Le MRC 53 est la structure mayennaise du Mouvement Républicain et Citoyen, qui a pour but de rassembler la gauche républicaine à partir, notamment, des idées de Jean-Pierre Chevènement, l'un de ses fondateurs, qui n'est plus membre du MRC depuis 2015. Le MRC a pris le relais du Mouvement des Citoyens (MDC) après les élections de 2002. En 2022, le MRC est devenu membre de la Fédération de la Gauche Républicaine avec quatre autres organisations politiques.
Réforme bancaire et politique monétaire vont de pair
Le grand mérite de la Fondation Res Publica est d’organiser des colloques qui font intervenir des experts sur un thème précis. Voir Colloques de la Fondation.
Le 23 janvier 2012, c’était La réforme des banques qui était au programme. Jean-Pierre Chevènement, président de la Fondation, ne pouvait être présent en raison de la campagne électorale.
Dominique Garabiol, directeur de banque, administrateur et membre du conseil scientifique de la Fondation, se chargeait de l’Accueil. Voici des extraits de son intervention.
La problématique de la réforme des banques
Une réforme fondamentale du système bancaire avait été annoncée par le G20 de Londres d’avril 2009. Les États-Unis ont engagé une réforme qui reste limitée (Dodd Frank Act). L’Union européenne a aussi traité un volet institutionnel (création d’autorités de régulation bancaire et de marché au niveau européen) mais les principales questions sont restées sans réponse novatrice. Le comité de Bâle, l’assemblée des régulateurs bancaires, a proposé des adaptations du cadre prudentiel sans en changer la philosophie. Les débats s’articulent finalement en deux thèmes majeurs que sont l’architecture des structures du système bancaire et les nouvelles règles de gestion de la politique prudentielle (…).
Le principe d’une régulation internationale et européenne
Les mouvements de capitaux étant globalisés, il apparaît d’évidence que la régulation doit l’être tout autant. Les deux objectifs légitimes d’une globalisation de la régulation sont à la fois d’éviter des arbitrages réglementaires, les intermédiaires financiers pouvant localiser leurs opérations chez le moins disant réglementaire, et de préserver l’équité concurrentielle entre les banques et entre les systèmes bancaires nationaux.
Mais le niveau international est aussi le niveau de régulation le plus faible. Le jeu des négociations rend les régulateurs très vulnérables aux pressions des lobbies, ne serait-ce qu’en raison de la technicité de la matière et l’importance des intérêts en jeu. Le souci d’arriver à des accords alors que les situations nationales sont fatalement très diverses, amènent aussi les régulateurs au plus petit dénominateur commun. Les grands groupes bancaires sont attachés à la dimension internationale de la régulation par souci d’optimisation des coûts réglementaires mais aussi parce que c’est le process qui aboutit systématiquement aux solutions qui leur laissent le plus de marge de manœuvre.
Les modèles de financement des économies sont très différents d’un pays à l’autre, 70 % étant assuré par l’intermédiation bancaire en Europe continentale alors que c’est l’intermédiation de marché qui assure cette part dans les pays anglo-saxons. Il est donc très incertain qu’une même régulation soit efficace à la fois sur la stabilité financière et sur l’équité concurrentielle. Des régulations s’appliquant à toutes les opérations dans le pays d’activité (par opposition au pays d’origine) seraient a priori plus efficaces en matière de stabilité financière mais elles seraient aussi plus coûteuses pour les intermédiaires financiers et donneraient par nature un avantage aux intermédiaires domestiques. Le choix est de nature politique : veut-on privilégier l’ouverture financière au risque de l’instabilité financière ?
Enfin, la grande limite de la régulation internationale réside dans la « flexibilité » de son application effective. Les États-Unis qui ont inspiré les règles comptables des IFRS et les règles prudentielles de Bâle II ne les appliquent pas. L’Europe qui est elle-même traversée par une hétérogénéité de cultures financières n’a pas de corps de règles en propre et applique scrupuleusement les normes internationales qui n’ont guère d’échos ailleurs. L’Europe n’est-elle pas le dindon de la farce de la régulation internationale ? Par souci d’ouverture, l’Europe n’offre-t-elle pas son marché aux quatre vents ?
L’articulation avec la politique monétaire
La mise en cause de la responsabilité des banques dans la crise renvoie aux explications comportementales de la succession des crises financières qui secouent la mondialisation depuis vingt-cinq ans. Chaque crise serait liée à un comportement déviant des gouvernements, des courtiers de crédits (cf. subprimes), des banques, des comptables (cf. affaire Enron et la bulle internet)… Si lors de chaque crise apparaît un maillon faible, son élimination ne saurait suffire à éviter la prochaine crise si la tension continue de croître sur la chaîne des circuits financiers. Cette tension naît de l’endettement global qui n’est plus maîtrisé depuis une douzaine d’années (abrogation du Glass Steagall Act). C’est l’explication systémique de la crise par opposition à l’explication comportementale.
La déstabilisation du système financier est alimentée par la canalisation des ressources monétaires vers les marchés financiers dès lors que les banques centrales s’autocensurent en considérant que seule l’inflation des biens et services est dans leur champ de compétence et qu’elles peuvent négliger avec dédain l’inflation des actifs patrimoniaux. Les incitations prudentielles à orienter les crédits vers les agents financiers ou vers les titres financiers ferment la boucle du dérapage de la globalisation financière. A tel point que l’heure est maintenant à la réduction urgente des effets de levier (deleveraging), aux désendettements, à la réduction des bilans bancaires.
Pour assainir les circuits financiers, il faudrait que ce désendettement soit focalisé sur les actifs patrimoniaux. Il faudrait, au contraire de la démarche du comité de Bâle, privilégier l’approche systémique des risques en inversant la hiérarchie de leur pondération et pas seulement en augmentant le niveau du ratio de solvabilité. Michel Aglietta proposait ainsi d’introduire les pondérations discrétionnaires sur les actifs bancaires.
Dans un rapport récent du Conseil d’Analyse Economique, Dominique Plihon propose d’utiliser les réserves obligatoires sur les actifs bancaires, tombées en désuétude depuis l’introduction de l’euro, pour différencier les différentes catégories de contreparties, entreprises ou agents financiers notamment. En tout état de cause, repenser la politique monétaire semble un corollaire nécessaire à la réforme des systèmes bancaires. Comme peut-être sur l’euro, on a une urgence mais une impréparation du débat public à ces questions.
Les autres interventions
Intervention d'Olivier Pastré, Economiste, professeur à l’Université Paris XIII.
Intervention de Jean-Michel Naulot, Membre du collège de l’Autorité des Marchés Financiers.
Intervention de Jean-Baptiste Bellon, Analyste financier spécialiste du secteur bancaire (Trapeza Conseil).
Intervention de Dominique Plihon, Professeur d'économie financière à l'Université Paris XII, membre du Conseil scientifique d’Attac.
Cet article est le 122ème paru sur ce blog dans la catégorie Capitalisme