Comment faire revenir les pouvoirs publics dans le jeu laitier ?
Les producteurs de lait sont allés manifester à Bruxelles le 5 octobre, afin de mettre la pression sur les 27 ministres de l’agriculture réunis à l’initiative du ministre français et de sa collègue allemande. Cette réunion, ils le savaient, n’était pas suffisante pour résoudre la crise, mais ils espéraient une prise de conscience du pouvoir politique européen de la gravité de la situation et de l’urgence de trouver une solution.
Selon Luc Vernet, correspondant de Ouest-France, L'Europe n'a rien lâché de plus pour le lait (6 octobre). En réalité, ce sont surtout les dirigeants de la FNSEA, des JA et de la FNPL, c’est-à-dire les syndicats majoritaires, qui sont les plus critiques. Normal, ils avaient combattu le mouvement de grève des producteurs de lait qui avait abouti à cette réunion des ministres à Bruxelles.
Ce 7 octobre, le même journal enfonçait le clou : Lait : les réactions au sommet de Bruxelles.
Le sommet a accouché d'une souris. C'est l'appréciation portée par les syndicats agricoles sur le conseil extraordinaire des ministres européens de l'Agriculture, consacré à la crise laitière, à Bruxelles, lundi.
Selon la FRSEA et les Jeunes agriculteurs de l'Ouest, « la nouvelle régulation européenne est une coquille vide. La Commission européenne persiste dans la libéralisation des marchés. »
Selon la Confédération paysanne de Loire-Atlantique, « la mise en place d'une commission d'experts est un recul. La démonstration de la nécessité de régulation de l'offre à l'échelle européenne n'est plus à faire. »
Le syndicat paysan demande au ministre de l'Agriculture Bruno Le Maire de « réunir tous les acteurs de la filière pour revoir le prix payé au producteur de façon à ce qu'il couvre, au minimum, le coût de production. Si des entreprises de transformation ont des difficultés, l'État doit les soutenir, comme il l'a fait pour les banques. »
La seule note positive à l'issue du sommet émane des députés européens Christophe Béchu et Michel Dantin (UMP, Parti populaire européen). « Les ministres des 27 pays ont conclu que le marché européen des produits laitiers nécessitait une régulation. C'est une avancée politique qui offre la perspective d'une nouvelle gestion du marché. »
L’association des producteurs de lait indépendants (APLI) et son président constatent qu’un pas a été fait dans la bonne direction, même si les ministres n’ont pas répondu à l’urgence. Pascal Massol a répondu aux questions de Jacques Ripoche dans Sud-Ouest, le 6 octobre.
Voir LAIT « Il nous faut encore 15 000 euros » - Accueil / Actualité ...
Quels enseignements tirez-vous de la réunion de lundi à Bruxelles ? Aucune porte n'est fermée. On a même entendu Mme Fischer Boel, la commissaire européenne, parler de régulation. C'est plutôt une bonne nouvelle. Jusqu'à présent le mot « régulation » n'entrait pas dans le vocabulaire de cette ultralibérale (rire) !
Qu'attendez-vous du groupe d'experts qui va se mettre en place ? Dans ce groupe, on va retrouver, en partie, des gens que l'on connaît. Donc, on va continuer à discuter avec eux jusqu'à ce que l'on trouve une solution qui nous satisfasse.
Quelle est la mesure que vous revendiquez le plus ? Incontestablement, la mise en place d'un indicateur de prix européen. Il permettrait, derrière, de fixer les volumes, et ce, sous l'autorité publique.
Pourtant, lundi soir, les organisations agricoles ont exprimé leur déception... Oui. La porte n'est pas fermée à moyen terme. Cela dit, les organisations agricoles attendaient aussi des mesures de court terme pour aider les producteurs laitiers en difficulté à passer le cap. Ces mesures n'étaient pas au rendez-vous.
Que demandez-vous précisément pour passer le cap ? Il nous faut 15 000 euros par tranche de 200 000 litres de lait. Nous pensons que c'est possible.
Que comptez-vous faire ? Nous réfléchissons à des actions intelligentes et innovantes que l'on ne peut pas dévoiler pour le moment. Mais nous allons interpeller l'État, les politiques. Il nous faut obtenir ces 15 000 euros. On ne lâchera pas. On n'a pas d'autre issue que de gagner. Il faut qu'on y aille !
Vous avez fondé l'Apli, en laquelle, au départ, peu de monde croyait. Comment mesurez-vous le chemin parcouru ? On ne peut être que satisfait. Quand vous partez à 3 et que vous vous retrouvez 30 000 à faire la grève du lait, c'est énorme ! Et sans la grève du lait, il n'y aurait pas eu la réunion de Bruxelles, lundi dernier...
Mais qui est Massol : un nouveau Bové ou un autre Lacombe ?
Mais qui est donc Pascal Massol ? Il fait trembler les institutions européennes au point de convoquer dans l'urgence un sommet informel le 5 octobre. En un été, il a mobilisé les agriculteurs de la France entière avec un point d'orgue : la marée blanche du Mont Saint Michel, le 21 septembre, soit dix jours après le lancement de la grève européenne du lait.
Ce paysan de l'Aveyron est issu du Segala, ces terres pauvres au sud de Rodez, juste bonne à produire du seigle. Mais très riches pour faire émerger de grands responsables agricoles nationaux. Il faut citer dans l'ordre chronologique, un président de la FNSEA en 1986 : Raymond Lacombe. Un des créateurs de la Confédération Paysanne, José Bové, en 1987. Un ministre de l'Agriculture, Jean Puech, en 1993. Et enfin un secrétaire général de la FNSEA, Dominique Barrau en 2005. Puis, désormais, avec la grève européenne du lait de septembre 2009 : Pascal Massol, éleveur laitier et créateur de l'APLI (Association des producteurs de lait indépendant).
Quoi qu'il arrive désormais, il faudra compter avec lui. Pour mieux comprendre ce nouveau Bové ou ce futur Lacombe qui n'a pas sa langue dans sa poche et est armé de bon sens, il fallait aller chez lui à sa rencontre, voir comment il vivait et vérifier si les rumeurs sur son compte souvent de la part d'opposants étaient vérifiées. A vous de juger, j'ai découpé la visite en 7 séquences pour ne pas lasser l'internaute.
Un nouveau José Bové ? Justement, la discussion semble animée entre Pascal Massol et le nouveau député européen, sous les yeux d’un jeune paysan mayennais (Bruxelles, 5 octobre). Voir photo ci-dessous.
Pour se détendre, voir une photo réjouissante (Le Figaro, 5 octobre) montrant les forces de l’ordre sur la défensive. A ne pas manquer sur http://minu.me/158l.
Plus sérieusement, dans l’Humanité, le 6 octobre, un témoignage de producteurs des Côtes-d’Armor : Crise du lait. "D'ici un an, on n'aura plus rien".
Sur son blog, le 2 octobre, Patrick Le Hyaric interpelle la Commissaire à l’agriculture.
Cet article est le 136ème paru sur ce blog dans la catégorie AGRICULTURE et PAC.