Le MRC 53 est la structure mayennaise du Mouvement Républicain et Citoyen, qui a pour but de rassembler la gauche républicaine à partir, notamment, des idées de Jean-Pierre Chevènement, l'un de ses fondateurs, qui n'est plus membre du MRC depuis 2015. Le MRC a pris le relais du Mouvement des Citoyens (MDC) après les élections de 2002. En 2022, le MRC est devenu membre de la Fédération de la Gauche Républicaine avec quatre autres organisations politiques.
Par Michel SORIN
Vouloir amender le projet Macron est se placer dans une position d’acceptation
La Tribune de Jean-Pierre Chevènement et de Patrick Quinqueton, publiée par Le Monde (voir cet article paru le 25 juillet Dans une Tribune, Chevènement amende la réforme du Code du travail) mettait sur un piédestal le modèle allemand de participation des salariés aux processus de décision dans les entreprises, ce qui est appelé communément la Codétermination (définition La Toupie). Voir aussi ce qu’écrit Hans Böckler-Stiftung : La codétermination* en Allemagne
Dans cette Tribune, les signataires donnent l’impression de cautionner la réforme du Code du travail et de vouloir compléter celle-ci par la codétermination afin de lui donner de meilleures chances de réussite. C’est opter franchement pour le soutien à la démarche du président de la République, pendant que la gauche à l’Assemblée nationale et une majorité de français s’opposent à cette réforme libérale.
Voici deux réactions qui m’ont été communiquées par des militants du Mouvement Républicain et Citoyen (MRC), Gérard Beillard et Alain Gély.
S’inspirer de l’ordo-libéralisme et de la codétermination qui se pratiquent en Allemagne, c’est une façon de ne pas vouloir prolonger l’histoire sociale de la France. C’est effacer les combats contre le capital et les contreparties obtenues pour les plus faibles. C’est accepter la logique de produire pour un maximum de résultat financier en engageant le minimum d’effort en matière de dépenses, d’énergie et de facteur humain.
Amender le projet Macron, c’est accepter l’idéologie néolibérale qui le sous-tend et la volonté du président de la République d’imposer une marche forcée vers une Europe libérale sur le modèle allemand. C’est prendre la responsabilité d’en finir avec le modèle républicain et social solidaire. C’est considérer que nos concitoyens ne sont pas capables de décider ce qu’ils veulent pour leur pays.
Cessons d’être des idiots utiles de l’idéologie néolibérale qui vise à détruire l’équilibre social à la française.
- Alain Gély (MRC Ile-de-France)
C'est positif dans la mesure où cela témoigne d'un regain d'intérêt pour l'entreprise (en reprenant ici une idée, bonne celle-ci, du rapport Gallois) et reprend des critiques de l'entreprise dans le capitalisme financier mondialisé.
Je crois qu'on peut retenir cette contribution mais assortie de quelques remarques :
- il y a des erreurs historiques surprenantes de leur part ; en particulier : la planification, apparue puis développée dans le cadre de l'économie de guerre après 1914, n'a pas grand chose à voir avec la charte d'Amiens de 1906 qui préconise le syndicalisme révolutionnaire, ou d'action directe (reconstruction par le prolétariat de ses propres institutions), et la "double besogne" (améliorer le sort immédiat des travailleurs tout en préparant la société future) ;
- la planification n'a pas non plus, comme on le croit souvent à tort, grand chose à voir avec le marxisme d'avant Staline : elle est en est même à certains égards, dans sa version soviétique centralisée et microéconomique, la négation ! En revanche une « planification à la française », ardente obligation mise en œuvre par de Gaulle, constitue une référence utile en ce qu'elle fixe des objectifs à l'Etat tout en organisant un vaste débat avec les interlocuteurs sociaux ;
- il y a des lacunes sérieuses : quid des PME et, surtout, des "fausses PME" que constituent les holdings financiers et autres donneurs d'ordre pilotant avec peu de salariés d'énormes réseaux de sous-traitants ? Il suffirait, pour contourner la codétermination, de transférer le pouvoir vers de telles structures (quand il n'y est pas déjà !) Mais ces lacunes ne sont évidemment pas une raison pour rejeter cette proposition ;
- sur le fond politique, on semble vouloir faire un « bon usage du macronisme » » en se plaçant dans une logique d'amendement de ses projets de redéfinition du code du travail, ce qui me semble politiquement naïf. L'article présente ainsi le projet Macron comme un assouplissement du code du travail alors qu'il s'agit plutôt d'un durcissement, voire d'une entreprise de destruction ; par ailleurs, on a l'air d'accepter l'ordolibéralisme sous prétexte qu'il marcherait (ou qu'il pourrait être « En marche » ?) alors que ce ne serait pas une raison suffisante pour l'importer !
La codétermination n'est évidemment pas à rejeter - sous le prétexte polémique de « collaboration de classes » ou en référence à une hypothétique pureté du syndicalisme - mais devrait s'inscrire dans un projet plus vaste de démocratie économique et de République sociale. Il s'agirait de refonder le projet socialiste des années 70-80 en tenant compte des évolutions survenues depuis, non pour l'ânonner mais pour s'y ressourcer. Cela nécessite en premier lieu de désigner et de combattre ce qui était à l'époque et demeure plus que jamais l'ennemi principal de l'égalité citoyenne et du progrès social : "dompter les requins de la finance" ou au moins préconiser des moyens concrets de limiter leur nocivité.
Cet article est le 3007ème sur le blog MRC 53 - le 137ème catégorie Travail Economie
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