois au moment du Printemps de Pékin, limogé pour s'être opposé à l'usage de la force contre les étudiants qui occupaient la place. Zhao Ziyang, un réformateur qui aurait pu être dans d'autres circonstances le "Gorbatchev chinois", a été assigné à résidence pendant dix-sept ans, jusqu'à sa mort en 2005.

Mémoires d'outre-tombe de Zhao Ziyang*

Pendant toutes ces années de silence, Zhao Ziyang a néanmoins enregistré ses mémoires, dictées sur des cassettes de musique pour enfants afin de contourner la surveillance dont il faisait l'objet. Ces mémoires, qui viennent de sortir aux Etats-Unis et à Hong Kong, ont été authentifiées par Bao Tong, le secrétaire particulier de l'ancien numéro un, lui aussi en résidence surveillée depuis vingt ans.

Zhao Ziyang, c'est le "fantôme de Tiananmen" qui vient hanter les dirigeants actuels, dont la légitimité remonte au choix de la force fait en 1989 par Deng Xiaoping, le vieux patriarche communiste que les membres du Bureau Politique, divisés sur la suite des événements, sont allés sortir de sa retraite et de ses parties de bridge, pour lui demander de trancher. L'homme que le monde vénère pour son choix des réformes économiques à la mort de Mao Zedong, trancha pour la force contre ceux qui défiaient le PCC : assurer le pouvoir par-dessus tout.

C'est lui qui, en effet, décida de faire donner l'armée contre les étudiants, comme l'avaient déjà révélé les "Archives de Tiananmen", sorties clandestinement de Chine en 2000. Et on y relevait déjà cette prise de position de Zhao Ziyang, dans son "autocritique" du 23 juin 1989, au lendemain du massacre : "Longtemps je me suis considéré comme un réformateur économique et un conservateur politique. Mais ma pensée a changé ces dernières années. A présent, je sens que la réforme politique doit être une priorité."

Le spectre de la réforme politique

La "réforme politique", cette hydre qui ressurgit à intervalles réguliers dans le débat chinois, depuis près d'un siècle comme l'avait montré le sinologue Jean-Philippe Béjadans son livre "A la recherche d'une ombre chinoise - le mouvement pour la démocratie en Chine [1919-2004], (Seuil 2004)…

Après Tiananmen, tirant les leçons du Printemps de Pékin mais aussi de l'effondrement du communisme à Moscou et en Europe, le pouvoir conclut un nouveau "contrat social" avec la classe moyenne urbaine : l'enrichissement et la fierté d'être chinois, en échange d'une paix politique et sociale. Ce Pacte informel a fonctionné pendant une douzaine d'années, mais montre aujourd'hui ses limites.

Aujourd'hui encore, alors que les dirigeants communistes ne cessent de réaffirmer que la "démocratie chinoise" ne sera pas calquée sur le modèle occidental, ils ont vu surgir en décembre dernier la "Charte08", initiée par une poignée de dissidents, et qui réclame rien de moins que l'application en Chine des valeurs universelles, la liberté d'expression et d'association, le multipartisme…

Ce 4 juin 2009 n'est finalement pas tant un jour de mémoire pour les familles des victimes qu'un jour symbolique de peur pour un régime qui n'arrive pas à se débarrasser de ce fantôme de la réforme politique, dont beaucoup de Chinois pensent qu'elle est la clé d'une modernisation réelle de leur pays.

* Sur le site du quotidien Le Monde, le 16 mai, Tiananmen : le brûlot posthume de Zhao Ziyang.

 

 

Pour prendre connaissance d’éléments économiques et financiers concernant la Chine :

 

- La Chine va moins bien qu'avant, mais mieux que les autres (Le Monde, 17 avril 2009)

 

- Le yuan, future monnaie internationale (Le Monde, 27 avril 2009)

 

- La Chine : scénario pour le futur : Intervention de Claude Martin, Ambassadeur de France, au colloque organisé par la Fondation Res Publica le 8 septembre 2008 sur le thème L'Asie vue d'Europe.

 

Cet article est le 5ème sur ce blog dans la catégorie Asie.

 

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26 décembre 2008 5 26 /12 /décembre /2008 22:12

Nous avons beaucoup à apprendre du Japon

 

Cette information m’a stupéfié : en novembre, la production industrielle du Japon s’est effondrée (-8% par rapport au mois précédent). En quelques mois, la diminution va dépasser les 25% ! La crise mondiale a fait chuter les exportations de 27% sur un an, ce qui explique la baisse de la production issue de l’industrie.

 

Le Monde, ce jour, éclaire notre lanterne avec cet article Au Japon, chute sans précédent de la production industrielle.

 

Une fois de plus, je me suis tourné vers le site de la Fondation Res Publica (Un trésor est caché dans Fondation Res Publica | République, mondialisation, dialogue des ...) pour puiser des informations concernant ce pays.

 

Les actes du colloque L'Asie vue d'Europe (8 septembre 2008) apportent une réponse. Voici quelques extraits de l’intervention de Jean-Marie Bouissou.

 

Le Japon, ex « number one »

 

(…) Tous les yeux sont tournés vers la Chine, l’Inde et, dans les écoles de commerce, peu de gens s’intéressent au Japon. Ils ont tort car le Japon d’aujourd’hui revêt certains aspects qui préfigurent ce que sera peut-être l’Europe de demain et connaît des problèmes qui sont aussi les nôtres. Il y a beaucoup à apprendre de ce Japon qui a connu quinze années de crise économique et politique extrêmement sévère : songez qu’en l’espace de quinze ans les exportations agricoles japonaises ont diminué de moitié ; songez que la dette publique cumulée au Japon dépasse aujourd’hui 180% du PIB (à 60% nous crions à la faillite !) ; songez que ce pays a connu, de 1990 à 2000, huit premiers ministres et six majorités différentes. Or, miracle : le Japon tient toujours debout ! Non seulement il tient toujours debout mais il n’est pas fracturé et il est optimiste.

Selon moi, le Japon est un pays qui compte beaucoup et qui ne doit pas être considéré comme un pays en déclin. Certes, en termes relatifs, on peut parler de déclin : en 1990, le Japon représentait presque 16% du PIB mondial, aujourd’hui, c’est moins de 11% ; en 1990 le Japon réalisait 10% des exportations mondiales, aujourd’hui sa part est tombée aux alentours de 6%. Déclin relatif, certes, mais devant l’émergence de géants comme la Chine et l’Inde, toutes les vieilles puissances enregistrent un déclin relatif.

Il faut considérer que le Japon est toujours le premier créditeur du monde. Il a la plus grosse réserve d’épargne privée de la planète : deux années de PIB, soit 12000 milliards de dollars. Il a encore le deuxième PIB du monde. Plus important : ce pays est la deuxième puissance technologique du monde par le nombre des brevets déposés (Canon aux Etats-Unis), nombre qui a doublé pendant les quinze années de crise ! Contrairement à d’autres pays, le Japon n’a pas freiné les investissements en R&D quand la crise s’est profilée, les dépenses de R&D ont été en permanence maintenues à 3% du PIB (record mondial).

Certes la situation économique est fragile : depuis 2005, le Japon oscille entre des moments d’espoir, des débuts de reprise, et des phases de dépression. Actuellement le Japon retourne à la récession, il a enregistré des croissances négatives sur deux trimestres successifs. Le gouvernement a réagi par un Nème plan de relance : ce gouvernement qui semble n’avoir plus d’argent et multiplie les plans de relance et les cadeaux fiscaux. La chute du gouvernement Fukuda la semaine dernière (1) est liée à cette politique.

Le problème économique du Japon est la faiblesse persistante de la demande interne. Cette faiblesse n’est pas imputable à une vague inquiétude sur l’avenir mais à une raison très concrète : le Japon s’est sorti de la crise par de brutales politiques d’ajustements, de profondes réformes structurelles ; les grands perdants des ajustement structurels ont été les revenus du travail : on a diminué les coûts de main d’œuvre. Personne ne s’étonne donc que les ménages dépensent moins.

Les exportations, traditionnellement le deuxième moteur de l’économie japonaise, souffrent aussi de la conjoncture mondiale actuelle (…).

Les Japonais parient sur l’innovation technologique : ils pensent qu’ils pourront garder une puissance industrielle tant qu’ils maintiendront cinq ou six ans d’avance technologique sur la Chine. C’est pourquoi ils ont fait du développement technologique l’axe de leur économie. Ceci repose sur une idée assez simple : dans le processus de création d’un produit, ceux qui gagnent de l’argent sont ceux qui le conçoivent, ceux qui le développent puis ceux qui assurent le service après-vente. Ceux qui en gagnent le moins sont ceux qui le fabriquent. Les Japonais rêvent d’être toujours dans la position de ceux qui vont concevoir et développer les produits, éventuellement les faire fabriquer par les Chinois, puis les commercialiser eux-mêmes.

Les Japonais ont également une force de frappe financière considérable. Les revenus des capitaux extérieurs représentent une source importante de la richesse nationale. Ils n’ont pas renoncé à la politique industrielle : les objectifs sont définis par l’Etat, assortis de moyens. Ils savent exactement quels secteurs ils veulent développer dans l’avenir et comment ils veulent les développer (…).
 
Le deuxième problème posé à la société japonaise est celui des inégalités. L’OCDE, en 2005, a évalué le taux de pauvreté au Japon à 15,3% (10,7% en moyenne dans les pays de l’OCDE, le taux japonais étant le plus élevé). Ce phénomène est nouveau : très longtemps le taux de pauvreté japonais a été l’un des plus faibles des pays de l’OCDE. Or, bizarrement, il n’y a pas de fracture sociale.

Les Japonais supportent très mal les inégalités : le fait qu’ils sont un peuple uni, le fait que leur capitalisme est plus humain que les capitalismes occidentaux, où les riches sont modestes, où les écarts de revenus sont faibles ont été au cœur de l’identité nationale japonaise d’après guerre. Cette identité se déchire et les Japonais le vivent très mal. Les élections qui viennent (après la récente démission de Fukuda) vont se jouer en grande partie autour de cette question des inégalités et de la manière de les combattre (…).

 

Et, il existe une autre source d’information sur le Japon, c’est Jean-Pierre Chevènement, qui a livré ses impressions à l’issue de son séjour dans ce pays. C’est sur son blog, en date du 23 décembre.

 

Quelques réflexions sur le Japon de 2008

 

(…) Le Japon a un rôle à jouer vis-à-vis de toutes les puissances asiatiques hors la Chine (ASEAN, Inde) et vis-à-vis de l’Australie pour créer un contexte favorable à la coopération et à la paix. On souligne souvent la progression des budgets de défense de la Chine (+ 17 % par an). C’est oublier que la Chine part d’assez bas et que son budget de défense n’est sans doute que le dixième de celui des Etats-Unis. Reste que la Chine est une puissance nucléaire et spatiale et que sa marine dispose avec la proximité des côtes chinoises d’un avantage stratégique en mer de Chine, que ne contrebalance que la présence d’une flotte et de forces armées américaines dans les ports du Japon et en Corée.

Le Japon depuis 1990 (l’éclatement de la bulle immobilière et de la bulle financière) n’a connu qu’une croissance ralentie). Au moment où, à partir de 2005-2006 il paraissait en sortir, le voilà à nouveau frappé par la crise. L’économie japonaise en 2008 est entrée en récession. La dette publique japonaise se situe à un niveau record – 170% du PNB- très au-dessus de l’Italie (110 %) et même de l’Allemagne et de la France (un peu en dessous de 70%), mais cette considération doit être tempérée par une autre, tenant au faible endettement des ménages japonais et à l’assainissement de leur système bancaire depuis près de vingt ans. La dette privée (ménages et entreprises) est de 80 % du PNB au Japon contre 170 % aux Etats-Unis (…).

 

Lire ce témoignage Chevenement.fr | le blog de Jean-Pierre Chevènement.


Cet article est le 4ème sur ce blog dans la catégorie Asie.

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8 août 2008 5 08 /08 /août /2008 20:29

Se garder des idées simples sur la Chine

 

Le spectacle présenté par les responsables de l’Etat chinois, c’est-à-dire du parti communiste chinois, ce 8 août 2008 à Pékin, en introduction aux Jeux Olympiques, a été qualifié de grandiose. Le mot n’est pas trop fort. C’est la preuve du savoir faire des dirigeants et de la capacité d’organisation de ce pays.

 

J’ai relu un petit livre, paru en 2003, « L’économie chinoise » (Françoise Lemoine, collection Repères, La Découverte), dont voici la conclusion.

 

« La politique économique suivie depuis un quart de siècle en Chine peut se prévaloir d’incontestables succès : amélioration du niveau de vie de la grande majorité de la population, essor spectaculaire des régions et métropoles côtières, ascension dans les échanges internationaux et montée en gamme des exportations, résistance aux chocs extérieurs.

 

Ces succès sont le fondement de la légitimité du régime politique et la base du consensus qui existe au début du XXIème siècle au sein du pouvoir politique sur la stratégie économique : poursuite des réformes et de l’ouverture, privatisations, renforcement des institutions et des instruments de régulation macroéconomique.

 

Au cours des prochaines années, la stabilité du pouvoir va encore être mise à rude épreuve par l’exode rural, la persistance du chômage et des inégalités sociales. Les autorités continueront donc à mettre tout en œuvre pour maintenir une croissance rapide. Elles le font déjà depuis 1997-1998, en menant une politique de relance budgétaire vigoureuse pour contrecarrer les effets d’une demande interne défaillante et de la détérioration de l’environnement international. Cependant, la situation des finances publiques n’est elle-même pas à l’abri d’une crise : si la dette publique est encore faible, elle augmente rapidement et s’y ajoutent les coûts de la restructuration du système bancaire et la dette implicite du système de retraite.

 

On souligne souvent le contraste entre les transformations économiques et sociales que connaît la Chine depuis un quart de siècle et la rigidité du système politique, où le parti communiste a conservé le monopole du pouvoir. Le Parti a néanmoins évolué et fait preuve d’une capacité d’adaptation : il recrute de nouvelles élites sociales, comme il l’a montré lors de son dernier Congrès en appelant les entrepreneurs privés à rejoindre ses rangs ; il autorise des expériences limitées d’élections directes au niveau des villages. Des formes de démocratisation interne du Parti peuvent ainsi contribuer à élargir son assise, à renforcer les processus de négociations internes, consolidant ainsi la légitimité de son pouvoir.

 

Tout aussi essentiel pour l’évolution interne du système politique et pour son image internationale est le développement de l’Etat de droit. La Chine est le lieu d’une intense activité législative. Les réformes économiques ont exigé l’établissement d’un cadre l égal et l’entrée à l’OMC rend nécessaire de nombreux changements législatifs et réglementaires pour mettre le droit économique chinois en conformité avec les normes internationales (droit de la concurrence, de la propriété intellectuelle, lois sur les investissements étrangers, etc.) pour garantir la transparence des règles et leur application. Pour Pékin, le renforcement et l’uniformisation du cadre légal sont aussi un moyen de réaffirmer le cadre central face aux pouvoirs provinciaux. Mais établir l’Etat de droit ne peut se réduire à assurer la régularité des actes administratifs, et suppose aussi l’indépendance du pouvoir judiciaire, y compris à l’égard du Parti ».

 

- Pour mieux connaître les réalités de la Chine, le site de Marianne (la chronique de Zola) apporte une contribution intéressante (Mon pays vu par les Français: une usine internationale nommée Made in China et Comment les Chinois contournent la censure du Net).

 

- Quant à l’actualité franco-chinoise, Pierre Haski sur Rue89 affirme que « c’est le plus grave échec de la diplomatie de Sarkozy depuis son élection, qu’il ne doit qu’à sa propre maladresse » … Lire l’article Sarkozy, Pékin et le dalaï lama: une Bérézina diplomatique.

 

Lire aussi les articles sur La Chine parus sur ce blog.

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