L’impasse d’une transition écologique qui n’est ni claire ni juste
La colère populaire s’est propagée par Internet. Mais il y avait depuis longtemps un mécontentement à l’égard du pouvoir politique, jugé insensible à la dégradation des revenus des catégories populaires en raison de l’augmentation des dépenses obligatoires pour les transports et la fiscalité, notamment.
Voir à ce sujet les différences géographiques et sociologiques en France (Le Vent Se Lève, 7 février 2018, Oscar Bockel) : Les trois France : entre périphéries et métropoles
A côté d’une France Métropolitaine qui bénéficie de la mondialisation, coexistent deux France périphériques. La première, « hyper périphérique », cumule anomie et forte précarité. La seconde, parvient à mieux supporter la mondialisation grâce à la résistance de structures sociales fortes, et fait même preuve d’un remarquable dynamisme. On a pris l’habitude d’opposer deux France, il en existe en réalité pas deux, mais trois.
Contrepoints répondait, le 13 novembre, à la question : Mouvement du 17 novembre : où se situent politiquement les gilets jaunes
La raison principale de la mobilisation semble ne pas être une opposition politique à proprement parler mais plutôt une absence complète de confiance dans les promesses politiques formulées. Voir Contrepoints, 17 novembre, Paul Salaun : La colère des gilets jaunes, conséquence de l'enfumage politique
Le politologue Jérôme Sainte-Marie, fondateur de PollingVox, voit dans la mobilisation du 17 novembre un mouvement né à la base qui pourrait avoir une traduction politique de grande importance (FigaroVox, entretien, Guillaume Perrault, 18 novembre). Voir Les «gilets jaunes» font converger des électorats populaires jusqu’ici opposés. Extrait.
Quelles conséquences politiques et électorales peut entraîner ce mouvement ?
Rappelons un instant que l'accession au pouvoir par Emmanuel Macron s'est faite par la réconciliation d'électeurs issus du centre, de la gauche et de droite, mais que cette diversité politique s'est accompagnée d'une certaine homogénéité sociale. Il me semble que ce soit alors créé un «bloc élitaire», rassemblant l'élite proprement dite, ceux qui aspirent à en faire partie, et enfin, ceux qui lui délèguent volontiers la gestion des affaires publiques. Cette polarisation a mis en difficulté et le Parti socialiste et le parti Les Républicains, supplantés dans leur vocation gouvernementale. En face, le «bloc populaire» n'existait que sous une forme négative, partagé de manière irréconciliable entre lepénistes et mélenchonistes. L'existence de ces quatre oppositions sans aucune formule d'alliance concevable est la meilleure garantie de pérennité du macronisme. Cependant, le mouvement des «gilets jaunes» peut constituer une rupture décisive. Mobilisation surgie de la base même du pays, ignorant les identités politiques ou syndicales, elle produit sans même s'en soucier une forme de réunification sociale. De ce fait, la polarisation que tente Emmanuel Macron entre «progressistes» et «populistes» prend une dimension sociologique de plus en plus visible. Avec un bloc élitaire bien en place et représenté prioritairement par LREM et un bloc populaire en gestation, la transformation de l'ordre politique français se poursuit et s'accélère.
A noter la prise de position du Mouvement Républicain et Citoyen (Jean-Luc Laurent, 15 novembre) sous le titre 17 novembre, la colère est légitime et juste !
La hausse brutale et continue du prix des carburants et l'augmentation des taxes annoncée pour 2019 a entraîné un vaste mouvement d'exaspération et de colère des citoyens. Ce mouvement spontané du 17 novembre prévoit de bloquer les routes pour exiger que des mesures soient prises par le Gouvernement en faveur des automobilistes. Les réponses du gouvernement et du président de la République qui viennent d'être annoncées, ne sont pas à la hauteur du ras-le-bol qui s'exprime.
Le prix des carburants et les taxes ne sont que l’élément déclencheur d’un mouvement de contestation générale dont la lame de fond est la colère populaire face à la politique, et principalement la politique fiscale injuste menée par le Gouvernement. Il faut rappeler que la suppression de l'ISF et de la flat tax représentent 25 milliards d'économies pour les plus riches sur 5 ans.
La légitimité d’un tel mouvement ne peut pas être contestée ni disqualifiée sous prétexte de transition écologique. Bien au contraire, cette colère montre bien l’impasse d’une transition écologique hypocrite, fondée sur une « fiscalité verte » punitive pour les classes moyennes et populaires qui refuse de prendre à bras le corps les véritables problèmes : investissement public dans le logement pour permettre à nos concitoyens de se rapprocher de leur lieu de travail et investissement dans les infrastructures de transport public, seule véritable alternative à la voiture !
Les citoyens comprennent que la fiscalité supplémentaire sur les carburants constitue après les cadeaux fiscaux et dans le cadre d'une politique d'austérité, une aubaine pour l'Etat : un centime d'Euro de taxe sur le gazole c'est une recette supplémentaire de 350 millions par an ! Les mesures de compensation annoncées par le gouvernement outre qu'il s'agit d'une usine à gaz, devrait s'élever à 500 millions d'euros de dépenses alors que la nouvelle hausse des taxes sur le gazole de 6,5 centimes en 2019 rapportera 2,25 milliards d'euros de recettes supplémentaires auxquels il faut ajouter les recettes supplémentaires qui viendront de s taxes supplémentaires sur l'essence.
Cette politique est la "goutte d'eau qui fait déborder le vase". Car pour beaucoup de nos concitoyens la voiture est toujours le seul moyen de transport à leur disposition pour se rendre sur leur lieu de travail. Ces hausses inconsidérées constituent donc pour eux une atteinte à la liberté de circuler doublée d’une atteinte au droit à travailler !
Cet article est le 3114 ème sur le blog MRC 53 - le 152ème dans la catégorie France et Europe