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Le MRC 53 est la structure mayennaise du Mouvement Républicain et Citoyen, qui a pour but de rassembler la gauche républicaine à partir, notamment, des idées de Jean-Pierre Chevènement, l'un de ses fondateurs, qui n'est plus membre du MRC depuis 2015. Le MRC a pris le relais du Mouvement des Citoyens (MDC) après les élections de 2002. En 2022, le MRC est devenu membre de la Fédération de la Gauche Républicaine avec quatre autres organisations politiques.

Procès en appel d'Hervé Eon, à Angers, pour offense au chef de l'Etat


La parole de Sarkozy interdite de reproduction ?

 

C’était au Salon de l’agriculture en 2008. Le président de la République se heurte à un homme qui refuse de lui serrer la main par peur de se salir. Ce courageux anonyme entend le chef de l’Etat lui répondre sur le même ton en utilisant des mots du même tonneau que son interlocuteur, ce qui prouve la capacité du président à se mettre au niveau de ses compatriotes…

 

Certes, on peut regretter le manque d’humour du président. A sa place, ses prédécesseurs se seraient abstenus de commenter ou s’en seraient sortis par une pirouette. Pas lui, il ne sait pas faire. Il veut être respecté, sans s’astreindre à respecter les autres.

 

Le 28 août 2008, Hervé Eon se rendait, à vélo, à une manifestation au centre ville de Laval. Il portait sur lui un carton sur lequel il avait écrit « Casse toi pov’ con », simple reproduction manuscrite des paroles prononcées par le président de la République au Salon de l’agriculture.

 

Le président venait en Mayenne pour la généralisation du Revenu de Solidarité Active (RSA). Le militant politique (président, en Mayenne, du mouvement Pour une République Sociale), ex-conseiller général, est obligé de mettre pied à terre, pour laisser passer le cortège de voitures officielles. Il brandit son carton au passage de ce qu’il croit être la voiture présidentielle. C’est alors que des policiers en civil lui mettent la main dessus et l’immobilisent sur le trottoir.

 

C’est pour cela qu’il est traduit en justice, le parquet ayant lancé une procédure pour délit d’offense au chef de l’Etat. Cet intitulé permet de poursuivre un tiers, sans plainte du chef de l’Etat. Le militant avait été condamné à une amende de 30 euros avec sursis par le tribunal de Laval, le 23 octobre 2008 (voir sur ce blog l’article Jean-Luc Mélenchon à Laval pour soutenir Hervé Eon au tribunal).

 

Hervé Eon ayant fait appel, l’affaire était jugée le 3 février à Angers (voir sur le blog du MRC 49, le 6 février Soutien à Hervé EON lors de son procès en appel).

Jean-Luc Mélenchon, sénateur de l’Essonne, président du nouveau Parti de Gauche (dont Hervé Eon est membre du bureau national), était présent à Angers en tant que témoin moral du prévenu. Il considère que le délit d’offense est tombé en désuétude, ayant été utilisé seulement six fois depuis sa création, en 1881. Il a d’ailleurs déposé une proposition de loi pour l’abroger (voir l’article du sénateur sur son blog RETOUR DE LIMEIL, avant l’ami EON et son carton).

Demain je vais à Angers au procès en appel d’Hérvé Eon, l’homme qui a été condamné a trente euros d’amende avec sursis pour avoir brandi un carton proclamant "casse toi pauvre con" sur le passage du Président de la République. Les lecteurs de ce blog connaissent cette histoire. Et pas seulement eux. Donc procès en appel. Dans le moment, après le coup des préfets virés, il y a une ambiance assez spéciale dans les élites du pays. Donc je pense que les juges vont finir le travail commencé à Laval. Là le président du tribunal avait dit "dans cette affaire il n’y a pas de plaignant". Et l’amende décidée est tombée de 15 000 euros prévus par la loi à …30 euros avec sursis.

L’avocate qui défend Hervé Eon, Me Dominique Noguères, a plaidé la relaxe, alors que l’avocat général requiert la confirmation de la peine en appel et une amende de 1000 euros. Décision de la justice le 24 mars.

 

Voir l’article de Chloé Leprince, sur le site de Rue89, paru le 5 février sur le site Vendredi.info (Voir le sujet d'origine).

 

Plus de 7000 personnes ont signé une pétition en ligne, initiée par la Ligue des droits de l’Homme, à voir sur http://www.ldh-france.org/Petition-... et, ci-après :

Ces dernières années, le délit d’outrage est devenu en France un délit « en vogue ». De 17.700 faits enregistrés en 1996, on est passé à 31.731 en 2007. Cette inflation (+ 42%), qui s’inscrit clairement dans le contexte actuel du « tout-répressif », pose de vraies questions, notamment celle, récurrente, des violences policières.

Le délit d’outrage, qui consiste à porter atteinte à la dignité d’un représentant de l’autorité publique, ou à ses fonctions, est très proche du délit d’injure, qui appartient au régime des infractions de presse, très protecteur de la liberté d’expression. Ce qui n’est pas le cas de l’outrage, délit de tous les arbitraires, passible de 7.500 euros d’amende et de six mois de prison. Alors que l’injure à un citoyen « ordinaire » ne « coûte » que 45 euros.

Cette ahurissante disproportion constitue la première des 10 raisons pour lesquelles les initiateurs de cet appel demandent que ce délit arriéré, obsolète, inique, soit chassé du Code pénal, comme le furent jadis les délits d’offense à la morale religieuse, d’outrage aux bonnes mœurs, et plus récemment (1994) le délit d’outrage par la voie du livre.

 parce que l’outrage constitue une aberration de droit, l’agent constatateur étant en même temps la « victime » et que devant un tribunal, c’est parole contre parole, celle du fonctionnaire assermenté contre celle du citoyen lambda.

 parce qu’il est utilisé par les « forces de l’ordre » (police, gendarmerie, police ferroviaire) pour couvrir des violences policières de plus en plus nombreuses et insupportables, des abus d’autorité scandaleux, des gardes à vue arbitraires (+ 54% en 5 ans) qui font de chaque citoyen, quelles que soient ses origines sociales, un coupable potentiel.

 parce qu’il est utilisé à des fins mercantiles par des policiers, des gendarmes qui arrondissent leurs fins de mois en se portant partie civile.

 parce que, dans le contexte actuel de la politique de rendement imposée dès 2002 par le ministre de l’Intérieur Sarkozy, l’outrage est scandaleusement utilisé pour faire grimper le taux d’élucidation des infractions.

 parce que l’outrage participe à une pénalisation des rapports sociaux en sanctionnant la parole au détriment du dialogue démocratique.

 parce que l’outrage concourt à un rétrécissement des libertés individuelles, et qu’il est utilisé par le pouvoir sarkozyste comme une arme de répression massive pour bâillonner les luttes militantes, notamment lorsque des citoyens, s’opposant à la traque des sans-papiers organisée par le ministre de l’Identité nationale, se voient traînés devant les tribunaux.

 parce que, s’il est normal que la République protège ses fonctionnaires, le fait que certains d’entre eux, notamment des policiers, des gendarmes, en profitent pour masquer leurs fautes et rattraper leurs propres insuffisances constitue un danger pour la démocratie, a fortiori dans la patrie dite « des droits de l’homme ».

 parce que le délit d’outrage, exception française, n’existe pas chez la plupart de nos voisins européens, ni aux Etats-Unis.

 enfin, parce qu’il y a dans la loi sur la presse de 1881 tout ce qu’il faut pour réparer l’outrage…

Nous demandons sa dépénalisation.

Mais le délit d’outrage n’est pas le seul en cause…

Tout récemment, et pour la première fois depuis 34 ans, un avatar de l’outrage a été remis au goût du jour : le délit d’offense au président de la République. Autrement dit, le crime de lèse-majesté. Un citoyen français a été condamné à 30 euros d’amende avec sursis pour avoir, lors du passage d’un cortège présidentiel, brandi une pancarte estimée offensante par la justice. L’affaire est d’autant plus scandaleuse (et ridicule) que cette personne ne faisait que reproduire l’injure adressée le 23 février 2008 au salon de l’Agriculture par le président de la République à un citoyen qui avait refusé de lui serrer la main. Elle est d’autant plus intolérable que nombre de nos concitoyens sont en droit de considérer ce « Casse-toi pauvre con ! » adressé à un des leurs comme une offense à la Nation tout entière, et n’hésitent plus à poser la question : « Quel respect accorder à un président de la République aussi peu respectueux de ses concitoyens ? »

Dans ces conditions, et alors que le délit d’offense à chef d’Etat étranger a été supprimé en 2004, après avoir été déclaré contraire à la Convention européenne des droits de l’homme, nous disons que le délit d’offense au chef de l’Etat français n’a plus sa place dans notre société. Et nous demandons l’abrogation pure et simple de l’article 26 de la loi du 29 juillet 1881, relatif à l’offense au chef de l’Etat.

Enfin, les signataires de cet appel lancent un cri d’alarme et appellent solennellement à un débat public sur le thème des violences policières et du comportement de plus en plus brutal d’une police dont on peut se demander si elle est encore au service des citoyens et de la République, ou au service exclusif d’un pouvoir chaque jour un peu plus attiré par des dérives totalitaires. Cette menace pour la démocratie ne peut laisser aucun citoyen indifférent. Trop de personnes ne supportent plus de vivre dans la peur d’un contrôle de police. Il est temps pour les femmes et les hommes politiques de notre pays de regarder la réalité en face, avec un courage qui ne fait pas défaut aux citoyens, et de ne plus considérer les violences policières comme un sujet tabou. Il y a urgence.

 

Cet article est le 8ème paru sur ce blog dans la catégorie Justice Police Défense

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