Le commissaire à l’agriculture Phil Hogan sera-t-il le fossoyeur de la PAC ?
Autres articles permettant de comprendre l’évolution de la PAC et de l’agriculture :
- (12 juillet 2008) : Michel Sorin (MRC) : une nouvelle politique agricole et alimentaire
- (13 octobre 2014) : Lycée agricole Laval : 50 ans d'agriculture mayennaise (4) par M Sorin
- (26 janvier 2016) : Agriculture, élevage, alimentation, pour la France, l'Europe, le monde
- (30 avril 2016) : Rapport Eric Andrieu (PE) : la PAC a eu un impact négatif sur l'emploi
- (8 septembre 2017) : Les éleveurs laitiers européens veulent une réforme de la PAC
Sur les bancs du Parlement européen, étonnante communauté de vue entre eurodéputés, qu’ils soient de droite, de gauche ou écologistes. Pour tous, la Commission fait fausse route.
Pour les 453 100 agriculteurs français, comme pour les 10,4 autres paysans des 28 Etats membres, l’Europe, c’est du concret. Des règles environnementales à respecter. Des formulaires à remplir. Des marchés qui s’ouvrent à l’export (comme récemment vers le Japon et la Turquie, bientôt vers la Chine ) ou des importations qui menacent (viande bovine du Canada, peut-être d’Amérique du sud). Et des subventions : 8 milliards par an, qui complètent les 5 milliards venant de la France (surtout sous forme d’allègements de charges).
Essentiel pour 60 % des fermes
Cela peut paraître élevé pour un secteur qui génère pour 70 milliards de chiffre d’affaires. Ce soutien - en moyenne de 32 000 euros par an et par exploitation - ne suffit à assurer la prospérité des exploitations françaises : sans aides, 60 % d’entre elles auraient généré des pertes en 2016.
La donne risque de changer, à la baisse. La politique agricole commune (Pac) actuelle arrive à échéance au 31 décembre 2020. Il faut préparer la suivante, qui entrera en vigueur le 1er janvier 2021 et durera 7 ans jusqu’au 31 décembre 2027. Logique, il en va de même du budget de l’Union européenne tout court, le Cadre financier pluriannuel (CFP), où l’on pioche celui de la Pac. Le CFP était, ces 7 dernières années, de presque 960 milliards, soit 142 en moyenne par an. La Pac y prélève 363 milliards sur 7 ans, soit environ 51 milliards par an.
Budget et Parlement pas synchro
Mais les rouages de l’Europe ne tournent pas tous à la même vitesse. Dans un peu plus d’un an, en mai 2019, on votera pour un nouveau Parlement européen, qui désignera une nouvelle Commission. Ces nouveaux eurodéputés, ces nouveaux commissaires et le successeur de l’actuel président de la Commission Jean-Claude Juncker, auraient 18 mois pour mettre au point un nouveau CFP et une nouvelle Pac. Et pourraient logiquement, durant le temps de leur propre mandat - 5 ans - mettre en cohérence leur politique avec leur budget.
Mais Jean-Claude Juncker met les bouchées doubles pour boucler un budget avant la fin de la mandature en cours. Concrètement, pour fin mars. Et son commissaire à l’Agriculture, l’Irlandais Phil Hogan fait de même pour la politique agricole commune. Là encore, c’est logique : la Pac, première dépense de l’Union européenne, consomme 37,8 % du budget de l’Europe. Peu importe que les recettes de l’Europe puissent varier de plus ou moins 10 milliards par an - ce que ne versera plus le Royaume-Uni - en fonction du type de Brexit qui sera tranché en octobre.
Budget en baisse
Du côté des Français, on s’inquiète. La France, première puissance agricole d’Europe, est aussi la première bénéficiaire de la Pac. La proposition de budget de Jean-Paul Juncker, à l’identique du budget antérieur, revient, avec l’inflation à venir, à des coupes de 17 % dans les aides agricoles. Pour les préserver tout en finançant de nouvelles missions (sécurité notamment), il faudrait faire passer de 1 à 1,3 % ce que l’Union prélève sur les richesses produites par les États membres. La Commission, le Parlement, les chefs d’Etats - par ailleurs sollicités pour rehausser leurs dépenses militaires au sein de l’Otan - sont condamnés à trouver un accord. Pas gagné.
Pour la suite de l’article, voir L'Europe va-t-elle bâcler sa politique agricole
- José Bové : "Introduire l'agriculture dans le Gatt a été une erreur historique"
- Eric Andrieu : « le marché ne régule pas les problèmes agricoles »
- Michel Dantin : « un déni démocratique »
- Michèle Rivasi : « libéralisme forcené et mondialisation sont incompatibles avec le bien des paysans et des consommateurs »
Cet article est le 3091 ème sur le blog MRC 53 - le 451ème, catégorie AGRICULTURE et PAC