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  • : Michel Sorin
  • : Le MRC 53 est la structure mayennaise du Mouvement Républicain et Citoyen, qui a pour but de rassembler la gauche républicaine à partir, notamment, des idées de Jean-Pierre Chevènement, l'un de ses fondateurs, qui n'est plus membre du MRC depuis 2015. Le MRC a pris le relais du Mouvement des Citoyens (MDC) après les élections de 2002. En 2022, le MRC est devenu membre de la Fédération de la Gauche Républicaine avec quatre autres organisations politiques.
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3 février 2015 2 03 /02 /février /2015 12:23

 

La gauche est-elle prête à s’engager dans la refondation républicaine ?

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« La France, nation suprêmement politique, peut encore, si nous le voulons, montrer le chemin à une Europe et à un monde qui ont besoin d'être éclairés par les valeurs que la République représente ». C’est par cette phrase que Jean-Pierre Chevènement conclut la Tribune publiée par l’hebdomadaire Marianne dans la rubrique de l’AGORA. Voir l’Article paru dans Marianne daté du 23 janvier.

Photo : Jean-Pierre Chevènement, le 6 avril 2014    

Voici des extraits de ce texte paru sur le site de Marianne le 2 février 2015, sous le titre :
La gauche doit faire sa conversion républicaine

 

Pour Jean-Pierre Chevènement, "le moment est venu" pour la gauche de "faire cette “conversion républicaine” à laquelle elle a trop souvent tourné le dos". Et pour lui de rappeler que "ce n'est pas la République qui est la cause des ratés de l'intégration des jeunes issus de l'immigration dans la communauté des citoyens. C'est le défaut ou l'insuffisance de République". Tout comme il rappelle aussi que "le droit à la différence débouche toujours sur la différence des droits".

Le peuple français s'est mis debout, le 11 janvier 2015, pour dire son attachement à la République. D'abord à un mode de vie fondé sur la liberté et particulièrement celle de s'exprimer, bref à une civilisation. Il a refusé le chantage à la peur que prétend exercer sur lui un terrorisme d'un autre âge. Mais ce sursaut républicain devra s'inscrire dans la longue durée. En effet, nous n'éradiquerons pas facilement ce terrorisme-là, qui se développe à l'intersection des plaies de notre société et des conflits qui frappent le monde musulman (1,2 milliard d'hommes et de femmes). Il faudra des années, voire des décennies, pour y parvenir. La raison en est simple : pour venir à bout du terrorisme, il faut le couper de sa base potentielle. Aucune action policière, si efficace qu'ait été celle qui a été conduite et si nécessaire soit-elle dans les temps à venir, ne peut se substituer à cet axe stratégique fondamental (…).

Prévisible depuis longtemps, le conflit qui frappe la France à son tour s'alimente à deux sources : la perte de repères d'une jeunesse précarisée et le sentiment d'injustice et de persécution que le monde musulman éprouve à tort ou à raison à l'endroit du monde occidental (…).

Ce terrorisme djihadiste frappe d'abord les musulmans. Dois-je rappeler que plus de 100 journalistes algériens ont payé de leur vie, dans les années 90, la conquête de leur liberté d'expression face à l'obscurantisme ? Refusons les amalgames trop rapides qui confondraient l'ensemble des musulmans avec une poignée de fanatiques. Ce serait faire le jeu du terrorisme. Les agressions contre les lieux de culte musulmans ne sont pas seulement odieuses et criminelles. Elles sont imbéciles. Combattre le terrorisme, c'est aussi combattre l'esprit de croisade. C'est aux musulmans d'abord qu'il revient pourtant de séparer le bon grain de l'ivraie. Les pays occidentaux peuvent les y aider, et d'abord en ne multipliant pas les ingérences expéditionnaires et déstabilisatrices.

La France, parce qu'elle a une politique claire, est fondée à demander à ses citoyens, qu'ils soient musulmans, juifs ou chrétiens, de ne pas importer sur son sol le conflit israélo-palestinien, a fortiori sous la forme d'horribles attentats antisémites qui frappent des Français en raison de leur religion. La France, parce qu'elle a une politique claire, est devant un défi de longue durée. Il lui faut aussi balayer devant sa porte. Ce n'est pas la République qui est la cause des ratés de l'intégration des jeunes issus de l'immigration dans la communauté des citoyens. C'est le défaut ou l'insuffisance de République.

De bons apôtres présentent le multiculturalisme comme remède alors qu'il n'est bien souvent que l'alibi des communautarismes. Il faut, au contraire, défendre la République comme un régime où, en dehors de ce qui est prohibé par la loi, la liberté est la règle. Une certaine bien-pensance s'en prend à la laïcité présentée comme « agressive ». La laïcité se borne à séparer le domaine du religieux propre à chacun de l'espace commun où tous les citoyens sont conviés, à travers l'exercice de leur raison naturelle, à participer à la définition de l'intérêt général. La laïcité n'est nullement dirigée contre les religions. La lettre de Jules Ferry aux instituteurs (1883) rappelle que le maître, dans ses cours d'éducation morale, ne peut rien avancer devant ses élèves qui blesserait la conscience d'un de leurs parents. Un professeur de dessin dans l'école de la République ne saurait caricaturer Mahomet. La République, pour être refondée, doit l'être sur la base de concepts clairs.

La République a besoin d'un nouveau programme du Conseil national de la Résistance (CNR) pour résorber les fractures de notre société. Il y a, bien évidemment, celle que crée le chômage, et d'abord celui des jeunes. Chacun le ressent : l'Europe doit rompre avec une politique de stagnation économique qui détruit des emplois au lieu d'en créer. Outre l'emploi, il y a aussi l'éducation et la culture. Il faut mettre l'accent sur ce qui unit et non sur ce qui divise, sur ce qui rassemble et non sur ce qui sépare. Arrêtons avec le « droit à la différence » qui débouche toujours sur la différence des droits.

Pour la gauche, qui a deux ans devant elle, le moment est venu de faire cette « conversion républicaine » à laquelle elle a trop souvent tourné le dos (affaire du voile en 1989). LE MONDE DANS LEQUEL NOUS ENTRONS NE NOUS FERA PAS DE CADEAUXOn a entendu encore récemment que l'addition des minorités permettrait de remplacer la majorité populaire dans laquelle la gauche trouvait traditionnellement sa base et sa raison d'être. L'heure de la refondation républicaine ne sonnera pas deux fois. Un pays qui ne s'aime plus ne saurait intégrer de nouveaux citoyens. Le récit national français a été détruit par tous ceux qui, dans leur tête, avaient déjà abandonné la France à Le Pen il y a trente ans : il faut reconstruire ce récit national, rompre avec les discours masochistes, aider la France à retrouver l'estime de soi, sans laquelle elle ne pourra surmonter sa crise d'identité actuelle. Là est le rôle, magnifique, de l'école de la République. Pourtransmettre les connaissances et les valeurs républicaines, pour expliquer la laïcité, pour faire aimer la France, notamment à travers sa littérature et son histoire, les programmes de l'école devront être revus et publiés sous une forme accessible à tous. Il faut à nouveau étudier les grandes œuvres. La formation des maîtres est la clé. « On ne transmet, disait Hannah Arendt, que cela à quoi on croit. » L'accès à la citoyenneté permettra seul d'« assécher le terreau » où peut germer le terrorisme djihadiste. Cela prendra du temps mais cela donnera du sens à la politique.

Je n'ai rien dit au chapitre de la sécurité parce que le président de la République, le Premier ministre et le ministre de l'Intérieur, assurant une efficace coordination des forces de police et de gendarmerie, se sont montrés tout à fait à la hauteur des événements et que je leur fais confiance pour perfectionner notre dispositif centralisé de lutte contre le terrorisme, tout en préservant l'Etat de droit.

Pour autant, la refondation républicaine est une tâche autrement plus vaste. Elle sera de longue haleine. C'est une immense révolution intellectuelle et morale qu'il faut conduire. L'unité nationale qui s'est manifestée le 11 janvier sera fondatrice si le gouvernement parle clair et juste en tous domaines et s'il appelle la France à l'exigence et à l'effort. Le monde dans lequel nous sommes entrés est difficile. Il ne nous fait et ne nous fera pas de cadeaux. La gauche est-elle capable d'effectuer, au bord du gouffre, cette « conversion républicaine » à laquelle j'ai souvent appelé ?

Le peuple français n'attend que cela. Il a déjà rendu à la France ce qui lui faisait le plus défaut : la fierté. La France, nation suprêmement politique, peut encore, si nous le voulons, montrer le chemin à une Europe et à un monde qui ont besoin d'être éclairés par les valeurs que la République représente.

 

Cet article est le 193ème paru sur ce blog dans la catégorie CHEVENEMENT

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