Le MRC 53 est la structure mayennaise du Mouvement Républicain et Citoyen, qui a pour but de rassembler la gauche républicaine à partir, notamment, des idées de Jean-Pierre Chevènement, l'un de ses fondateurs, qui n'est plus membre du MRC depuis 2015. Le MRC a pris le relais du Mouvement des Citoyens (MDC) après les élections de 2002. En 2022, le MRC est devenu membre de la Fédération de la Gauche Républicaine avec quatre autres organisations politiques.
Par Michel SORIN
Le ministre veut un capitalisme financier durable et des salariés précarisés
Dominique Plihon, auteur de nombreuses publications*, est professeur d’économie financière à l’université Paris XIII, président du conseil scientifique d’Attac. Dans Politis, le 7 mai 2015, il a publié un article intitulé Capital contre travail. En voici un extrait.
La stratégie d’Emmanuel Macron, ministre de l’économie, étoile montante de l’oligarchie politico-financière, est claire : la réindustrialisation de la France passe par la mise en place d’une nouvelle démocratie actionnariale**. Le développement industriel requiert un « capitalisme de long terme » favorable aux entreprises et à l’investissement grâce à des financements adéquats, dont la finance actionnariale doit être le principal vecteur. Trois leviers doivent être mobilisés pour développer l’actionnariat, et assurer le rebond industriel français. En premier lieu, il faut inciter les français à investir dans les entreprises, notamment par le biais de l’actionnariat salarié, par une fiscalité et une réglementation plus favorables aux actionnaires. Deuxièmement, remobiliser les investisseurs vers le financement de l’économie, par exemple en orientant les fonds des caisses de retraite vers la détention d’actions françaises, ce qui est un signal clair pour la promotion des fonds de pension et du financement des retraites par capitalisation. Enfin, il s’agit de promouvoir l’actionnariat de long terme, propice au financement des entreprises, en attribuant un droit de vote double aux actionnaires conservant leurs titres au moins deux ans. Selon Emmanuel Macron, ces mesures permettront l’émergence d’un nouveau capitalisme financier***, condition sine qua non d’un nouvel essor de l’économie française.
Cette vision d’Emmanuel Macron, qui sous-tend la politique du gouvernement Hollande, repose sur une erreur tragique de diagnostic. La chute inquiétante de l’investissement des entreprises françaises depuis le début de la crise ne provient pas de l’insuffisance de leurs financements, alors que l’économie est inondée de liquidités à bas taux d’intérêt. La cause principale de cet effondrement industriel réside dans la faiblesse de la demande adressée aux entreprises, aggravée par la politique de transfert massif de ressources des ménages … vers les entreprises.
Mais la stratégie du gouvernement comporte une deuxième contradiction majeure. L’un des objectifs de la loi Macron, supposée « libérer l’activité », est de « flexibiliser » le marché du travail. La philosophie « social-libérale » qui sous-tend cette réforme fait du travail une marchandise comme une autre. Le contrat de travail est considéré comme une simple relation de gré à gré « librement consentie » entre l’employeur et le salarié, qui devra être régie par le code civil, ce qui permet d’alléger la protection des salariés garantie par le code du travail. Ainsi, la réforme de la justice du travail organisée par la loi Macron donne un poids accru aux juges professionnels au détriment des juges prud’homaux.
Ici réside la deuxième contradiction : le capitalisme dont rêve Emmanuel Macron fait des relations de long terme entre actionnaires et entreprises la condition du « rebond industriel », mais transforme les salariés en acteurs précarisés, plus faciles à licencier. Le contraire d’une relation de long terme entre les entreprises et les travailleurs, principale source de création de richesse pour la société !
* Voir Politis, 28 août 2014 : Dominique Plihon : « Hollande et Valls ont tué toute tentative de mener une autre politique économique
** Voir Le Monde, 24 avril 2015 : Emmanuel Macron veut « retrouver l'esprit industriel du capitalisme
*** Voir Le nouveau capitalisme (Plihon, 2009, La Découverte). Le capitalisme se transforme en profondeur depuis le dernier quart du XXè siècle sous l’effet de la globalisation financière et des nouvelles technologies de l’information et de la communication (NTIC). Émerge ainsi un nouveau capitalisme qui consacre le rôle dominant de la logique boursière. En France, ce passage au « capitalisme actionnarial » s’est effectué à un rythme accéléré à la suite de la privatisation du système industriel et financier. L’emprise croissante de la finance internationale et le développement des NTIC transforment le fonctionnement des entreprises, fragilisent le salariat traditionnel et engendrent de nouvelles tensions, dont les crises économiques et financières du début du XXIè siècle sont l’une des manifestations. Dans ce livre, Dominique Plihon analyse les mutations économiques et sociales à l’œuvre en montrant qu’elles sont de nature systémique. Il s’interroge également sur les modes de régulation et les réformes radicales susceptibles d’encadrer et de transformer le « nouveau capitalisme ». Le capitalisme sortira-t-il transformé de la crise commencée en 2007-2008 ?
Cet article est le 143ème paru sur ce blog dans la catégorie Capitalisme
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