Halte à la privatisation des services publics !
La consultation nationale initiée par le Comité national contre la privatisation de La Poste, pour un débat public et un référendum sur le service public postal se déroule ce 3 octobre dans toute la France. Comme indiqué ce jour sur le site de Marianne, La Poste: c'est aujourd'hui qu'on « votationne ». En fait, la mobilisation militante avait commencé dès mardi, y compris en Mayenne :
Le collectif contre la privatisation de La Poste propose des lieux de vote - 28 septembre 2009
Votation citoyenne ici à St-Berthevin
voir Saint-Berthevin (Mayenne) : Poste close dans le but de mieux accueillir
L’enjeu ne se situe pas au niveau du résultat des votes puisque chacun sait que cette consultation n’a pas de valeur juridique. Sur le site du quotidien Le Monde, ce 3 octobre, Jean-François Dannely, secrétaire de la fédération CGT des activités postales et des télécommunications, revient sur l'enjeu de la "votation citoyenne" sur l'avenir de La Poste : Votation citoyenne : "Montrer l'attachement de la population au service public postal".
L’éditorialiste Laurent Joffrin du quotidien Libération, dans un article paru hier, Le bien commun, situe bien le problème, qui est celui du changement de statut, d’établissement public en SA.
Pour moderniser un service public, faut-il le privatiser ? Telle est la question simple et décisive que pose le référendum en cours sur le statut de la Poste en France. L’UMP jure ses grands dieux que l’entreprise restera dans le giron public. Les mêmes serments avaient précédé la privatisation de Gaz de France. Cette parole-là n’est plus crédible ; si l’on change le statut, c’est bien pour modifier, à terme, la propriété. Sinon, à quoi bon ?
Ceux qui tiennent les raisonnements d’avant la crise sont persuadés qu’ils obéissent au sens de l’histoire. Le marché est toujours la meilleure solution, pensent-ils, tout le reste est vaticination idéologique. Cette idée, qui structure l’inconscient des élites françaises, est précisément celle qu’une gauche moderne doit réfuter. Les sociétés de l’avenir ne sauraient être unidimensionnelles, vouées entièrement à la performance et aux critères de réussite financière.
Un esprit de solidarité, de dévouement au bien commun, en un mot de service public, doit équilibrer dans une économie libre l’impérieuse logique de la rentabilité. Il faut donc aller voter dans ce référendum spontané organisé autour de l’administration postale, qui est depuis Louis XI placée au service des usagers et du territoire. Non pas pour les charmes du terroir et le respect des traditions.
Mais pour montrer qu’une organisation fondée sur l’intérêt collectif, dès lors qu’on lui en donne les moyens, dès lors aussi qu’elle sait se remettre en cause, peut elle aussi parvenir à l’efficacité et relever les défis de l’avenir.
Voir aussi la position du Mouvement Républicain et Citoyen, exprimée par Jean-Luc Laurent sur le site du MRC : Service public de la Poste : n’habite plus à l’adresse indiquée.
Un sondage réalisé par l’IFOP pour Sud-Ouest Dimanche fait apparaître Les Français favorables à un référendum sur La Poste (Le Monde, 3 octobre).
C’est ce qui peut expliquer pourquoi Le ministre de l'industrie conteste la votation citoyenne sur le statut de La Poste (Le Monde, 2 octobre).
Sur son blog, hier, Jean Quatremer, correspondant de Libération à Bruxelles, a réagi aussitôt en rappelant « L’ouverture à la concurrence des services postaux au sein de l’Union s’est faite en trois étapes : une directive du 15 décembre 1997 qui ouvrait le chemin, une seconde, la plus importante, du 10 juin 2002 et une troisième du 20 février 2008 qui prévoit une ouverture totale pour 2011 au plus tard ». Voir cet article Estrosi pris la main dans le sac postal.
La controverse porte sur la question de la privatisation, qui n’en est pas une, selon les ministres.
Jean-Philippe Gasparotto, porte-parole CGT à la Caisse des Dépôts et Consignations (CDC), a réfuté (communiqué de presse, 1er octobre) les arguments des ministres Estrosi et Lagarde, qui déclarent "Il n'est pas question de privatiser la Poste" :
L'article 1er alinéa 2 du projet de loi relatif à "l'entreprise publique La Poste" indique explicitement : "la personne morale de droit public La Poste est transformée à compter du 1er janvier 2010 en une société anonyme dénommée La Poste …".
Cette disposition signifie bien, en droit, une "privatisation du statut" et des modes de gestion de la Poste, qui devenant société anonyme, se trouvera soumise à titre principal aux dispositions du droit commun des sociétés commerciales (code du commerce, code monétaire et financier …). Cette transformation, à elle seule, est lourde de sens et de conséquences puisqu'elle signifie la soumission aux normes et règles de gestion économiques, comptables et sociales des entreprises privées banalisées agissant dans un marché concurrentiel.
Depuis 30 ans, il n'est pas un exemple d'Etablissement Public transformé en société anonyme qui n'ait conduit à terme à une banalisation et à une privatisation de sa gestion, c'est-à-dire à la disparition de ses missions publiques, quand ce n'est pas à sa disparition tout court, y compris en gardant parfois des actionnaires majoritairement publics (TDF, la CNP, la CAECL devenue CLF-DEXIA ….).
Gouvernement et direction de La Poste prétendent que "les textes applicables interdisent à la Caisse des dépôts de souscrire à une augmentation de capital d'un établissement public et qu'il est donc nécessaire de modifier le statut de La Poste pour lui permettre de réaliser celle-ci".
C'est exactement le contraire, répond le responsable CGT. La caisse des dépôts, Etablissement public autonome du gouvernement et, pour ce faire, placé sous le contrôle du Parlement, est notamment un investisseur d'intérêt général et de long terme, qui à l'appui d'un mandat public, peut investir pour renforcer les fonds propres ou soutenir les projets d'investissement d'une autre personne morale de droit public.
Sans revenir à l'exemple de la CNP, de la CAECL ou de l'EDF avant qu'elles ne soient transformées en SA, prenons l'exemple plus récent d'OSEO, EPIC agissant dans un champ hautement concurrentiel, qui regroupe la BDPME, l'ANVAR et la SOFARIS et que la CDC finance à plus de 40 % ; autre exemple : l'ANRU (agence nationale de la rénovation urbaine) EPIC fortement financé par la Caisse des dépôts et d'autres opérateurs publics.
Rien, dans le droit interne ou dans le droit communautaire, rien non plus dans la "doctrine d'investissement de la Caisse des dépôts" publiée en décembre 2008 après la promulgation de la loi LME, n'interdit à la Caisse des dépôts d'investir dans un Etablissement Public.
Partenaire de la Poste depuis plus d'un siècle, dans une logique de complémentarité de missions publiques (aménagement du territoire, lutte contre l'exclusion bancaire, collecte et centralisation de l'épargne populaire…), la CDC pourrait donc parfaitement, dans le cadre d'un mandat public investir dans le renforcement et la modernisation nécessaires des moyens de l'Etablissement Public La Poste (…).
Cet article est le 23ème paru sur ce blog dans la catégorie Services publics