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Le MRC 53 est la structure mayennaise du Mouvement Républicain et Citoyen, qui a pour but de rassembler la gauche républicaine à partir, notamment, des idées de Jean-Pierre Chevènement, l'un de ses fondateurs, qui n'est plus membre du MRC depuis 2015. Le MRC a pris le relais du Mouvement des Citoyens (MDC) après les élections de 2002. En 2022, le MRC est devenu membre de la Fédération de la Gauche Républicaine avec quatre autres organisations politiques.

Le MRC a organisé une table ronde sur Cuba le 17 mars 2009 à Paris


Des problèmes de niveau de vie et de démocratie

 

Marie-Françoise Bechtel* avait préparé cette réunion portant sur l’avenir de Cuba, 50 ans après sa révolution. Elle en a réalisé un compte rendu, à lire sur le site du MRC, en cliquant sur

Cuba, cinquante ans après la Révolution, quelles perspectives?

Lors du 5ème Sommet des Amériques, à Trinité-et-Tobago, du 17 au 19 avril 2009, Cuba était le seul pays absent, car exclu en 1962 de l’Organisation des Etats américains (OEA), cette même année qui vit John Kennedy décréter un embargo commercial contre Cuba.

 

L’intervention de Janette Habel

 

Du compte rendu de la table ronde du 17 mars, je retiens l’intervention de Janette Habel, universitaire (Institut des Hautes études d’Amérique latine), qui avait publié un remarquable article dans Le Monde Diplomatique, en janvier 2009

Voir Cuba en quête d’un modèle socialiste renouvelé

Janette Habel a présenté une analyse des défis internes. Elle a relevé d’abord que Cuba vivait dans un environnement mondial en crise mais où pèse encore l’embargo américain. Les éléments les plus importants pour analyser la situation interne sont les suivants :
- les difficultés économiques importantes ne sont toujours pas surmontées,
- la société a acquis depuis la révolution une sensibilité égalitaire qui est aujourd’hui fortement ancrée.

Or, cette sensibilité a été heurtée par les réformes économiques faites durant la « période spéciale » qui a suivi l’effondrement de l’URSS et qui ont conduit à creuser des inégalités sociales sans qu’aujourd’hui le niveau de vie de 1989 ait été retrouvé et alors que le niveau d’homogénéité sociale a également régressé.

Raul Castro a indiqué que des « changements structurels » étaient nécessaires et souligné l’insuffisance des salaires ce qui a suscité beaucoup d’espoir dans la population, mais ces changements tardent à se réaliser.

La fracture générationnelle est très forte : les jeunes de 20 ans n’ont connu que des difficultés matérielles et ils ont des aspirations non satisfaites (voyages, accès à Internet). Il y a de nouvelles exigences de la part d’une société civile émergente, d’autant que les vingt ans écoulés depuis la chute de l’URSS et la rupture des échanges avec Moscou ont été très durs.

Il y a un débat dans le pays sur la nature des changements à apporter : faut-il s’en tenir à l’économie de commandement qui manque d’efficacité et qui n’est pas suffisamment productive, avec 55% de terres non cultivées alors que le pays est fertile ?

Comment répondre simultanément aux défis politiques : les institutions ont été taillées pour Fidel Castro, des adaptations sont donc nécessaires alors que la génération historique qui a fait la révolution va disparaître. Comment passer de la légitimité révolutionnaire à une légalité institutionnelle ?

Il y a à Cuba de nombreux débats, largement ignorés ici. Dans la perspective du Congrès du Parti communiste cubain qui devrait se tenir à l’automne 2009, des intellectuels, des militants s’interrogent sur les raisons de l’effondrement de l’URSS. On analyse les problèmes du socialisme réel. Il y a de nombreuses discussions d’écrivains et d’artistes depuis le Congrès de l’UNEAC (Union des écrivains et artistes). C’est un débat ouvert.

Il y a même eu une « guerre des courriels » pour demander la révision des politiques passées de censure culturelle, qui a débouché sur une synthèse critique qui a été publiée. Ces débats font apparaître des aspirations à plus de démocratie : participation, autogestion, possibilité de discuter et de critiquer.

Raul Castro a lui-même appelé au débat mais la révocation sans explication satisfaisante de plusieurs dirigeants comme Carlos Lage (ex-premier ministre de fait) et Felipe Perez Roque (ancien ministre des Affaires Etrangères) ont rappelé les méthodes du passé. Les relations avec l’Amérique latine et notamment les pays amis (Venezuela, Bolivie, Equateur, mais aussi Brésil) et la réponse à apporter aux premiers gestes du président Obama font l’objet de discussions. Des sensibilités différentes s’expriment, même si le front anti-impérialiste est maintenu sous l’œil vigilant de Fidel Castro toujours présent.

Quant aux problèmes économiques, on sent que plusieurs voies s’ouvrent entre lesquelles le nouvel exécutif n’a peut-être pas encore tranché : 
une voie à la vietnamienne ou à la chinoise avec forte ouverture économique sans ouverture politique, une voie qui serait un statu quo un peu aménagé avec des réformes graduelles et une voie empirique privilégiant la libéralisation du petit commerce et le développement des PME ainsi qu’une ouverture démocratique.

Il n’y a pas de courants politiques clairement identifiés mais la société cubaine, du moins ses intellectuels et ses responsables politiques, réfléchissent à l’après-Fidel.

La conclusion de Sami Naïr

Sami Naïr a d’abord souligné la « nécessité de Cuba ». Sans Cuba, a-t-il dit, il n’y aurait pas eu Lula ni Chavez. Ce qui n’empêche pas qu’il y ait aussi une relation dialectique entre l’Amérique latine et Cuba avec la question de la transformation, de la réforme des structures à Cuba. La question du passage à la légalité institutionnelle à Cuba ne passe pas par la rupture.

Le symbole de Cuba est celui du sacrifice pour une cause, idée qui chez nous n’a malheureusement plus de vie. Sans l’intervention de l’armée cubaine en Namibie, l’Afrique du Sud de l’apartheid n’aurait pas disparu. Cuba a formé des milliers de combattants du Vietnam ainsi que de nombreux cadres de l’OLP. C’est cette action dont on veut tenter de détruire l’image. De même, cas exemplaire, celui du Che, aujourd’hui victime d’une hostile campagne médiatique.

Derrière tout cela, il y a une véritable volonté d’éradiquer l’expérience cubaine. A Cuba, derrière la révolution socialiste et l’anti-impérialisme, il y a une révolution beaucoup plus profonde et d’ailleurs unique :

Cuba est la première nation d’Amérique latine qui pratique une intégration totale de ses citoyens. Ni le Brésil, ni la Bolivie, ni le Venezuela, en dépit d’efforts considérables, n’en ont fait autant. Le premier décret pris par Fidel mettait fin aux « enfants naturels », rendant par là légitimes les créoles et les Noirs. Le peuple cubain n’acceptera pas de revenir sur tout cela. Malgré une guerre de 50 ans, qui a été totale et impitoyable, Cuba perdure.

La République est au-dessus des ethnies, des confessions et même des idéologies. C’est ce concept que nous avons formé ici en France que Cuba met en pratique. Nous mesurons l’effort colossal que cette entreprise volontariste demande et c’est pour cela que Cuba a droit à notre admiration et à notre solidarité.

 

* Marie-Françoise Bechtel est secrétaire national du MRC à la formation et à la diffusion des idées.

 

Cet article est le 8ème paru sur ce blog dans la catégorie Amérique.

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