Disparition du centre, dilué dans la liste de droite
Comme il l’avait fait avant le premier tour des élections régionales (voir Régionales en Mayenne : les listes 2010 comparées à 2004 (JY Delort) - 12 mars 2010), Jean-Yves Delort, ancien rédacteur en chef du Courrier de la Mayenne, m’a transmis ses observations après le scrutin du 14 mars en Mayenne. Je l’en remercie.
Je propose d’en prendre connaissance, après avoir rappelé les résultats en Pays de la Loire (Ouest-France).
Pays de la Loire - Inscrits : 2551783 ; Abstentions : 1320742 (51.76%) ; Exprimés : 1178860 (95.76%)
Mayenne - Inscrits : 221 046 ; Abstentions : 119 110 (53,88%) ; Exprimés : 95 448 (93,64%).
Jacques Auxiette (La gauche en action, liste de rassemblement de la gauche et des écologistes - PS) : 405103 (34.36%) - 31112 (32,6%),
Christophe Béchu (Agir vraiment avec Christophe BECHU - UMP) : 386465 (32.78%) - 34577 (36.23%),
Jean-Philippe Magnen (Europe Ecologie Pays de la Loire) : 160830 (13.64%) – 12340 (12.93%)
Brigitte Neveux (Front National Pays de la Loire - FN) : 83157 (7.05%) - 7002 (7.34%).
Marc Gicquel (Tous ensemble, la gauche vraiment - Front de Gauche - NPA) : 58897 (4,996%) - 3708 (3.88%).
Patricia Gallerneau (Pays de la Loire Démocrates - soutenue par François BAYROU - MoDem) : 53879 (4.57%) - 5034 (5.27%).
Eddy Le Beller (Lutte Ouvrière soutenue par Arlette Laguiller - LO) : 18860 (1.6%) – 1658 (1.74%).
Jacky Flippot (Nous te ferons Bretagne - DVG) : 11669 (0.99%) – 17 (0.02%).
Voici le texte de Jean-Yves Delort.
La gauche majoritaire en Mayenne pour la première fois
Le premier tour des élections régionales de dimanche dernier a été marqué en Mayenne comme en France par une forte percée de la gauche. La liste UMP-UDF est certes en tête mais ne dispose que de très peu de marge de progression pour le second tour. Surtout si le nombre d'abstentionnistes reste aussi élevé (53%).
- A gauche, la liste de Jean-Pierre Le Scornet recueille 32,60% des voix soit 3% de plus qu'il y a six ans. Elle n'arrive qu'en seconde position dans le département mais est en tête dans la plupart des grandes localités (38% à Laval et St Berthevin, 45% à Mayenne, 53% à Chalons du Maine). Elle a bénéficié d'un bilan jugé favorable de l'équipe sortante de Jacques Auxiette (venu plusieurs fois en Mayenne au cours de cette campagne), d'une union sans faille entre ses partenaires (PS, PC, PRG, MRC, quelques écologistes) et d'une campagne électorale dynamique : le dernier meeting à Laval Saint Nicolas jeudi dernier avait attiré la foule. Les plus petites réunions publiques «pédagogiques» organisées sur le terrain ont aussi été bien suivies. La gauche a surtout profité du discrédit de la politique nationale de Nicolas Sarkozy.
- La liste UDF-UMP conduite par Élisabeth Doineau arrive en tête : c'était l'objectif avoué de la liste unique. Mais avec 36,23%, elle est très loin des 54% des suffrages obtenus par les deux listes de François Zocchetto et de Yannick Favennec il y a six ans. Elle est en tête à Château-Gontier, Ernée, Evron, et dans la plupart des communes rurales. Faut-il mettre en cause le principe de la liste unique ? Ce n'est pas la vraie raison de l'échec. Les électeurs centristes n'ont pas rallié la liste Modem. Il est vraisemblable qu'une liste UDF conduite par Élisabeth Doineau et une liste UMP conduite par Yannick Favennec n'auraient pas atteint un meilleur résultat. En 2004, on avait alors beaucoup accusé Jean Arthuis d'avoir contribué à faire battre la liste conduite par François Fillon.
- Les écologistes de Michel Perrier (Jean-Philippe Magnen) avec près de 13% des suffrages réalisent un score tout à fait honorable. Ils se positionnent comme la troisième force politique réelle en Mayenne (ils sont en tête à Montflours !). Ils recueillent le fruit d'une mobilisation forte sur certains sujets (la ligne THT); le meeting avec Noël Mamère a été un point fort de leur campagne. Socialistes et verts ont réussi à se différencier sans s'affronter vraiment. Il fallait quand même expliquer pourquoi après avoir gouverné ensemble pendant 6 ans, on partait séparément devant l'électeur. Le message semble avoir été compris.
- Le Front national obtient 7,34% des suffrages. Soit en léger recul par rapport à 2004 (9,2%) d'autant plus qu'il y avait aussi à cette date une liste MNR. Il est loin des 12% réalisés en France.
- Le Modem subit sur le plan local une défaite (5,27%) ; manifestement le gros des troupes centristes mayennaises ne l'a pas suivi. Sa présence a été très faible lors de la campagne électorale et ses candidats peu connus.
- Le Front de gauche a eu du mal à percer (3,88%) ; la position des communistes (tantôt dans le Front de gauche, tantôt avec les socialistes) a été ambiguë et mal comprise y compris au sein du P.C. Les électeurs qui ont voulu manifester leur opposition au pouvoir ont préféré voter utile en se prononçant pour la liste Auxiette.
Le total des voix de gauche atteint 51% en Mayenne : la gauche est majoritaire ce qui ne s'était jamais produit pour des élections régionales. Il y a assez peu d'écart entre le vote mayennais et les résultats nationaux ou régionaux.
Certes l'UMP-UDF est en tête en Mayenne mais la marge est faible. Son grave handicap, c'est de n'avoir aucun partenaire avec qui passer des alliances pour le second tour.
En toute logique, la gauche pourrait être majoritaire dimanche prochain alors qu'il y a six ans, la liste de François Zocchetto l'avait emporté au second tour (52,9% contre 47,1%). La liste UMP – UDF d'Élisabeth Doineau ne peut remonter la pente qu'en récupérant toutes les voix qui se sont portées sur le Front national et sur le Modem au premier tour, en mobilisant les abstentionnistes du premier tour ou en espérant des désaccords entre les Verts et les socialistes. Le pari s'annonce difficile.
Pourquoi une telle abstention ?
- Plus de 53% des électeurs mayennais ne sont pas allés voter. On n'avait jamais vu ça pour une élection régionale. S'agit-il de plus jeunes ? S'agit-il d'électeurs plus orientés à droite ? Difficile à dire. Il s'agit en tout cas d'électeurs qui n'ont pas senti l'importance du scrutin. A moins qu'il s'agisse d'une attitude volontaire d'opposition à une certaine forme de politique.
- «Nos militants eux se sont bien mobilisés», remarquait pourtant un responsable socialiste. On pourrait en dire pareil à droite. Mais c'est au delà de ce premier cercle que la mobilisation n'a pas eu lieu.
- Les partis ont-ils joué le jeu de la mobilisation en Mayenne ? Oui ; aussi bien au PS qu'à l'UMP-UDF, on a multiplié les petites réunions de terrain. A gauche, une grande partie des soirées était consacrée à détailler les pouvoirs et les actions du Conseil régional. Ça en devenait presque ennuyeux. Du coup les intervenants jouaient le jeu à plusieurs.
- A droite Elisabeth Doineau et Yannick Favennec ont multiplié les réunions cantonales, mais sans rencontrer beaucoup d'écho à chaque fois. Côté grands meetings, la droite n'a organisé aucune réunion publique à Laval.
Cet article est le 23ème paru sur ce blog dans la catégorie Régionales 2010.