L’unité le 1er mai et la radicalité dans certains cas
Après le 29 janvier, puis le 19 mars (voir, sur ce blog : A Laval et ailleurs, ce 19 mars, le monde du travail était dans la rue), voici le 1er mai : les syndicats représentatifs du monde du travail avancent des revendications salariales, face aux représentants du capital et de l’Etat.
Voir cet article paru sur le site de L’Humanité, le 7 avril :
Et, le 10 avril, le début d’une série d’articles permettant aux syndicats de s’exprimer sur le sens qu’ils donnent à ce 1er mai unitaire :
1er mai 2009 : ce que souhaitent les syndicats
Par ailleurs, au niveau des entreprises, les syndicats utilisent des méthodes qui tiennent compte des situations particulières constatées, notamment des interlocuteurs patronaux sur place. Quand il s’agit de cadres qui n’ont pas le pouvoir de décision, celui-ci appartenant à des dirigeants hors du territoire national, comme c’est le cas pour Caterpillar, Sony, et d’autres, des pressions sont exercées sur les cadres locaux afin de faire aboutir les revendications.
Lire cet article paru dans Ouest-France, le 10 avril, sous la plume de Carine JANIN (entretien) :
Dirigeants de Caterpillar, de Sony, de Scapa, de Faurecia... retenus par leurs salariés. Des séquestrations pas nouvelles, mais révélatrices d'un climat. Rude.
Les séquestrations de dirigeants, un phénomène nouveau ?
Pas du tout. L'histoire du mouvement ouvrier est marquée par des phénomènes d'occupation d'usine, dès 1936, et d'occupation et de séquestration, plutôt à partir des années 1970, après mai-68.
Les motivations ont changé...
Bien sûr. Dans les années 1970, c'est l'apogée des Trente glorieuses. Les mouvements sociaux sont liés à des revendications en matière de salaire. Aujourd'hui, ce ne sont que des conflits « défensifs » liés à l'emploi : défendre l'emploi ou négocier au mieux les conditions de licenciement, de « sortie ».
La structure des entreprises aussi s'est transformée ?
Oui, on n'est plus dans le modèle « patrimonial de l'entreprise » : vous avez un patron, vous n'êtes pas content de votre sort, vous pouvez aller le voir, il existe en chair et en os. Aujourd'hui, c'est une particularité de ces séquestrations : les entreprises concernées ont toutes leur siège social à l'étranger. Continental, Caterpillar, Scapa...
Les entreprises s'internationalisent, les directions aussi et, finalement, les salariés n'ont plus personne en face d'eux pour exprimer leur mécontentement. Ils ne savent plus trop à qui appartient leur entreprise, qui décide. Ils ont en face d'eux des dirigeants qui ne font qu'obéir à des logiques qui les dépassent, décidées par d'autres, à d'autres endroits. Bref, qui n'ont, eux-mêmes, pas vraiment de pouvoir de décision.
Séquestrer, c'est en réaction à cela ?
Oui, c'est une manière de garder la main sur des choses que l'on sait qu'elles vont nous échapper. Même si, au fond, tout est déjà perdu. Ces conflits sont liés à une urgence sociale. Ceux qui les mènent n'ont plus rien à perdre.
Les injustices sociales, les cas de ces dirigeants qui partent avec des sommes faramineuses alimentent, bien sûr, ces actions. Le fait aussi, que les pouvoirs publics n'aient pas beaucoup bougé malgré deux grosses journées de mobilisation.
Le mouvement s'amplifie. Inquiétant ?
Cinq ou six cas de séquestrations depuis un mois, ça ne fait pas un mouvement ! La répétition peut être liée au contexte actuel, et à un phénomène de contagion « médiatico-syndicale » : quand on voit que certains utilisent ce mode d'action et que ça paie, bien sûr que ça peut donner des idées. Mais il est bien trop tôt pour parler de « mouvement ». En revanche, ce qui est inquiétant, c'est que le gouvernement ne semble pas saisir le danger de ces situations. Malgré les mises en garde des syndicats.
Sur le site du quotidien Le Monde, le 10 avril, Sylvia Zappi montre la sympathie de l’opinion publique à l’égard de ces actions syndicales qui font céder les dirigeants d’entreprises. La dérive scandaleuse, puis la déroute, de la finance mondiale, et ses conséquences économiques et sociales, ont créé un climat de mécontentement sans précédent, à caractère prérévolutionnaire.
Lire cet article : Pourquoi les séquestrations de patrons sont populaires
Sur le site de ce quotidien, Bernard Thibault a répondu aux critiques concernant ces actions :
Les séquestrations de dirigeants d'entreprises en France ne peuvent être assimilées à des prises d'otages et sont défendables tant que l'intégrité physique des patrons n'est pas menacée, estime le secrétaire général de la CGT, Bernard Thibault. "Ce sont des actions syndicales coordonnées, organisées, ce n'est pas comparable à des prises d'otages", a déclaré Bernard Thibault sur RTL.
Le patron de la CGT a dit qu'il comprenait ce type de mouvements et qu'il les défendrait "dès lors que ce sont des actions qui ne portent pas une atteinte physique à ces dirigeants". Selon lui, Nicolas Sarkozy et le gouvernement portent une part de responsabilité dans cette radicalisation pour ne pas avoir entendu la colère des salariés.
"Si l'on constate un certain nombre de modifications dans la conduite des revendications (...), je crois que c'est aussi la conséquence directe d'un certain nombre de déclarations et d'attitudes du chef de l'Etat et du gouvernement qui ont minoré jusqu'à présent le mécontentement", a-t-il dit.
"On ne peut pas à la fois dire que l'on est dans un pays où les grèves et les manifestations ne se voient pas et s'étonner que les salariés pour être entendus et pris en considération imaginent d'autres formes d'actions" qui permettent "d'attirer les micros et les caméras" (…) - Le Monde, 10 avril.
Pour en savoir plus, lire Militants politiques et activistes à l'assaut des syndicats (Rue89, 26 mars). Alors que les mobilisations s'amplifient, le NPA ou les Désobéissants tentent d'en tirer profit au détriment des syndicats (…).
Cet article est le 50ème paru sur ce blog dans la catégorie Travail Economie.