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  • : Michel Sorin
  • : Le MRC 53 est la structure mayennaise du Mouvement Républicain et Citoyen, qui a pour but de rassembler la gauche républicaine à partir, notamment, des idées de Jean-Pierre Chevènement, l'un de ses fondateurs, qui n'est plus membre du MRC depuis 2015. Le MRC a pris le relais du Mouvement des Citoyens (MDC) après les élections de 2002. En 2022, le MRC est devenu membre de la Fédération de la Gauche Républicaine avec quatre autres organisations politiques.
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14 mai 2015 4 14 /05 /mai /2015 22:53

 

 

La laïcité n'est pas contre les religions, elle est pour la liberté de conscience

 

 

Le Parlement examine la proposition de loi des radicaux de gauche sur la neutralité religieuse dans les crèches privées, qui reprend la jurisprudence « Baby-Loup ». Voir (13 mai) : . Crèches et laïcité: Les députés votent la jurisprudence «Baby-Loup»

 

L'UFAL s'opposait à cette proposition de loi Tourret. Voir le communiqué de presse (13 mai) : Pas de financement public pour les crèches confessionnelles ! Non à la proposition de loi Tourret. Mais le contenu du texte voté par les députés satisfait l'Union des Familles laïques. Voir le communiqué de presse (14 mai) : La proposition de loi Tourret sur les crèches vidée de son contenu : l’Assemblée nationale choisit la voie de la sagesse

Finalement, l’Assemblée Nationale aura enterré avec les honneurs, ce 13 mai 2015, la proposition de loi Tourret qui, sous couleur d’« étendre l’obligation de neutralité à certaines personnes ou structures privées accueillant des mineurs » autorisait (comme nous l’avons montré) le versement de fonds publics aux crèches confessionnelles (...).

L'UFAL organise une conférence publique sur le thème de la laïcité le 30 mai 2015 à 17h à Paris. Voir www.ufal.org/laicite-liberte

La laïcité est un principe d’organisation politique qui repose sur la séparation de l’État et des Églises, la liberté de conscience étant le but, la séparation le moyen. Mais elle est aussi, et d’abord, une conviction que des militants défendent au quotidien, parfois au péril de leur vie. En organisant cette réunion publique, l’UFAL souhaite mettre à l’honneur ces militants et montrer, à partir d’exemples concrets, comment le militantisme laïque permet de défendre nos libertés et d’en conquérir de nouvelles. Liberté d’expression, liberté de « blasphème », émancipation par l’instruction, liberté de mourir dans la dignité, liberté sexuelle : autant de libertés que la laïcité rend effectives. Après l’attentat contre Charlie Hebdo et l’attentat de Copenhague, nous voulons montrer que les laïques n’ont pas l’intention de baisser les bras !

 

La position du Mouvement Républicain et Citoyen est conforme à la conception traditionnelle de la laïcité. Voir les prises de position successives de Claude Nicolet, secrétaire national en charge de la citoyenneté et de la laïcité - En savoir plus sur cet auteur

- Entretien de Claude Nicolet avec l'Est Eclair, 11 mai 2015 : "La France a besoin de réaffirmer sereinement son identité républicaine". Extrait :

Nous sommes en pleine confusion. La laïcité n'est pas contre les religions. La laïcité, c'est la liberté de conscience, l'égalité des droits et des devoirs, la recherche de l'intérêt général. C'est également comme le disait Jules Ferry, "ne rien faire qui puisse heurter la conscience des élèves". Je ne confonds pas avec les repas halal ou casher par exemple puisqu'il y a un abattage rituel avec un taxe prélevée dans un but religieux. Mais des repas de substitution doivent toujours pouvoir être prévus, pour des raisons de santé par exemple ou de choix personnel tout simplement. 

- Tribune de Claude Nicolet sur Marianne.net le 18 novembre 2014 : Les attaques contre la laïcité se multiplient : ça suffit ! Extrait.

Après le combat de la crèche Baby-Loup, après un rapport remis au Premier ministre Jean-Marc Ayrault en novembre 2013, après les déclarations de Madame Najat Vallaud-Belkacem sur le sorties scolaires, les attaques frontales contre la laïcité se multiplient et il faut bien le reconnaître, la réponse de l'Etat n'est pas à la hauteur de l'enjeu. 
Il est stupéfiant de devoir rappeler à celles et ceux qui en ont la charge, que ce sont les fondements mêmes de la République et de la citoyenneté qui sont mis en cause.

Les religions, si elles doivent être approchées dans le cadre scolaire, ne doivent l'être qu'en ce qu'elles sont un objet social, culturel, historique et anthropologique comme tous les autres. Elles ne peuvent donc être abordées qu'au titre d'objet scientifique et en aucun cas comme des croyances. Sinon il y aura automatiquement introduction d'une dimension morale qui renverrait de fait la liberté de conscience, l'agnosticisme, l'athéisme où le matérialisme à des croyances comme une autre. Voire même une discrimination vis-à-vis de ceux qui n'adhèrent pas à une religion. Et puis lesquelles enseigner ? 
Faut-il encore dire que la laïcité est la garantie de la liberté de conscience, indépassable outil au service de l'émancipation des hommes et des femmes, inséparable de l'esprit critique, ciment de la citoyenneté et de l'égalité de tous vis-à-vis de tous.


Sur le thème de la laïcité, la Fédération départementale de la ligue de l'enseignement (FAL 53) et la FSU53 invitent à une conférence d'Henri PENA RUIZ le 26 mai à 20h dans l'amphithéâtre du Lycée agricole à Laval (Mayenne).

 

Cet article est le 68ème paru sur ce blog dans la catégorie République Parlement

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17 février 2015 2 17 /02 /février /2015 23:49

 

L’habileté de Macron n’a pas suffi pour amadouer les députés frondeurs

La majorité est si branlante que le gouvernement a eu recours à la procédure exceptionnelle que lui permet la Constitution, article 49 alinéa 3, qui consiste en l’adoption sans vote d’un projet de loi, en l’occurrence le projet présenté par le ministre de l’économie, Emmanuel Macron.

Voir Vote du projet de loi Macron : 17 février 2015 à l'Assemblée nationale (16 février).

Le quotidien Le Monde (Thomas Wieder) a titré : En recourant au 49-3, le gouvernement passe en force sans jouer sa peau et parlé d’un incontestable camouflet.

« Désormais, le gouvernement ne peut plus se permettre un tel luxe. Les « frondeurs », naguère peu redoutés, sont dorénavant pris au sérieux. Pour l’exécutif, c’est un signe de vulnérabilité que nul ne peut contester. Cette faiblesse est d’autant plus manifeste que le gouvernement disposait a priori d’un atout qui pouvait laisser penser que l’adoption du projet de loi Macron se ferait plus aisément que celle d’autres textes par le passé.

Cet atout résidait dans le climat politique général de ce début d’année, ce fameux « esprit du 11 janvier » qui, pendant quelques semaines, avait semblé réduire au silence les « frondeurs ». Dans le contexte post-attentats, le gouvernement espérait secrètement que la gravité de la situation allait resserrer les rangs et que les tiraillements internes à la majorité, qui avaient été le quotidien des deux premières années du quinquennat, ne seraient plus que de mauvais souvenirs.

« L’esprit du 11 janvier », pas plus que les efforts considérables déployés par M. Macron pour convaincre les parlementaires de voter son texte n’auront donc suffi. L’on aurait pu penser en effet que les dizaines d’heures de débat, en commission puis en séance, passées à éplucher le texte, auraient fini par avoir raison des plus réticents, voire auraient permis de construire une majorité alternative en compensant les défections à gauche par des soutiens au centre et même à l’UMP. La preuve est qu’il n’en est rien. L’habileté du ministre et des rapporteurs du texte n’y a rien fait là non plus. Pour l’exécutif, c’est un incontestable camouflet ».

 

Le Figaro soutient le Premier ministre : Valls déterminé à continuer les réformes, qui se fait fort de continuer jusqu’en 2017.
"J'ai du carburant pour continuer, personne ne peut douter de notre détermination, nous continuerons les réformes jusqu'au bout, jusqu'en 2017", déclare Manuel Valls qui dit ne pas accepter "l'immobilisme, les conservatismes".

 

Le président du Mouvement Républicain et Citoyen, Jean-Luc Laurent, invite le Premier ministre à ne pas persévérer dans l’erreur et demande aux partis de la majorité de se réunir pour en parler. 

Loi Macron : le Parlement ne peut consacrer tout le printemps à un projet de loi condamné

 

Le Premier Ministre vient de décider d’avoir recours à l’article 49 de la Constitution qui lui permet de faire adopter le projet de loi « Macron » sans vote. Le recours à cette procédure constitutionnelle marque l’échec d’un projet de loi libéral et anachronique contre lequel nous avions décidé de voter. 
L’usage de la procédure 49-3 ne dissout pas les problèmes d’un coup de baguette magique: le Parlement et Gouvernement ne peuvent consacrer tout le printemps à un projet de loi condamné. Il est bien évident que nous ne voterons pas la motion de censure déposée par l’UMP mais nous invitons le Gouvernement à remiser définitivement ce texte obsolète. 
Depuis l’adoption du traité européen TSCG, le Gouvernement légifère trop souvent pour parler à Bruxelles et prouver son «réformisme structurel». Il oublie trop souvent de travailler avec la majorité issue des élections en 2012. 
En ce début d’année 2015, tout invite au changement de cap. Le recul de l’Etat, le recours au marché, la flexibilité sociale et les politiques budgétaires récessives, conduisent la France et la gauche dans une impasse. Nous sommes convaincus que la France ne pourra pas faire face à ses démons (les attentats et les fractures profondes qu’ils ont révélées) avec des politiques social-libérales du siècle dernier. Le Mouvement Républicain et Citoyen invite les partis de la majorité à débattre de cette nouvelle situation. 

 

Cet article est le 67ème paru sur ce blog dans la catégorie République Parlement

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16 février 2015 1 16 /02 /février /2015 23:49

 

Une partie de la gauche va voter contre et parle de régression sociale

 

Le projet de loi du nom du ministre de l’économie, Emmanuel Macron, sera présenté au vote de l’Assemblée nationale, en 1ère lecture, mardi 17 février, à 16h15.
L'Assemblée se prononce, par scrutin public, sur le projet de loi pour la croissance et l'activité. En savoir plus.
Présenté en Conseil des ministres le 10 décembre 2014, le projet de loi s'articule autour de trois grands principes : libérer, investir et travailler. Il ne sert qu'un seul l'intérêt : l'intérêt général. Adopté le 19 janvier 2015 par la commission spéciale mise en place à l'Assemblée nationale, le projet de loi est examiné en séance publique depuis le 26 janvier.
Voir le dossier de presse (décembre 2014) : Projet de loi pour la croissance et l'activité

 

 

Le Mouvement Républicain et Citoyen est fermement opposé à ce projet. Voir le communiqué de presse, repris par l’AFP, de Jean-Luc Laurent, président du MRC et député du Val-de-Marne :

Loi Macron : les 3 députés du MRC voteront contre une loi de résignation

Demain lors du vote solennel à l’Assemblée Nationale, les trois députés MRC voteront contre le projet de loi « croissance, activité et égalité des chances économiques ». En débat depuis le 12 janvier, avec la commission spéciale dont j’étais membre, puis en séance depuis maintenant 3 semaines, nous avons toujours exprimé aux mieux des réserves et souvent des désaccords aux nombreuses mesures de dérégulation proposées par le texte. 

Que ce soient pour les autocars, la vente des aéroports de Nice et Lyon, la privatisation de Nexter-GIAT dans le domaine de l’armement…l’ensemble témoigne d’une volonté de faire reculer la puissance publique en lien avec l’idéologie de Bercy et de Bruxelles. 

L’ouverture du capital des sociétés d’exercice des professions juridiques témoigne aussi d’une approche étroitement libérale qui traite tout sujet comme une question purement économique. Sur le travail du dimanche, le gouvernement court après la croissance, les emplois et le porte-monnaie des «touristes chinois». 

A l’inverse, le gouvernement a été hostile à la réouverture du dossier «réforme bancaire» bâclée en 2013, aux compensations légales pour les travailleurs dominicaux des grandes enseignes et des boutiques de luxe ou à l’augmentation de la présence des salariés dans les conseils d’administration des entreprises comme nous le proposions. 

Le projet de loi Macron frappe par son anachronisme. Version allégée du rapport Attali de 2007, le projet de loi cherche d’abord à convaincre Bruxelles de la volonté de « réforme » du gouvernement français. Anachronique, ce projet de loi l’est encore plus après les attentats de janvier qui auraient dû nous éloigner des dogmes du moins d’Etat et de la réduction de la dépense publique. Anachronique, le projet de loi l’est aussi 15 jours après la victoire de Syriza en Grèce, suite à laquelle le gouvernement n’a eu aucune volonté d’infléchir les politiques européennes d’austérité qui sont pourtant responsables de la panne de croissance et d’emplois que connaissent la France et la zone euro. 

Maintenir le projet de loi Macron, ses mesurettes structurelles, sa flexibilité sociale, était en soi un choix politique significatif. Le premier trimestre 2015 restera sans doute comme l’occasion manquée d’un nouveau départ pour la majorité présidentielle. Loin du volontarisme affiché, la loi Macron est le symbole de cette résignation.

Voir aussi :

- Benoît Hamon, Marianne, 16 fév. 2015 : Loi Macron : la lettre de l'équilibriste Hamon aux députés

- Gérard Filoche,  blog Mediapart, 11 décembre 2014 : ANALYSE DETAILLE DU PROJET DE LOI MACRON : En route pour le régressisme ? 

 

Cet article est le 66ème paru sur ce blog dans la catégorie République Parlement

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13 octobre 2013 7 13 /10 /octobre /2013 10:54

Revaloriser la dimension civique de cette journée

 

Comme me l’a signalé Serge Maupouet, le Haut conseil à l’intégration (voir le site) publiait, en septembre 2009, un rapport en deux volets, dont l’un était un avis relatif à "la connaissance des valeurs de la République". Voir Etudes et intégration - Faire connaître les valeurs de la République (La documentation française).

L’article 2 de la Constitution définit les attributs de la souveraineté républicaine : « La langue de la République est le français. L’emblème national est le drapeau tricolore, bleu, blanc, rouge. L’hymne national est La Marseillaise. La devise de la République est Liberté, Égalité, Fraternité. Son principe est : gouvernement du peuple, par le peuple et pour le peuple. ». Mais, d’autres symboles non inscrits dans le marbre constitutionnel incarnent également la République (…).

 

Après l’extrait concernant la laïcité (voir Intégration : connaître les valeurs de la République, notamment la laïcité - 9 octobre 2013), puis celui traitant de Marianne (voir Un symbole républicain : Marianne, figure allégorique de la République - 11 octobre 2013), de la Marseillaise (voir La Marseillaise, chant national patriotique, subit parfois des outrages - 11 octobre 2013), du drapeau national (voir Le drapeau tricolore, emblème national, l'un des symboles républicains - 12 octobre 2013) et de la devise (voir Liberté, égalité, fraternité : la devise de la République, idéal universel - 12 octobre 2013), voici l’extrait concernant la fête nationale.

 

Une fête nationale : le 14 juillet*

 

Il ne s’agit pas ici de revenir sur le déroulement de la journée révolutionnaire sur laquelle l’historiographie est imposante. On sait que c’est davantage le sens symbolique de la journée qui a compté a posteriori que l’importance politique de ce qui s’est joué avec la prise de la Bastille. Elle incarne la liberté et la lutte contre toutes les formes d’oppression et d’arbitraire. Mais le grand public continue d’ignorer que c’est davantage le 14 juillet 1790, à savoir la fête de la fédération, qui est célébrée. Commémorant le premier anniversaire de la prise de la Bastille, le Champ de Mars rassemblait le peuple, l’Assemblée et le roi réconciliés. Une messe avait été célébrée par Mg Charles-Maurice de Talleyrand sur l’autel de la patrie. La nation souveraine qui est au coeur de la démocratie républicaine prend donc naissance le 14 juillet 1790 et non 1789. Il est regrettable que le grand public ne soit pas mieux informé de cette distinction. Il est d’ailleurs observé que la Formation civique de l’OFII donnée aux étrangers ne retient que la date de 1789 et n’indique pas que le 14 juillet est devenue officiellement fête nationale le 6 juillet 1880 (sur une proposition de loi de Benjamin Raspail).

 

Le programme du premier 14 juillet officiel montre bien la volonté des parlementaires de l’époque de faire de cette fête un moment d’unité nationale autour de la République : « Distribution de secours aux indigents. Grands concerts au jardin des Tuileries et au jardin du Luxembourg. Décorations de certaines places, notamment de la place de la Bastille et de la place Denfert où l’on verra le fameux Lion de Belfort qui figurait au Salon de cette année, monument élevé au colonel Denfert-Rochereau, de glorieuse mémoire – illuminations, feux d’artifices – ajoutons les fêtes locales, comprenant des décorations, des trophées, des arcs de triomphe et le tout organisé par les soins des municipalités de chaque arrondissement avec le concours des habitants.

Deux cérémonies importantes doivent dominer toute la fête : la distribution des nouveaux drapeaux à l’armée et l’inauguration, sur l’ancienne place du Château d’eau, du monument surmonté de la figure de la République, monument qui a fait l’objet d’un concours ouvert l’année dernière par la Ville de Paris ».

Le 14 juillet tend à se résumer aujourd’hui, dans l’esprit des Français et des étrangers, au défilé militaire sur les Champs Élysée (depuis 1915) et aux bals populaires ponctués de feux d’artifice.

 

Le Haut Conseil estime que la dimension festive a peut-être trop pris le pas sur la dimension civique de la fête nationale. Le 14 juillet est aussi un moment politique pendant lequel tous les habitants du pays peuvent ressentir leur appartenance à la Nation, qu’ils en aient d’ailleurs ou non acquis la nationalité. C’est pourquoi le Haut Conseil souhaite que les élus locaux s’expriment solennellement avant les festivités auxquelles seraient officiellement conviés les nouveaux arrivants dans la commune, qu’ils soient Français ou étrangers.

 

Rappel : 14 juillet, fête nationale de la République française depuis 1880 - 14 juillet 2008

 Ce 14 juillet, la France fête la Nation, l'Europe se réunit à Strasbourg - 14 juillet 2009 

 14 juillet : en ces temps perturbés, une seule règle d'or, la République ! - 14 juillet 2011 

 

Cet article est le 65ème paru sur ce blog dans la catégorie République Parlement

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12 octobre 2013 6 12 /10 /octobre /2013 17:34

Des mots qui aident à lutter pour les droits fondamentaux

 

Comme me l’a signalé Serge Maupouet, le Haut conseil à l’intégration (voir le site) publiait, en septembre 2009, un rapport en deux volets, dont l’un était un avis relatif à "la connaissance des valeurs de la République". Voir Etudes et intégration - Faire connaître les valeurs de la République (La documentation française).

L’article 2 de la Constitution définit les attributs de la souveraineté républicaine : « La langue de la République est le français. L’emblème national est le drapeau tricolore, bleu, blanc, rouge. L’hymne national est La Marseillaise. La devise de la République est Liberté, Égalité, Fraternité. Son principe est : gouvernement du peuple, par le peuple et pour le peuple. ». Mais, d’autres symboles non inscrits dans le marbre constitutionnel incarnent également la République (…).

 

Après l’extrait concernant la laïcité (voir Intégration : connaître les valeurs de la République, notamment la laïcité - 9 octobre 2013), puis celui traitant de Marianne (voir Un symbole républicain : Marianne, figure allégorique de la République - 11 octobre 2013), de la Marseillaise (voir La Marseillaise, chant national patriotique, subit parfois des outrages - 11 octobre 2013) et du drapeau national (voir Le drapeau tricolore, emblème national, l'un des symboles républicains - 12 octobre 2013), voici l’extrait concernant la devise de la République.

 

Une devise : Liberté, Égalité, Fraternité

 

Née avec la Révolution française, la devise apparaît dans le débat public le 5 décembre 1790 dans un discours du député Maximilien de Robespierre « sur l’organisation des gardes nationales ». Antoine-François Momoro, membre du club des Cordeliers, partisan de Jacques-René Hebert, l’emploie le 29 mai 1791 et la tradition républicaine lui en a accordé la paternité. En avril 1792, la devise est publiquement invoquée lors de la « fête de la liberté ». En juin 1793, le maire de la commune de Paris, Jean-Nicolas Pache, fait peindre sur les murs : « Liberté, Égalité, Fraternité, ou la mort ». La devise est ensuite progressivement abandonnée avec la fin de la Révolution, tandis que le serment de haine aux monarchistes et aux anarchistes vient remplacer le serment de fraternité sous le Directoire de 1796 à 1799.

 

Avec la révolution de 1830, la devise fait son retour et sera popularisée par différents révolutionnaires comme Pierre Leroux, Alexandre-Auguste Ledru-Rollin mais également l’abbé ultramontain Félicité-Robert de Lamennais. C’est le 27 février 1848, sous l’impulsion de Louis Blanc que le triptyque « Liberté, Égalité, Fraternité » devient la devise officielle de la France. Elle est officiellement un symbole républicain sous la IIIe République et prend tout son sens avec l’adoption du suffrage universel. En 1880, la devise est systématiquement inscrite sur les frontons des édifices publics.

 

Au cours de la Seconde Guerre mondiale, la devise républicaine fut remplacée par la devise de l’État français de Vichy « Travail, Famille, Patrie ». La France libre reprend la devise républicaine quand, le 15 novembre 1941, lorsque le général de Gaule déclare : « Nous disons Liberté-Égalité-Fraternité parce que notre volonté est de demeurer fidèles aux principes démocratiques que nos ancêtres ont tirés du génie de notre race et qui sont l’enjeu de cette guerre pour la vie et la mort. ». Néanmoins, avant ce discours, la formule officielle « Honneur et Patrie » avait été préférée en juillet 1940. Il s’agissait, selon le général de Gaulle, de tenir compte des réticences du peuple français à l’égard de la démocratie parlementaire incarnée par la devise : « Si nous proclamions simplement que nous nous battons pour la démocratie, nous obtiendrions peut-être des éloges du côté américain, mais nous perdrions beaucoup sur le tableau français qui est le principal. La masse française confond pour le moment le mot démocratie avec le régime parlementaire tel qu’il fonctionnait chez nous avant cette guerre. Nos propres partisans, quel que soit leur origine politique et surtout nos combattants, en sont convaincus dans l’immense majorité » (8 juillet 1941).

 

C’est avec la Constitution de 1946 que la devise républicaine reprend sa place comme symbole national. Au cours des dernières décennies, la devise a fait l’objet de critiques au nom du principe de réalité. Certains invoquent que l’égalité n’est pas réalisée en France comme en témoigne l’existence de discriminations sociales, territoriales, racistes. D’autres proposent de remplacer fraternité par solidarité, notion qui leur semble moins abstraite. Il faut ici rappeler qu’une devise résume un idéal. Ce n’est pas une formule vide que l’on utiliserait uniquement pour la communication politique. Les idéaux démocratiques rassemblés dans la devise fixent à notre société un objectif qui n’ignore pas l’existence d’inégalités. L’usage aujourd’hui généralisé de l’expression « l’égalité des chances » pour définir le principe d’égalité montre cette évolution. Certes, entre idéal et réalité, la disjonction peut être criante et douloureusement ressentie. À cet égard, les nouveaux immigrants sont particulièrement exposés dans la mesure où beaucoup ont construit leur départ sur le rêve, l’idéal, d’une vie meilleure dans un pays de liberté.

 

Le Haut Conseil juge important d’expliquer aux nouveaux immigrants, mais également à tous les jeunes Français, le sens des valeurs inscrites dans la devise, les remettre dans la perspective d’un idéal politique de dimension universelle tout en insistant sur ce que les mots de la devise ont représenté pour des générations d’hommes et de femmes qui se battaient pour leurs droits fondamentaux. Il est utile de mieux leur faire comprendre le sens de cet idéal et de son imparfaite réalisation en expliquant que les inégalités sociales et territoriales qui perdurent peuvent mettre à mal cet idéal (surtout dans un contexte de crise), mais qu’elles ne le détruisent pas puisque, par la volonté politique de ceux qui gouvernent au nom du peuple, on s’attache à les réduire. On pourra également rappeler que l’égalisation des situations est un processus toujours inachevé, mais que la mise en oeuvre de l’idéal social de notre démocratie est l’affaire de tous ceux qui disposent de droits et de devoirs : élus, citoyens électeurs, étrangers.

 

Cet article est le 64ème paru sur ce blog dans la catégorie République Parlement

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12 octobre 2013 6 12 /10 /octobre /2013 15:05

Trois bandes verticales bleu blanc rouge d’égale largeur

 

Comme me l’a signalé récemment Serge Maupouet, le Haut conseil à l’intégration (voir le site) publiait, en septembre 2009, un rapport en deux volets, dont l’un était un avis relatif à "la connaissance des valeurs de la République". Voir Etudes et intégration - Faire connaître les valeurs de la République (La documentation française).

L’article 2 de la Constitution définit les attributs de la souveraineté républicaine : « La langue de la République est le français. L’emblème national est le drapeau tricolore, bleu, blanc, rouge. L’hymne national est La Marseillaise. La devise de la République est Liberté, Égalité, Fraternité. Son principe est : gouvernement du peuple, par le peuple et pour le peuple. ». Mais, d’autres symboles non inscrits dans le marbre constitutionnel incarnent également la République (…).

 

Après l’extrait concernant la laïcité (voir Intégration : connaître les valeurs de la République, notamment la laïcité - 9 octobre 2013), puis celui traitant de Marianne (voir Un symbole républicain : Marianne, figure allégorique de la République - 11 octobre 2013) et de la Marseillaise (voir La Marseillaise, chant national patriotique, subit parfois des outrages - 11 octobre 2013), voici ce qui concerne le drapeau national.

 

Un emblème : le drapeau tricolore

 

Le drapeau tricolore reprend les trois couleurs utilisées déjà sous l’Ancien Régime depuis Henri IV, premier roi à associer les trois couleurs. Le format tricolore sera repris le 14 juillet 1789 comme couleurs de la liberté. Durant la Révolution, c’est d’abord à travers le signe d’appartenance militaire de la cocarde que naît le futur emblème de la Nation. D’abord en bleu et rouge, elle s’impose car elle reprenait les couleurs de la populaire garde municipale parisienne. C’est La Fayette qui introduisit le blanc, couleur de la monarchie mais aussi présente dans la cocarde des colons américains luttant pour leur indépendance. Le sens de l’association des trois couleurs après le 14 juillet 1789 reste aujourd’hui encore discuté. C’est le 24 octobre 1790 que la Constituante crée un étendard national unitaire. L’agencement en trois bandes verticales d’égale largeur n’est alors pas unifié dans les troupes françaises. On trouve, en effet, des pavillons tricolores comprenant des losanges, des carrés, des croix, des superpositions de couleurs.

 

C’est en 1804 que Napoléon uniformise les drapeaux des régiments. Le drapeau national n’existe pas encore officiellement, mais apparaît un pavillon officiel de la Nation en application du décret du 27 pluviôse an II (15 février 1794) qui déclare que « le pavillon national sera formé des trois couleurs nationales, disposées en bandes verticalement, de manière que le bleu soit attaché à la gaule du pavillon, le blanc au milieu et le rouge flottant dans les airs ». En 1812, une ordonnance impériale décrète que le pavillon de 1794 devient drapeau national et l’impose comme pavillon militaire unique.

 

Le drapeau tricolore est également visible sous la forme de blason (accompagné du sigle RF), de l’écharpe tricolore (que tous les élus ne portent pas systématiquement), de cocarde (armée, police), le ruban lors des inaugurations, enfin le logotype de la République française obligatoire sur tous les documents administratifs depuis 1999. Le grand public est également amené à se familiariser avec le drapeau tricolore lors d’évènements sportifs au cours desquels la France est engagée, ainsi la tenue de l’équipe de France de football fait référence au drapeau (maillot bleu, short blanc, chaussettes rouges).

 

Ainsi est soulignée l’importance de ce type de rassemblement populaire quant à la familiarisation aux symboles républicains, en particulier chez les plus jeunes. Le drapeau tricolore et La Marseillaise sont les deux symboles obligatoirement convoqués lors de ces évènements d’ampleur nationale ou internationale. Il est donc essentiel que les marques d’honneur qui leur sont faites soient collectives, partagées dans l’enthousiasme tout en demeurant empruntes d’une forme de solennité.

On a pu remarquer lors du match France-Lituanie du 1er avril 2009 au Stade de France, l’effet impressionnant des milliers de drapeaux agités par les spectateurs pendant La Marseillaise. Cette animation de match a été initiée et financée par la Fédération française de football. Depuis 2008, elle a souhaité favoriser cette animation tant pour son apport visuel que symbolique dans le cadre d’un programme « d’actions de civilité » plus large.

 

Aussi, le Haut Conseil invite-t-il les organisateurs de ces rassemblements (fédérations sportives, médias, sponsors, etc.) à poursuivre leurs efforts de préparation de ces moments d’union collective autour des symboles républicains comme la distribution de milliers de petits drapeaux tricolores à l’occasion des manifestations sportives par exemple.

 

Cet article est le 63ème paru sur ce blog dans la catégorie République Parlement

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11 octobre 2013 5 11 /10 /octobre /2013 22:31

C’est l’honneur de tous les citoyens qui est alors mis en cause

 

Comme me l’a signalé récemment Serge Maupouet, le Haut conseil à l’intégration (voir le site) publiait, en septembre 2009, un rapport en deux volets, dont l’un était un avis relatif à "la connaissance des valeurs de la République". Voir Etudes et intégration - Faire connaître les valeurs de la République (La documentation française).

L’article 2 de la Constitution définit les attributs de la souveraineté républicaine : « La langue de la République est le français. L’emblème national est le drapeau tricolore, bleu, blanc, rouge. L’hymne national est La Marseillaise. La devise de la République est Liberté, Égalité, Fraternité. Son principe est : gouvernement du peuple, par le peuple et pour le peuple. ». Mais, d’autres symboles non inscrits dans le marbre constitutionnel incarnent également la République (…).

 

Après l’extrait concernant la laïcité (voir Intégration : connaître les valeurs de la République, notamment la laïcité - 9 octobre 2013), puis celui traitant de Marianne (voir Un symbole républicain : Marianne, figure allégorique de la République - 11 octobre 2013), voici ce qui concerne l’hymne national.

 

Un chant national : La Marseillaise*

 

Écrite par Claude-Joseph Rouget de Lisle dans la nuit du 25 au 26 avril 1792 à la suite de la déclaration de guerre de la France à l’Autriche, l’hymne national fut composé pour l’armée du Rhin, avant d’être entonné par les volontaires du Midi montant vers le front au cours du mois de juillet 1792 sous la conduite du docteur François Mireur qui en avait diffusé les paroles au préalable. C’est le 14 juillet 1795 que La Marseillaise devient hymne national.

 

Après avoir été interdite sous l’Empire et la Restauration, elle réapparaît après la Révolution de 1830 mais c’est la IIIe République présidée par Jules Grévy qui l’impose comme hymne officiel de la République en 1879.

La relégation de La Marseillaise au rang d’instruments d’un nationalisme guerrier due à la fois à la méconnaissance du contexte historique qui l’a vue naître et à la posture idéologique des années 1960 a contribué à l’accaparement, dans les années 1980, par l’extrême droite nationaliste de l’hymne et à la confiscation de son sens profond, à l’instar d’autres symboles comme le drapeau tricolore. Le compositeur-interprète Serge Gainsbourg avait précisément voulu contrer cet accaparement en montrant le caractère universel et moderne de l’hymne national à travers une version reggae en 1979. Cette initiative fut hélas incomprise et violemment attaquée par des groupes de parachutistes. Ce n’est qu’au milieu des années 1990, dans le contexte de réappropriation du patrimoine républicain, que La Marseillaise reprend ses droits et commence à être entonnée régulièrement et de façon « déculpabilisée »

à l’occasion de cérémonies publiques en particulier lors de rassemblements politiques de partis démocratiques.

 

L’insistance posée par la lettre de mission du ministre chargé de l’Intégration au Haut Conseil à la connaissance et au respect de La Marseillaise nécessite d’aborder la question de l’outrage et de son sens. Nous l’aborderons plus spécifiquement dans la quatrième et dernière partie de l’avis puisque l’outrage en question ne concerne pas, bien entendu particulièrement, les immigrés, mais une fraction minoritaire de la jeunesse**. Il convient d’abord de revenir à la question de l’attachement des citoyens à leur hymne. L’idée reçue pourrait laisser croire qu’ils y sont indifférents, or les condamnations unanimes, à la suite de sifflets lors des manifestations sportives prouvent le contraire. En 2005, un sondage révélait que 72 % des Français étaient attachés à La Marseillaise et 64 % déclaraient en connaître les paroles (le refrain). Les sondés la qualifiaient de patriotique (89 %) et porteuse d’un sens symbolique fort (82 %) représentant bien la France (80 %). L’accusation de violence souvent faite aux paroles de l’hymne n’était retenue que pour 41 % des sondés. Ils étaient 72 % à estimer important d’en connaître les paroles, alors que l’obligation faite par la loi du 23 avril 2005 de l’apprendre aux élèves des écoles primaires avait suscité une large opposition des syndicats d’enseignants et de certaines fédérations de parents d’élèves.

 

La question de l’outrage au symbole est ainsi posée dans la mesure où ces actes ou paroles portent atteinte aux principes politiques fondant le pacte républicain admis et respecté par les citoyens. D’une certaine manière, c’est l’honneur de tous les citoyens qui est mis en cause. Il faut, toutefois, relever la présence de dépositaires de l’autorité publique lors des évènements au cours desquels sont survenus ces incidents ; on peut penser, sans que cela ne légitime ces manifestations d’hostilité, que c’est davantage l’État comme autorité de gouvernement que la France comme nation qui était visée par les sifflets.

Dans la continuité de cette réflexion, la pénalisation de l’outrage est posée. Elle doit faire l’objet d’une explication contextualisée auprès des nouveaux immigrants lors des sessions de formation qu’ils peuvent recevoir. C’est à la suite aux incidents de 2001 (match France-Algérie) et 2002 (match Lorient-Bastia), qu’une loi a été votée le 18 mars 2003 dans le cadre de la loi sur la sécurité intérieure (LSI) : « Le fait, au cours d’une manifestation organisée ou réglementée par les autorités publiques, d’outrager publiquement l’hymne national ou le drapeau tricolore est puni de 7 500 euros d’amende. Lorsqu’il est commis en réunion, cet outrage est puni de six mois d’emprisonnement et de 7 500 euros d’amende » (loi no 2003-239 du 18 mars 2003, article 433-5-1 du Code pénal). La difficulté à faire appliquer cette nouvelle disposition est réelle comme cela s’est vu lors de la réitération de ces incidents en 2007 et 2008. Il est, en effet, fort difficile d’identifier au sein d’une foule de supporters les auteurs de ces actes et le risque d’arbitraire est grand à vouloir faire un exemple en faisant condamner quelques contrevenants.

 

Le Haut Conseil considère qu’il revient aux fédérations sportives amateurs comme professionnelles, de sensibiliser plus encore leurs publics à la dimension civique des rassemblements sportifs, sur le modèle, par exemple, du « passeport » de la Fédération française de football qui incite les joueurs à chanter l’hymne national à travers un outil distribué depuis six mois à tout joueur de plus de 16 ans sélectionné en équipe de

France. De même, le Haut Conseil recommande qu’à l’occasion des cérémonies officielles, la Marseillaise soit jouée, voire chantée.

 

* Rappel : Les paroles de La Marseillaise sont à resituer dans leur contexte historique - 28 juillet 2007

Match de foot à St-Denis : Marseillaise sifflée, République outragée - 18 octobre 2008

 

** L’école : un lieu primordial de la transmission des valeurs républicaines

 

Ceci étant posé, il est clair qu’on observe, depuis bientôt trois décennies, le retour du questionnement de la République sur la problématique de la transmission des valeurs civiques fondatrices de la Nation française dans l’héritage des réflexions des années 1880 portées par la IIIe République puis dans la République d’après-guerre (1945-1950). L’éclipse de l’instruction civique au primaire, dans les années 1970, diluée dans les activités dîtes d’éveil s’achève en 1984 lorsque Jean-Pierre Chevènement, alors ministre de l’Éducation nationale, la rétablit officiellement. Il apparaît donc bien qu’en vertu de la tradition républicaine française, c’est à l’école publique qu’incombe principalement la responsabilité de la formation civique. Dans le même ordre d’idée, la loi du 23 avril 2005, dite loi Fillon, inscrit clairement la dimension de formation civique de l’école : « Outre la transmission des connaissances, la Nation fixe comme mission première à l’école de faire partager aux élèves les valeurs de la République. Dans l’exercice de leurs fonctions, les personnels mettent en oeuvre ces valeurs ». L’article 15 bis de la loi précitée, issu de l’amendement du député Jérôme Rivière, prévoit l’apprentissage obligatoire de La Marseillaise et le rappel de son contexte historique. La circulaire de rentrée datant du 31 août 2005 reprend l’article modifié du Code de l’éducation L. 321-3 précisant, qu’aux côtés de la famille, l’école élémentaire « assure l’éducation morale » et « offre un enseignement d’éducation civique qui comporte obligatoirement l’apprentissage de l’hymne national et son histoire ».

 

À ce jour, il est bien difficile d’évaluer l’application de cette loi qui avait suscité la polémique et l’opposition de la plupart des syndicats enseignants. Si l’école est le lieu de construction primordial de la citoyenneté politique qui s’acquiert à la majorité, il est évident que l’éducation à la citoyenneté ne peut faire l’économie d’un passage par la transmission théorique des valeurs et symboles républicains. La citoyenneté n’existe qu’à travers des actes exprimant un engagement, un désir de participer à la vie publique parce que l’on partage un projet politique avec le reste de la communauté citoyenne à laquelle on décide d’appartenir à sa majorité. La question se pose alors de savoir si les actes d’incivisme sont le signe d’un rejet de la citoyenneté ou d’une quête de citoyenneté différente ?

 

Afin que le citoyen participe pleinement et concrètement aux affaires publiques qui le concernent dans le cadre démocratique républicain, il y a des notions indispensables à maîtriser. Elles viennent expliciter le sens des valeurs et symboles auxquels la République est attachée. Ces notions relèvent du droit, de la philosophie du droit et d’une culture historique dont la transmission incombe pour l’essentiel à l’école républicaine. C’est lorsque ses notions sont connues, comprises et intériorisées que la citoyenneté politique prend un sens. L’apprentissage scolaire éduque au respect des valeurs et symboles de la République, mais c’est l’intériorisation découlant de la continuité de ce parcours civique tout au long de la scolarité qui conduit à l’adhésion aux valeurs. Il est regrettable de constater que la pédagogie civique scolaire fasse parfois passer l’apprentissage de la citoyenneté politique (droit de vote, etc.) avant l’exposé historique et philosophique des valeurs et symboles.

 

Il est utile de distinguer deux espaces de transmission à la jeunesse des valeurs républicaines. Tout d’abord, l’espace privé relevant de la famille et de l’environnement du jeune. Le rôle des parents dans cette éducation citoyenne est important et doit se faire en cohérence avec ce que la société a défini comme valeurs, au fil des générations.  Dans le cas des publics migrants, il est indispensable de tenir compte de l’éventuelle disjonction existante entre ce que l’école dit des valeurs et ce que les familles peuvent en dire pour comprendre les conflits intérieurs de certains jeunes. Cette disjonction ne concerne d’ailleurs pas que les familles immigrées. L’existence de plus de quarante associations fédérées depuis 1970 au sein de l’École des parents et des éducateurs (EPE) mérite d’être signalée. En effet, ces structures, ayant pour objet de favoriser de façon concrète (suivi, soutien, projets collectifs, etc.) les interactions éducatives entre parents, professionnels de l’éducation et jeunes doivent être encouragées.  

 

Cet article est le 62ème paru sur ce blog dans la catégorie République Parlement

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11 octobre 2013 5 11 /10 /octobre /2013 17:08

A l’origine, une chanson populaire « La guérison de Marianne »

 

En septembre 2009, le Haut conseil à l’intégration (voir le site) publiait un rapport en deux volets, dont l’un était un avis relatif à "la connaissance des valeurs de la République".

Voir Etudes et intégration - Faire connaître les valeurs de la République (La documentation française).

 

L’article 2 de la Constitution définit les attributs* de la souveraineté républicaine : « La langue de la République est le français. L’emblème national est le drapeau tricolore, bleu, blanc, rouge. L’hymne national est La Marseillaise. La devise de la République est Liberté, Égalité, Fraternité. Son principe est : gouvernement du peuple, par le peuple et pour le peuple. ». Mais, d’autres symboles non inscrits dans le marbre constitutionnel incarnent également la République (…).

 

Après l’extrait concernant la laïcité (voir Intégration : connaître les valeurs de la République, notamment la laïcité - 9 octobre 2013), en voici un autre, relatif à Marianne, l’un des symboles républicains.

Le mot symbole est dérivé du grec sumbolon traduisible par «signe de reconnaissance». Le symbole est un signe (texte, objet, etc.) qui par son caractère imagé conduit spontanément à une association d’idées dans un groupe social donné avec quelque chose d’abstrait ou d’absent. Ici, la présence physique du symbole rappelle que nous vivons dans une République héritière et porteuse d’un ensemble de principes et de valeurs incarnées par ces symboles (…).

 

Un visage : Marianne

 

Marianne est la figure allégorique de la République. Elle représente autant l’idée abstraite d’une forme politique que la notion morale de liberté à laquelle elle se rattache et qui fonde l’idéal républicain. Si elle apparaît, depuis la IIIe République, quasi exclusivement sous forme de buste, la Marianne est d’abord un personnage entier porteur d’attributs symboliques qui lui donnent tout son sens :

– le bonnet phrygien incarne l’esclave affranchi et le peuple de Paris de la Révolution de 1789 ;

– la couronne signifie le pouvoir ;

– le sein nu : la mère nourricière ;

– les chaînes brisées : la liberté ;

– le triangle : l’égalité ;

– les faisceaux : l’autorité étatique ;

– la balance : la justice.

 

L’origine de la dénomination de Marianne comme symbole de la République date de 1792. Une chanson populaire en langue occitane, la Guérison de Marianne, racontait les premiers jours bouleversés du nouveau régime et Marianne y représentait la revanche des servantes contre les nobles.

Mais c’est la IIIe République qui va imposer le symbole de la Marianne par des campagnes d’exposition publique d’abord dans les mairies servant souvent d’école dans une France encore largement rurale. Les succès électoraux des Républicains à la fin du XIXe siècle ont contribué à la diffusion de l’imagerie républicaine dans les mairies. La Marianne de la IIIe République est plus sage, elle porte plus fréquemment la couronne que le bonnet phrygien rappelant davantage la violence révolutionnaire. À la fin des années 1960, dans le contexte du développement de la culture de masse, s’initie cette connivence entre République et show- business. Il est intéressant de relever cette mutation du politique dans sa conception des vecteurs de communication créateurs de lien avec les citoyens : la star de cinéma Brigitte Bardot, mondialement connue et célébrée, est ainsi devenue en 1968 la première célébrité désignée comme Marianne. Suivront Mireille Mathieu, Catherine Deneuve, Inès de la Fressange. Les polémiques commencèrent avec le choix du mannequin Laetitia Casta et surtout celui d’une animatrice de télévision fort populaire à l’époque, Évelyne Thomas. Beaucoup critiquèrent la dimension « démocratie médiatique d’opinions » incarnée par ces initiatives.

En 1999, l’État a adopté le logotype représentant le profil de Marianne reprenant les couleurs du drapeau puisqu’elle est dessinée en blanc sur un fond bleu et rouge ; la devise et la mention « République française » figurent également sur ce logotype.

 

Le Haut Conseil demande que le logotype républicain figure sur tous documents et objets émanant des services de l’État, mais également des collectivités territoriales qui sont le plus au contact de la population. Cela permettrait de familiariser le public avec les symboles républicains. Le Haut Conseil recommande également que le buste de la Marianne soit présent de façon plus systématique dans les écoles, mairies et préfectures.

 

* Rappel : L'origine des trois couleurs du drapeau français, selon Xavier Dumoulin - 30 mars 2007

Les paroles de La Marseillaise sont à resituer dans leur contexte historique - 28 juillet 2007

14 juillet, fête nationale de la République française depuis 1880 - 14 juillet 2008

 

Cet article est le 61ème paru sur ce blog dans la catégorie République Parlement

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9 octobre 2013 3 09 /10 /octobre /2013 22:55

Réguler les tensions identitaires et communautaires

Ayant lu les articles relatifs à la Marseillaise (voir Les paroles de La Marseillaise sont à resituer dans leur contexte historique - 28 juillet 2007 et Match de foot à St-Denis : Marseillaise sifflée, République outragée - 18 octobre 2008), Serge Maupouet a eu la bonne idée de me signaler les travaux du Haut Conseil à l’intégration, publiés par la Documentation française en septembre 2009.

Voir Etudes et intégration - Faire connaître les valeurs de la République.

Extrait concernant la laïcité.

 

La République française a fondé un modèle de laïcité singulier qui a servi et sert encore de modèle ou de contre modèle. La dimension multiculturelle de sociétés modernes actuelles justifierait pour certains la remise en question de ce modèle, auquel pourtant l’immense majorité des Français demeurent attachés. Le premier article de la Constitution de 1958 place la laïcité en deuxième rang des principes qui fonde la république : « La France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale ».

 

Pour faire comprendre aux nouveaux venus dans la République pourquoi la France est si attachée à sa laïcité, il faut en retracer l’histoire et dire en quoi elle est un élément essentiel de la pacification de l’espace social.

Portée par les idées des Lumières, elles-mêmes héritées de l’Angleterre et de la jeune démocratie américaine, la Révolution française constitue le départ de l’aventure laïque française. Le cheminement vers la laïcité de l’État propre à l’histoire nationale est un récit des conflits internes à la société et met en lumière la construction identitaire républicaine et démocratique.

 

Avant que l’on parle du « pacte » laïque français, il y eut une guerre idéologique et politique de

la Révolution à la veille de la Première Guerre mondiale.

Le 26 août 1789, l’article 10 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen affirme que « nul ne peut être inquiété pour ses opinions, mêmes religieuses, pourvu qu’elles ne troublent l’ordre public établi par la loi ». La rupture de l’alliance entre le trône et l’autel est affirmée par l’article 3 : la Nation est désormais seule détentrice de la souveraineté. La France est devenue un État multiconfessionnel où le catholicisme perd son monopole. L’offensive révolutionnaire a eu une motivation économique (abolition des dîmes, nationalisation des biens du clergé, interdiction des ordres religieux dont la propriété foncière revient à l’État 1789-1790), mais aussi politique avec l’obligation du serment constitutionnel en novembre 1790 et la suppression des ordres religieux et des congrégations qui s’occupaient largement d’éducation est un autre moment important de l’histoire laïque française.

 

La Constitution de 1791 va mettre fin au monopole de l’Église catholique sur l’enregistrement de l’état-civil. Naissance, mariage et décès ne sont plus considérés comme prioritairement liés à un sacrement. Les étapes de la vie du citoyen, qui n’appartient à aucun groupe communautaire, doivent être enregistrées par un agent de l’État. Le mariage devient un contrat civil susceptible d’être rompu, le divorce est ainsi reconnu. En septembre 1792, un décret imposera aux autorités municipales de se charger de l’enregistrement et de la conservation de ces données. La laïcisation de l’état civil est une étape fondamentale dans la construction d’une société émancipée des pressions et des exclusivismes religieux.

 

Après la Terreur, le régime du Directoire doit réagir face à la progression des opposants à l’affaiblissement du pouvoir de l’Église. La séparation de l’Église et de l’État est déclarée : « Nul ne peut être empêché d’exercer, en se conformant aux lois, le culte qu’il a choisi. Nul ne peut être forcé de contribuer aux dépenses d’un culte. La République n’en salarie aucun » (article 354).

Le conflit avec la papauté est insurmontable. C’est Bonaparte en signant le Concordat de 1801 avec Pie VII qui apaise les tensions en faisant du catholicisme la religion « de la grande majorité des Français » et la charte de 1814 rétablira le catholicisme religion d’État. Jusqu’en 1905, le Concordat de 1801 organisera les relations entre l’État et l’Église catholique, il reste encore en application dans les deux départements de l’Alsace et la Moselle.

 

Le refus de la modernité incarnée par les Ultras qui veulent renégocier un nouveau concordat structure la réaction anticléricale de la seconde moitié du XIXe. Pour les républicains et les libéraux français, le catholicisme n’est pas qu’une foi, c’est une structure politique aux objectifs avérés : la prise de contrôle du corps social et la mainmise sur l’État. Le camp de l’anticléricalisme ressent l’activisme de l’Église, en particulier des congrégations jésuites, comme une menace envers l’unité nationale. Ce combat contribue à l’entrée en 1871, du mot « laïcité » dans son acception moderne dans le dictionnaire.

 

Le 16 mai 1877, la victoire électorale des républicains anticléricaux permet un renforcement de la IIIe République qui revendique son projet de laïcisation de l’espace public. Ainsi, entre 1878 et 1891, des mesures sont prises pour laïciser les hôpitaux de Paris. En 1880, le repos dominical n’est plus obligatoire et en 1881 le caractère religieux des cimetières est aboli. À partir d’août 1884, les prières publiques lors de l’ouverture de la saison parlementaire sont supprimées.

En 1899 et 1905, deux lois obligent les séminaristes à effectuer leur service militaire. Le 1er avril 1904, le ministère de la Justice par voie de circulaire ordonne le retrait des crucifix dans les tribunaux. À partir de 1881, le combat laïc va se jouer sur le terrain scolaire.

 

Le 1er juillet 1901, la loi Waldeck-Rousseau peut être vue comme une réaffirmation du socle laïque républicain après l’ébranlement de l’affaire Dreyfus. Cette loi soulève l’opposition du Vatican car si la liberté d’association est facilitée de façon inédite, l’article 3 de la loi soumet les congrégations religieuses à une autorisation législative permettant leur mise sous contrôle par l’État. Le gouvernement d’Émile Combes, issu du Bloc des gauches, résiste à l’opposition violente des cléricaux et applique avec rigueur la loi de 1901. Les ordres religieux sont même expulsés et en juillet 1904 l’interdiction faite aux congrégations d’enseigner entraîne la rupture des relations diplomatiques avec le Vatican. Le Concordat de 1801 est caduc. Le projet de loi de séparation nette entre Églises et État préparé par le gouvernement Combes est mis en débat devant l’Assemblée par le gouvernement Rouvier. Aristide Briand et Jean Jaurès présentent la loi comme un texte pouvant concilier les catholiques modérés puisqu’en ne reconnaissant et en ne salariant aucun culte, l’État accorde toute liberté aux institutions religieuses pour s’organiser sous la forme d’association cultuelles.

 

Le 11 décembre 1905, la loi est promulguée. Elle sera condamnée par le pape Pie X en février 1906 et il faudra attendre 1921 pour une reprise des relations diplomatiques avec le Saint-Siège.

Après la période du gouvernement de Vichy qui remet en cause la nature laïque du régime en subventionnant les écoles confessionnelles et en supprimant la réglementation imposée aux congrégations pour obtenir l’autorisation d’exercer, la Constitution de 1946 puis celle de 1958 vont réaffirmer la nature laïque de la République en en faisant un principe constitutionnel.

 

Les combats pour la paix religieuse et sociale ont été peu rappelés aux générations d’après-guerre. Le principe de laïcité, considéré comme un acquis incontesté, se trouva mal défendu lorsqu’il fut remis en cause dans les années 1980 autour du débat sur la visibilité d’un islam radical prosélyte. La prise de pouvoir politico-spirituel sur la jeunesse française de culture musulmane en situation de relégation sociale et économique dans des quartiers abandonnés par les pouvoirs publics complétée par la volonté d’une mainmise sur le corps de la « femme musulmane » au mépris de ses droits de citoyenne ont fait l’objet d’une réponse politique qui n’a pas tout de suite été appropriée. Au milieu des années 1980, quand ces phénomènes vont émerger, on pensait qu’ils seraient rapidement défaits, à l’instar de la réaction catholique quelques décennies plus tôt.

 

Le principe de laïcité va au-delà de la sécularisation de l’espace publique, il induit une profonde relativisation sociopolitique du fait religieux. Il s’agit là d’un bouleversement philosophique auquel aucune religion ne consent. IL faut donc bien expliquer comment la France a structuré ce bouleversement et l’a imposé à l’Église en 1790 puis 1905. On peut aussi de quelle façon Napoléon 1er l’impose aux juifs français lors de l’Assemblée des notables de 1807 puis du

Grand Sanhédrin de 1808. L’islam, nouvelle communauté religieuse entrée dans la communauté nationale au milieu des Trente Glorieuses, n’hérite pas de cette même histoire. Les populations migrantes de culture musulmane des années 1950-1970 sont majoritairement d’origine africaine et en particulier maghrébine, le lien historique avec la France ramène à la période coloniale. De plus, jusqu’à la fin des années 1970, la classe politique française considère que leur présence en France n’est que temporaire et qu’après avoir travaillé, ils retourneront dans leur pays d’origine.

 

Au fil du temps, la législation évolua favorisant logiquement le regroupement des familles de migrants. Les pouvoirs publics continuèrent pourtant à mal évaluer la nécessité d’une véritable politique d’intégration. On peut en trouver une illustration dans la poursuite au sein même des écoles publiques des enseignements de langue et culture d’origine (ELCO) dispensés par des enseignants souvent envoyés des pays d’origine sur lesquels ils étaient difficile de porter une évaluation. Crée en 1925, c’est une réglementation datant de 1939 qui en fixe toujours le fonctionnement (en dehors du temps scolaire, dans les locaux scolaires, des cours de langue, d’histoire et géographie du pays d’origine).

 

La laïcité est un principe mettant en oeuvre un ensemble de règles organisant la vie publique. Ces règles communes à tous incarnent les principes républicains d’égalité et de liberté en régulant les tensions identitaires et communautaires dans une société démocratique reposant sur le respect du pluralisme.

Par la neutralité politico-religieuse de son espace public, la République garantit la libre expression et le principe citoyen qui veut que l’on reconnaisse l’individu pour son mérite et non pour son origine sociale, ethnique ou religieuse. Ce principe est de plus en plus brocardé au motif qu’il demeure, en France, des discriminations contredisant cet idéal. Mais comme nous l’avons déjà dit, le réel ne limite ni la portée ni le combat pour atteindre un idéal fondateur du pacte social. Le volontarisme partagé par tous doit permettre d’y parvenir.

 

Le Haut Conseil recommande que, dans la formation civique, soit traitée avec une particulière attention la question de la laïcité. Il souhaite qu’au-delà de l’histoire de la conquête de ce principe républicain, soit rappelée l’égalité de valeur entre la liberté de conscience et la liberté religieuse d’une part, et la laïcité de l’État et des services publics, d’autre part. Il observe en outre que les formateurs doivent mieux distinguer la laïcité de la sécularisation de la société française et notamment son lien avec les droits de l’homme et l’égalité.

 

Cet article est le 60ème paru sur ce blog dans la catégorie République Parlement

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13 juillet 2013 6 13 /07 /juillet /2013 21:24

Après cette loi, d’autres réformes nécessaires

 

En première lecture, le 9 juillet 2013, les députés ont adopté, à une majorité plus large que prévu* (300 voix, majorité absolue 289), le projet de loi interdisant le cumul d’un mandat parlementaire avec une fonction exécutive locale. Voir (Le Monde, 9 juillet 2013) :

Non-cumul des mandats : le projet adopté à la majorité absolue

PS, FRONT DE GAUCHE ET EELV MASSIVEMENT POUR

La très grande majorité des 292 députés socialistes ou apparentés ont adopté le texte, sauf quatre, dont les trois chevènementistes (apparentés PS), qui ont voté contre et dix abstentions, dont l'élue de Corrèze Sophie Dessus, qui a succédé à l'Assemblée à M. Hollande. Sept élus n'ont pas participé au vote. De même, presque tous les députés Front de gauche, ainsi que la totalité des écologistes ont voté pour le projet de loi, contre lequel se sont dressés l'UMP, la plupart des députés de l'UDI, et dans la majorité, la plupart des radicaux de gauche.

 

* Rappel : Délibération à haut risque au Parlement sur le non cumul des mandats - 5 juillet 2013. 

 

Les explications de vote de Jean-Luc Laurent et de Marie-Françoise Bechtel, députés MRC : Non-cumul: pourquoi les députés du MRC ont voté contre

 

Université d'été MRC 2010 021 T5 bonnes raisons de ne pas voter la loi sur le cumul des mandats (par Jean-Luc Laurent)

 

1. Le Parlement ne sera pas revalorisé
Il y a des députés cumulards très présents et des non-cumulards très absents: le critère du cumul ne permet pas de juger de l’implication des députés. Aujourd’hui le Parlement trouve plus difficilement encore sa place dans une 5ème République devenue hyper présidentielle. Revaloriser le rôle du Parlement nécessiterait d’abord de lui rendre des armes pour mieux légiférer, moins vite et contrôler fermement l’action du gouvernement. La Constitution de 1958 a donné à l’exécutif un arsenal lui permettant de gouverner et de légiférer sans le Parlement. Sans le supprimer, il faut commencer par réduire cet arsenal pour redonner sa place au Parlement. C'est exactement ce que ne fait pas le projet de loi qui s'attaque à la forme (le cumul) en laissant de côté le fond (rééquilibrer les relations entre l'exécutif et le législatif).

2. Mode de scrutin : les effets cachés
La réforme du quinquennat en 2000 devrait nous instruire sur les effets pas toujours souhaitables des réformes présentées comme « modernes ». Cette loi anti-cumul aura en fait deux conséquences : la réduction du nombre de députés et le passage au mode de scrutin proportionnel. La réduction du nombre de députés n'est pas un problème en soi mais cela éloignera le député des habitants (aujourd'hui un député pour 100 000 habitants en moyenne). Le maintien du mode de scrutin actuel (uninominal dans des circonscriptions à taille humaine) ne survivra pas à l’élimination des députés-maires : l’instauration de la proportionnelle sera inévitable. Ses promoteurs ne l’assument pas mais la loi va ainsi éloigner le député du citoyen.. Le mode de scrutin uninominal est aussi un facteur de respiration démocratique par rapport à l’emprise des partis et l’occasion de promouvoir des talents locaux.

 3. Un bon député est un député indépendant
Aujourd’hui beaucoup de députés de la majorité vont voter ce texte par discipline et « parce qu’il le faut bien »: l’acte inaugural de cette réforme est l’exact inverse de ce que les citoyens attendent d’un bon député. Si les députés votaient librement, ils refuseraient ce texte qui va augmenter leur dépendance aux appareils politiques et au gouvernement. Le mandat local leur prend certes un peu de temps mais il augmente la liberté des députés. La figure du député-maire n’est pas un archaïsme mais au contraire un point d’équilibre entre l'indépendance des élus et la discipline de parti, entre le législatif et l’exécutif, entre le local et le national.

4. Une loi passoire
Pour essayer de rendre son projet acceptable, le gouvernement a repoussé son application à 2017 et n’a pas voulu aller au bout en proposant le mandat unique. Demain, il sera impossible d’être député-maire mais tout à fait possible d’être député-conseiller général et député-conseiller régional. C’est incohérent et les élections de 2015 donneront lieu à un transfert vers ces mandats en prévision de l'application de la loi 2017. On aura alors remplacé des centaines de députés-maires par des centaines de maires-conseillers généraux ou régionaux. Ce n'est pas un oubli mais une façon de rendre votable le texte en réunissant les 289 voix qui, au final, seront nécessaires pour adopter cette loi. Par ailleurs, la loi contre le cumul, comme la loi transparence adoptée en juin, a laissé intactes les possibilités de cumul d’activités privées alors que, comme moi, de nombreux députés proposaient leur limitation.

5. Le député-maire est un bouc-émissaire
Au final, le député-maire ou le sénateur-maire sont les seuls visés par la loi. Aucune disposition ne limite le cumul des fonctions et des mandats locaux qui permet justement la constitution de ces bastions locaux. Au niveau national, les promoteurs du texte attendent un renforcement des parlementaires face à l’exécutif (Président de la République et Premier Ministre)…on attendra longtemps. La gauche après 1981 s’est glissée dans les institutions de la Cinquième République sans les comprendre et face aux déséquilibres, aggravés au fil du temps, on nous propose de sacrifier les députés-maires comme boucs-émissaires….d’affaiblir le député pour le renforcer. Aucun renouvellement du personnel politique n’est attendu car la loi n’aura pour résultat que d’accélérer circulation des mandats au sein du même monde politique. Au final, le non-cumul appauvrira l’offre politique (diversité des parcours, petits partis…) pour faire sortir les députés d’un moule unique.

Université d'été MRC Belfort 15 et 16 09 12 022 TUne non cumularde en faveur du cumul : Pourquoi je n’ai pas voté le projet de loi interdisant le cumul des mandats (par Marie-Françoise Bechtel)

 

Ce projet de loi vise à interdire tout cumul entre les fonctions de député et celle d’exécutif local au sens large : maire et adjoints (étendu à l’intercommunalité), président et vice-président de conseil général et régional. S’y ajoute l’interdiction de cumuler avec toute présidence ou direction d’un établissement public local. Une interdiction que j’ai qualifiée de drastique devant le Ministre de l’intérieur venu défendre ce projet à la Commission des lois.

Cette interdiction drastique m’a paru, après réflexion, trop brutale. Je comprends la logique qui écarte du mandat de député le président d’un conseil général ou régional. Ces fonctions qui obligent à gérer de nombreuses politiques publiques sur un large territoire demandent une implication mal compatible avec la fonction d’élu national sauf à laisser très largement les pouvoirs de décision aux mains des services et des cabinets. Ce n’est pas un système satisfaisant. Et on peut dire la même chose, sans doute, des fonctions de maire d’une grande ville.
Mais il reste que de nombreux maires de cités petites ou moyennes représentent dans notre pays une figure originale qui apporte plus qu’elle ne retire à la démocratie. Fallait-il leur appliquer l’interdiction de cumuler ou, au moins, fallait-il le faire immédiatement sans évaluer les effets d’une loi qui aurait pu être une première étape ?

J’ai considéré après réflexion que les arguments « pour » et « contre » le non cumul total penchaient en faveur du « contre ».

1 – un renouvellement du paysage politique ?
Il est certes justifié d’encourager le renouvellement de la classe politique afin d’éviter que ne se créent et ne se renforcent des baronnies locales où le mandat parlementaire devient une fin en soi et non une fonction au service de l’intérêt général. En face de cela, il faut toutefois rappeler la défense éloquente que faisait Pierre Mauroy, un grand républicain, du député-maire : celle d’une formation d’élites venues d’en bas, du terrain, capables par l’expérience acquise dans le mandat local de contrebalancer efficacement une pensée plus uniforme venue des élites technocratiques.

2 – Mettre fin à une exception française injustifiée ?
En vérité, le cas français est original : par l’étendue de notre territoire, par sa variété, par la légitimité historiquement acquise par le maire nous ne pouvons nous comparer à d’autres pays et l’argument de l’ « exception française » à laquelle il faudrait mettre fin me semble vain. Chacun a en réalité son exception : en Allemagne les syndicats sont un puissant levier de détection et de formation des élites. Dans les pays anglo-saxons et, parfois, nordiques, c’est le terreau associatif qui nourrit celles-ci. En France, ce sont les fonctions municipales qui permettent souvent une véritable ascension sociale, permettant aux talents de s’exercer et de monter en puissance. Il faut y regarder à deux fois avant de tarir cette source.

3 – Un député à temps plein qui travaillerait mieux que celui qui est maire ou adjoint d’une commune ?
Ce n’est pas si sûr. Le député se fait mieux connaître dans sa circonscription s’il y dispose d’une base qui lui apporte des facilités de contact avec les électeurs. A l’inverse, celui qui ne dispose pas de cette base doit passer plus de temps à rencontrer, expliquer, et soutenir les projets du territoire sans parler même de la palette des moyens dont dispose l’élu local. De sorte que le temps libéré pour sa mission première –celle d’un élu national –, en bref le temps passé au Parlement, n’y gagne pas forcément et parfois bien au contraire.

4 – Un Parlement qui sortirait renforcé de cette réforme ?
C’est la question la plus importante. Mieux faire la loi, mieux exercer la fonction législative dans son ensemble ce serait mieux remplir le mandat donné par le peuple souverain. Une élue de la sensibilité républicaine qui est la mienne ne peut qu’être sensible à cet argument.
Malheureusement, ce qui dépossède aujourd’hui le député de son pouvoir, ce qui nuit à l’exercice de la fonction législative tout entière est sans lien avec l’exercice simultané de fonctions locales du moins lorsque celles-ci ne sont pas trop étendues. Plus redoutables sont les lobbies, ce termite invisible qui mine la société démocratique, plus nocive est l’absence de contrôle de la loi nationale sur les normes européennes qui lui échappent par le haut. A ces maux véritables qui corrodent le système, la réforme du non cumul n’apporte aucune réponse.

Et maintenant ?

Cette loi, quoi qu’on pense d’elle, sera votée. Il faut donc regarder vers l’avenir. Deux réformes s’imposent, mais elles doivent être d’une ampleur suffisante :

1- au lieu de se limiter à un statut du parlementaire au sens strict, il faut lui donner les moyens de mieux se consacrer au travail législatif sans pour autant se couper du terrain. Or, ces moyens sont aujourd’hui très loin d’être suffisants : le député a en moyenne 3 collaborateurs en tout et pour tout quand le sénateur américain, qui exerce des fonctions comparables sans cumuler, dispose d’une équipe de 35 personnes. Il faudra bien un jour arriver à donner au député de vrais moyens pour agir, que ce soit sur son territoire ou dans le travail législatif lui-même. C’est un enjeu essentiel. La question du non cumul serait largement résolue si le député avait des moyens d’agir qui soient considérablement renforcés, fût-ce au prix d’une réforme réduisant le nombre des députés pour dégager les moyens nécessaires à un travail efficace.

2- au lieu de vouloir rénover le Parlement par un bricolage institutionnel avec quelque renforcement de pouvoirs ça et là, il faut une vraie révision constitutionnelle pour donner enfin au Parlement un véritable pourvoir de contrôle sur le droit européen. A cet égard, j’ai écouté attentivement les interventions de mes collègues du groupe majoritaire lors des débats sur le non-cumul des mandats : comme j’aurais aimé que ces interventions ferventes en faveur de la démocratie mettent la même ardeur à défendre la souveraineté du peuple français devant le grignotage par étapes venu d’un droit européen sans contrôle ! Voilà qui mériterait une réforme de notre Constitution. Et voilà qui rapprocherait vraiment les élus de nos concitoyens : c’est mon idée de la démocratie.

 

Cet article est le 59ème paru sur ce blog dans la catégorie République Parlement

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