Le MRC 53 est la structure mayennaise du Mouvement Républicain et Citoyen, qui a pour but de rassembler la gauche républicaine à partir, notamment, des idées de Jean-Pierre Chevènement, l'un de ses fondateurs, qui n'est plus membre du MRC depuis 2015. Le MRC a pris le relais du Mouvement des Citoyens (MDC) après les élections de 2002. En 2022, le MRC est devenu membre de la Fédération de la Gauche Républicaine avec quatre autres organisations politiques.
Par Michel SORIN
« Lisez Chevènement, c'est de la politique, pour de vrai »
Le 12 novembre 2013, la "Cité des livres" de la Fondation Jean Jaurès recevait l'auteur d'un opuscule qui fera date 1914-2014 : l'Europe sortie de l'histoire? (Fayard, octobre 2013, 342 pages, 20 euros). Le même auteur, Jean-Pierre Chevènement, pour son précédent ouvrage « La France est-elle finie ? », chez le même éditeur, avait reçu le prix du livre politique 2011.
Dans son édition de Novembre 2013, la revue "Esprit critique" de la Fondation Jean Jaurès a publié la critique de Thierry Germain. Voir Esprit critique - Publications - Fondation Jean-Jaurès. Extrait (2ère partie). Rappel (1ère partie) : Fondation Jean Jaurès : le livre de Chevènement vu par Esprit Critique - 13 novembre 2013
1914-2014 : l’Europe sortie de l’Histoire ?
(…) Pour la monnaie, il y voit le signe le plus évident d’une Europe libérale « piégée dans la deuxième mondialisation » et qui, loin de permettre aux Européens d’affronter la globalisation, les empêche en fait de le faire. Faisant fi de l’hétérogénéité des situations, durablement surévalué, bâti hors des peuples et très largement au profit d’une puissance (l’Allemagne) qu’il était tout au contraire censé mettre au service d’un continent mieux équilibré, l’euro est « un dogme qui coûte cher ». Revenant sur les sommets européens (et notamment celui des 9 et 10 mai 2010), il en détaille les choix faits au nom de sa préservation à tous prix de la monnaie unique, avec à la clé une cascade de plans de sauvetage et l’austérité généralisée sur le continent.
Rôle et fonctionnement de la Banque centrale européenne (BCE), distorsions compétitives, déséquilibres Nord/Sud, absence de politique de changes, crise de l’emploi : ces éléments sont rappelés mais l’auteur va plus loin. En évoquant la construction d’un continent réellement harmonisé et donc les transferts massifs que sous-entend selon lui la réussite d’une monnaie unique, il démontre du même coup les limites des ajustements qui pourraient être réalisés autour de politiques de convergences, voire d’un gouvernement économique. D’autant qu’il faut bien prendre en compte le déficit démocratique profond dans lequel se trouve aujourd’hui l’Europe.
Concernant l’hégémon, Jean-Pierre Chevènement insiste sur trois aspects : l’absence de régulation du capitalisme depuis la première mondialisation, la question centrale de la démocratie au sein de cet ensemble mondialisé, la question toujours posée de l’hégémonie en son sein. « Faire revenir l’Europe dans l’histoire », c’est donc l’investir pleinement dans ce besoin criant de régulation qui caractérise la mondialisation économique, et rompre ainsi l’inquiétant face-à-face qui s’organise peu à peu entre les Etats-Unis et la Chine.
Pour cela, il faut restaurer l’équilibre interne de notre continent en s’appuyant d’abord, au juste croisement de l’indispensable bataille pour la compétitivité et des acquis de la République, sur un véritable projet français. L’enjeu central est de « reconquérir notre souveraineté pour la mettre au service d’un véritable projet européen ».
Comment y parvenir ? Pointant l’insuffisance des mécanismes européens (MES) face aux enjeux affrontés, énonçant le dilemme de l’Allemagne – entre la préservation de sa compétitivité (largement acquise au détriment des autres pays du continent) et son rôle central dans la construction européenne –, démontrant à quel point les élites françaises et européennes ont refusé jusqu’à présent de réellement interroger les mécanismes profonds de la construction européenne telle qu’engagée, l’auteur appelle à un sursaut autour de quatre points majeurs :
– Poursuivre l’Europe autour des nations (nations « post-nationalistes » s’entend), avec la création notamment d’une assemblée juxtaposant les parlements nationaux, la nécessaire revalorisation du Conseil européen et la mise en place d’une gouvernance à géométrie variable (notamment dans le cadre de la politique économique et monétaire) ;
– Pour, dans cette confédération, redonner à chaque nation sa responsabilité tout en préservant l’Europe, remplacer la monnaie unique par une monnaie commune, l’une des propositions phares du sénateur de Belfort. Constatant l’impossibilité d’un plan de sauvetage économique qui s’appuierait sur la BCE (refus de l’Allemagne, poids des statuts, hétérogénéité des situations nationales), Jean-Pierre Chevènement prône une monnaie commune qui permettrait de retrouver des mécanismes internes d’ajustement entre les différentes économies ;
– Cette politique se ferait d’abord en refondant la relation franco-allemande dans de nombreuses dimensions, puisque « les nations ne se laissent pas résumer à leurs chiffres d’affaires » ;
– Enfin, il s’agirait d’entreprendre la mise en oeuvre de cette politique au niveau d’une « grande Europe » dont les deux partenariats stratégiques seront à l’Est (en premier lieu la Russie) et au Sud (la Turquie et les pays du nord de la Méditerranée).
Rien de bien neuf, diront certains. La constance en politique peut être une vertu à ne pas négliger. Et un responsable qui embrasse l’histoire, la géographie, l’économie et la politique avec une vue à la fois large et profonde peut, agréablement, nous changer de ceux dont l’horizon semble se résumer à d’hypothétiques points de croissance ou quelque inespéré retournement de conjoncture.
Même si c’est pour bien vous assurer de vos désaccords, lisez Chevènement. C’est de la politique, pour de vrai.
Cet article est le 181ème paru sur ce blog dans la catégorie CHEVENEMENT
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