Le marché au secours des agriculteurs Dans sa note de conjoncture de novembre 2006, le service Etudes économiques et prospective des Chambres d’agriculture (APCA), sous la responsabilité de Lucien Bourgeois, est gagné par l’optimisme. A part la viticulture qui broie du noir et vit une des plus graves crises de son histoire, accentuée par la vendange abondante, la conjoncture sur les marchés agricoles semble la plus favorable de ces dernières années. L’agriculture française a un meilleur moral En raison de la canicule de fin juillet, la récolte de céréales a été beaucoup plus faible que prévu. Mais les prix ont compensé les pertes de quantités. De même, la crise de l’ESB (« vache folle ») a réduit les troupeaux de vaches. Moins de vaches, moins de veaux. Les prix ont remonté. En ce qui concerne les viandes blanches (poulets, porcs), après de très mauvais moments, on a pu constater une amélioration. C’est la même chose pour les fruits et légumes. Le principal problème de la viticulture est l’accroissement excessif des surfaces qui pèse sur un marché en surproduction. La PAC ne coûte pas si cher si l’on fait le bilan économique global La Politique Agricole Commune de l’Union européenne, si décriée en raison de ses excédents et de son coût budgétaire, s’en sort plutôt bien ! Les agriculteurs français perçoivent environ 7,5 milliards € d’aides directes. En ajoutant les autres subventions à la production, on arrive à 9,7 milliards €. Cela correspond à leur revenu net d’une année. Autrement dit, si ces aides étaient supprimées, le revenu agricole serait nul… Toutefois, il faut préciser que les agriculteurs, grâce à ces aides, achètent du matériel et des équipements pour une somme équivalente (9,7 milliards €). Les aides compensent la baisse des prix des produits. Cela permet aux industries agroalimentaires de bénéficier d’un approvisionnement local sécurisé au moindre coût. Ce qui en fait le premier secteur industriel de France et d’Europe. Et ce qui permet à la France de dégager un excédent du commerce extérieur, chaque année, de 8 milliards €. En 2006, l’Union européenne a réussi à dépasser les USA en matière d’exportations agroalimentaires. Malgré un territoire agricole deux fois plus petit, l’UE parvient à nourrir 150 millions d’habitants de plus que les USA, à exporter autant qu’eux, et à avoir une balance bilatérale agroalimentaire de plus en plus excédentaire. La France, les Pays-Bas et, même l’Allemagne, exportent chacun plus de produits alimentaires transformés que les USA. Ces résultats positifs pour l’économie générale conduisent à relativiser les discours sur le coût de la PAC. La dépense pour les contribuables est désormais inférieure à celle qu’ils affectent à la sécurité de leur automobile et de leur logement. Ce qui permet à Lucien Bourgeois de conclure par une formule empruntée au monde de l’assurance : « la prime ne paraît chère qu’avant l’accident ! ». Aux dernières nouvelles, les USA sont fous du maïs grain ! Selon Le Monde, daté des 21 et 22 janvier, dans un article intitulé astucieusement « L’épi phénomène », le maïs se fait rare et cher. En un an, son cours sur le marché de Chicago a doublé. Sur les quatre derniers mois, l’augmentation est de 69%. La demande mondiale de maïs est supérieure à la production, notamment sur le continent américain, premier producteur et premier exportateur. Quelles en sont les raisons ? Il y en a trois : - l’alimentation animale pour compenser les déficits en fourrages liés à la sécheresse, - les exportations vers des pays comme la Chine qui élèvent leur niveau de vie et mangent plus de viande, ce qui accroît leurs besoins en céréales, - l’utilisation des grains pour la fabrication de bioéthanol. Les USA veulent multiplier par dix leur production de biocarburants dans les dix ans. Le ministère de l’agriculture de ce pays tire la sonnette d’alarme, les stocks mondiaux de maïs ayant diminué de 31% en un an. Et cela pourrait continuer et, même, s’étendre au soja parce que les agriculteurs américains vont semer du maïs plus rémunérateur et délaisser le soja. On le voit, les temps sont au changement rapide. L’Union européenne a tout intérêt à repenser la PAC. En la refondant, pas en la supprimant.