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Le MRC 53 est la structure mayennaise du Mouvement Républicain et Citoyen, qui a pour but de rassembler la gauche républicaine à partir, notamment, des idées de Jean-Pierre Chevènement, l'un de ses fondateurs, qui n'est plus membre du MRC depuis 2015. Le MRC a pris le relais du Mouvement des Citoyens (MDC) après les élections de 2002. En 2022, le MRC est devenu membre de la Fédération de la Gauche Républicaine avec quatre autres organisations politiques.

La crise, qui ne fait que débuter, va obliger l'Europe à se redéfinir


Pour un protectionnisme au niveau européen

 

Hier, j’ai présenté sur ce blog (voir Les conditions d'une politique économique européenne face à la crise) le thème et le programme du prochain colloque de la Fondation Res Publica, présidée par Jean-Pierre Chevènement.

 

« L’Europe au défi de la crise » : comment peut-elle contribuer à faire émerger une politique économique européenne qui puisse apporter les bonnes réponses ?

 

Je découvre, ce 31 janvier, sur le site du Monde, des titres qui traduisent l’inquiétude du pouvoir face à l’ampleur de la crise et de ses conséquences possibles :

 

Crise : Christine Lagarde craint des troubles sociaux et le retour du protectionnisme

 

Paris s'inquiète de la fragilité de la zone euro

 

Je prends connaissance sur le site de Marianne du billet hebdomadaire de Edouard Husson concernant l’Allemagne : Ma semaine allemande : et si l'euro implosait ?

 

Et si l’euro échouait, éclatait ? La question n’est plus taboue. Elle se fait sa place discrètement dans les journaux et elle a envahi depuis longtemps les lettres confidentielles et les débats sur Internet. Mais, comme pour le traité constitutionnel européen, les gouvernements n’ont pas prévu de plan B.

Que se passera-t-il si la Grèce, l’Espagne, l’Irlande, l’Italie et même la France sont traversées de tensions économiques et sociales majeures et que l’un de ces pays craque, sur le plan monétaire?

La divergence des taux d’emprunt accordés aux gouvernements devient telle que certains, sur les marchés, commencent à parier sur l’éclatement de l’euro. Beaucoup d’analystes soulignent que le problème d’une sortie de l’euro est moins économique que politique: la crédibilité de l’Europe serait en jeu et il suffirait qu’un pays sorte pour provoquer une réaction en chaîne.

Pourtant, nos gouvernants refusent d’envisager un tel « cauchemar ». Alors qu’il suffirait de prendre les devants et de proposer que, pour les membres soumis à des tensions sociales trop fortes du fait de la crise et de l’endettement, soit ouverte la possibilité de se doter d’un instrument monétaire particulier dont le taux de change serait fixé de façon réaliste par rapport à l’euro.

Et si plusieurs saisissaient cette occasion? L’euro deviendrait monnaie commune et non plus unique. On ne risquerait pas de tout perdre d’un  coup de l’immense effort d’unité monétaire européenne.    

 

En participant au voyage organisé par l’AFLEC* de St-Berthevin les 3 et 4 décembre 2008, à Bruxelles, j’ai écouté avec attention le représentant de la Commission européenne, Christian Ghymers (conseiller à la Direction Générale Economie et Finances) présenter « la réponse de l’Union européenne à la crise ». Voici quelques éléments de son exposé.

 

Il a brillamment défendu la globalisation mondiale et l’ouverture des marchés (« si vous entendez le mot protectionnisme, c’est mauvais »), le pacte de stabilité européen, l’euro et son effet positif sur la création d’emplois, la politique « impeccable » de la Banque Centrale Européenne, diagnostiqué les deux handicaps majeurs de l’Europe, que sont l’insuffisante productivité globale des facteurs de production et le défaut d’intégration financière (interne et externe) européenne. Il manque une coordination sur les problèmes macroéconomiques.

Sarkozy essaie d’imposer sa politique aux autres (il veut obliger l’Allemagne à dépenser plus), mais sa vision est trop centralisée (sur la conception française) (...). L’Europe ne sera jamais un Etat fédéral, comme les USA, car 1% des européens, seulement, le souhaitent.

 

Sur le site de Marianne, le 17 janvier 2009 (voir Le Monde : Dieu nous protège du protectionnisme !), Philippe Cohen écrivait, notamment :

 

(...) Les réticences des nations et des peuples à poursuivre sur la voix de la libéralisation totale des échanges sont plus que compréhensibles, elles sont légitimes. On en revient forcément à l’analyse de la crise des subprimes. Qui l’a déclenché ? Des banquiers inconscients, des financiers irresponsables et quelques escrocs à la Madoff ?

Ou bien le modèle du  du libre-échange et ses ayatollah qui après avoir provoqué une compression salariale massive dans les pays développés, ont ensuite encouragé et multiplié les prêts aux familles des classes moyennes pour maintenir – provisoirement bien sûr - un taux de croissance permettant aux entreprises de continuer à vendre leurs produits à des gens qui n’avaient plus le moyens de les acheter ? 

Voilà la vraie raison de cette crise qu'une majorité d'experts, d'économistes et de chiens de garde médiatiques persistent à masquer en évoquant «les excès du capitalisme financier» ou «l'absence de régulation».

Protectionnisme ou chaos social

Continuer à diaboliser le protectionnisme est d’autant plus inacceptable que personne ne propose de «fermer les frontières». Le libre-échange intégral est d’ailleurs une utopie. Pour ne prendre qu’un exemple, le dumping monétaire des Chinois et des Américains constitue une entrave très sérieuse aux échanges puisqu’il freine et rend très difficiles les exportations des pays européens à l’exception – sans doute provisoire – de l’Allemagne qui dispose d’un quasi-monopole dans le domaine des équipements industriels.

Il ne s’agit évidemment pas d’arrêter les échanges mais de leur permettre de s’effectuer dans le cadre d’une concurrence loyale, sans distorsion trop grande de coûts salariaux, de réglementations et de parités monétaires. Bref, il s’agit de réfléchir à un protectionnisme à l’échelle européenne, perspective d’autant plus réaliste que l’Europe constitue le plus grand marché mondial.

Réfléchir mais vite : plus le temps passe, et plus l'échec de plans de relance qui visent davantage à sauver le système qu'à créer les conditions d'une transformation réelle nous rapproche d'une alternative radicale : le chaos social ou une sérieuse limitation de la liberté des échanges.

 

Un économiste indépendant, Jean-Luc Gréau, se distingue par son plaidoyer en faveur du protectionnisme européen. L’entretien qu’il a accordé au Monde de l’économie (Anne Rodier) le 26 janvier, permet de mieux comprendre ses arguments.

"Le retour de la croissance doit passer par une revalorisation du travail"

 

Selon la plupart des économistes, le protectionnisme a accéléré la Grande Dépression des années 1930. Vous affirmez pourtant que le protectionnisme peut être favorable à la croissance. Comment ?

Des barrières douanières pertinentes protègent de la dévalorisation du travail, qui s'est largement répandue avec la globalisation de l'économie. Le poids des pays émergents dans un contexte de libre-échange mondial a été déterminant dans la déflation salariale.

Or, la croissance ne peut pas tenir durablement sur la base d'une sous-rémunération du travail. Le travail, comme le disaient, aussi bien John Maynard Keynes, Karl Marx que Joseph Schumpeter, est "le" facteur de production. S'il est sous-rémunéré, la demande ne peut plus apparaître sur le marché.

C'est la raison pour laquelle l'endettement des ménages s'est tant développé aux Etats-Unis, mais aussi au Royaume-Uni, au Pays-Bas, en Espagne, en Hongrie et même en Corée du Sud. Ce qui a créé artificiellement une demande qui, avec la crise financière, a fait long feu.

Le retour de la croissance doit passer par une revalorisation du travail, qu'un système de protections commerciales rendra possible. Des barrières douanières permettraient de contrôler les échanges de marchandises et de services, au niveau continental, en Europe, par exemple, afin de ne faciliter le commerce qu'aux pays dont les conditions sociales voire environnementales sont comparables aux nôtres.

Quand il y a une barrière douanière déterminée en fonction de l'écart de rémunération pour un même type de travail et une même productivité, on limite le dumping social et on soutient la demande interne. Il y a quelques mois, les exportations représentaient encore 45 % du produit intérieur brut (PIB) de la Chine. Pour un pays de plus de 1 milliard d'habitants, c'est tout à fait anormal.


Pourquoi le protectionnisme ne provoquerait-il pas les mêmes effets néfastes que dans les années 1930 ?

A l'époque, les deux tiers du commerce international étaient représentés par les matières premières - énergie, produits agricoles. Depuis, la structure du commerce international s'est inversée : à la fin des "trente glorieuses", les deux tiers du commerce mondial concernaient les produits manufacturés.

La question du protectionnisme ne se pose pas pour la plupart des produits primaires ni pour les biens d'équipement. Les Etats ne vont pas en limiter le négoce, ils en ont tous besoin. En revanche, la protection doit s'appliquer aux produits manufacturés et aux services intellectuels. Il ne s'agit pas d'instaurer un protectionnisme comme celui mis en place dans les années 1930, mais de renforcer sélectivement la protection commerciale à l'aide de nouveaux droits de douane.


Cela ne risque-t-il pas de conduire à un repli sur les territoires nationaux ?

La protection commerciale ne ferme pas les frontières. Elle maintient la libre circulation des investissements productifs - et donc la possibilité de conquérir des parts du marché mondial -, mais aussi celle du savoir et du savoir-faire, qui a permis un rattrapage accéléré dans de nombreux pays.

Cette protection a, en revanche, l'avantage d'empêcher la dévalorisation du travail, de rapprocher la production de marchandises de la demande à l'échelon territorial, et de permettre un meilleur contrôle de la qualité des produits. Nous serons d'autant plus attractifs que nous aurons une protection intelligente.


Comment qualifieriez-vous les plans de sauvetage au secteur automobile, par exemple ?

Ce n'est pas du protectionnisme, ce sont des mesures de sauvegarde, des réflexes de bon sens. Pour toutes les productions que nous savons faire, il ne faut pas encourager les délocalisations. Mais si la croissance ne redémarre pas rapidement, on peut s'attendre, à moyen terme, à des mesures protectionnistes préjudiciables.


Vous faites référence aux récentes mesures de rétorsion américaines ?

Oui. Les récentes hausses de droits de douane, décidées par les Etats-Unis à l'encontre des produits européens comme le roquefort, les châtaignes ou autres eaux minérales, c'est du protectionnisme au sens primaire du terme. C'est un acte politique qui doit être contré par le dialogue. Les Américains savent pertinemment que l'Union européenne peut prendre des mesures de rétorsion : elle représente près de 490 millions d'habitants, un PIB supérieur à celui des Etats-Unis, avec un éventail de production et un marché énorme. Le rapport de force n'est plus celui des années 1930. Mais ce contentieux va s'atténuer, car le véritable enjeu, c'est l'écart de rémunération et l'écart social.


* Ce déplacement de deux jours à Bruxelles était organisé par l’AFLEC Association Familiale Loisirs Et Culture Saint-Berthevin ...

Cet article est le 41ème sur ce blog dans la catégorie France et Europe
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