Les jeunes et l’électorat populaire se sont abstenus le plus
Le MRC a publié l’analyse de Guillaume Vuilletet, secrétaire national aux élections, concernant les résultats des votes aux élections des députés au Parlement européen en juin. Voir Citoyens Militants (juillet-août 2009) sur le site du Mouvement Républicain et Citoyen.
Voir les résultats complets de l’élection européenne 2009 en France :
% des inscrits % des votants
Inscrits 44 282 679
Abstentions 26 282 225 59,35
Votants 18 000 454 40,65
Nuls 781 480 1,76 4,34
Suffrages exprimés 17 218 974 38,88 95,66
Listes Voix % Exprimés Sièges
Listes d’extrême gauche (LEXG) 1 050 170 6,10 /
Listes du PCF et du Parti de gauche (LCOP) 1 041 755 6,05 4
Listes du Parti Socialiste (LSOC) 2 837 674 16,48 14
Listes divers gauche (LDVG) 81 045 0,47 1
Listes des Verts (LVEC) 2 802 950 16,28 14
Listes régionalistes (LREG) 42 969 0,25 /
Autres listes (LAUT) 768 375 4,46 /
Listes centre MoDem (LCMD) 1 455 225 8,45 6
Listes de la Majorité (LMAJ) 4 798 921 27,87 29
Listes divers droite (LDD) 1 160 933 6,74 1
Listes du Front National (LFN) 1 091 681 6,34 3
Listes d’extrême droite (LEXD) 87 276 0,51 /
Ce tableau est présenté par Guillaume Vuilletet dans son rapport, dont voici des extraits significatifs.
Au niveau européen
La progression de l’abstention
Avec 60% d’abstentionnistes (contre 57% en 2004), un nouveau record vient d’être battu en France. Mais la progression de l’abstention dans ce scrutin est un phénomène européen. Il concerne aussi bien les « anciens » pays membres que les nouveaux (…).
La défaite des partis socio-démocrates
Le scrutin du 7 juin a sanctionné tous les partis de gauche soumis à la logique libérale. Il apparaît donc que les électeurs ont choisi une option que l’on peut qualifier d’ « autoritaire » - ce qui ne signifie pas extrémiste. Au niveau européen, les votants ont exprimé une demande de protection par la puissance publique (…).
Les faits marquants du scrutin en France
Les résultats du scrutin du 7 juin en France offrent un condensé ou une caricature des tendances constatées au niveau européen.
Une abstention record
En premier lieu, bien entendu, en ce qui concerne le niveau atteint par l’abstention. L’abstention, véritable désaveu pour l’Europe telle qu’elle se construit depuis 25 ans, fournit les principaux enseignements à tirer du scrutin : la construction européenne doit être remise à plat ; la gauche sociale-libérale doit – enfin – opérer sa révolution copernicienne (…).
Les classes populaires, les premières victimes de la crise, ont très peu voté. Selon le sondage TNS Sofres/Logica réalisé le 7 juin, l'électorat populaire s'est en effet fortement abstenu (69 % d'abstention chez les ouvriers et 66 % chez les employés) (…).
Les jeunes se sont abstenus encore plus massivement.
Selon TNS Sofres, 70 % des 18-24 ans ont boudé les urnes ; chez les 25-34 ans, ils sont 72 %. Ceux qui sont souvent décrits comme « profondément européens », sont aussi les plus sceptiques ou les plus désabusés.
La décomposition du PS
Les listes PS n’obtiennent que 14 sièges, avec 2 837 674 voix, soit 16,48% des suffrages exprimés – plus de 11 points derrière la liste UMP. En 2004, les listes PS avaient obtenu 31 élus avec
4 960 756 voix, soit 28,9% des suffrages exprimés. Le PS, coupé des couches populaires, n’a pas proposé un discours audible. Replié sur lui-même, pris par la guerre des ego, il n’incarne pas d’alternative crédible (…).
Toutefois, si les élections régionales à venir sont un scrutin bien différent des élections européennes, le PS n’est pas à l’abri de nouvelles déconvenues, ceci pour deux raisons :
- La première, c’est que les élections régionales ne sont pas non plus considérées comme un scrutin majeur par les électeurs.
- La seconde, c’est que les Français ont été durablement choqués par l’autisme du PS. Les mêmes causes pourraient donc produire les mêmes effets en 2010.
Enfin, on peut espérer que le vote sanction subi par le PS aux européennes de 2009 aura des vertus pédagogiques. Le sectarisme du PS l’a détourné d’une démarche de rassemblement. Or, même si le soutien du MRC pouvait paraître modeste, ainsi que celui du PRG, l’affichage d’un score supérieur à 20% au lieu de 16% aurait changé bien des choses dans l’appréciation des résultats.
L’UMP : une victoire par défaut
Faut-il parler d’une grande victoire du pouvoir en place ? Non. Il s’agit d’un succès par défaut. Les listes UMP n’ont en effet rassemblé que 28% des suffrages exprimés et 11,2% des électeurs. Les listes Sarkozy ont obtenu l’un des plus faibles scores européens. Plus encore, l’UMP ne dispose pas de réserves de voix (…).
Le Front de gauche et l’extrême gauche
Le Front de gauche n’a, quant à lui, réussi qu’une seule chose : contenir la poussée du NPA. Encore cette performance doit-elle être relativisée par la prise en compte de la piètre qualité de la campagne menée par le NPA.
Le résultat global du Front de gauche est de 1 041 755, voix, soit 6,05% des suffrages exprimés et 4 sièges. Rappelons qu’aux européennes de 2004, le PCF avait réuni 1 009 976 voix (5,88%). Avec 30 000 voix de plus, l’objectif du Front de gauche de changer la donne à gauche est loin d’être atteint.
Le NPA, pour sa part, rassemble 840 713 voix, soit 4,88% des suffrages exprimés (pas de siège).
Le Front de gauche devance le NPA dans les circonscriptions du Sud-Ouest, du Massif central-Centre, en Ile de France, dans le Nord-Ouest et le Sud-Est. Le NPA devance le Front de gauche dans l’Est et dans l’Ouest.
Au niveau national, les listes d’extrême gauche hors Front de gauche (1 050 570 voix, soit 6,10 % des suffrages exprimés) devancent légèrement les listes du Front de gauche (1 041 755 voix et 6,05% des suffrages exprimés) (…).
Les Verts
Avec 2 802 950 voix,16,28% des suffrages exprimés et 14 sièges, comme le PS, les Verts, emmenés par Cohn-Bendit, réalisent au moins un joli coup marketing. Ayant vraisemblablement pris 8 ou 9 points à l’électorat PS, ils montrent à ce dernier qu’ils sont peut-être à même de le remplacer au cas où la rue de Solferino persisterait dans sa médiocrité.
Le succès des Listes Europe Ecologie peut s’analyser comme celui d’un vote anti-système « sympa » ou « mou ». Il n’est pas certain que ce résultat, optiquement flatteur, soit systématiquement reproductible à l’avenir (…).
Quoi qu’il en soit, le résultat des Verts, s’il doit être relativisé, doit néanmoins être pris au sérieux, car il confirme, sur le fond, que la préoccupation environnementale est ancrée dans l’électorat. Cette sensibilité n’est pas à opposer ou à mettre en hiérarchie avec des préoccupations plus sociales.
Une prime au rassemblement ?
Dans ce qu’il faut bien appeler la compétition interne à la gauche, les forces qui tirent leur épingle du jeu sont apparemment celles qui ont su jouer le jeu du rassemblement ou de l’ouverture à d’autres partenaires. C’est la cas des Verts, par opposition au PS, et du Front de gauche, par opposition au NPA. Il serait certes un peu rapide d’en conclure que cette volonté d’ouverture constitue un nouveau sésame électoral.
Mais au moins ce phénomène est-il le signe que, face à la pauvreté des idées et des propositions dans l’offre politique, les électeurs préfèrent encore l’ouverture et la dialogue à la solitude et au repli.
Le Modem
Les scores obtenus par les listes du Modem sont médiocres (1 455 225 voix, soit 8,45% des suffrages exprimés et 6 sièges au niveau national). La principale erreur de François Bayrou est probablement d’avoir voulu donner un véritable enjeu au scrutin (…).
Le MRC
(…) Au vu des résultats, le fait que le MRC n’ait pas présenté de listes apparaît plutôt comme une bonne chose. Il reste que nous nous trouvons dans une situation politique compliquée, parce que paradoxale.
Pour l’ensemble de la gauche, une des questions qui se pose est : « Pourquoi les électeurs réagissent-ils face à la crise en votant plutôt pour des formations politiques dont l’idéologie est à l’origine de la crise ? ». Pour le MRC, une question cruciale est certainement celle-ci : « Pourquoi le fait que la réalité valide nos analyses ne nous rend pas plus crédibles ? ».
Pour commencer à répondre à ces questions, il faut d’abord prendre en considération le fait qu’une majorité d’électeurs ne croit plus que des solutions efficaces existent dans l’offre politique actuelle.
Cette désillusion n’est certes pas nouvelle, mais elle touche peut-être encore plus la gauche, dans la mesure où le discours sarkoziste met en avant l’action ou du moins la détermination à agir. Le désenchantement des électeurs est bien entendu la conséquence des démissions successives de la gauche sociale-libérale devant le marché.
C’est pourquoi il apparaît urgent, à notre niveau, sur la base de nos analyses, de bâtir un programme de travail afin de présenter aux Français des propositions concrètes et articulées.
Enfin, sur le plan stratégique, l’échec du PS vient paradoxalement valider la ligne définie par le MRC au Kremlin-Bicêtre en 2008. Cet échec, lié au nombrilisme du PS et à sa soumission à l’ordre libéral, donne toute leur actualité à des propositions qui permettraient de bouleverser la donne.
Cet article est le 33ème paru sur ce blog dans la catégorie Européennes 2009.