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Le MRC 53 est la structure mayennaise du Mouvement Républicain et Citoyen, qui a pour but de rassembler la gauche républicaine à partir, notamment, des idées de Jean-Pierre Chevènement, l'un de ses fondateurs, qui n'est plus membre du MRC depuis 2015. Le MRC a pris le relais du Mouvement des Citoyens (MDC) après les élections de 2002. En 2022, le MRC est devenu membre de la Fédération de la Gauche Républicaine avec quatre autres organisations politiques.

Mayotte : il faut relancer d'urgence la production agricole et alimentaire

Les travailleurs "informels" sont la majorité de la main-d'oeuvre agricole

 

Le 14 décembre 2024, le cyclone tropical Chido a dévasté Mayotte. Voir (CiViQ, 28 décembre)Mayotte, île française des Comores, département où la vie s'est arrêtée.

 

Le 30 décembre, le gouvernement français était sur place, avec une importante délégation interministérielle. Voir Le Premier ministre François Bayrou présente le plan "Mayotte debout".

 

Le projet de loi "d'urgence pour Mayotte" a été présenté le 8 janvier en conseil des ministres. Voir (LCP Assemblée nationale, Maxence Kagni, 8 janvier) : Mayotte : ce que contient le projet de loi d'urgence pour la reconstruction après le cyclone Chido

 

La spécificité de l'agriculture

 

Concernant la production agricole et alimentaire, c'est la Confédération paysanne qui représente les producteurs mahorais. Elle appelle à la Solidarité pour faire face à l'urgence et relancer la production agricole et demande davantage d'aides pour les agriculteurs.

Voir les nombreux défis à relever pour l'agriculture mahoraise (Outre-mer la 1ère, 4 mars 2024).

 

Un universitaire, Victor Bianchini, relate la particularité de l'agriculture mahoraise (The Conversation, 9 janvier 2025).

Face au cataclysme provoqué par le cyclone Chido, l’économie informelle agricole joue un rôle compensatoire. L’île peut compter sur son système agroforestier traditionnel, le jardin mahorais, ainsi que sur des travailleurs informels représentant la grande majorité de la main-d’œuvre agricole. Avec quel avenir ?

Avant le passage de Chido, l’objectif d’atteindre la souveraineté alimentaire à Mayotte d’ici 2030 pouvait déjà sembler trop ambitieux. Après le cyclone, cet objectif paraît désormais utopique. L’attention portée sur le nombre de pertes en vies humaines occulte la situation dramatique de nombreux travailleurs précaires, français ou étrangers, avec ou sans papiers, pourtant essentiels à l’économie informelle de l’île.

Leur sort, incertain, laisse présager un choc considérable pour l’économie de l’île et surtout, pour sa sécurité alimentaire. En effet, la quasi-totalité des productions agricoles est dévastée. La perte des récoltes et la transformation des paysages laissent présager des accaparements opportunistes de terres arables. Elles exacerbent les tensions entre ayant droits et occupants précaires, désorganisant les circuits informels de production, ceci au détriment de la sécurité alimentaire des plus vulnérables.

Mayotte produit plus d’un tiers de sa consommation alimentaire

Comme d’autres économies insulaires isolées et difficiles d’accès, l’économie de Mayotte est particulièrement sensible aux aléas climatiques, notamment en ce qui concerne son agriculture. Lors de son discours de 2017 sur les Assises des outre-mer, le président de la République a insisté sur l’importance de réduire la dépendance alimentaire. À Mayotte, celle-ci s’élevait à 27 % en 2012 et aurait grimpé à 50 % en 2016.

En mai 2022, l’Agence de la transition écologique a néanmoins confirmé que Mayotte suivrait la tendance générale des départements et régions d’outre-mer (DROM) à une hausse de la dépendance alimentaire aux importations. Pourtant, l’île semble parvenir à limiter cette dynamique. Mayotte produit entre 30 % et 40 % de sa consommation alimentaire. Contrairement aux autres DROM : entre 76 % et 87 % de leurs besoins sont couverts par les importations, voire 98 % à Saint-Pierre-et-Miquelon.

Préférence des agriculteurs pour l’informel

La relative résilience de l’agriculture locale est significative, bien que 80 % de sa production ne soit pas déclarée. Le nombre de ménages agricoles déclarés a été divisé par deux entre 2017 et 2020 – passant de 9 108 à 4 315. Ce phénomène s’expliquerait par la préférence des producteurs pour le maintien dans l’informalité.

Les personnes en situation irrégulière ont principalement recours à l’agriculture comme moyen de subsistance. Elles privilégient des productions de banane ou de manioc qui ont des cycles courts. Ces travailleurs informels constituent la grande majorité de la main-d’œuvre agricole. Ainsi, rares sont les Mahorais qui cultivent aujourd’hui eux-mêmes leurs terres.

Si l’agriculture ne contribue qu’à une faible part de l’économie formelle de Mayotte, sa fonction sociale et nourricière reste cruciale. Elle garantit une certaine autonomie alimentaire pour une grande partie de sa population. Ce modèle repose principalement sur une agriculture vivrière non mécanisée, largement soutenue par une main-d’œuvre immigrée. Cette dernière est le plus souvent rémunérée à la tâche ou selon des accords oraux de métayage.

Jardins mahorais et petites exploitations agricoles

Cette relative autonomie alimentaire s’explique en partie par l’existence d’un système agroforestier traditionnel particulièrement productif et résilient : le « jardin mahorais ». Il mêle production vivrière, maraîchère, arbres fruitiers et couvrent 90 % des surfaces cultivées. Ces jardins sont fondés sur la complémentarité des espèces végétales et des coutumes mahoraises. Les manguiers et les cocotiers servent par exemple à délimiter les parcelles.
 

Ce modèle agricole a permis d’éviter des pénuries alimentaires majeures lors des blocus de l’île en 2011, 2016 et 2018. Ces exploitations agricoles sont à 79 % des micro exploitations en 2020. Elles produisent principalement des fruits, des tubercules et des fleurs : bananes, manioc, tomates, noix de coco, mangues, vanille ou ylang-ylang.

Rareté du foncier

Malgré son rôle essentiel, le secteur agricole fait néanmoins face à des défis structurels. La rareté du foncier et d’infrastructures, ainsi que la concurrence croissante entre espaces agricoles, urbains et protégés, créent des tensions. Mayotte reste le département français le plus densément peuplé après l’Île-de-France. Et seuls 23 % des agriculteurs déclarent disposer d’un titre de propriété ou d’un bail écrit. Ce désordre foncier freine l’installation des jeunes et compromet l’accès aux financements publics et bancaires.

Pourtant, le potentiel de l’agriculture mahoraise est réel. Le plan de souveraineté témoigne de l’ambition de Mayotte d’atteindre la souveraineté alimentaire d’ici 2030. De l’avis de tous, la reconstruction de Mayotte sera longue et difficile. Si l’idée de concevoir un modèle alternatif d’action publique pour relever Mayotte semble évidente, la définition de ses contours et sa mise en œuvre restent aujourd’hui un défi colossal.


 

Cet article est le 3423 ème sur le blog MRC 53 - le 497ème, catégorie AGRICULTURE et PAC

Article paru le 12 janvier 2025 sur http://mrc53.over-blog.com/

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