Seconde partie de cette contribution sur la contre-réforme des retraites
Le Conseil national du MRC a décidé de réunir un congrès, convoqué pour le samedi 1er avril 2023. Une motion d'orientation est proposée au débat militant. Voir Congrès.
Dans ce cadre, l’Union interdépartementale MRC Limousin-Poitou-Charentes a constitué un groupe de travail et rédigé une contribution aux débats sur la contre-réforme des retraites.
Serge Maupouet a coordonné la rédaction de cette contribution, qui est ici publiée en deux parties. La 1ère est ici : Congrès MRC 2023 : contribution du MRC Limousin-Poitou-Charentes.
La seconde est à voir, ci-après.
Contribution du MRC Limousin–Poitou-Charentes sur la contre-réforme des retraites
Alors que le système actuel n’est pas en péril financier (déficit de 2,9 milliards d’euros en 2018, selon le Conseil d’Orientation des Retraites et, pour la décennie 2030 autour de 10 milliards de déficit par an sur un volume de prestations de 350 milliards), le problème réside essentiellement dans la réduction des volumes des ressources affectées aux retraites : le déficit n’est pas la conséquence des dépenses liées aux retraites, mais celle de la restriction de ressources affectées aux retraites (non compensation des allégements ou exonérations de cotisations sociales décidés par l’État pour la Sécurité sociale). D’autant que les réserves du système actuel de retraites sont conséquentes (130 à 150 milliards).
Un autre volant du problème réside dans la situation des finances publiques, suite à la stratégie de réduction d’impôts du premier quinquennat Macron, en faveur du capital et des plus riches. Cela, et la crise du Covid, ont conduit à une hausse de 16 points de la dette publique. La réactivation du respect des critères de convergence du traité de Maastricht et du Pacte de stabilité et de croissance de 1997 (3% de déficits budgétaires et une dette inférieure à 60% du PIB), avec une surveillance multilatérale et des procédures pour déficit excessif (amende possible entre 0,2 et 0,5% du PIB) induira inéluctablement une politique d’austérité qui pèsera sur les classes populaires et moyennes. On peut rappeler ici la recommandation CSR 2019.1.4 de la Commission européenne adressée à la France en 2019 dans le cadre du « semestre européen » ; d’où les explications du Président Macron relatives au fait que la réforme dégagerait des marges de manœuvre budgétaires pour financer d’autres politiques publiques – dépendance, école, santé, transition écologique, etc. Déshabiller Pierre pour habiller Paul.
La protection sociale n’est pas de la compétence de l’Union Européenne, mais, par le biais d’une définition « libérale » de la notion de dépenses publiques, celle-ci entre dans le calcul du déficit budgétaire, et donc dans le collimateur de la Commission européenne. Ajoutez-y « la concurrence libre et non faussée », et vous avez le ressort essentiel de la dégradation de notre modèle social. Et d’aucuns sont partie prenante de cette dégradation.
Par conséquent, la question du financement des retraites revient non pas à poser les questions paramétriques de la réforme actuelle, dont le point central porte sur le recul de l’âge légal de 62 ans (depuis 2010) à 64 ans, mais bien les questions relatives aux recettes.
D’une part, il faut s’opposer à la réforme actuelle car :
- avec un passage à 64 ans, les salariés les plus modestes risquent de ne plus accéder à la retraite, alors que l’espérance de vie en bonne santé, selon l’INSEE, n’était en 2020 que de 64,4 ans pour les hommes et 65,9 ans pour les femmes et que les ouvriers vivent moins longtemps en bonne santé que les cadres ;
- avec un passage à 43 annuités pour avoir le taux plein, la décote, pour tous ceux ne pouvant valider 172 trimestres, entraînera une baisse générale des pensions ;
- la pension minimum annoncée à environ 1 200 € brut (en additionnant pension de base et retraite complémentaire, et avant prélèvements sociaux) sera essentiellement illusoire, car elle ne sera pas atteinte sans avoir cotisé à temps plein 43 annuités au SMIC, ce qui exclura les temps partiels et, par voie de conséquence, beaucoup de femmes ;
- seuls certains critères de pénibilité seraient pris en compte (charges lourdes, vibrations mécaniques...), la réforme va précariser les travailleurs ayant commencé à travailler jeune et dans des métiers où les critères de pénibilité sont nombreux ;
- le gouvernement s'obstine à présenter le montant des retraites comme un prélèvement fait sur la richesse nationale ; il refuse de mentionner qu’en contrepartie les retraités paient des impôts et des taxes. Ils assument aussi, bénévolement, une bonne part de la vie démocratique en s’impliquant dans les collectivités locales. Ils participent également à la vie associative tant dans le sport, la culture, que l’aide à la personne, à tel point que les dons aux associations et les frais de bénévolat sont officiellement reconnus par les impôts. Combien cela coûterait-il de payer à leur place des professionnels pour répondre à ces besoins ? C'est pourtant aussi ce qui nous attend si l’on retarde l'âge de la retraite.
Mais il faut aller plus loin, prendre le contre-pied d’un gouvernement qui organise la régression sociale des salariés et lutter pour que l’État-providence soit réorienté vers les citoyens : exiger la remise en cause des exonérations de cotisations (poursuivies depuis 1993, accrues en 2015 avec le Pacte de responsabilité et de solidarité), la suppression de cadeaux fiscaux, l’élargissement de l’assiette aux revenus financiers pour compléter la cotisation par la contribution, des hausses de salaires plutôt que le recours à des primes, prévoir des mesures en faveur des femmes pour revenir sur les réformes régressives qui, depuis 1993, les ont particulièrement pénalisées (rétablissement du bénéfice pour les mères des huit trimestres supplémentaires par enfant, de la majoration de 10% du montant de la pension par enfant à partir du troisième).
Nous devons refuser collectivement la réforme par la régression et imposer une autre réforme, pour le progrès social, dans une logique de solidarité nationale et d’humanisme républicain.
Cet article est le 3236 ème sur le blog MRC 53 - le 263 ème dans la catégorie MRC national