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Présentation

  • : Michel Sorin
  • : Le MRC 53 est la structure mayennaise du Mouvement Républicain et Citoyen, qui a pour but de rassembler la gauche républicaine à partir, notamment, des idées de Jean-Pierre Chevènement, l'un de ses fondateurs, qui n'est plus membre du MRC depuis 2015. Le MRC a pris le relais du Mouvement des Citoyens (MDC) après les élections de 2002. En 2022, le MRC est devenu membre de la Fédération de la Gauche Républicaine avec quatre autres organisations politiques.
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8 septembre 2013 7 08 /09 /septembre /2013 21:40

L’UE néolibérale négocie pour libéraliser le commerce

 

La négociation commerciale entre l’Union européenne et les USA, qui s’est ouverte récemment (voir Néolibéralisme en action : négociations ouvertes entre les USA et l'UE - 8 juillet 2013) sera au centre des débats le 16 septembre (voir Res Publica : le marché transatlantique, thème de la prochaine réunion - 8 septembre 2013).

Cela ne doit pas occulter le fait que l’UE a engagé des négociations dans différentes directions depuis plusieurs années. C’est le cas avec le Canada depuis 2008 (un accord est annoncé fin 2013). Il existe une méfiance dans la société canadienne à l’égard de ces négociations. Le réseau québécois sur l’intégration continentale (RQIC) est contre cet accord.

 

Voir Argumentaire du Réseau québécois sur l'intégration continentale (RQIC) contre l'accord de libre-échange Canada-UE  

Le RQIC est une coalition sociale multisectorielle regroupant plus de vingt organisations sociales du Québec, provenant des milieux syndicaux, communautaires et populaires, étudiants, environnementaux, de femmes, de droits humains, et de développement international. Les organisations membres du RQIC représentent plus d’un million de personnes.

Depuis sa fondation lors des négociations de l’ALÉ entre les États-Unis et le Canada, le RlQeIC s’est imposé comme un interlocuteur important de la société civile québécoise en matière d’intégration économique et de commerce international.

Représentant au Québec de l’Alliance Sociale Continentale (ASC), le RQIC a organisé à Québec en avril 2001 le 2e Sommet des peuples des Amériques lors du Sommet des chefs d’États. En septembre 2004, il a été l’organisation hôte du Colloque tri-national Les dix ans de l’ALÉNA: Bilan social et perspectives qui a accueilli plus de 350 déléguéEs des trois pays signataires de l’accord et relancé les alliances stratégiques entre les mouvements sociaux du Mexique, des États-Unis, du Canada et du Québec.

Plus récemment, le RQIC a contribué à ébranler le processus du Partenariat nord-américain pour la sécurité et la prospérité (PSP), une initiative néolibérale nouveau genre par laquelle, en associant économie et sécurité, les élites économiques et politiques cherchaient à approfondir le modèle de l’ALÉNA, à harmoniser à la baisse les normes et réglementations dans la région, à intégrer les marchés de l’énergie, à implanter un périmètre commun de sécurité, et à institutionnaliser le pouvoir des entreprises dans la définition même des politiques publiques.

 

Une enquête bien documentée a été publiée dans l’Humanité le 27 août 2013, sous le titre

Accord de libre-échange: Méfions-nous du Canada

 

L’accord de libre-échange entre l’Union européenne et le Canada, négocié depuis 2008, fait peu de vagues en Europe, concentrée sur le partenariat avec les États-Unis. Pourtant, au Canada, la résistance à la doctrine néolibérale s’active contre ce traité. Un exemple à suivre pour les Européens, car l’accord UE-USA n’en sera qu’une copie.

 

Dans le plus grand secret, l’Union européenne et le Canada négocient un traité de libre-échange depuis 2008, l’Accord économique et commercial global (AECG, CETA en anglais, pour Comprehensive Economic and Trade Agreement). Le Canada réclame un accord avec l’UE, deuxième partenaire économique du Canada, depuis 2004. La signature était prévue pour fin 2011 mais les négociations ont pris du retard et les plus optimistes parlent maintenant de fin 2013.

 

« Indifférence générale »

Car depuis l’ouverture des discussions sur un accord de libre-échange avec les États-Unis d’Amérique (TAFTA, pour Transatlantic Free Trade Area, qui devrait voir le jour en 2015), l’UE traîne des pieds dans le dossier canadien. Le Canada n’est que le 12e partenaire économique de l’Union, ne représentant que 1,8 % des échanges commerciaux totaux, loin derrière Oncle Sam et ses 14 %. Une puissance commerciale de seconde zone donc pour l’Union européenne, qui toutefois teste pour la première fois son pouvoir de négociation avec un pays du G7. En effet, depuis l’entrée en vigueur du traité de Lisbonne en 2009, les accords de libre-échange sont conclus directement au niveau européen, par la Commission européenne, et l’AECG devrait être le premier partenariat signé.

Le premier mais pas le seul, car l’Union européenne noue des accords de libre-échange à la pelle : outre les USA, l’Union négocie sec avec l’Inde et la Corée du Sud. De quoi faire oublier le Canada. « Nous sommes moins importants au commerce européen que l’Inde ou la Corée du Sud. Et notre pays ne compte que 34 millions d’habitants, bien moins que les USA, qui seront un négociateur beaucoup plus coriace lors des discussions. », admet Stuart Trew, responsable du commerce au Conseil des Canadiens, une organisation militante canadienne créée en 1985 pour s’opposer à l’accord de libre-échange nord-américain (ALENA). « C’est vrai que ce traité est négocié dans l’indifférence générale », déplore Marie-Christine Vergiat, eurodéputée Front de gauche. « Et le silence le plus total de la Commission européenne n’aide pas à sa médiatisation. »

 

Résistance canadienne

Si l’accord passe quelque peu inaperçu en Europe, il n’en va pas de même au Canada où militants de gauche, syndicats et ONG organisent la résistance contre le néolibéralisme. Pour Stuart Trew, « Les trente dernières années ont assez prouvé que le libre-échange enrichit les riches et appauvrit les pauvres, menace la santé publique et la défense de l’environnement et encourage à toujours plus de privatisations. »

À la demande du Canada, les négociations ont eu lieu sous le régime dit de la liste négative : tout service public qui n’est pas exclu nommément de l’accord est considéré comme automatiquement inclus, même s’il n’existait pas au moment de la signature. Une aberration pour Judith Kirton-Darling : « Pour nous, les services publics viennent du choix d’un peuple de ce qu’il veut mettre dedans, maintenant ou dans le futur. » La jeune femme est secrétaire générale de la Confédération européenne des syndicats (CES), une organisation dont sont membres les principaux syndicats français. « Sur le principe, nous ne sommes pas opposés à un accord de libre-échange, mais nous souhaitons qu’il soit « gold standard », de la meilleure qualité possible. Il doit protéger le droit du travail, l’environnement et les services publics », détaille-t-elle.

Outre-Atlantique, les propos sont plus virulents : « Avec cet accord, les grandes multinationales européennes auront accès aux marchés publics canadiens, ce à quoi nous nous opposons totalement. », explique Claude Vaillancourt, président d’Attac-Québec. L’association a contribué à créer le Réseau québécois sur l’intégration continentale (RQIC), qui rassemble syndicats et associations québécoises contre l’AECG. « Par exemple, l’eau est une ressource publique au Canada. On craint qu’avec l’accord, des multinationales type Veolia débarquent. Regardez en Europe, les tarifs ont explosé quand les services de distribution ont été privatisés. »

 

Traité international, réforme intérieure

Puisqu’au Canada les services publics, ainsi que l’exploitation des ressources naturelles, relèvent de la compétence des provinces, les Canadiens craignent que le traité n’entraîne une perte d’autonomie. Ce sont les provinces qui gèrent les monopoles de service public, comme Hydro-Québec, l’équivalent québécois d’EDF, avant la libéralisation du secteur. « Tous les monopoles du monde entier agacent ceux qui négocient des accords de libre-échange », confesse Pierre-Marc Johnson, ancien Premier ministre du Québec, lors d’une audition devant le Parlement québécois en 2010.

« Du point de vue du Canada, l’AECG relève plus de la réforme intérieure que du commerce. », explique Stuart Trew. Un avis partagé par la Commission européenne qui se félicite des concessions canadiennes. Ainsi, dans une note d’octobre 2012, elle note que : « L’offre canadienne d’accès aux marchés publics est la plus complète et ambitieuse jamais faite par le Canada et ses provinces à un partenaire commercial, y compris les États-Unis. L’offre dépasse même les accords mutuels entre les différentes provinces canadiennes. De cette façon, l’AECG ouvre la voie à une importante réforme intra-canadienne. »

 

Les entreprises contre la société

Si l’AECG entraînera une privatisation à tout va, il conduira aussi à une possible contestation des lois sociales et environnementales, à cause de la mise en place de mécanismes d’arbitrage investisseur-État (ISDS en anglais, pour Investor-State Dispute Settlement). « Ces mécanismes sont notre plus grande crainte », admet Judith Kirton-Darling. Sous leur nom barbare, ces mécanismes d’arbitrage, hérités de l’accord de libre-échange entre le Canada, les USA et le Mexique (ALENA), permettent à une entreprise privée de poursuivre, devant un tribunal spécial, un gouvernement étranger si une réglementation la prive de profits anticipés. « L’AECG est le premier accord négocié par l’UE où un mécanisme d’arbitrage investisseur-État est intégré. », rappelle la syndicaliste.

Une nouveauté pour l’UE mais pas pour le Canada, déjà confronté depuis de nombreuses années à ce système. À cause des nombreuses lois de protection de l’environnement que le pays a votées, le Canada a été poursuivi 28 fois par des entreprises privées, entre 1994 et 2011, pour un total de cinq milliards de dollars (3,7 milliards d’euros). Dernier exemple en date, le Québec a récemment interdit la fracturation hydraulique, utilisée pour extraire le gaz de schiste. La société canadienne d’exploitation de gaz de schiste Lone Pine Resources, grâce à une filiale aux USA, menace de poursuivre le gouvernement du Québec et lui réclame 250 millions de dollars canadiens (environ 180 millions d’euros) pour profits non-réalisés.

Une plaie pour les citoyens. Selon Claude Vaillancourt, « Les tribunaux spéciaux sont coûteux, antidémocratiques et penchent souvent en faveur des entreprises. Les nombreux exemples issus de l’ALENA en attestent. » Un avis partagé par Judith Kirton-Darling : « Le Canada et l’UE ont les systèmes juridiques parmi les plus développés du monde, il n’y a aucun besoin de ces arbitrages supplémentaires. »

Le Parlement européen, par la voie de sa résolution du 8 juin 2011, s’oppose à la mise en place de ces arbitrages. Et le groupe d’experts mandaté par la Commission européenne pour étudier l’impact de l’accord est lui aussi sceptique. Dans son rapport adressé à la Commission, rendu en juin 2011, il stipule que « l’intégration des mécanismes d’arbitrages investisseur-État dans l’AECG aura un effet bénéfique réduit, tant au niveau économique que social et environnemental. » Mais la Commission européenne et les lobbies économiques ne sont pas près de lâcher le morceau.

 

Gentil Canada contre Europe libérale ?

Surtout que l’accord offre plus de libéralisation pour un gain économique au final assez faible. En 2011, le groupe d’experts mandatés par la Commission européenne a évalué ce profit à quatre milliards de dollars en moyenne, tant pour l’Union que pour le Canada, soit une hausse respective du PIB de 0,025 % et 0,27 %.

Originellement, la signature aurait dû avoir lieu fin 2011, mais elle a été maintes fois repoussée depuis. Principale pierre d’achoppement, les quotas d’importation dans l’agriculture. « L’accord permettra aux Canadiens d’exporter leurs bœufs aux hormones, dont se méfient les Européens, et aux Européens d’exporter leurs fromages, qui menacent la multitude de fromageries locales au Canada. », expose Claude Vaillancourt.

Avec une population quinze fois inférieure et un PIB égal au douzième de celui de l’UE, le Canada paraît en position de faiblesse dans ces négociations. D’ailleurs la Commission européenne note qu’« un point clé est que la liste des intérêts que l’Europe a à gagner avec ce traité est beaucoup plus longue que celle du Canada. » « Je ne vois pas bien l’intérêt du Canada dans cette affaire. », renchérit Marie-Christine Vergiat. Les seuls gains pour le Canada seraient une ouverture du marché du bœuf, de certains éléments d’automobile et peut-être du poisson (…).

 

Cet article est le 139ème paru sur ce blog dans la catégorie Capitalisme

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8 septembre 2013 7 08 /09 /septembre /2013 15:44

La Fondation Res Publica mérite être plus connue

 

Le prochain débat de la Fondation Res Publica aura lieu lundi 16 septembre 2013, de 18h à 20h30, 28 rue Saint-Dominique, Paris 7ème. Avec la participation de :

 

- Hubert Védrine, ancien Ministre des Affaires Etrangères;
- Xavier Bertrand, député UMP de l’Aisne et Ancien Ministre du Travail, de l’Emploi et de la Santé;
- Jean-Luc Gréau, économiste, membre du Conseil scientifique de la Fondation Res Publica;
- Jean-Michel Quatrepoint, journaliste économique, membre du Conseil scientifique de la Fondation Res Publica;
- Jean-Pierre Chevènement, président de la Fondation Res Publica.

 

Entrée libre sous réserve de s’inscrire à info@fondation-res-publica.org.

 

Voir Le projet de marché transatlantique

 

Sur ce thème, voir Néolibéralisme en action : négociations ouvertes entre les USA et l'UE - 8 juillet 2013 

 

 Pour information, les ACTES récemment publiés par la Fondation Res Publica :  

La France et l'Europe dans le nouveau contexte énergétique mondial

Nouveau pacte social : mode d'emploi

Voir aussi les Notes et études de la Fondation
Notamment (8 mars 2013) : BRIC: les paradoxes russes
Par David Teurtrie, docteur en géographie et spécialiste de la Russie. Chercheur au Centre de Recherches Europes Eurasie (CREE) de l’INALCO, il consacre ses travaux aux mutations géoéconomiques et géopolitiques de l’Eurasie postsoviétique.

 

Pour en savoir plus : Présentation de la Fondation Res Publica, par Jean-Pierre Chevènement

 

Cet article est le 170ème paru sur ce blog dans la catégorie CHEVENEMENT

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7 septembre 2013 6 07 /09 /septembre /2013 21:46

Soutenir partout les processus démocratiques

 

Le 19 août 2013, Patrick Nivet a publié sur son blog sa lettre à un ami, collègue au Conseil municipal de Libourne (Gironde), dans laquelle il exprime son point de vue sur les évènements en cours dans les pays arabes.

 

Bonjour Omar,

 

Tu suis sans doute  comme moi les nouvelles bien terribles venues d'Egypte, de Tunisie et d'ailleurs. Tous ces pays du Moyen Orient et du Maghreb sont comme des volcans en éruption que rien n'éteint, pas même des processus démocratiques plus ou moins réussis ; le feu des déchirements couve toujours sous les cendres et la moindre manifestation se transforme en coups d'Etat ou en répressions plus ou moins féroces qui, elles mêmes, entraînent de nouvelles manifestations jusqu'à la guerre civile qui embrase maintenant la Syrie, voire l'Irak et même la Libye.

 

Je pense que les problèmes économiques, les contradictions religieuses, la non résolution du Problème israélo-palestinien, les nationalismes en souffrance, en sont les grandes causes mêlées... Les pays occidentaux jouent en général les « sainte nitouche » mais multiplient souvent les approximations et les erreurs en tous genres.

 

Pour l'essentiel, ils font la part trop belle à Israël et cherchent dans le maquis des intentions des uns et des autres à défendre évidemment le fil de leur intérêt en se prenant souvent les pieds dans le tapis incandescent des incendies qu'ils allument parfois ...

 

Ce qui est sûr, c'est qu'en Algérie il y eut bien un coup d'Etat dans les années 1990, qui a débouché sur une guerre civile, et qu'en Egypte aujourd'hui le risque est grand d'une telle évolution après celui auquel on vient d'assister.

En fait, l'impression c'est que, pour beaucoup, la démocratie ne peut être conçue avec un pouvoir religieux... qu'évidemment le FIS en Algérie et les Frères musulmans en Egypte se proposaient d'installer...

 

J'avoue que je préférerais que les élections débouchent sur un pouvoir laïque mais, pour autant, je ne pense pas que nous puissions montrer une quelconque satisfaction devant des coups d'Etat qui constituent des remèdes pires que le mal qu'ils sont sensés soigner. Sinon, ce n'est pas la peine de montrer la moindre distance avec les partis Bass en général et Bachar el Assad en Syrie.

La démocratie en Iran me parait très contrôlée par les religieux, que la société iranienne supporte, tout compte fait, difficilement, en essayant de se faufiler dans les interstices des processus électoraux.

Quand aux contradictions religieuses, c'est un sous-produit attisé par les autres, économiques notamment.

 

Au fond, il n' y a pas de solutions simples, mais la nécessité de soutenir les processus démocratiques en les rendant le moins imparfaits possibles me parait quand même incontournable et c'est pour cette raison que les militaires en Egypte et les bandes armées en Iran ou ailleurs ne doivent pas être encouragés.

 

Je ne souhaite pas, d'autre part, que nous intervenions militairement en Syrie aujourd'hui pas plus qu'hier en Irak. La position de la France au début des année 2000 (Chirac - De Villepin), sans oublier évidemment JP Chevènement au début des années 1990, trouvant dans la guerre civile larvée d'aujourd’hui le prolongement de son bien fondé.

 

Voir, précédemment (30 mai 2013) : Patrick Nivet : 14 ans de commissions de discipline des hôpitaux publics

 

Cet article est le 32ème paru sur ce blog dans la catégorie Proche Moyen Orient.

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7 septembre 2013 6 07 /09 /septembre /2013 19:51

Pensons à servir la France et à défendre la paix

 

MRC national 002Jean-Pierre Chevènement, sénateur du Territoire de Belfort, est intervenu le 4 septembre 2013 dans le cadre du débat au Sénat sur la situation en Syrie - sa précédente intervention au Sénat date du 12 août 2013 (voir Chevènement au Sénat lors du débat sur le Livre blanc de la défense).

Syrie: le jour d'après

Monsieur le Ministre,

Les circonstances nous donnent un peu de temps pour la réflexion. Sachons utiliser ce répit pour éviter des décisions précipitées qui pourraient s’avérer funestes. J’ai eu l’occasion à plusieurs reprises de vous exprimer ainsi qu’au Président de la République ma préoccupation, et cela dès juin 2012, quant à la définition de notre politique vis-à-vis de la Syrie. Je n’exprime pas ma seule préoccupation. Elle est aussi celle de Robert Hue et de plusieurs sénateurs du groupe Rassemblement Démocratique Social et Européen (RDSE). En fait nous avons hérité de cette orientation politique. Quand vous êtes arrivé au Quai d’Orsay, notre ambassade à Damas avait déjà été fermée.
De même l’exigence, avant toute transition, du départ d’Assad, déclaré assassin de son peuple, affaiblissait toute démarche de négociation visant à faire pression sur le régime de Damas.

En réalité, c’est la nature même de la guerre engagée en Syrie qui faisait et fait encore problème aujourd’hui. C’est une guerre civile et plus que cela une féroce guerre interconfessionnelle. Assad, dictateur brutal, défend les prérogatives d’une minorité, celle des Alaouites qu’il sait soutenus par d’autres minorités, chrétiennes par exemple mais aussi par une fraction de la majorité sunnite qui a longtemps bénéficié de la stabilité des courants d’affaires.

L’expression « Assad doit partir ! » sous-estimait à l’évidence les appuis dont il disposait. La seule issue de cette guerre civile barbare est une issue négociée entre les deux camps.

Les Sunnites ou du moins une majorité d’entre eux veulent l’effacement des Alaouites. Ils doutent d’y réussir par la force. Ils comptent sur l’intervention extérieure, à l’exemple de ce qui s’est passé en Libye. Mais comparaison n’est pas raison.
La résolution 1973 sur la Libye a été prise grâce à l’abstention de la Russie et de la Chine. Cette résolution a été évidemment interprétée dans le sens d’un changement de régime. Je me suis moi-même abstenu quand le gouvernement a demandé, le 12 juillet 2011, l’autorisation de prolonger l’intervention de nos forces. Le résultat est là : si l’opération militaire a été brillamment conduite, Kadhafi a été assassiné. Les milices tribales et le plus souvent islamistes se sont rendues maîtresses du terrain. Le port de Derna est aux mains d’Al Quaïda, le Mali a été déstabilisé.

Sans l’intervention de la France dans le cadre des résolutions de l’ONU que j’ai soutenue fortement, le Mali serait devenu aujourd’hui un sanctuaire de l’islamisme radical, dominé par des groupes terroristes djihadistes. Enfin, par l’interprétation qui a été faite en Libye de la résolution 1973, la notion de responsabilité de protéger a été passablement discréditée aux yeux de la Russie, de la Chine, mais aussi de la plupart des pays émergents qui refusent la notion d’ingérence, elle-même proscrite par la Charte des Nations Unies. L’occidentalisme peut se camoufler en droit de l’hommisme. Celui-ci ignore ou, de manière plus perverse, veut occulter les réalités et les choix politiques.

Or, la France doit d’autant plus se placer sur le terrain du droit international qu’elle est elle-même l’un des cinq membres permanents du Conseil de Sécurité de l’ONU. C’est son intérêt. Pour être une puissance repère, comme l’ont souhaité le Président de la République et vous-même, dans votre brillante intervention en conclusion de la Conférence des Ambassadeurs, la France ne doit pas s’affranchir du Droit. Or, le droit d’ingérence n’existe pas au regard de la Charte des Nations Unies. La mise en œuvre de la responsabilité de protéger, énoncée par l’Assemblée Générale des Nations Unies dans son document final de 2005, souligne que cette responsabilité incombe d’abord à chaque Etat et à défaut à la communauté internationale, je cite : « par une action collective résolue, par l’entremise du Conseil de Sécurité, conformément à la Charte, notamment son chapitre VII. Voilà ce que dit le droit.

Des frappes aériennes sur la Syrie ne pourraient ainsi s’effectuer qu’en dehors du cadre de la légalité internationale. Vous invoquez la légitimité et même vous essayez d’invoquer une autre source de droit en vous référant à la convention ancienne et aujourd’hui dépassée de 1925 interdisant l’utilisation, en temps de guerre, des armes chimiques dont la Syrie et pour cause – elle était alors sous mandat français – n’était pas partie prenante. Quant à la Convention plus récente sur l’interdiction des armes chimiques signée à Paris le 13 janvier 1993, vous savez pertinemment que ni la Syrie ni l’Egypte ne l’ont signée, le négociateur égyptien de l’époque, M. Amr Moussa, ayant alors expliqué que son pays y adhérerait quand les armes de destruction massive, nucléaires, bactériologiques et chimiques auraient été éliminées du Proche-Orient, la détention d’une telle arme contribuant, selon lui, à un équilibre de dissuasion régional. La Conférence d’examen du Traité de Non Prolifération (TNP) de mai 2010 vise la création d’un Moyen-Orient dénucléarisé. C’est dans ce cadre général qu’il faut agir pour préserver dans cette région les équilibres de sécurité.
A l’heure actuelle, deux Etats ont signé mais n’ont pas ratifié la Convention d’interdiction des armes chimiques : la Birmanie et Israël, et six autres demeurent en dehors : Angola – Corée du Nord – Egypte – Somalie – Soudan du Sud – Syrie.

Vous évoquez la notion de crime contre l’humanité mais j’observe que le statut de Rome, portant création de la Cour Pénale Internationale (CPI), définit celui-ci très largement dans son article 7, mais ne mentionne pas spécifiquement l’utilisation d’armes chimiques. Dans la logique morale où vous vous placez, qui ne faut-il pas punir ? Les utilisateurs de bombes à fragmentation, de bombes au napalm, les pays qui refusent de signer les conventions d’interdiction des armes chimiques, bactériologiques, nucléaires, ceux qui n’ont pas ratifié le traité d’interdiction des essais nucléaires, ceux qui répriment par balles leur opposition ? La liste serait longue des Etats qu’il faudrait punir.

Aussi bien est-on sûr à 100 % de l’origine des frappes ? Or, n’ont été produits jusqu’à présent, au dire même de nos autorités, que des « faisceaux d’indices ». Exerçons le doute méthodique cher à Descartes. L’hypothèse qu’un groupe extrémiste comme le Front Al Nosra alimenté par des fournitures d’armes extérieures ou par des stocks qu’il aurait pu détourner, ait pu perpétrer ce crime abject pour entraîner une intervention occidentale n’a pas été sérieusement examinée. Or, chacun sait que les déclarations du Président Obama d’août 2012 faisant de l’utilisation d’armes chimiques la ligne rouge légitimant une intervention militaire, ont provoqué depuis lors une surenchère d’accusations parmi les groupes d’opposition et leurs relais. Nous savons depuis les guerres yougoslaves que des populations d’un des belligérants peuvent être choisies comme cibles pour justifier une intervention extérieure. Dans une guerre intercommunautaire féroce comme celle-là, nous ne pouvons pas avoir un degré absolu de certitude. Aussi bien on ne discerne pas clairement quel eût été l’intérêt du régime syrien qui avait pris le dessus par des moyens conventionnels, d’ailleurs tout aussi barbares.

Ainsi la morale remplace le droit. Ce n’est pas un progrès car seul le droit protège tandis que la morale d’où procède la sanction est à l’appréciation des plus forts. La France doit être le soldat du Droit. L’esprit de défense n’a rien à gagner à ce que la France confectionne un droit à sa mesure, en marge du droit international reconnu par l’ONU.

J’en viens maintenant au fond politique de cette affaire. Quels sont nos objectifs politiques ?

L’opposition syrienne démocratique est divisée. La guerre l’a marginalisée au profit de groupes extrémistes. Le cours des révolutions arabes en Tunisie et plus encore en Egypte doit nous rendre prudents. Le premier acte ne pouvait que recueillir notre sympathie. Le second acte a vu l’islamisme politique prendre le pas sur les revendications démocratiques initiales et tendre à la confiscation du pouvoir. Des minorités de plus en plus importantes se sont senties menacées. En Egypte, l’armée a interrompu le processus, avec d’ailleurs – je le note - le soutien de l’Arabie Saoudite. Est-ce là notre référence ? Quelle cohérence y a-t-il entre notre combat justifié au Mali contre les groupes djihadistes armés et la complaisance dont nous ferions preuve à l’égard de ces mêmes groupes dans la guerre civile qui déchire la Syrie ? La France doit soutenir partout non pas l’islamisme politique mais la démocratie, au Mali, au Niger, en Libye, en Tunisie, en Egypte, en Syrie, en Arabie Saoudite, au Qatar, à Bahreïn, dans le respect du principe de non ingérence, bien sûr, et sous le contrôle du Conseil de Sécurité des Nations Unies (CSNU).

Quel effet des frappes américaines et françaises, même brèves et limitées, auront-elles ? D’ores et déjà la menace des frappes a fait se gonfler le flot des réfugiés aux frontières du Liban et de la Jordanie. On ne pourra pas éviter les dommages collatéraux, surtout si les stocks d’armes chimiques sont visés. Que se passera-t-il le jour d’après ?
D’autres frappes ? Sur la Syrie ? Il serait terriblement imprudent de cibler l’arsenal chimique syrien. Ou sur l’Iran ? Un engrenage incontrôlable risque de se mettre en marche. Encore une fois restons fidèles à Descartes et traitons séparément des dossiers dont la solution doit rester distincte : la Syrie, la Palestine, l’Iran. La « fabrication d’un ennemi » est chose facile. Elle sert rarement la cause de la paix.

Le rôle de la France doit être de faire pression pour que l’opposition syrienne désigne ses représentants à la Conférence de Genève II et que celle-ci puisse se réunir dans les prochaines semaines. Cette négociation peut se faire par des rencontres bilatérales dans les couloirs du G20, à Saint-Pétersbourg, mais le G20 n’a pas vocation à remplacer le CSNU. C’est dans le cadre de celui-ci que nous pouvons obtenir une trêve dans la guerre civile et un compromis qui préserve autant que possible l’unité de la Syrie. La balkanisation de la Syrie serait, comme nous le voyons aujourd’hui en Irak, la source de malheurs encore plus grands. Des frappes militaires risquent non de faciliter un compromis mais de reporter aux calendes la négociation nécessaire.

Il faut mettre un peu de cohérence dans notre politique :

C’est une facilité de crier « Munich ». C’est du même niveau que Guy Mollet assimilant Nasser à Hitler. Ce n’est pas digne des républicains que nous devrions être. Le bilan des ingérences passées – Irak, Kosovo, Libye – n’est pas reluisant. Sachons tirer les leçons de l’expérience.

Pour définir notre attitude et le sens même de notre diplomatie, pensons à servir la France et à défendre la paix. Défions-nous de l’occidentalisme. La France ne se définit pas, comme le disait M. Sarkozy, par son appartenance à la famille des nations occidentales. Elle appartient avant tout à la grande famille des nations humaines. La Révolution de 1789 visait à l’universalité. La France doit servir de pont entre toutes les nations et ne pas se couper des pays dits émergents. Le Président de la République souligne à juste titre la nécessité de préserver notre souveraineté. La souveraineté va avec l’indépendance qui est la condition de la grandeur de la France. Celle-ci n’est pas une question de taille mais de hauteur de vues.
Mais qu’en est-il, dans la situation présente, je ne dis pas de l’indépendance mais de l’autonomie même de la France ? Où sont passés nos alliés européens ?

Je souhaite de tout cœur, Monsieur le Ministre, éviter l’enlisement de la France dans une guerre qui serait contraire à ses intérêts et j’ajoute, à sa vocation. Je souhaite que vous usiez de votre influence qui est grande pour contribuer à la réunion aussi rapide que possible de la Conférence de Genève II. La France vous en serait reconnaissante. Il ne faut pas effacer la brillante réussite malienne, qui nous doit aussi beaucoup, par une erreur qui, elle, serait gravissime pour l’ensemble de notre politique étrangère et pour nos intérêts dans le monde.

Voir aussi Syrie : "Une erreur gravissime pour l'avenir de notre diplomatie". Jean-Pierre Chevènement était l'invité de Thomas Sotto sur Europe 1, le 5 septembre 2013.

 

Cet article est le 35ème paru sur ce blog dans la catégorie Chevènement sénateur

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4 septembre 2013 3 04 /09 /septembre /2013 22:49

Mille euros pour le champion du monde cycliste sur piste

 

Un jeune cycliste mayennais était à l’honneur ce 4 septembre dans le hall de l’Espace régional à Laval. L’association des anciens conseillers régionaux des Pays de la Loire* avait décidé de remettre son chèque annuel de mille euros au mayennais François Pervis, après ses performances aux championnats du monde 2013 de cyclisme sur piste et compte tenu des difficultés rencontrées par ce coureur, sans statut professionnel.

 

Francois-Pervis-Laval-040913-016-T.jpgGuy Poirier, président de l’association, a d’abord précisé qu’il revenait, cette année, aux représentants de la Mayenne de proposer un jeune méritant en matière de formation professionnelle. En fait, l’idée de Georges Minzière était de proposer la candidature de François Pervis, compte tenu des articles de presse le concernant. Cela n’entrait pas dans le cadre défini précédemment mais le conseil d’administration de l’association, réuni le 30 mai dernier, s’était rallié à l’unanimité aux arguments de Michel Sorin, qui leur avait présenté cette proposition. Celui-ci, à la demande du président, a expliqué les raisons de ce choix.

 

Photo : François Pervis, entouré des anciens conseillers régionaux présents et du président de son club "Laval Cyclisme 53"

 

Le parcours du jeune cycliste mayennais François Pervis

 

Il est né en octobre 1984 à Château-Gontier. Ses parents, Colette et Patrick Pervis, sont domiciliés à Villiers-Charlemagne (sud-est de la Mayenne). Son palmarès sportif est impressionnant. Voir François Pervis - Wikipédia et le Site officiel de François Pervis.

 

Et, pourtant, la situation du cyclisme sur piste en France ne lui a pas permis d’intégrer une structure professionnelle (à part deux années chez Cofidis). Il a vécu avec les subventions des collectivités territoriales et des sponsors. De plus, il n’a pas été épargné par les blessures et les déceptions, notamment celle de la non sélection aux Jeux Olympiques de Londres, en 2012, alors qu’il remplissait les conditions de sélection.

 

Entre 2006 et 2011, il avait obtenu cinq médailles aux championnats du monde, mais il lui manquait celle qui compte vraiment : l’or. Pour l’obtenir, il a pris des décisions qui l’ont rendu plus fort dans les compétitions. D’abord, la préparation mentale (apprendre à gérer le stress d’avant-course) avec Denis Troch, l’ancien entraîneur du Stade Lavallois. Ensuite, la gestion des courses avec son entraîneur Florian Rousseau. Enfin, la participation aux courses de keirin (spécialité japonaise du cyclisme sur piste) au Japon a été positive pour renforcer sa puissance et apporter un complément de revenu. Mais il y a des frais et des contraintes (longues périodes au Japon, l'éloignant de sa famille).

 

Les championnats du monde en Biélorussie, en février 2013, ont été couronnés de succès pour François Pervis. Médaille d’or au kilomètre, dans un temps remarquable. Voir cet article (Le Point, 20 février 2013) : Cyclisme - Mondiaux 2013 : François Pervis champion du monde.

Médailles de bronze en vitesse individuelle et par équipe. Regret d’être passé à côté d’un exploit en keirin, en raison d’une disqualification sur faute technique.

 

Ce parcours peut être considéré comme exemplaire par les qualités humaines de ténacité et d’intelligence déployées par François pour atteindre son objectif. Il lui a fallu mieux se connaître, faire appel à des conseillers, conserver la confiance en soi et surmonter les obstacles. Ce sont des qualités humaines dont les jeunes ont besoin pour accéder à la vie professionnelle.

 

Patrick Omasson et Alain Lecrecq, respectivement président et vice-président du club « Laval Cyclisme 53 », se sont exprimés à propos des difficultés du cyclisme mayennais, justifiant la construction d’un vélodrome à Laval, l’entraînement sur route étant de plus en plus dangereux pour les coureurs.

 

Puis François Pervis a remercié l’association des anciens conseillers régionaux de sa décision de soutien financier, bien utile dans cette période de crise. Il lui faudrait 30 000 euros par an pour préparer les Jeux Olympiques de Rio en toute sérénité. Ce qu’il est bien loin d’atteindre. A partir de 2014, son objectif sera d’obtenir sa qualification pour les JO de 2016. Il veut rester mayennais, car le soutien des mayennais ne lui a pas fait défaut depuis 15 ans. Il a l’intention de retourner en 2014 pendant cinq ou six mois au Japon afin de compléter son revenu et être plus fort dans les compétitions internationales. Sa description des courses au Japon, sur des pistes - découvertes - en béton, face à des concurrents japonais tous ligués contre lui, menaçant de le faire chuter, a impressionné son auditoire.

 

Jean-Pierre Le Scornet, vice-président du Conseil régional, a trouvé une similitude entre les qualités nécessaires à l’élu régional et au coureur cycliste sur piste, dont la discipline n’est pas suffisamment reconnue. Il a rappelé que la Région soutient le grand projet d’équipement sur Laval, incluant un vélodrome et souhaité que la France, lors des prochains Jeux Olympiques, prenne sa revanche sur la Grande-Bretagne en cyclisme sur piste…

 

Le président de l’association, Guy Poirier, a remis le chèque de 1000 euros au président du club « Laval Cyclisme 53 », le destinataire final étant François Pervis.

 

Puis les discussions ont pu se poursuivre, chacun pouvant accéder aux rafraîchissements mis à disposition par les services de la Région.

 

* Voir Les anciens Conseillers régionaux ont visité La Rochelle et Rochefort - 23 octobre 2009 et Les anciens Conseillers régionaux ont visité Nantes et Saint-Nazaire - 12 juin 2010. 

 

Cet article est le 22ème paru sur ce blog dans la catégorie Les sports et loisirs

 

 

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1 septembre 2013 7 01 /09 /septembre /2013 22:35

MRC, Chevènement et agriculture, titres les plus fréquents

 

Depuis 72 mois, au début de chaque mois, je reprends les titres des articles parus le mois précédent sur ce blog (voir Titres des articles du mois précédent). 

 

Michel SorinDepuis 2006, 2599 articles - classés en 50 catégories - ont été publiés sur ce blog.- en comptant les récapitulatifs mensuels. 

Les 15 titres en août se répartissent ainsi :

- Politique MRC, Chevènement, Fondation Res Publica (5 articles),

- Agriculture et PAC (4 articles),

- Le chômage (1 article),

- Retraites (1 article),

- Energies (1 article),

- Europe (1 article),

- Mutation d’un directeur territorial à la mairie de Laval (1 article),

- L’ermite du Rocher de Roquebrune (1 article).

 

Titres des articles parus en août 2013 sur http://mrc53.over-blog.com

 

Frère Antoine, mayennais d'origine, ermite du Rocher de Roquebrune (31 août) 

Accord de libre-échange ALENA : défavorable à l'agriculture mexicaine (15 août)

Fondation Res Publica : les Actes du colloque sur le thème de la Charia (14)

Fondation Res Publica : Louis Gallois pour un dialogue social productif (13)

Chevènement au Sénat lors du débat sur le Livre blanc de la défense (12)

Chômage et austérité : Nathalie Michaud a rappelé le réel à F Hollande (11)

Les atouts de la luzerne dans le système fourrager sont innombrables (10)

Réforme de la PAC : le ministère de l'agriculture propose 4 scénarios (09)

Filières avicoles françaises en grave difficulté (oeufs, poulet export) (08)

Le projet du MRC pour une autre Europe : réorienter ou tout changer (07)

Le MRC va débattre avec les militants de son projet d'une autre Europe (06)

Il y a 40 ans, le livre de M Rocard Le marché commun contre l'Europe (05)

Financement des retraites : la dette publique (USA, France) en question (04)

Sauvons le climat : danger sur la distribution de l'électricité en Europe (03)

Mutation de Philippe Serre : la mairie de Laval doit faire marche arrière (02)

Cet article est le 72ème paru sur ce blog dans la catégorie Titres des articles du mois précédent

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31 août 2013 6 31 /08 /août /2013 22:39

Cet homme d’esprit sait vivre avec peu et se faire aimer

 

Roquebrune-aout-2013-011-T.jpgOn n’oublie pas une rencontre avec Frère Antoine chez lui, dans cette partie du Rocher* qu’il a squattée depuis 1966 et aménagée à son goût. Il sait accueillir simplement et gentiment, échanger des propos avec humour, raconter des anecdotes sur sa vie autant que des réflexions de fond.

 

Roquebrune-aout-2013-016-T.jpg* Le Rocher de Roquebrune (Var) est un amas de rochers rouges, isolé au milieu de la plaine où coule l’Argens, qui sépare les Maures et l’Estérel. Les Maures, massif cristallin aux formes très arrondies, recouvertes d’immenses forêts. L’Estérel, massif volcanique, avec ses falaises de couleur rouge. Lire la présentation qui est faite dans le livre « Roquebrune au fil du temps » (voir Les temps forts culturels - Roquebrune).

 

 

J’avais pour ma visite une raison particulière : nous sommes originaires du même canton en Mayenne (Cossé-le-Vivien) et son nom, Louis Chauvel, m’avait fait penser à cette famille de Cuillé, près de La Guerche-de-Bretagne, qui a exercé des responsabilités électives (mairie, coopérative agricole, notamment). Louis, né en 1923, était le 11ème d’une famille paysanne de 12 enfants.

 

Sa vie a été racontée dans un livre « Le Paradis, c’est ici » (éditions du Châtelet) et des extraits significatifs ont été publiés dans Vie et spiritualité de Frère Antoine.

 

Voir aussi Frère Antoine (ermite) - Wikipédia et Ermite du rocher - Lengele.fr

 

Cet article est le 33ème paru sur ce blog dans la catégorie Personnalités et célébrations

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15 août 2013 4 15 /08 /août /2013 22:21

Tirer les leçons des accords commerciaux avec les USA

 

Les traités de libre-échange sont fort recherchés par les Etats-Unis d’Amérique. On devine qu’ils y trouvent leur intérêt. Les négociations ont commencé avec l’Union européenne.

Voir, à ce sujet : Les dangers du traité transatlantique UE-USA (Laurent Pinsolle, 24 mai 2013) et Néolibéralisme en action : négociations ouvertes entre les USA et l'UE (Michel Sorin, 8 juillet 2013). 

 

Tirer les leçons des accords commerciaux avec les USA est très important. L’association Mars | Mouvement Agricole et Rural Solidaire, lors de sa réunion du 14 mai 2013, traitait des impacts économiques et sociaux sur l’agriculture mexicaine des accords commerciaux de l’ « ALENA » passés entre les Etats Unis, le Canada et le Mexique en Janvier 1994. Voir Accord de libre-échange nord-américain - Wikipédia

 

Le sujet était introduit par Victor Quintana, enseignant-chercheur à l’université de Chihuahua au Mexique. Il est spécialisé dans l’histoire des mouvements sociaux de son pays et conseiller de l’ANEC, l’un des syndicats d’agriculteurs familiaux les plus représentatifs du Mexique. Voir Víctor Quintana Silveyra – Wikipedia (en espagnol). Membre d’un parti de gauche (PRD), il avait pris position dès le début contre la partie agricole de l’ALENA.

 

Dans son exposé, Victor Quintana avait d’abord présenté les caractéristiques du Mexique…

1 950 000 km² (4 fois la superficie de la France ; le nord est un désert aride) ; 112 millions d’habitants ; République  fédérale ; 31 états, un district fédéral ; Les trois pouvoirs au niveau fédéral et local ; Chambre bicamérale au niveau fédéral (députés et sénateurs par élection directe) ; Chambre monocamérale dans chaque état ; Président de la République et gouverneurs des états : 6 ans, non rééligibles ; Sénateurs : 6 ans ; députés, 3 ans. Non réélection consécutive ; Non cumul des mandats ; Partis politiques. PRI, PAN, PRD, PT, MC. PVEM, PANAL. (MORENA). La constitution mexicaine date de 1917 (Révolution entre 1910 et 1923). Protectionnisme fort jusqu’en 1986.  

… Puis, il avait abordé l’agriculture mexicaine et l’ALENA. Le « miracle agricole mexicain » se traduit par une agriculture à deux vitesses (petits propriétaires entrepreneurs d’un côté, agriculture de subsistance de l’autre).

A partir de 1965, importation de maïs pour la première fois. Enorme transfert de valeur de l’agriculture à l’industrie. Prix garantis gelés. Investissement et production au ralenti. Relance 1970-1982. En 1982, suspension du paiement de la dette du Mexique. Programme d’ajustement structurel avec investissement public en agriculture et libération des prix. Ouverture commerciale abrupte à partir de 1986 (accords GATT). Suppression du système de crédit et d’assurance pour les petits paysans.

Application de l’Accord de libre-échange nord-américain (ALENA) en 1994. Rébellion des zapatistes. Ralentissement de la croissance agricole depuis le début des années 2 000. Depuis 1990, la productivité n’a plus progressé. L’agriculture mexicaine est moins dynamique que celles des pays hors ALENA. Avec l’ALENA, les exportations agricoles ont augmenté, mais plus encore les importations. La pauvreté a cru de 50 % au Mexique (95 % en campagne), la grande pauvreté concerne 32 % des Mexicains (57,8 % en campagne). La malnutrition s’est développée (70 % des adultes en surpoids, 30 % des enfants), suite à l’abandon de la nourriture traditionnelle (maïs et haricots secs) très équilibrée. « Nous ne vivons pas comme les Américains, mais nous mourons comme eux » …

Le Mexique est un très bon élève des organisations internationales ; il a suivi les préceptes néolibéraux. Le déficit commercial avec les USA s’est accentué. Les USA ont profité de l’ALENA, ainsi que les narcotrafiquants. La démographie a augmenté de 3 % par an entre 1950 et 1970 puis de 1,8 %, suite à des campagnes en faveur des petites familles. La population est passée de 30 millions en 1955 à 112 millions actuellement (dont 20 dans l’agglomération de Mexico). Les jeunes ne trouvent pas de travail. Il y a 12 millions d’habitants d’origine mexicaine aux USA.

L’ALENA est défavorable aux petits paysans et les investissements dans le développement agricole sont insuffisants. Le Mexique a un profil de pays industrialisé (producteur de voitures). Depuis peu (2012), il existe un plan pour aller vers la souveraineté alimentaire en développant la capacité productive des petits paysans. Les subventions agricoles sont concentrées dans les Etats du nord-ouest (irrigation, infrastructures pour les parties arides). Les OGM sont interdits mais des pressions sont exercées par Monsanto sur le gouvernement mexicain. Il y a peu de relations avec les pays voisins. Les pays d’Amérique du Sud ont une croissance plus forte.

Voir, par ailleurs, cet article du Monde Diplomatique : Le jour où le Mexique fut privé de tortillas (Anne Vigna, mars 2008).

Entré en vigueur il y a quatorze ans, l’Accord de libre-échange nord-américain (Alena) a eu des effets dévastateurs sur l’agriculture du Mexique. Les productions américaines (subventionnées) ont inondé ce pays et ruiné des millions de petits paysans. Mais la situation va encore s’aggraver car, depuis le 1er janvier 2008, la libéralisation des échanges agricoles entre le Canada, les Etats-Unis et le Mexique, déjà fort importante, est devenue totale. Pourtant, les trois pays ont décidé de poursuivre dans cette voie.

Voir aussi cet article de Benjamin Sourice (Mediapart), cité le 14 août 2013 dans la revue de presse de l’Association nationale des producteurs de lait indépendants - Apli. Article issu d'une traduction d'un article de Nation of Change paru le 24 juin 2013 sous la plume de Barbara Chicherio, membre du Parti Vert américain.

 

Tirer les leçons des autres accords commerciaux avec les Etats-Unis

Dix ans après la mise en place de L’ALENA signé (Accord de libre-échange nord-américain) entre les Etats-Unis, le Canada et le Mexique, plus d'un million et demi de fermiers mexicains ont fait faillite parce qu’ils n’étaient pas en mesure de rivaliser avec le maïs subventionné et OGM américain qui entrait sur le marché mexicain. En matière d'agriculture, ces accords commerciaux ont provoqué le déplacement de dizaines de millions de petits fermiers, contraints à l'immigration ou la misère des bidonvilles. La destruction des économies alimentaires locales a entraîné une forte hausse des prix (plus de 100%)  jusqu'à provoquer la « crise de la tortilla » et ses émeutes de la faim en 2007. Vingt ans après la signature des accords, le Mexique est passé d’un pays autosuffisant produisant l’intégralité de son maïs à un pays important maintenant au moins le quart de cet aliment de base, et 40% de son alimentation, depuis les Etats-Unis. En 2013, le Mexique devançait cependant les Etats-Unis sur une chose : le pays compte désormais le plus fort taux d'obésité au monde selon la FAO.

 

« Alors que le Traité trans-pacifique est à de nombreux égards semblable à l’ALENA, il apparaît que les entreprises ont également su tirer les leçons des expériences précédentes. Elles peaufinent le PTP afin de s’assurer que les citoyens des pays impliqués n’aient aucun contrôle sur la sécurité alimentaire, sur ce qu’ils vont manger, sur le lieu où cette nourriture sera cultivée, sur les conditions dans lesquelles la nourriture sera cultivée et sur les restrictions d’utilisation d’herbicides ou de pesticides » analyse Chicheria pour Nation of Change. « Si le PTP est adopté, la porte sera alors encore plus ouverte aux abus envers les droits de l’Homme et de l’environnement » poursuit-elle.

Dans un ultime avertissement, la militant prévient que « les choses auxquelles nous devons nous attendre avec certitude sont les suivantes : plus d’exploitations agricoles à grande échelle et plus de monoculture ; la destruction des économies locales ; aucune donnée sur la façon dont notre nourriture sera cultivée ou sur ce que nous mangerons ; plus de déforestation ; une utilisation accrue des herbicides et des pesticides ; plus de pollution industrielle ; un nombre croissant de dépôts de brevets sur le  vivant ; plus de plantes et d’aliments OGM ; aucun étiquetage des OGM contenus dans la nourriture. »


Et demain l'Europe ?

Tout ceci représente un pas en arrière pour les droits de l’Homme et un pas de géant vers le contrôle de notre nourriture par Monsanto et toutes les multinationales de l'agroalimentaire américaines. Malgré ces conséquences désastreuses pour les Droits fondamentaux, ainsi qu'une perte de souveraineté alimentaire sans précédent, la plupart des américains comme les  citoyens des autres pays signataires ne sont au courant ni de cet accord commercial, ni de ses effets plus qu’inquiétants, tous soigneusement maintenus dans l'ignorance la plus crue. 

 

Début juillet 2013, les Etats-Unis ouvraient avec l'Union Européenne des négociations similaires pour répliquer l'accord trans-pacifique avec les pays européens sous le nom de Partenariat transatlantique de commerce et d’investissement (TTIP ou TAFTA). De la même manière, l'accord est négocié dans le secret entre les dirigeants européens et les négociateurs américains, de la même manière les multinationales cherchent à imposer des normes moindres pour introduire leur produits en Europe, de la même manière, un système de compensation financière sera érigé en système d'assurance des actionnaires contre la décision des citoyens de se protéger contre des produits indésirables, au premier rang desquels les OGM. Monsanto n'aura alors aucun mal à venir collecter ses « compensations » dans les pays qui maintiendront un moratoire sur ses semences...

 

Pourtant il existe une différence de taille : les négociations viennent tout juste de s'ouvrir pour aboutir en 2015 et déjà des informations fuites sur ces accords du TTIP. Les citoyens européens se montreront dès lors plus aptes à se mobiliser pour éviter cette catastrophe annoncée. De plus, les élections du Parlement européen se tiennent en mai 2014, et « ce seront ces eurodéputés issus du scrutin de 2014 qui auront, in fine, leur mot à dire » comme le rappelait le journal Politis. La mobilisation ne fait donc que commencer ! Suite...

 

Cet article est le 404ème publié sur ce blog dans la catégorie AGRICULTURE et PAC.

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14 août 2013 3 14 /08 /août /2013 19:41

La nécessité d’un vrai dialogue entre les civilisations

 

Le 15 avril 2013, la Fondation Res Publica (pour faire connaissance, voir Présentation de la Fondation Res Publica, par Jean-Pierre Chevènement) organisait un colloque sur le thème  

La Charia: qu'est-ce à dire?

 

Les actes de ce colloque ont été publiés le 5 juin 2013. En voici les titres.

Accueil de Jean-Pierre Chevènement, président de la Fondation Res Publica

Introduction de Sami Nair, membre du Conseil scientifique de la Fondation Res Publica

Intervention de Baudouin Dupret, directeur du centre Jacques Berque (Rabat), directeur de recherche au CNRS

Intervention de Naïla Silini, islamologue et professeur de civilisation islamique, Université de Sousse (Tunisie)

Intervention de Franck Frégosi, chargé de recherche au Centre National de Recherche Scientifique

Difficile d’aller plus à fond sur cette question particulièrement délicate. Avec des intervenants de très haut niveau. Parmi eux, une femme, Naïla Silini, qui fait partie d’un groupe de Tunisiens, auteurs d’une « Etude critique du Coran » en langue arabe. « Nous avons terminé cet ouvrage, qui comprend environ 3500 pages, à la veille de la révolte tunisienne. Avec la montée de l’islamisme, il n’est plus possible d’éditer cette encyclopédie en Tunisie ni en Orient ».

 

Chevènement Le Mans 280111 002 TVoici les propos de conclusion de Jean-Pierre Chevènement (extraits).

 

Jean-Pierre Chevènement

(… ) Mais je constate que le courant fondamentaliste s’est développé et semble l’avoir emporté, en Iran en 1979 et, sous une forme très aseptisée, en Turquie par la voie des élections. Ce qu’on a appelé les « révolutions arabes » met aujourd’hui au premier plan la question de l’islamisme. L’Afrique noire n’est pas épargnée, comme en témoigne l’affaire du Mali. Une chaîne de télévision francophone d’Al-Jazeera va être lancée à Dakar très prochainement.

Nous assistons à des mouvements, des mutations, dont nous ne sommes pas vraiment maîtres et qui nous interpellent. Un ancien directeur général de la sécurité extérieure, M. Brochand, nous a livré son interprétation : selon lui, l’islamisme est l’une des formes de réaction des sociétés musulmanes, plus particulièrement porteuses de la tradition. Il y a d’autres traditions, chrétienne, juive, orthodoxe… mais l’islam réagit en tant que porteur de la tradition de sociétés souvent antérieures à l’islam lui-même, tradition patriarcale, tradition de l’hétéronomie totale, reposant sur des interdits sexuels extrêmement forts. Cette réaction se manifeste sous différentes formes : l’islamisation des mœurs, en sourdine, l’islamisme politique qui veut conquérir le pouvoir politique par la voie des élections, les différentes formes de salafisme, piétiste ou violent, et puis le djihadisme armé qui s’en prend naturellement aux intérêts de la France, des États-Unis, d’autres puissances européennes ou occidentales, et même – en priorité – à des régimes considérés comme impies (kufr), comme on l’a vu avec l’attentat de Tiguentourine. L’Algérie a payé un lourd tribut au terrorisme.

Il me semble qu’il faut avoir une lecture politique de tout cela et savoir où on fait passer le trait. En effet, l’islam est une puissante réalité : 1 200 millions d’hommes très divers. Il n’y a pas beaucoup de rapports entre l’islam d’Afrique noire et ce qui se passe en Indonésie, en Malaisie, en Asie centrale, dans l’islam turc, l’islam perse et l’islam du monde arabe. Même dans ce monde arabe, cœur du monde musulman, le Maghreb et le Machrek, les pays du Golfe… sont assez différents.

La question que je pose est celle de la coexistence pacifique des hommes, au sens générique, bien entendu. C’est une question difficile. Nous avons eu l’idée de ce colloque pour essayer de mieux comprendre ce qui se cache derrière le mot « charia ». Il va falloir faire avec le monde musulman tel qu’il est, avec ses tensions, ses contradictions. J’ai déjà exprimé l’idée que nous ne pouvions pas être indifférents à ce qui s’y passe et à ce que comporte l’islamisme du point de vue politique :

Celui-ci crée-t-il politiquement des situations irréversibles ? Ouvre-t-il, ou plutôt ferme-t-il, la possibilité d’alternances politiques ? Le problème du statut personnel et particulièrement du statut de la femme – que vous avez traité tout à l’heure, Madame – est au cœur du débat. Ces questions sont devant nous. Ce sont des problèmes qui sont, hélas, à mon sens, loin d’être résolus.

 

(…) Pour conclure, en présence de M. Baudouin Dupret (qui dirige le Centre Jacques Berque de Rabat), je voudrais rappeler la pensée de celui-ci : Chaque peuple doit prendre appui sur ses propres motivations pour trouver le chemin des valeurs universelles, dans le respect de ce qu’il est, de son « authenticité ». Dans les rapports qu’un pays comme la France peut entretenir avec des nations majoritairement ou entièrement musulmanes, nous n’avons pas à « exporter » la démocratie, que ce soit sur le mode « bushien » ou sur un autre mode, mais nous devons nous tenir fermes sur les valeurs de la République et nous appuyer sur la capacité des peuples, et notamment du peuple tunisien, je le dis en présence de Madame Silini, professeur à l’université de Sousse. Il faut faire confiance et, naturellement, appuyer de notre sympathie ceux qui se battent pour une société ouverte qui ne rompe pas le fil de sa tradition, car chaque pays a la responsabilité de faire sa propre Histoire.

J’ai entendu ce qui s’est dit tout à l’heure sur les différents niveaux de croyance. Il est vrai que demander aux imams d’enseigner un islam totalement déconnecté des textes « sacrés » n’a pas de sens. Moi-même qui suis, bien que vieux laïque, catholique romain « sociologiquement parlant » (comme aurait dit Jacques Berque), je perçois que la foi de mon Haut-Doubs natal n’a pas grand-chose à voir avec la pensée des théologiens.

Je reste fidèle à l’idée que, dans les relations internationales, il faut éviter ce qui ressemble à de l’ingérence, il faut respecter la volonté des peuples, ce qui n’empêche pas, au niveau des sociétés civiles, que s’établissent des liens tendant à encourager ceux qui se battent pour les valeurs de liberté et d’égalité.

 

Hassan Fodha
Merci, Monsieur le Président, d’avoir organisé cette réunion très intéressante, très utile, très instructive.
J’ai beaucoup aimé la qualification de la charia, par M. Dupret, de « slogan politique », ce qu’elle est, en effet. En terre d’islam, si vous demandez à un musulman s’il croit en la charia, il répond que la charia, qui est le fait des hommes, est critiquable. En revanche, il croit en l’islam car, pour lui, le Coran n’est pas critiquable. Cette nuance, en terre d’islam, permet de mettre la charia en seconde position par rapport au Coran. C’est bien un slogan politique, la preuve en est que, dans les pays qui ont subi la révolution (Tunisie, Égypte et Libye), on demande aujourd’hui l’inscription de la charia dans les constitutions, non pas au nom de la religion mais au nom de « l’identité ». Par ce mot, la religion est associée au patriotisme. Aujourd’hui, les médias tunisiens et égyptiens sont pleins de chants patriotiques et d’appels à l’identité nationale pour justifier la demande des partis religieux d’inscrire la référence à la charia dans la constitution. Donc la charia n’a pas de définition, surtout juridique, dans le monde arabe et dans le monde musulman. En tout cas, c’est mon point de vue.

L’utilisation de la charia comme slogan politique dans les pays où il y a eu la révolution, est une manière de rejeter les valeurs « occidentales ». Pour la même raison, en Égypte et en Tunisie, on refuse d’inscrire dans la constitution la référence aux valeurs universelles reconnues. En même temps, en Occident, on fait l’amalgame entre charia et Coran, entre charia et islam, pour démontrer que l’islam n’est pas compatible avec les valeurs républicaines. Deux discours s’opposent : d’un côté on dit que l’islam n’est pas compatible avec les valeurs républicaines, de l’autre on essaie de faire passer le message qu’en terre d’islam on ne reconnaît pas les valeurs universelles. Si nous n’arrivons pas à sortir de ce malentendu, nous allons vers la guerre des civilisations. C’est très grave.

Jean-Pierre Chevènement
Je crois que vous avez très bien situé les choses : deux fondamentalismes s’opposeraient. C’est une vision que nous devons combattre. Si ce débat, qui a fait naturellement apparaître des opinions diverses, contribue à nous convaincre de la nécessité d’un vrai dialogue entre les civilisations, les cultures, et les nations, il aura eu son utilité.
Je veux remercier les intervenants, en particulier Mme Silini, venue tout exprès de la Tunisie chère au cœur des Français. Merci de votre concours

Cet article est le 24ème paru sur ce blog dans la catégorie Laïcité et communautarismes.

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13 août 2013 2 13 /08 /août /2013 21:49

L’entreprise n’appartient pas à ses actionnaires

 

Le 21 mai 2013, la Fondation Res Publica (pour faire connaissance, voir Présentation de la Fondation Res Publica, par Jean-Pierre Chevènement, son président) organisait un colloque sur le thème Nouveau pacte social : mode d'emploi.

 

Les actes de ce colloque ont été publiés le 19 juillet 2013. En voici les titres.

Quelques questions sur le pacte social - Intervention de Patrick Quinqueton, Conseiller d'Etat et membre du Conseil scientifique de la Fondation Res Publica.

Le dialogue social : une des clés de la compétitivité - Intervention de Louis Gallois, Commissaire général à l'investissement

Pour un dialogue social constructif mais offensif - Intervention de Mohammed Oussedik, Secrétaire confédéral de la CGT

La place des salariés dans le paysage social - Intervention de Raymond Soubie, Président des sociétés de conseil Alixio et Taddeo
L’intervention de Louis Gallois* (extrait)

Le dialogue social : une des clés de la compétitivité

 

1. Les syndicats doivent être reconnus dans l’entreprise.

L’information en continu – et, autant que possible, en avance – de telle manière que chacun, y compris les partenaires sociaux, puisse se préparer à répondre aux questions lourdes qui peuvent se poser, se fait normalement à travers le comité d’entreprise. En France, le dialogue social est souvent figé au sein de l’entreprise parce qu’on ne reconnaît pas suffisamment le rôle du comité d’entreprise et des délégués du personnel. Dans ce domaine, il y a matière à progresser dans le camp patronal comme dans le camp syndical.

Il faut des représentants du personnel dans les conseils d’administration des grandes entreprises. Je ne parle pas des petites entreprises qui fonctionnent de manière tout à fait différente.

Ne nous faisons pas d’illusions, la présence des représentants du personnel dans des conseils d’administration ne réglera pas tout et le consensus ne se dégagera pas de lui-même. Les conseils d’administration seront toujours précédés de réunions sans les représentants du personnel et, de leur côté, les représentants du personnel se réuniront, lorsqu’ils auront capacité à le faire, pour adopter une ligne commune au sein du conseil. C’est ce qui se passe en Allemagne : avant le conseil de surveillance, la partie patronale et la partie salariale se réunissent chacune de leur côté.

Mais deux raisons plaident en faveur de la représentation du personnel au sein du conseil d’administration :
Première raison
 : Les personnels apportent leur connaissance de l’entreprise et surtout la dimension du long terme. Ce sont eux qui incarnent le mieux la durée de l’entreprise. Un actionnaire reste actuellement moins de deux ans dans une entreprise. Dans une entreprise du CAC 40, la durée moyenne d’un actionnaire n’excède pas six ou sept mois, certains faisant des allers et retours quasi quotidiens, d’autres ayant une durée plus longue. Les actionnaires ont donc plus de difficulté à incarner le long terme. La tutelle croissante du marché financier sur les entreprises implique la priorité au court terme. Si cette affirmation peut se nuancer, elle exprime un fond de réalité.

Deuxième raison : Il est essentiel que les personnels se sentent chez eux dans l’entreprise. Comment le pourraient-ils s’ils ne sont pas représentés dans l’instance dirigeante de l’entreprise qu’est le conseil d’administration ? Je fais mienne la thèse de chercheurs qui travaillent sur l’entreprise selon laquelle l’entreprise n’appartient pas à ses actionnaires qui n’en possèdent que le capital. Depuis la fin du servage, personne ne peut s’approprier une collectivité humaine. Or l’entreprise est une collectivité humaine. Il faut donc regarder l’entreprise comme la conjonction de parties prenantes. Les actionnaires cherchent la sécurité et la rémunération de leur capital et la capacité de réaliser des plus-values. Les personnels, éléments constitutifs et essentiels de l’entreprise, sont évidemment concernés au plus haut point par son devenir. Lorsque je déclare devant des assemblées patronales que les salariés doivent être conscients que leur entreprise n’appartient pas aux actionnaires, je suscite toujours un certain étonnement… mais nul ne peut évidemment me contredire ! Si l’entreprise est une entité partagée entre ses parties prenantes, le bien de l’entreprise et le bien des salariés peuvent être réconciliés. Ce qui est intéressant pour les salariés est intéressant pour l’entreprise. Ce qui fait la force de l’Allemagne est précisément ce consensus sur la création de richesses, sur l’impératif de ne rien faire qui aille contre le développement de l’entreprise qui est un bien indivisible entre les parties prenantes.

Toute réduction de charges accordée aux entreprises est ressentie en France comme « un cadeau aux patrons » alors qu’il s’agit d’un apport à l’entreprise dont chacun doit se saisir. Cela suppose un changement copernicien dans la manière de gérer les entreprises qui se traduit par une prise de responsabilités réciproque. Le développement de l’entreprise devient donc l’affaire de tous même si la répartition des richesses créées par l’entreprise reste le domaine de conflits ou de négociations entre le capital et le travail. C’est pour cette raison que j’avais proposé dans mon rapport que les entreprises qui le souhaiteraient puissent désigner un représentant du personnel pour présider le comité d’entreprise. C’était le cas chez EADS, en Allemagne. Ceci entraîne une modification réelle de la relation patrons-syndicats au sein de l’entreprise.

 

Au niveau national, certaines modifications techniques sont également nécessaires :

- Il faut d’abord encourager à la syndicalisation dans les PME pour créer de véritables interlocuteurs.

- Il serait bon de réduire le nombre de branches. Sur les 600 ou 700 branches d’activité, en France, certaines n’ont plus aucune vie. Normalement les branches sont des instances de négociation. Comment mener la négociation sur des conventions collectives sur un tel nombre de branches ? Les forces syndicales ne sont même pas en mesure d’avoir des représentants dans chacune des branches.

- Il faut aussi régler le problème du financement des organisations syndicales en allant vers un système très clair. Il est normal que la collectivité nationale participe au financement des organisations syndicales. Actuellement, ce sont les budgets de formation professionnelle [5] qui, très largement, assurent le financement des syndicats. Il y a aussi la partie moins visible des permanents… Il serait beaucoup plus sain d’instaurer un financement transparent en fonction des résultats aux élections professionnelles.

- Il est enfin nécessaire de veiller à la formation et à la carrière des responsables syndicaux. Les organisations patronales se plaignent souvent de la qualité des représentants des syndicats (il arrive aussi, assez souvent, que les syndicats se plaignent de la qualité des patrons…). En tout cas, il est absolument indispensable de garantir aux responsables syndicaux une formation et un déroulement de carrière si on veut attirer des gens de qualité vers ces responsabilités lourdes.

2. La consultation et la concertation.

L
’État ne peut pas s’en remettre au seul « dialogue social » pour gérer cet aspect tout à fait important. Nous sommes dans un pays où la demande d’État est forte. L’État a son rôle à jouer pour que la négociation sociale aboutisse dans un certain nombre de domaines. D’une part il aura à transcrire dans le droit du travail un certain nombre d’accords sociaux, d’autre part il est un acteur essentiel du dialogue social qu’il peut faciliter ou gêner. Il a en particulier à nourrir la négociation sociale.

Enfin, comme je l’ai dit, une réflexion doit être menée sur le paritarisme, sur la manière de gérer nos grands systèmes – qu’il s’agisse de la formation professionnelle ou de la sécurité sociale et de ses différentes branches – pour faire du paritarisme une source de dynamisme et éviter le mélange des genres qui conduit à une sorte de conservatisme dans ce paritarisme, parce qu’on ne veut pas changer des équilibres entre organisation syndicale et organisation patronale.

* Voir Louis Gallois propose un pacte de compétitivité pour l'industrie française - 5 novembre 2012 et Rapport Gallois : les 22 propositions pour reconquérir la compétitivité -  6 novembre 2012

 Cet article est le 126ème paru sur ce blog dans la catégorie Travail Economie

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