Le MRC 53 est la structure mayennaise du Mouvement Républicain et Citoyen, qui a pour but de rassembler la gauche républicaine à partir, notamment, des idées de Jean-Pierre Chevènement, l'un de ses fondateurs, qui n'est plus membre du MRC depuis 2015. Le MRC a pris le relais du Mouvement des Citoyens (MDC) après les élections de 2002. En 2022, le MRC est devenu membre de la Fédération de la Gauche Républicaine avec quatre autres organisations politiques.
Julien Landfried et Laurent Pinsolle, proches sur le fond
Pendant cette seconde quinzaine d’août, le débat politique a continué sur la question de la dette et de l’euro. En tant que secrétaire national du Mouvement Républicain et Citoyen, Julien Landfried a proposé un premier texte, publié le 15 août sur le site LeMonde.fr (voir Le blog politique de Julien Landfried)
Crise de la dette: quelle devrait être la politique de la France ?
Quelle devrait être, dans la situation actuelle de déflagration de la zone euro, la politique de la France ? L'aggravation des divergences économiques, prévue de longue date par de nombreux observateurs, a d'ores et déjà conduit la zone euro dans une zone d'incertitude telle que c'est l'avenir même de la monnaie unique qui est en jeu. Le temps où l'on pouvait déclarer à qui voulait l'entendre que "l'euro nous protège" est désormais révolu. Rien ne pourra se faire sans une remise à plat du fonctionnement de l'euro, initiative que la France devrait prendre à très court terme. C'est la faute de M. Sarkozy que de n'avoir su mener cette politique et celle du Parti socialiste que de n'y voir qu'une carence personnelle, alors que la politique capable d'éviter l'effondrement de l'euro suppose un changement en profondeur de la stratégie économique en Europe.
La France peut d'abord légitimement faire comprendre à l'Allemagne que le taux de change actuel de l'euro est le principal problème de la zone. Seule l'Allemagne peut aujourd'hui supporter à moyen terme une telle surévaluation de l'euro, qui asphyxie littéralement l'industrie des autres pays (mais aussi ses services, notamment le tourisme), tout particulièrement des pays périphériques. Il ne peut pas y avoir de redressement économique de la zone euro avec un euro surévalué. Telle devrait être la première exigence française : faire baisser le cours de l'euro par une action concertée avec la Banque centrale européenne (BCE), qui nécessite bien entendu l'aval de Berlin. L'Espagne, l'Italie, le Portugal et la Grèce ne pourraient qu'appuyer une telle exigence française. Si l'euro se rapprochait d'une parité stricte avec le dollar (et partant avec le yuan), l'activité économique redémarrerait et les comptes publics se redresseraient de manière significative. Le niveau de pression des marchés financiers sur les dettes publiques européennes se réduirait. Cette politique, il faut le noter, ne commande aucune dépense publique supplémentaire.
La seconde exigence française conduirait à une réforme des statuts et missions de la BCE. D'abord l'ajout de la croissance et l'emploi dans ses statuts, afin d'équilibrer le policy mix européen. Ensuite sa coordination avec un Ecofin chargé de fixer la politique de change conforme à l'intérêt de l'ensemble de la zone (et pas uniquement de la nouvelle "zone mark" comme c'est le cas actuellement). Ici encore, le France recevrait l'appui du Sud mais aussi de partenaires comme la Belgique. Cette coordination marquerait l'entrée de l'industrie et du monde du travail dans la politique de la zone euro, alors que c'est aujourd'hui le secteur financier qui commande les décisions de la BCE. Elle éviterait des cas de surévaluation manifeste et de longue durée de la monnaie unique.
La troisième et dernière exigence de la France : réorienter la politique allemande qui mène depuis dix ans une stratégie non coopérative qui a détruit l'industrie de ses voisins, par contraction de sa demande intérieure et réduction de ses coûts de production. Le salariat outre-Rhin ne verrait pas d'un mauvais œil un rééquilibrage de son pouvoir d'achat, pas plus que les partenaires commerciaux de l'Allemagne. Cette relance allemande, d'un niveau raisonnable, s'appuierait uniquement sur une relance salariale.
D'abord, la substitution des eurobonds aux programmes des fonds structurels européens qui se sont révélés inaptes à donner aux pays périphériques une industrie ex nihilo. Ceci déchargerait les contribuables des pays centraux de la zone euro de subventions dispendieuses qui contribuent à creuser leurs déficits publics. Cela constituerait un signal sans ambiguïtés donné à l'opinion publique allemande que chaque pays entend développer un tissu économique robuste et concurrentiel. Cette réorientation serait d'autant plus crédible qu'elle se déploierait à l'abri d'un taux de change redevenu compétitif.
Ensuite, chacune des économies de la zone devrait s'engager à re-nationaliser sa dette publique, par un mécanisme dit de "dette perpétuelle", faisant d'abord appel à l'épargne nationale. Ce mécanisme ne pose pas de difficultés majeures aux pays à forte capacité d'épargne comme la France, mais obligera les pays où les ménages sont fortement endettés (comme l'Espagne) à un effort très important. En procédant ainsi, les pays de la zone euro se soustrairaient à la pression des agences de notation en comptant d'abord sur leurs propres forces plutôt que sur de versatiles marchés financiers.
Ces deux conditions sont diamétralement opposées au fonctionnement actuel de la zone qui oppose un centre industrieux (l'Allemagne) et une périphérie spécialisée dans la consommation (les pays du Sud). Cette configuration est bien entendu intenable dans la durée. Ce "pack" de propositions françaises donnerait une véritable crédibilité de long terme à l'euro, et dessinerait un accord acceptable pour chacune des parties.
Il faut parier sur la lucidité du gouvernement allemand à entendre des propositions françaises, conformes à nos intérêts mais aussi à l'intérêt européen tout entier. Si l'Allemagne a été la principale bénéficiaire de l'euro, elle serait aussi la principale perdante en cas de disparition de la monnaie unique. La route de Francfort passe par Berlin. Et la politique de la France suppose de mener une stratégie diplomatique et économique qui ne résume pas à l'asservissement au "triple A" et à un secteur financier qu'il faudra bien réduire dans les années à venir.
Source : LeMonde.fr
Le 23 août, c’est le site Rue89 qui publiait les propositions de Julien, secrétaire national du MRC :
Cinq mesures pour soustraire la politique à l'empire de la finance
Comment nommer un système politique dont les maîtres sont les grandes banques, les banques d'affaires et les compagnies d'assurance ? Il faut ici affirmer l'enjeu essentiel des prochaines années, pour un gouvernement français authentiquement républicain, de soustraire les politiques publiques et l'économie réelle à la prédation financière.
Les idées directrices ci-dessous pourraient inspirer un tel gouvernement.
1/ Réduire la dépendance de l'Etat aux marchés financiers par une politique de renationalisation de la dette publique
Il s'agit pour l'essentiel de financer les besoins de l'Etat et des organismes de Sécurité sociale par un appel direct à l'épargne des ménages français (mécanisme dit de « dette perpétuelle »). Ces derniers ne sont pas plus mauvais juges de la pertinence d'une politique économique que les opérateurs de marché, bien au contraire, et ils ne perçoivent pas l'Etat sous l'angle unique du débiteur.
2/ Ecarter les anciens dirigeants du secteur bancaire et financier des autorités ministérielles, des conseillers ou des postes de régulateur des autorités de contrôle
La porosité des institutions gouvernementales aux intérêts financiers doit être réduite au maximum, afin d'éviter les possibilités de manipulation, de lobbying ou de délit d'initié. Un certain secret doit entourer les décisions de politique économique et financière du gouvernement, car celles-ci devront sans doute frapper dans le futur le secteur bancaire et financier.
Il est donc crucial que les dirigeants de ces derniers soient tenus à l'écart de ces décisions et qu'ils en subissent le plein effet. Ce point est fondamental car l'épisode de la gestion de la crise financière illustre jusqu'à la caricature l'impunité totale dont ont bénéficié les fauteurs de troubles et la complaisance dont ils jouissent dans les milieux politiques.
3/ Face à la gigantesque crise bancaire qui s'annonce, mettre les banques sous tutelle par l'Etat et remplacer leurs dirigeants
Les dirigeants actuels des banques doivent être écartés et remplacés par des personnels au-dessus de tout soupçon. Des dirigeants de l'industrie, formés par l'économie réelle (c'est-à-dire par la production industrielle) ou des commis de l'Etat (indépendant par culture des habitus du monde de la finance) rempliraient idéalement ce rôle.
Il faut noter ici que ce sont les banques qui étaient managées par des « ringards » (dixit le monde de la finance) qui ont en définitive bien géré leurs affaires (le cas de la Banque Postale en France est emblématique).
4/ Réduire le poids de la finance dans l'économie et les élites en commençant par les grandes écoles
Le problème économique posé est celui de la prédation de la finance qui a crû plus vite que l'économie réelle. Une saine politique devrait consister à réduire son poids (en part du PIB comme en nombre de salariés) dans les prochaines années.
A ce titre, une politique indispensable de réorientation des jeunes élites diplômées doit être menée vigoureusement. Les grandes écoles financées par l'Etat doivent être réorientées vers les besoins fondamentaux de l'économie (santé, énergies renouvelables ou décarbonnées, Internet, enseignement, recherche, etc.). Les jeunes diplômés de ces grandes écoles qui ont vu financer leurs études par l'Etat (comme c'est par exemple le cas à l'Ecole polytechnique, à l'Ecole normale supérieure ou à l'ENA) doivent remplir leurs obligations auprès de celui-ci.
Les sanctions financières prévues en cas de manquement à ces devoirs doivent être à nouveau appliquées, ce qui n'est plus le cas aujourd'hui. Cette politique de bon sens réaffirmerait l'autorité de l'Etat républicain tout en rappelant les élites à un devoir de décence trop souvent oublié.
5/ Cesser de mentionner dans les discours gouvernementaux les avis des institutions financières et des agences de notations
Face aux entreprises de subversion menées par certaines institutions financières et agences de notation, le gouvernement doit cesser toute référence à leurs avis ou conseils. « La politique de la France ne se décide pas à la Corbeille », affirmait le général de Gaulle.
Le drame actuel est que, dans la tête des élites, domine le logiciel imposé par le monde de la finance. Il faut dès lors rendre étanches les discours des autorités gouvernementales de celui des institutions financières pour autonomiser la sphère de la décision politique (…).
Source : Rue89
Laurent Pinsolle, porte-parole de Debout La République, s’était exprimé sur son blog (voir Blog gaulliste libre) le 22 août, puis le 27 août, précisant convergences et divergences avec les positions du MRC.
Photo : Laurent Pinsolle, lors de l'université d'été 2010 du MRC à Valence
Suite à mon papier interpellant le MRC dans le débat sur l’euro, Julien Landfried, secrétaire national et porte-parole de Jean-Pierre Chevènement, m’a répondu sur son blog, révélant une vraie divergence d’analyse (…).
Je crois justement qu’il faut sauter de l’avion car malheureusement, toutes ces réformes, aussi pertinentes soient-elles, ne reviennent qu’à re-disposer les fauteuils sur le pont du Titanic. Cette année de débats sur l’euro m’a renforcé dans la conviction que cette monnaie unique ne pourra jamais marcher et que même si les réformes majeures proposées par le MRC étaient mises en place, cela ne serait pas suffisant.
D’ailleurs, si je reconnais volontiers que ces mesures amélioreraient la situation globale de la zone euro, elles ne permettraient pas de régler les problèmes très différents qu’ont les pays qui la composent. Qu’adviendrait-il des bases productives grecque, espagnole, italienne et même française, de moins en moins compétitive par rapport à l’Allemagne ? Je crois que les pays de la zone euro sont simplement trop différents pour partager la même monnaie.
Voir Sur la position de Chevènement et du MRC sur l'euro: réponse à Laurent Pinsolle
Cet article est le 96ème paru sur ce blog dans la catégorie MRC national.