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  • : Michel Sorin
  • : Le MRC 53 est la structure mayennaise du Mouvement Républicain et Citoyen, qui a pour but de rassembler la gauche républicaine à partir, notamment, des idées de Jean-Pierre Chevènement, l'un de ses fondateurs, qui n'est plus membre du MRC depuis 2015. Le MRC a pris le relais du Mouvement des Citoyens (MDC) après les élections de 2002. En 2022, le MRC est devenu membre de la Fédération de la Gauche Républicaine avec quatre autres organisations politiques.
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5 août 2008 2 05 /08 /août /2008 10:45

Un homme sincère qui a bien servi la République

 

En parcourant le blog de Anicet Le Pors, hier (voir Langues régionales : les débats ne sont pas clos depuis le 21 juillet - 4 août 2008), j’ai trouvé une autre perle, en l’occurrence deux articles très intéressants concernant le service public.

 

Voyons d’abord le premier qui reproduit un article du quotidien l’Humanité, paru dans l’édition du 8 juillet 2008, sous le titre « La fonction publique ? Un métier spécifique ». Il s’agit d’un entretien avec Jacques Fournier, conseiller d’État honoraire, ancien secrétaire général du gouvernement, qui a été président de Gaz de France, de la SNCF et du Centre européen des entreprises publiques. Cet éminent fonctionnaire a écrit un ouvrage qui retrace sa carrière.

“Itinéraire d’un fonctionnaire engagé” par Jacques Fournier, Éditions Dalloz-Sirey, 2008

J’ai connu Jacques Fournier, en 1974 ou 1975, à Mayenne, où il était l’invité du PS, et, par la suite, je l’ai revu lors de réunions du CERES. Il était proche de Jean-Pierre Chevènement au sein du PS. En 1981, sa nouvelle fonction (Secrétaire général du gouvernement) lui imposait un devoir de réserve, ayant fait le choix de servir l’Etat.

 

Voici le début de l’entretien, dans lequel il évoque son engagement politique initial et sa proximité avec Jean-Pierre Chevènement.

À la lecture de votre ouvrage, on a un peu le sentiment que vous êtes davantage un haut fonctionnaire, un grand commis de l’État qu’un homme politique. Pourtant vous avez occupé des fonctions au plus haut niveau politique de l’État. Partagez-vous ce constat ?

Jacques Fournier. Incontestablement ma carrière a été celle d’un fonctionnaire. J’ai toujours été attiré par le service public. C’est ma vocation. Ce choix m’a conduit au Conseil d’État. En même temps, ma conviction était qu’à partir d’un certain degré de responsabilité il était préférable de n’avoir à mettre en oeuvre que des politiques avec lesquelles j’étais d’accord. Au Conseil d’État, j’ai eu des fonctions de contrôle et de juridiction qui n’impliquaient aucun engagement politique. Je n’ai pris de responsabilités dans l’administration dite active que lorsqu’elles m’ont permis de mettre en oeuvre mes convictions. Il faut cependant préciser que mon engagement dans la vie politique a été progressif, au cours des années 1960 et 1970. Le prolongement en a été, en 1981, ma nomination aux fonctions de secrétaire général adjoint à l’Élysée.

Au cours de cette montée en puissance sur le plan politique, il y a l’anecdote que vous racontez. Lors du congrès d’Épinay, vous avouez aujourd’hui que vous vous êtes trompé de vote…

Jacques Fournier. J’avais une vision politique très claire dès le début de la Ve République. J’ai voté « non » au référendum de 1958. Nous n’étions pas très nombreux à gauche à faire ce choix hormis le PCF, François Mitterrand et Pierre Mendès France. Mon sentiment, à partir de ce moment-là, était qu’un renouveau de la politique en France passait par la réalisation de l’union de la gauche. Un changement de cap n’était, selon moi, possible que sur la base de l’union entre le courant socialiste de l’époque et le Parti communiste. Le courant socialiste étant lui-même assez éclaté, et pas très bien représenté par la SFIO à laquelle personnellement je n’ai jamais adhéré. Dans cet esprit j’ai aidé François Mitterrand à l’élection présidentielle de 1965. Après mai 1968, on sentait qu’il y avait besoin de matérialiser l’élan qui s’était exprimé. J’ai animé un groupe de réflexion avec des juristes et des politiques de sensibilités différentes, dont des amis communistes. J’ai suivi d’autant plus près la préparation du congrès d’Épinay que Nicole Questiaux, qui faisait partie de notre groupe de travail, était aussi présidente du comité préparatoire au congrès. Mais je n’étais pas du tout habitué aux grandes manoeuvres des congrès socialistes. Nous étions en présence de deux courants de gauche. Je me suis prononcé pour le courant Poperen alors que j’aurais dû le faire en faveur du CERES qui, par son alliance avec François Mitterrand, allait permettre à ce dernier de renouveler le Parti socialiste.

Vous allez très rapidement ensuite rejoindre ce CERES de Jean-Pierre Chevènement.

Jacques Fournier. J’y ai milité jusqu’en 1981 et je suis toujours resté en bons termes avec Jean-Pierre Chevènement, même si notre cheminement a été ensuite différent. Je participe aux activités de la Fondation Res Publica* qu’il anime.

En réalité, vous n’êtes pas un homme d’appareil…

Jacques Fournier. Après avoir été candidat aux législatives dans les années 1970 dans les Hauts-de-Seine, j’aurais pu, à partir de 1981, commencer une carrière politique, comme l’ont fait un certain nombre de mes amis. Mais on m’a proposé d’être secrétaire général du gouvernement et j’ai pensé que je pouvais être plus utile de cette manière. Par la suite, mes responsabilités ont toujours concerné le service de l’État, sans chercher à me faire parachuter en politique. Cette position était peut-être liée à un certain désenchantement vis-à-vis de la politique gouvernementale et de l’évolution qu’elle a prise à partir de 1983. J’en suis resté solidaire mais avec moins d’enthousiasme.

Arrêtons-nous sur 1983. Vous écrivez que les choses ne seront plus comme elles auraient pu l’être dans la foulée de 1981. Mais vous donnez en même temps le sentiment que vous vous y résignez sans affirmer une contestation forte du tournant de la rigueur.

Jacques Fournier. J’ai considéré ce tournant comme inévitable et ne l’ai pas condamné, tout en n’en étant pas non plus complètement solidaire. Mais l’équipe gouvernementale a continué, dans ce nouveau cours des choses, à faire des réalisations importantes. J’ai utilisé mes compétences pour faire tourner la machine gouvernementale, puis à la tête de deux grandes entreprises publiques, Gaz de France et la SNCF. Je suis arrivé à GDF sur la pression de l’Élysée, Jacques Chirac étant alors à Matignon. Je serai plus tard, au début du second septennat de François Mitterrand, nommé président de la SNCF sous le gouvernement Rocard (…).

A l’issue de cet entretien, le journal a sollicité l’ancien ministre Anicet Le Pors (l’un des quatre ministres communistes du gouvernement Mauroy entre 1981 et 1984) pour qu’il ajoute un commentaire (Anicet LE PORS).

LE SENS DE L’ÉTAT

Il s’agit d’un témoignage exceptionnel qui fera référence. Dans son Itinéraire d’un fonctionnaire engagé, Jacques Fournier restitue les expériences mêlées du militant de l’union de la gauche et du « grand commis de l’État » qu’il a été pendant la deuxième moitié du XX° siècle (…).

L’auteur se livre à une introspection permanente sur le sens de son action, les conflits qui l’habitent, l’appréciation de ses succès comme de ses échecs, et ce avec une sincérité rare à ce niveau. Contrairement aussi aux visions puériles sur l’État, il montre que celui-ci est sans doute un moyen de domination politique mais aussi un lieu de contradictions fortes qu’il faut avoir le courage d’affronter avec intelligence. Ce qu’il a fait au Conseil d’État en étant à l’origine de la notion de « principes généraux du droit » permettant de contenir les débordements de l’exécutif de la V° République (mendésiste, il a voté contre) et en enrichissant la notion de service public. Au sommet de l’appareil d’État en affirmant « l’irréductibilité de la décision politique » mais en faisant tout pour l’infléchir dans le sens de l’économie « des besoins » contre l’économie « de marché » et en affirmant la responsabilité de « la main visible » contre la mondialisation libérale. À la tête de GDF puis de la SNCF en justifiant l’avenir de ces entreprises publiques au nom de leur efficacité sociale (…). Président du Centre européen des entreprises publiques en appelant au rééquilibrage en faveur du service public au nom de l’aménagement du territoire, de la solidarité et du long terme. Une contribution éminente en faveur d’une recomposition qui serait réellement socialiste.

* Voir, concernant la Fondation Res Publica, un article récent paru sur ce blog Débat de la Fondation Res Publica sur la PAC : aux actes, citoyens - 28 juillet 2008

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commentaires

L
Bonjour Michel,Je me suis régalée de lire ce portrait.Oui, Jacques Fournier apparaissait comme un homme droit. Anicet le Pors également. Ils se comptent sur les doigts des 2 mains depuis 35 ans.Je le connaissais peu, à dire vrai, mais il forçait le respect lorsqu'il parlait (Secrétaire Général du Gouvernement, ou à des réunions du CERES), et j'ignorais certains épisodes (son Poperénisme par exemple).Amitié
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