L'agression de l'Ukraine par la Russie conduit à une crise alimentaire
Notre note du 6 avril 2022 sur l’alerte à la famine* visait à démontrer que l’indignation contre l’agression de l'Ukraine et ses effets sur la flambée des cours du blé ne devait pas justifier des mesures inefficaces pour la sécurité alimentaire d’ici l’été 2023 sur la quantité de blé disponible, donc sur le prix du pain chez nous et surtout en Afrique et au Moyen Orient.
* L’alerte à la famine… au profit des marchands de grains ?
Nous ne manquons pas de blé mais de régulation du marché.
Plutôt que de reprendre le vieux slogan simpliste « produire plus pour nourrir le monde» qui conduit à polluer plus au Nord et à empêcher le développement des agricultures du Sud, nous avons rappelé les deux solutions nettement plus efficaces à court terme: arrêter de faire de l’éthanol carburant avec des céréales et réduire l’élevage industriel, gros consommateur de céréales et de soja. Ces deux secteurs utilisent les 2/3 s des céréales européennes (près de 200 sur 300 Mt).
Pour le blé seul, les économies sur ces deux secteurs seraient de 50 Mt, soit l’équivalent des exportations russes et ukrainiennes réunies ! Ainsi la France et l’UE peuvent décider, face à un risque de famine ou d’émeute de la faim, de réduire immédiatement ces deux secteurs, coupant court aux spéculations à la famine.
Mais en parallèle, il faut changer les règles du commerce mondial pour ces aliments de 1ère nécessité : la constitution des stocks de sécurité publics,la lutte contre la spéculation, les programmes d’intervention d’urgence… Ce que le G7 du 24 mars n’a même pas rappelé alors qu’il l’avait demandé en 2008 ! Le stockage public reste donc interdit par l’OMC car cela pourrait fausser le marché !
C’est précisément pour lutter contre la spéculation sur la famine qu’il faut changer les règles du commerce international :
1) en interdisant la spéculation sur les commodités agricoles et alimentaires
2) en faisant des co-investissements dans les infrastructures de stockage des pays du sud importateurs,
3) en établissant des contrats d’approvisionnement avec un plafond de prix pour faire face à la crise actuelle, nous dit Jean-Louis Rastoin.
Face à la crise alimentaire qui parait inéluctable dans les prochains mois dans la vaste zone Afrique Moyen-Orient il faut changer les règles du commerce des aliments indispensables pour l’alimentation humaine. Il faut plafonner les prix pour éviter la spéculation et soutenir financièrement le stockage public dans les pays importateurs et exportateurs au lieu de l’interdire. Ce doit être la priorité de la prochaine réunion de l’OMC ( CM 12) à Genève à la mi- juin 2022!
Mais l’OMC est un gros paquebot lent à la manoeuvre, avec 150 pays aux intérêts divergents. Sans un accord préalable entre deux principaux acteurs, les Etats-Unis et l’UE, on ne peut guère espérer de miracle à court terme… Et la Russie se permet d’accuser l’UE et les USA de l’empêcher de fournir du blé aux pays africains, du fait des sanctions économiques, tout en accentuant sa guerre de destruction en Ukraine !
* http://www.mars-asso.fr/lalerte-a-la-famine-au-profit-des-marchands-de-grains/
Cet article est le 3183 ème sur le blog MRC 53 - le 463ème, catégorie AGRICULTURE et PAC