Le MRC 53 est la structure mayennaise du Mouvement Républicain et Citoyen, qui a pour but de rassembler la gauche républicaine à partir, notamment, des idées de Jean-Pierre Chevènement, l'un de ses fondateurs, qui n'est plus membre du MRC depuis 2015. Le MRC a pris le relais du Mouvement des Citoyens (MDC) après les élections de 2002. En 2022, le MRC est devenu membre de la Fédération de la Gauche Républicaine avec quatre autres organisations politiques.
Qui peut convaincre l’Allemagne
de jouer son rôle ?
Du 5 au 7 mai, Jean-Pierre Chevènement rencontre de nombreux responsables allemands dans le cadre de la visite officielle d’une délégation du Sénat conduite par le président GÉRARD LARCHER EN ALLEMAGNE.
La réforme de la Politique Agricole Commune et la gouvernance économique de la zone euro, notamment la réponse européenne à la crise grecque, sont au cœur des discussions avec le président de la République, les présidents des deux Chambres, le Bundestag et le Bundesrat, les ministres des finances, de l’agriculture et des affaires européennes.
Avant de prendre la direction de Brême, puis de Berlin, Jean-Pierre Chevènement avait eu, hier, un entretien avec Public Sénat, qui est à voir sur son blog.
Alors que la Grèce est en proie à de violentes manifestations, après l’annonce d’un plan de rigueur drastique, le sénateur du Territoire de Belfort, ancien ministre et président du MRC, Jean-Pierre Chevènement, préfère une « relance à l’échelle de la zone euro », plutôt que des plans de rigueur. Il dénonce les dirigeants européens qui « ne sont pas à la hauteur » et « enfermés dans une philosophie libérale hyper-orthodoxe ». Entretien.
Public Sénat : La commissaire européenne aux Affaires économiques, Olli Rehn, s’est prononcée, comme Angela Merckel, pour un renforcement du Pacte de stabilité et de croissance, suite à la crise grecque. Vous avez toujours milité au contraire pour son assouplissement. Avez-vous changé d’avis ?
Jean-Pierre Chevènement : Je pense qu’il faut concevoir la zone euro comme une zone économique susceptible de bénéficier de politiques contracycliques. Les politiques keynésiennes ont réussi à chaque fois qu’elles étaient appliquées dans un cadre vaste. Plutôt que de multiplier les pactes de stabilité qui se traduisent par des plans de récession, il faudrait mieux concevoir des politiques économiques basées sur des relances à l’échelle de la zone euro. Il faut certes que la Grèce fasse des efforts pour rétablir ses comptes. Mais les grands pays devraient faire des efforts pour participer à la relance de l’économie à l’échelle européenne et mondiale.
On ne peut pas programmer dans tous les pays de la zone euro des plans de retour à la rigueur sans que cela ne signifie une récession généralisée dont l’Allemagne fera les frais au final. Elle exporte plus de la moitié de sa production en Europe, donc elle n’a pas intérêt à ce que la croissance européenne soit mise en berne.
Le plan d’aide à la Grèce est-il arrivé trop tard ?
Oui, il aurait pu arriver plus tôt, mais il y a eu des résistances. On a fait le jeu des marchés financiers et de la spéculation. De plus, le taux d’intérêt auquel on prête est trop élevé.
Les dirigeants européens ont-ils été à la hauteur ?
A mon avis, ils ne sont pas à la hauteur. Ils n’ont pas une vue d’économie d’ensemble. Ils sont enfermés dans une philosophie libérale hyper-orthodoxe, qui va leur faire imposer des plans de rigueur. Le résultat sera une récession généralisée, une crise sociale et politique dont je ne vois pas l’issue.
La Grèce pourrait-elle sortir de la zone euro ?
Tout ce qui est fait actuellement est fait pour qu’elle ne sorte pas de l’euro. Mais on ne peut rien exclure. Si elle se retrouve en défaut de paiement, elle peut choisir d’elle-même d’en sortir. Mais ce n’est pas souhaitable. Je ne suis pas pour la politique du pire. La monnaie unique, vis-à-vis de laquelle j’ai été très critique, est une monnaie qui ne repose pas sur une identité politique solide. Mais aujourd’hui, il faut essayer de trouver le moins mauvais remède.
A noter le commentaire, ce jour, de Elie Arié, ancien secrétaire national MRC, que l’on peut lire à la suite de l’article. Il commence ainsi :
Je continue à ne pas comprendre ce sauvetage de la Grèce, puisqu'on sait bien qu'elle ne remboursera jamais : la soi-disant opération juteuse pour les prêteurs de l' UE (qui prêtent à 5 % ce qu'ils ont emprunté à 1,5%) est donc illusoire (ils auraient aussi bien pu prêter à 27%), et de nouveaux plans de rigueur seront nécessaires à l'avenir : ce n'est qu'une fuite en avant, qui ne fera qu'aggraver les choses pour tout le monde (…).
Sur le site du quotidien Le Monde, ce 6 mai, Franck Van de Velde, maître de conférences en économie à l’université Lille-1, éclaire le débat (extraits).
La solution au problème du déséquilibre de compétitivité entre la Grèce et ses partenaires de la zone euro ne passe donc pas prioritairement par la politique budgétaire, mais par la politique des revenus. La croissance des salaires grecs doit certes ralentir pour s'aligner sur la croissance de la productivité, mais les pays excédentaires, au premier rang desquels figure l'Allemagne (mais aussi l'Autriche et les Pays-Bas), doivent eux aussi faire une partie du chemin dans l'autre sens, pour rattraper le retard pris par les salaires réels sur la productivité, plutôt que de persévérer dans des politiques de "modération salariale" qualifiées à juste titre de néo-mercantilistes. Il est toujours difficile d'admettre que les pays excédentaires ont une part de responsabilité dans les déséquilibres de compétitivité et de finances publiques.
Une vraie solution du problème de la dette nationale grecque passe par la relance de l'économie allemande et son inflexion vers le marché domestique, condition nécessaire à la relance de l'ensemble de l'économie européenne. Quant au traitement du problème de l'interférence entre dette publique et dette nationale, lié au fait que les dettes publiques sont pour l'essentiel des dettes extérieures, l'un des éléments d'une solution à la fois rationnelle et efficace passerait par l'"européanisation" d'une partie de l'ensemble des dettes publiques de la zone euro, qui impliquerait elle-même un vigoureux renforcement de la coordination des politiques budgétaires, une véritable politique de change et la monétisation d'une partie de la dette publique européenne, c'est-à-dire par l'élaboration d'une véritable politique économique européenne (…).
Sur le site du quotidien Libération, ce 6 mai, le président du conseil scientifique d’ATTAC France, Dominique Plihon, répond aux questions de Sylvain Mouillard (extrait).
Grèce: «Le plan d'austérité va être inefficace et même dangereux»
Il y a un effort à faire du côté des banques, qui bénéficient d'un circuit financier très pervers. Elles se refinancent auprès des banques centrales et prêtent cet argent à des taux beaucoup plus élevés. Pour mettre fin à ce phénomène de spéculation, on pourrait mettre en place un fonds européen. Celui-ci s'endetterait sur les marchés avec la signature européenne, garantie par des pays comme l'Allemagne et la France. Ces taux d'intérêt, plus bas, bénéficieraient à d'autres pays que la Grèce, comme l'Espagne et le Portugal.
Cet article est le 14ème paru sur ce blog dans la catégorie Chevènement sénateur