Un programme réaliste pour rassembler la Nation
C’est l’histoire de jeunes militants de Génération République, qui soutenaient Jean-Pierre Chevènement en 2002. Ils sont restés en relation amicale, en étant dispersés entre ceux qui sont restés avec Chevènement (Julien Landfried) et ceux qui sont partis au PS, avec Montebourg (Gaël Brustier et John Palacin), Hollande (Olivier Jouis) ou Valls (Sébastien Gros), sans compter celles et ceux qui sont allés ailleurs.
Cela m’a donné l’idée de rapprocher les interventions de Montebourg, Hollande et Chevènement, lors des trois dernières universités d’été du Mouvement Républicain et Citoyen (MRC).
On constate que Montebourg voulait depuis 2002 sortir le PS du formol et que Hollande avait, en septembre 2010, les idées claires sur ce qu’il allait faire dans la perspective de l’élection présidentielle 2012. Quant à Chevènement, il a donné dans son livre « Sortir la France de l’impasse » ses propositions de solutions. Voir Pour "sortir la France de l'impasse", il faut une politique alternative (Julien Landfried, 10 octobre).
N’en déduisons pas trop vite que ces trois hommes vont se mettre ensemble dès maintenant en vue de l’élection présidentielle. Il me semble qu’il y a place pour une candidature Chevènement à côté de celle qui sortira de la primaire PS, avec désistement mutuel au second tour. Le président d’honneur du MRC en décidera prochainement, probablement avant la fin octobre.
Arnaud Montebourg (Toulouse, septembre 2009)
Arnaud Montebourg veut rassembler la gauche sur de nouvelles bases - 20 novembre 2010 (résumé de son intervention lors de l’université d’été du MRC en septembre 2009 à Toulouse).
Après le 21 avril 2002, il fallait reconstruire le socialisme, le monolithisme de la pensée du PS devenant dangereux. Il y eut le débat sur la position à prendre au référendum européen le 29 mai 2005. Au Parlement européen, les élus socialistes français s’alignaient sur le Parti Socialiste Européen (PSE), favorable dans tous les pays à la dérégulation.
Le PS présentait comme positif tout ce qui, dans les décisions internationales, allait dans ce sens. Pendant dix ans, il a été impossible de faire bouger le PS sur le libre-échange. La défaite de 2007 a eu un coût énorme pour la gauche.
Sarkozy a pu réconcilier la droite avec les couches populaires. Nous avons une société extrémiste, barbare. Que faut-il faire ? On ne le sait pas encore. Mais, dans les composantes de la gauche, il y a les éléments de renouvellement de l’offre politique. Il manque celui qui tiendra la plume. Comme Jean-François Kahn, je rends hommage à Jean-Pierre Chevènement (…).
Par le rassemblement de la gauche, il faut viser à transformer le système productif et la manière de vivre, en réunifiant les couches sociales sur la base de l’intérêt général et en mettant à contribution les multinationales. La mondialisation, qui est une dérégulation, spolie nos intérêts industriels, avec des conséquences sur les couches populaires, qui s’éloignent de nous.
Il faut aller vers des reconstructions originales, prenant appui sur l’internationalisme des travailleurs. La question européenne est centrale. Ce n’est plus seulement la question du oui ou du non de 2005. Je suis contre l’élargissement à la Turquie et à d’autres pays. Ce qu’il faudrait, c’est un gouvernement mendésiste qui s’appuie sur les citoyens. La France a des ressources politiques. Elle se relèvera par la démocratie. Comment sortir de ce bourbier ? L’euro survivra-t-il ? L’européen que je suis est inquiet (…).
François Hollande (Valence, septembre 2010)
Université d'été MRC à Valence : le dialogue Chevènement-Hollande - 9 septembre 2010
Après avoir fait la liste des interrogations concernant la France de 2010, François Hollande précise les cinq défis à relever en 2012 :
- La place de la France dans la mondialisation. Depuis dix ans, la France a reculé. Il faut retrouver un chemin productif. Il faut proposer au pays un pacte productif, et aux entreprises une logique coopérative tournée vers l’investissement.
- La mutation écologique. La tendance est à renouveler les énergies, garder le nucléaire, moderniser sans catastrophisme. Les questions à régler : le coût lié à la taxe carbone, les déchets, le coût lié à l’augmentation du carburant.
- La cohésion sociale et la redistribution. Les disparités se sont accrues entre les 2% les plus favorisés et le reste de la population. Il faudra une réforme fiscale transparente et réduire les déficits. Il n’est pas acceptable que 60% de l’endettement soit entre les mains de non résidents et que la charge de remboursement des emprunts soit le 2ème poste du budget.
- La cohésion républicaine. Il s’agit de traduire les principes dans le quotidien : autorité, égalité, solidarité républicaines, fermeté face à la délinquance.
- La jeunesse. Elle est sacrifiée (chômage, logement, sécurité, égalité…). Elle est électoralement minoritaire.
Il faut rassembler la nation autour d’objectifs qui nous dépassent. Le rassemblement de la gauche est nécessaire au premier tour de l’élection présidentielle, ou au second. Le rêve français dans le récit national (en écho au rêve américain d’Obama), c’est l’égalité réelle, le progrès maîtrisé, les droits de l’Homme et du Citoyen (…).
Jean-Pierre Chevènement (Carros, septembre 2011)
"Pour sortir la France de l’impasse, il nous faut armer les consciences, élever le niveau du débat, faire bouger les lignes".
(…) Chers camarades, je voudrais développer deux points :
L’impasse d’abord dans laquelle se trouve la France, une tragique impasse dont, je crois, l’opinion n’a pas encore pris totalement conscience malgré ce que nous a dit Philippe Guibert. « Un avenir friable à court terme pour chacun » ce n’est pas tout à fait la même chose que l’impasse historique au fond de laquelle nous nous trouvons désormais mais ça y ressemble. Ce sera mon premier point.
Et mon deuxième point, naturellement, c’est que nous devons sortir la France de l’impasse et nous allons offrir un projet au peuple français. Nous allons faire surgir un recours. Ce sera difficile mais il y a un chemin.
D’abord la France se trouve dans une tragique impasse. Qui a pris le pouvoir ? Ce sont ces masses de capitaux qui, désormais libres à l’échelle du monde, sans aucune réglementation, comme si le monde était une cuvette, peuvent se déplacer d’un bout à l’autre de la planète avec la vitesse de la lumière, avec des mouvements d’amplification qui démentent tout ce qu’on a pu dire sur l’efficience des marchés. Vous vous souvenez de l’école de Chicago, Milton Friedman : on a dérégulé, on a déréglementé, on a supprimé tout ce qui permettait de mettre un peu de viscosité et on a prêté. D’immenses pyramides de dettes se sont édifiées, des sommes colossales de capitaux sont en circulation assoiffés de rentabilité et avides « d’effets de levier », mais des capitaux qui ne reposent que sur une confiance qui, aujourd’hui, s’étiole. Le montant des CDS - c’est un produit dérivé, plus exactement un produit d’assurance - représente quelque chose comme dix fois le PNB mondial. Il y a une totale déconnexion qui s’est opérée entre la sphère financière et l’économie réelle. Ces masses de capitaux qui ont pris le pouvoir, car une décision d’implantation a pour contrepartie une décision de fermeture, ces masses de capitaux assoiffés d’une rentabilité à 15 %, quelquefois même davantage, détruisent l’entreprise où les actionnaires ont pris le pas sur les salariés. Qui possède aujourd’hui Novartis demandais-je à un haut fonctionnaire? Qui détient son capital ? Réponse : On ne sait pas … Ce ne sont pas des Suisses … des anglo-Américains oui, au conseil d’administration. Mais on ne sait pas très bien quels fonds de placement ils représentent vraiment. C’est un univers mouvant.
Comment en est-on arrivé là ? Tout cela s’est fait en quatre temps : Dans le monde anglo-saxon : Thatcher-Reagan ; en Europe continentale : l’Acte Unique dont on ne dira jamais assez que c’est l’acte de dérégulation duquel ont procédé trois cents directives dont la plus connue est la libération des mouvements de capitaux, non seulement en Europe mais également vis-à-vis des pays tiers sans exception, y compris les paradis fiscaux, a ouvert la voie au capitalisme financier dont on voit aujourd’hui le naufrage. Puis vint la fin de l’URSS ; le ralliement de la Chine à l’économie de marché, puis son entrée à l’OMC, en 2001, sans que les problèmes de fond soient posés. La Chine c’est le modèle des petits dragons mais à l’échelle d’un pays de 1400 millions d’habitants avec un modèle de croissance qui est fondé essentiellement sur l’exportation et sur l’accueil d’entreprises délocalisées.
Nous sommes en présence, à travers le capitalisme financier globalisé, d’un nouveau Frankenstein, le monstre qui se retourne contre ses créateurs et qui s’attaque aujourd’hui aux Etats. Les Etats sont venus au secours des banques au moment de la crise des liquidités en 2008. Ils sont venus également à la rescousse quand nous étions confrontés à la récession de 2009. Mais aujourd’hui les marchés financiers dans lesquels il y a quand même les banques et leurs salles de marché, se retournent contre les Etats.
Il y a un conflit politique entre deux légitimités, la légitimité du capital et la légitimité démocratique qui s’exprime à travers les nations et les Etats quand ils sont évidemment des Etats démocratiques, quand ils sont des Etats républicains (…).
Cet article est le 15ème paru sur ce blog dans la catégorie Présidentielle 2012