Le MRC 53 est la structure mayennaise du Mouvement Républicain et Citoyen, qui a pour but de rassembler la gauche républicaine à partir, notamment, des idées de Jean-Pierre Chevènement, l'un de ses fondateurs, qui n'est plus membre du MRC depuis 2015. Le MRC a pris le relais du Mouvement des Citoyens (MDC) après les élections de 2002. En 2022, le MRC est devenu membre de la Fédération de la Gauche Républicaine avec quatre autres organisations politiques.
Droit de se nourrir et souveraineté alimentaire
Avant la journée mondiale de l’alimentation, qui se déroulait hier à l’initiative de l’Agence des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), celle-ci se montrait pessimiste en décrivant les conséquences de la hausse du prix des céréales sur les populations des pays pauvres, dépendantes de l’importation de ces denrées pour se nourrir.
Dans un article du Monde, daté du 17 octobre, intitulé « Envolée du prix des céréales : menace sur les pays pauvres », Laëtitia Clavreul se fait l’écho de l’inquiétude des experts.
Cette page 22 du quotidien présente d’abord « les cinq raisons de la hausse des cours des matières premières agricoles :
- Des craintes sur la production. Les multiples révisions à la baisse des prévisions de récolte mondiale 2007-2008 ont pesé sur les cours. Elles sont dues essentiellement aux aléas climatiques : sécheresse en Australie et en Ukraine, pluies dans l’Union européenne...
- La hausse de la consommation mondiale. La demande mondiale de céréales va croissant depuis plusieurs années, du fait de l’augmentation de la population et de l’évolution des modes de consommation dans les pays émergents comme l’Inde et la Chine.
- La baisse des stocks. La production ne suit pas la consommation. En 2007-2008, même si la récolte mondiale ne devrait pas être en baisse, elle suffira juste à couvrir la demande, mais pas à remonter les stocks. Pour le blé, par exemple, ces derniers sont au plus bas depuis 32 ans.
- Les agrocarburants. L’essor des biocarburants à travers le monde commence à concurrencer la production alimentaire, et à bouleverser le jeu. Les USA conservent leur maïs pour le transformer en bioéthanol, et ne l’écoulent donc plus sur le marché mondial.
- La spéculation. Beaucoup s’attendaient, pour des raisons structurelles, à une hausse des cours des céréales, mais personne n’avait prédit de tels niveaux, que les professionnels mettent sur le compte de spéculateurs. A Chicago, le prix du blé a plus que doublé depuis le début de l’année.
Puis, après avoir rappelé que 854 millions de personnes souffrent de sous-alimentation dans le monde, la journaliste essaie de répondre à la question « Quel sera l’impact de cette hausse sur les populations ? »
Voici ce qu’elle écrit à propos des effets négatifs à redouter.
« "Avant, les prix étaient si bas que notre tropisme était de nous inquiéter pour les producteurs. Nous allons devoir maintenant analyser les conséquences du nouveau contexte sur les consommateurs", estime M. Abbassian, expert à la FAO. Quel que soit le continent, les plus pauvres seront les plus touchés, et particulièrement les populations urbaines, qui ne produisent pas de denrées.
L'impact sera plus ou moins fort sur le pouvoir d'achat : dans les pays développés, les dépenses alimentaires représentent de 10 % à 20 % du budget des ménages, contre 60 % à 90 % dans les pays pauvres. "Quand 90 % des dépenses vont à la nourriture, une augmentation de 20 % du prix des céréales est tout simplement dramatique", explique Françoise Gérard, économiste au Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement (Cirad). "Pour éviter des émeutes de la faim, les Etats vont tenter de limiter la hausse des prix, comme au Mexique avec les tortillas ou au Sénégal avec le pain", poursuit-elle, redoutant que certains gouvernements, qui n'en auront pas les moyens, perdent le contrôle de la situation (…).
Cette évolution erratique des cours mondiaux des matières premières agricoles conduit à s’interroger sur la mise en œuvre de la mondialisation dans le secteur agricole et alimentaire.
C’est ce que fait Thierry Pouch dans la Lettre économique des Chambres d’agriculture (APCA) en octobre. Il constate que certains pays, comme l’Inde, constituent des stocks de sécurité en recourant à des importations massives de céréales. D’autres, en Europe, comme l’Espagne et le Portugal, créent des réserves stratégiques de produits agricoles afin de se prémunir contre la hausse vertigineuse des cours mondiaux.
Il en déduit que la notion de souveraineté, étroitement associée à celle d’indépendance, revient dans le débat public après des années de discrédit.
Il convient de bien préciser ce qu’on entend par souveraineté : ce qui peut se produire par soi-même, et qui fonde et préserve le lien social, pour aboutir à la constitution de la liberté d’un peuple.
Ainsi, la souveraineté alimentaire est un élément fondamental du fragile édifice européen. Dans cette perspective, il revient aux producteurs de denrées agricoles d’intervenir au niveau politique et économique pour réaffirmer cette notion de souveraineté (qui préserve de la tentation du conflit), qui ne saurait être confondue avec celle de protectionnisme (dont le but est de se protéger de l’autre).
Restaurer la souveraineté alimentaire nécessite de faire face à l’émergence de nouvelles puissances agricoles, comme le Brésil, dont les intérêts sont contradictoires avec les nôtres.
Les blocages à l’OMC sur le dossier agricole nous rappellent que l’équilibre alimentaire mondial, reposant sur la reconnaissance de la souveraineté, est perturbé par la force des intérêts économiques divergents.
Ces réflexions de Thierry Pouch prolongent ce que dit la FAO sur le droit à se nourrir dignement. Pendant ce temps, l’Organisation Mondiale du Commerce continue son forcing pour l’ouverture généralisée de tous les secteurs économiques, y compris l’agriculture, au commerce mondial, affirmant sans rire que c’est bénéfique pour tous !
Comme l’écrit le rédacteur de la Lettre économique de l’APCA, « la souveraineté alimentaire est un élément fondamental du fragile édifice européen ». Mais c’est aussi indispensable aux pays pauvres, importateurs de céréales, dont les peuples vont subir les hausses de prix.
Je propose, dans le cadre du réseau CIVIQ (voir l’article paru le 8 octobre sur ce blog), de réfléchir aux propositions de politique agricole que j’ai présentées à Libourne (article paru le 1er avril 2007 sur ce blog – c’est l’article le plus lu sur ce blog par les internautes) et lors des élections législatives (articles parus les 1er et 2 juin 2007).
Nous allons vers une situation carrément insupportable en laissant faire des marchés, dont la motivation est le profit à court terme, sans aucun souci de la vie de millions d’hommes et de femmes dans le monde.
Il faut que la politique serve à faire prévaloir l’intérêt général, à long terme, de la société sur les intérêts particuliers, à court terme, des détenteurs de capitaux uniquement préoccupés par leurs placements financiers.
Amis citoyens, mettons-nous en mouvement et prenons part à ce qui sera la révolution du 21ème siècle : la reconquête du pouvoir politique sur le pouvoir financier, afin de faire vivre l’économie.