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  • : Michel Sorin
  • : Le MRC 53 est la structure mayennaise du Mouvement Républicain et Citoyen, qui a pour but de rassembler la gauche républicaine à partir, notamment, des idées de Jean-Pierre Chevènement, l'un de ses fondateurs, qui n'est plus membre du MRC depuis 2015. Le MRC a pris le relais du Mouvement des Citoyens (MDC) après les élections de 2002. En 2022, le MRC est devenu membre de la Fédération de la Gauche Républicaine avec quatre autres organisations politiques.
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26 février 2013 2 26 /02 /février /2013 22:42

Plus de la moitié des votants contre la politique européenne

 

Caslino-d-Erba-15eme-anniversaire-037--Copier-.jpgLe suspense était grand avant les élections législatives des 24 et 25 février 2013 en Italie. On n’a pas été déçu. Au vu des résultats, le suspense est toujours aussi grand en ce qui concerne le futur gouvernement de ce grand pays dont l’un des meilleurs observateurs est Marc Lazar, qui vient de publier ce livre collectif : L'Italie contemporaine, de 1945 à nos jours, de Marc Lazar

Figée dans l'imaginaire occidental comme étant le berceau de l'art et de la culture, ou réduite à la caricature d'un pays de non-droit soumis aux guerres des « familles », l'Italie, dont l'expansion depuis la Deuxième Guerre mondiale a été spectaculaire, n'en finit pas de surprendre. Or ce pays, perçu pourtant comme le creuset où s'est élaborée la civilisation européenne, est mal connu de ses plus proches voisins. Deux malentendus survenus entre la France et l'Italie en témoignent : les trois victoires électorales de Silvio Berlusconi, qui ont provoqué la stupeur des Français, et la protection que la France accorde aux ex-terroristes italiens, à commencer par Cesare Battisti, qui ne cesse d'indigner les Italiens. Cet ouvrage restitue les multiples aspects de la trajectoire de l'Italie depuis 1945 : la difficile formation d'une démocratie qui, après deux décennies de totalitarisme fasciste, a su relever de grands défis ; la lente mise en place de l'unité nationale qui a tenu compte des diversités géographiques ; son action en Europe, en Méditerranée et dans le monde ; ses grandes mutations économiques ; la modernisation de sa société, mais également la persistance de ses traditions et des héritages non résolus, à savoir la question du Mezzorgiorno ou encore les relations entre l'Etat et l'Eglise catholique. Pour parachever ce tableau riche et contrasté, c'est aussi toute la créativité culturelle et l'inventivité artistique de l'Italie qui sont présentées ici, ainsi que la place de la télévision et le rôle des intellectuels. Une trentaine de spécialistes de l'Italie, français ou franco-italiens travaillant en France, historiens, historiens de l'art, du cinéma, de la littérature, politistes, sociologues, économistes et géographes, ont ainsi oeuvré à la réalisation de cet ouvrage, complet et indispensable au spécialiste comme au néophyte.

Voir les commentaires de cet auteur : "Un coup de tonnerre en Europe" (Le Monde, Marc Lazar, 26 février 2013). Lire aussi : Sans majorité claire au Sénat, l'Italie ingouvernable (Le Monde, 25 février). Extrait.

La coalition de gauche de Pier Luigi Bersani, qui remporte 29,5 % des voix, s'adjuge la majorité des sièges à la Chambre (345 sur 630), grâce à un système qui accorde 54 % des fauteuils à la formation arrivant en tête. La droite, qui remporte 29,18% des voix, n'obtient que 125 sièges. Beppe Grillo a 108 députés avec 25,55% des voix tandis que les centristes de Mario Monti obtiennent 45 sièges avec 10,56% des voix.

Mais au Sénat, où la prime de majorité est accordée par région, les résultats donnent le centre gauche très loin de la majorité absolue des 158 sièges. Elle totalise seulement 123 sièges sur les 315 que compte la Chambre, contre 117 sièges à la coalition de droite. En termes de voix, la gauche en remporte 31,63 % (27,43% au PD et 2,97% à SEL) et la droite 30,72 %, (22,30% pour le PDL et 4,33% pour son principal allié, la Ligue du Nord). Le Mouvement cinq étoiles (M5S) de Beppe Grillo a 54 sièges avec 23,79% des voix tandis que la coalition centriste de Mario Monti, avec 9,13% des voix, obtient 18 sièges auxquels s'ajoute un sénateur représentant les Italiens de l'étranger.

La crise et quinze mois de rigueur budgétaire imposés par le gouvernement technique de Mario Monti ont énormément influé sur ces élections. Le chef du gouvernement sortant, qui jouissait d'une solide popularité pour avoir rétabli la crédibilité de l'Italie, a fortement pâti des effets de sa politique d'austérité.

 

Les gagnants et les perdants des législatives italiennes (Le Monde, 26 février)

 

Philippe Ridet, correspondant du "Monde" en Italie, analyse ce 26 février les résultats des élections législatives et les issues possibles à l'impasse politique. Voir A Rome, "on entend beaucoup parler d'un gouvernement de grande coalition". Extraits.

« Oui, il y a une composante anti-européenne dans le vote Grillo-Berlusconi. Le premier a proposé un référendum pour sortir de l'Euro, le second a attaqué durement l'Europe "germano-centrée". Comme dans de nombreux pays d'Europe du Sud, la rigueur imposée est perçue comme une "punition" d'Angela Merkel. Mais les motivations plus italo-italiennes comptent énormément. Dans un pays où près d'un million de jeunes diplômés ont émigré ces vingt dernières années, le discours de Beppe Grillo qui se propose de renvoyer tous les "vieux politiciens" "a casa" (à la maison) a fait mouche. Alors que l'évasion fiscale est estimée à 120 milliards d'euros, la proposition d'amnistie pour les fraudeurs et de remboursements d'impôts faite par Silvio Berlusconi ne compte pas moins » (…).

Le vote pour Beppe Grillo représente la volonté d'une grande partie des Italiens et, notamment les plus jeunes, d'un système politique vu, à tort ou à raison, comme une manière de se répartir des postes, des charges, des prébendes. Dire de Beppe Grillo qu'il serait un fasciste est tout à fait exagéré. Même s'il fait des grands discours comme les faisait Mussolini depuis le balcon de la place de Venise, sa manière de considérer la politique, le recours permanent à l'approbation de ses militants via Internet, son intention d'installer une démocratie directe et participative l'éloignent tout à fait du modèle fasciste. Mais il est vrai qu'il y a quelques semaines, il avait tendu la main à des militants du groupuscule d'extrême droite Casa Pound.

Les élus de Beppe Grillo n'ont rien à voir avec la figure de leur leader. Pour la plupart, ils sont de parfaits inconnus et des néophytes. On trouve parmi eux des femmes au foyer, des géomètres, des étudiants, des physiciens etc. Ils ont en commun une pratique intensive d'Internet - le seul vecteur de communication de ce parti sans siège ni structure - et pour beaucoup des connaissances très pointues dans certains domaines, comme l'environnement par exemple. Mais ce ne sont pas les "agités" que l'on a voulu décrire.

Le vote Grillo est relativement transversal bien que ce soit les plus jeunes des Italiens qui aient voté en majorité pour le Mouvement 5 Etoiles. J'ai rencontré personnellement des partisans du comique génois qui venaient du Parti démocrate (centre gauche) et d'autres qui venaient du Peuple de la liberté (centre droit), le parti fondé par Silvio Berlusconi. Ce vote cristallise avant tout une fracture générationnelle typique de l'Italie où de nombreux jeunes diplômés doivent s'exiler chaque année pour trouver un travail à la mesure de leur qualification. Il cristallise également, mais dans une moindre mesure, le rejet de la rigueur imposée par Silvio Berlusconi puis par Mario Monti. Une rigueur vécue comme un diktat de l'Allemagne, de la Banque centrale européenne et de la Commission. C'est un vote anti-"castes politiques" et anti-élites (…).

 

Le leader politique qui sort vainqueur, difficilement, de ces élections est Pierluigi Bersani (Parti démocrate, centre gauche). Voir Le discret Bersani se voit en nouvel homme fort de l'Italie (Le Monde, 26 février) et Bersani, nouveau chef de la gauche italienne (Le Monde, 26 octobre 2009).

 

Nicolas Chapuis (Le monde, 26 février) a recueilli les propos de Guillaume Bachelay, numéro 2 du PS, qui s'inquiète de la percée du populisme en Italie. Ce proche de Laurent Fabius, qui avait combattu le traité constitutionnel européen en 2005, estime que l'Europe doit soutenir la croissance par la relance. Soulignant les efforts de rigueur faits par les Italiens, il reproche à Bruxelles de ne pas avoir joué son rôle. Voir "Les élections italiennes valident l'approche du président Hollande".

 

Le commentaire de Jean-Luc Laurent, président du Mouvement républicain et citoyen (MRC) :

 

La politique italienne est complexe mais les électeurs viennent pourtant d’adresser un message très clair aux gouvernements européens : l’austérité portée par les conservateurs européens conduit à une impasse politique. La récusation de Mario Monti, le retour de Berlusconi et le succès du Mouvement 5 Etoiles traduisent tous un divorce profond entre les citoyens et leurs dirigeants. Il y a quelques jours, l’agence Moody’s a dégradé la note du Royaume Uni invalidant la politique d’austérité forcenée conduite et reconduite par le gouvernement Cameron.

Économiquement et politiquement, l’Europe fonce dans le mur en klaxonnant. La réorientation de l’Europe n’est pas un vœu pieux ou un élément de langage pour habiller des demi-succès ou de mauvais compromis. La réorientation de l’Europe passe aujourd’hui par la création d’un rapport de force politique contre Merkel, Cameron et les conservateurs. Gardons-nous d’atteindre le point où les politiques qui étaient simplement mauvaises deviennent suicidaires.

Voir, sur le site du MRC : Italie: l’Europe face à ses responsabilités

 

Cet article est le 55ème sur ce blog dans la catégorie Etats Union européenne

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12 novembre 2012 1 12 /11 /novembre /2012 22:51

F Hollande doit proposer une autre politique européenne

 

Lors de sa conférence de presse, demain mardi, à l’Elysée, le président de la République devra faire preuve d’habileté et de fermeté sur la conduite de la politique européenne. « La France est le plus gros problème de la zone euro en ce moment », selon l’un des « sages » économistes allemands consulté par le ministre des finances Schaüble.
C’est ce qu’on apprend en lisant l’éditorial (daté du 11 novembre 2012) de Jacques Omnès. Voir Mes Allemagnes

Editorial

La semaine dernière, j'évoquais l'article de ce journaliste de Bild qui se demandait gravement si la France était en train de devenir une "nouvelle Grèce". Un papier en partie inspiré, semble-t-il, par l'ex-chancelier social-démocrate Gerhard Schröder, le père de la politique d'austérité à l'allemande.
Cette fois, c'est un papier publié sur le site de Die Zeit qui est venu rappeler l'inquiétude - feinte ou réelle - de certains dirigeants politiques allemands face à la situation économique de la France. Ainsi, selon le célèbre hebdomadaire d'outre-Rhin, le ministre des finances Schäuble aurait demandé aux "sages", un petit groupe d'économistes qui conseille le gouvernement allemand, de rédiger une étude sur la situation économique de notre pays et même d'élaborer une sorte de plan de réformes pour le sortir de l'ornière !

Les affirmations de Die Zeit, pourtant corroborées par l'agence Reuters, ont été démenties par le président de la commission du groupe d'experts. Il reste que Monsieur Schäuble a refusé de s'exprimer sur cette question. Il reste que l'un des "sages" a déclaré au moment de la présentation de leur rapport annuel : "La France est le plus gros problème de la zone euro en ce moment. Le plus gros problème, ce n'est plus la Grèce, l'Espagne ou l'Italie, c'est la France, parce que la France n'a rien entrepris du point de vue de sa compétitivité et prend même le chemin inverse."

Il reste que Monsieur Kauder, président du groupe parlementaire chrétien-démocrate au Bundestag, a suggéré à François Hollande de se rapprocher de Madame Merkel et l'a exhorté à faire preuve de "courage" et à entreprendre enfin de "véritables réformes structurelles".

Force est donc de constater que, depuis une quinzaine de jours, des dirigeants politiques allemands exercent une pression plus ou moins directe, plus ou moins ouverte, mais de plus en plus forte sur la France pour qu'elle s'engage encore plus résolument dans la voie sans issue de l'austérité. Tout se passe comme s'ils considéraient déjà la France comme une "nouvelle Grèce", à qui on pourrait - on devrait - imposer la volonté de l'Allemagne et de la troïka.

Je l'ai souvent écrit ici : la coopération entre la France et l'Allemagne n'est pas un but en soi, elle ne peut pas - ne doit pas - se faire sur n'importe quelle base. Une politique commune qui ferait fi des intérêts de la masse de la population de nos deux pays, qui ne viserait qu'à la satisfaction des appétits des nantis, mettrait en danger l'amitié entre nos deux peuples et ferait renaître la germanophobie.

Avec son "pacte de compétitivité", le gouvernement français a déjà fait un grand pas en direction de l'Allemagne. Un pas dans la mauvaise direction. Plutôt que de céder aux pressions de Berlin, il devient urgent d'abandonner la voie funeste de l'austérité et de se montrer solidaire de ceux qui souffrent déjà durement de la politique de Madame Merkel et de la troïka, à commencer par nos amis Grecs.

 

Voir aussi : Angela Merkel, nouveau Machiavel (Le Monde Idées, Ulrich Beck, 12 novembre 2012)

Lisbonne accueille Merkel par des huées (Le Monde, 12 novembre 2012)

 

Cet article est le 54ème sur ce blog dans la catégorie Etats Union européenne

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4 novembre 2012 7 04 /11 /novembre /2012 21:06

L’Allemagne pourrait subir les conséquences de sa politique

 

La presse s’est fait l’écho des déclarations de l’ancien chancelier allemand, Gerhard Schröder, qui frôlaient l’indécence à l’égard du président de la République française, François Hollande (voir L'Allemagne, donneuse de leçons d'austérité, cherche à imposer sa loi - 3 novembre 2012).

 

Manif Antilles Laval 003 TDans l’éditorial qui accompagne ce 4 novembre la mise à jour hebdomadaire de son site Mes Allemagnes, Jacques Omnès revient sur l’outrecuidance du chancelier social démocrate qui se faisait appeler en Allemagne « le camarade des patrons » et qui, abandonnant la vie politique, s’est empressé de servir les intérêts du consortium germano-russe chargé de la construction et de l'exploitation du gazoduc de la Baltique Nordstream.  

 

En fait, l’Allemagne pourrait bientôt trouver des inconvénients aux politiques Schröder-Merkel quand elle verra ses débouchés en Europe se réduire sous l’effet de ces politiques d’austérité.

 

Editorial

 

"La France est-elle en train de devenir la nouvelle Grèce ?" ("Wird Frankreich das neue Griechenland?") s'interrogeait le journaliste Nikolaus Blome dans le journal à scandale Bild le 30 octobre dernier. Cette grave question, posée en marge de la "conférence européenne" organisée par l'institut du milliardaire Nicolas Berggruen à Berlin, s'appuyait notamment sur des déclarations de l'ex-chancelier social-démocrate Gerhard Schröder. Celui-là même qui, avec son "Agenda 2010", a été en 2003 l'initiateur d'une politique d'austérité, dont chacun peut constater aujourd'hui les ravages en Allemagne (augmentation des inégalités, de la précarité et de la pauvreté). Et il prétend aujourd'hui faire la leçon à ses camarades socialistes français : le maintien de la retraite à 60 ans - pour un nombre pourtant très restreint de bénéficiaires - ne serait pas finançable,  l'augmentation de la pression fiscale ferait fuir les capitaux, etc.

Madame Parisot et le Medef applaudiront certainement aux propos de celui qu'on appelait outre-Rhin "le camarade des patrons". Le peuple français, en revanche, a toutes les raisons de se méfier des conseils d'un "social-démocrate", qui, après avoir quitté la vie politique, s'est fait engager par la société russe Gazprom pour présider le conseil de surveillance du consortium germano-russe chargé de la construction et de l'exploitation du gazoduc de la Baltique Nordstream, et qui a été conseiller de Goldman Sachs et de la banque Rothschild, avant de rejoindre comme consultant le groupe de presse suisse Ringier.

Le problème de la France aujourd'hui, ce n'est pas que le gouvernement tiendrait des promesses électorales catastrophiques pour l'économie. C'est, au contraire, qu'il s'engage, à quelques nuances près, dans une politique d'austérité qui risque de ressembler bougrement à celle suivie par l'Allemagne aux niveaux national et européen. Avec des conséquences qui commencent déjà à inquiéter les  Allemands : tel l'arroseur arrosé, le pays, qui misait beaucoup sur l'exportation, voit se réduire ses débouchés dans une Europe du Sud étranglée par l'austérité.

François Hollande serait bien inspiré d'écouter le peuple français plutôt que ses "amis" allemands...

 

Cet article est le 53ème sur ce blog dans la catégorie Etats Union européenne

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3 novembre 2012 6 03 /11 /novembre /2012 21:54

L’Europe doit intégrer les différences de compétitivité

 « L'Allemagne ne cache pas son scepticisme face à la politique économique de son partenaire. Gerhard Schröder tire la sonnette d'alarme ».

"La France sera-t-elle la nouvelle Grèce ?"

En prenant connaissance de cet article publié le 2 novembre sur le site du Point, François Hollande a dû avoir des pensées émues pour ses « amis » allemands, qui semblent lui savonner la planche avec délectation. Extrait.

(…) Il n'y a pas qu'en France que les doutes s'accumulent sur la stratégie de François Hollande. Les Allemands commencent eux aussi à se demander s'il y a un pilote dans l'avion. Le très populaire quotidien Bild n'y va pas par quatre chemins. Le journal à plus gros tirage de la presse allemande se demandait mercredi : "La France sera-t-elle la nouvelle Grèce ?" L'article, consultable en ligne, assène que la France est "en chute libre" et que "le président nouvellement élu, François Hollande, ne réagit pas".

C'est notamment l'ancien chancelier Gerhard Schröder qui a inspiré le journaliste Nikolaus Blome, auteur de l'article. Le père de l'agenda 2010, un train de réformes d'inspiration libérale qui a fait passer l'Allemagne du statut d'"homme malade de l'Europe" à une machine à exporter, ne s'est pas privé de douter publiquement du chef de l'État français, en marge de la conférence européenne du Berggruen Institute, qui rassemblait à Berlin de nombreux responsables et ex-responsables politiques et économiques. "Les promesses de campagne du président français vont voler en éclats face à la situation économique", a lâché Gerhard Schröder, pourtant social-démocrate. Il a notamment critiqué le retour de l'âge de la retraite à 60 ans pour certaines catégories de salariés, un "mauvais signal", "non finançable". Il s'est aussi inquiété de l'augmentation de la pression fiscale, qui aura pour effet,

La réponse sur le site québécois Oikos Blogue : L’hypocrisie allemande
On trouve la réponse à Schröder sur ce site québécois, vraiment excellent. Gilles Bourque a écrit, le 29 octobre 2012, un article dans lequel il reprend les propos de Guillaume Duval sur Les raisons du blocage allemand.

(…) Le journaliste économique Guillaume Duval, du magazine Alternatives Economiques, nous explique dans son article Les raisons du blocage allemand que derrière l’intransigeance de l’Allemagne, on trouve la même hypocrisie du plus fort qui cherche à imposer sa loi, parce qu’elle en tire profit. Il montre en particulier que les réformes de libéralisation du marché du travail qu’Angela Merkel veut prescrire à ses voisins de l’Union européenne ne sont aucunement celles qui ont permis à l’Allemagne de garder une santé économique enviée par tous. Le marché du travail allemand ne peut pas être caractérisé comme flexible, bien au contraire. Malgré, nous dit Guillaume Duval, une baisse du PIB de 5,1% en 2009, l’économie allemande aurait conservé tous ses emplois. La structure de codétermination du modèle allemand du travail (où l’on voit les représentants des travailleurs participer aux lieux de gouvernance des entreprises) a fait en sorte que le pays a fait un usage massif de la solidarité à travers un chômage partiel et la réduction du temps de travail dans les entreprises. Résultats : le pouvoir d’achat global des salariés s’est maintenu sans avoir à mobiliser les finances publiques. Pendant la même période, la France et l’Espagne qui ont vu leur PIB baisser respectivement de 2,7% et 3,7% avec des pertes d’emplois de 280 000 pour la première et de 1,4 millions pour la seconde ! Qui est vraiment flexible ?

L’Allemagne s’entête à proclamer que les politiques d’austérité sont les seules réponses viables pour sortir ces pays de la crise parce qu’il est vrai qu’elle a elle-même fait subir aux Allemands ces remèdes à partir du début des années 2000. Mais si cette politique n’a pas eu les effets désastreux qu’elle ne peut qu’avoir aujourd’hui, c’est qu’à cette époque l’Allemagne était seule à la mettre en œuvre. Pendant la même période, tous les autres pays européens s’endettaient pour consommer les produits allemands alors que les pays émergents, en pleine croissance, s’arrachaient les machines-outils et les voitures de luxes allemandes. Le succès de l’Allemagne est là : d’une part une spécialisation dans les équipements productifs à haute valeur ajoutée (la moitié des effectifs européens de cette industrie sont allemands) et les voitures de luxe ; d’autre part une politique de rigueur dont le succès a été possible grâce à la croissance des autres pays.

Guillaume Duval ajoute que ce qui complique les choses, à l’heure actuelle, est le fait que l’Allemagne a profité jusqu’à maintenant de la crise de la dette souveraine européenne. Avec un taux d’intérêt de 1,37% pour ses obligations de dix ans, on peut dire que les investisseurs ‘paient’ l’État allemand pour pouvoir détenir ses titres de dette puisque l’inflation de la zone euro est supérieure à ce taux ! Ainsi, depuis le début de la crise, l’Allemagne aurait épargné 70 milliards d’euros sur les intérêts versés à ses créanciers…ce qui est bien supérieur aux 55 milliards d’euros que l’Allemagne s’est engagée à prêter à la Grèce, à l’Irlande et au Portugal (…).

 

La réponse de Chevènement : les écarts de compétitivité viennent de loin

Dans son intervention au Sénat, le 29 octobre, Jean-Pierre Chevènement a évoqué les causes des divergences de compétitivité entre la France et l’Allemagne. Voir Au Sénat, Chevènement explique pourquoi il vote contre la règle d'or - 2 novembre 2012.

(…) Ce qui mine en réalité la monnaie unique c’est la compétitivité divergente et de façon croissante, entre les dix-sept pays qui ont cette monnaie en partage. Ainsi la France qui avait une balance commerciale équilibrée en 2001, connaît en 2011 un déficit de plus de 70 milliards d’euros, tandis que dans le même temps, l’Allemagne affiche un excédent de 158 Milliards en 2011.

 

Ces divergences de compétitivité proviennent pour l’essentiel d’écarts dans le développement industriel qui s’enracinent dans l’histoire longue : ainsi l’Allemagne a creusé l’écart avec la France et la Grande-Bretagne dès la fin du XIXe siècle. Les causes en sont connues : cohésion sociale exceptionnelle favorisée par la cogestion syndicats-patronat, valorisation systématique, par consensus national, du « site de production Allemagne », formation par alternance dans le cadre d’un système dual où la moitié des enfants sont orientés dès l’âge de onze ans, mise en application de la science et de la technologie dans toutes les industries, y compris les industries courantes, puissance du « Mittelstand » et des entreprises moyennes, réinvestissement des profits, presque toujours substantiels, dans l’entreprise et dans l’innovation, sous-traitance à bas prix dans les pays voisins de la « Mitteleuropa » et maîtrise de l’assemblage et de la chaine de valeur ajoutée en Allemagne même. Ces écarts sont cumulatifs, comme l’a bien montré Robert Mundell, dans une « zone monétaire non optimale ». Il se produit en Europe ce qui s’était produit en Italie après l’unification italienne et la généralisation de la lire à la péninsule : polarisation des richesses au Nord, mezzogiornisation au Sud.

Les écarts de compétitivité au sein de la zone euro ont été creusés en second lieu par le « choc de compétitivité » mis en œuvre au début des années 2000 par le Chancelier Schröder : déflation salariale, réduction de l’Etat-providence et sous-traitance à la main d’œuvre bon marché des pays proches, politique continuée par Mme Merkel avec la hausse de 3 points de la TVA en 2007. Au total, la France a perdu quinze points de compétitivité par rapport à l’Allemagne de 2000 à 2011
(…).

 

Jacques Omnès ne voit pas dans l’Allemagne un modèle

 

Son site* Mes Allemagnes est une mine d’informations concrètes.

Dans ses éditoriaux des 21 et 28 octobre, il déplore l’image laissée par l’Allemagne en Grèce et ailleurs « Madame Merkel maintient en effet imperturbablement le cap vers une politique européenne d'austérité et de capitulation devant les puissances financières avec un entêtement digne d'une meilleure cause.
La mise à jour de cette semaine ne manquera donc pas de rappeler, à l'aide de liens vers des articles et documents récents, que l'Allemagne n'est décidément pas un modèle dont on pourrait actuellement s'inspirer. Les inégalités, la précarité, la pauvreté continuent d'y faire des ravages (…) ». 

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24 mai 2012 4 24 /05 /mai /2012 20:41

L’euro doit être au service du bien commun européen

 

La question grecque est devenue la question européenne. Pour sauver les grecs de l’infortune, il faut changer de politique européenne. Quelle surprise de constater que Laurent Fabius n’a rien compris ! Il croit sans doute qu’il ne s’est rien passé entre 2002 et 2012.

Voici ce qu’il a déclaré le 21 mai sur Europe1 (voir Fabius-Grèce : "une très grande inquiétude") :

Laurent Fabius, nouveau ministre des Affaires étrangères, a admis lundi sur Europe 1 "une très grande inquiétude sur la situation grecque", alors que le pays s’apprête à voter une deuxième fois en deux mois, et fait face à une poussée des extrêmes. "Nous n’avons pas de leçon à donner, mais la France doit dire les choses à nos amis grecs telles qu’elles se présentent aujourd’hui : s’ils veulent rester dans l’euro, ils ne peuvent pas se prononcer pour des formations qui de fait les feraient sortir de l’euro", a prévenu Laurent Fabius. "Il faut respecter le mémorandum (plan de rigueur imposé par l’UE et le FMI, ndlr), mais en même temps donner une perspective de croissance. L’enjeu, c’est que les Grecs restent ou pas dans l’euro", a-t-il rappelé.

 

Interrogé par Arlette Chabot, le 23 mai, sur Europe1, Alexis Tsipras, responsable de Syriza, le parti de la gauche radicale grecque, a répondu « M. Fabius est en contradiction avec les engagements électoraux de Monsieur Hollande » 

Rappel : Elections du 6 mai en Grèce : les résultats analysés par Gérard Filoche - 8 mai 2012

Voir aussi : Le Front de gauche reçoit Alexis Tsipras à l'Assemblée nationale (23 mai)

Alexis Tsipras « Les sorts des peuples européens sont liés »  (l’Humanité, 23 mai)

            Grèce : Tsipras veut « garder l'euro » (Le Parisien, 23 mai) 

 

 Jacques Généreux / France Inter (23 mai)

Economiste et Secrétaire national à l'économie du Parti de gauche, Jacques Généreux est revenu sur la crise actuelle en Europe et plus particulièrement en Grèce. Il plaide pour un changement de politique européenne car il juge "imbécile et inhumain de vouloir sortir d'une crise financière de surendettement par une cure d'austérité". "Nous avons les moyens pour relancer notre économie par nous mêmes" estime Jacques Généreux qui ajoute que "l'Euro en tant que monnaie unique n'est pour rien dans cette crise" : si Alexis Tsipras arrive au pouvoir, "les grecs désobéiront au traité européen, restructureront leur dette s'ils le veulent tout en restant dans l'Euro".

 

Il faut relancer l'économie grecque, dût l'euro en périr (Le Monde, Jacques Sapir, 24 mai)

 

Le mémorandum signé entre la "troïka" et le gouvernement grec a démontré sa nocivité. Rajoutant la rigueur à l'austérité, il a plongé la Grèce dans une dépression sans égale. Cette politique est l'équivalent contemporain de la déflation des années 1930 dans son esprit comme dans ses mesures les plus concrètes (baisse autoritaire des salaires, diminution des prestations sociales). Elle conduira aux mêmes catastrophes. En dépit des coups de menton de Berlin, Francfort ou Bruxelles, il n'existe pas de cadre légal pour expulser un pays de la zone euro. Les traités n'ont fixé aucun chemin pour en sortir. Ici encore, c'est un bel exemple d'intelligence politique !

L'Union européenne (UE) peut certes décider de suspendre son aide, mettant ainsi le gouvernement grec dans l'incapacité d'honorer ses dettes. Mais ce dernier peut alors prendre conjointement deux décisions lourdes de conséquences. Tout d'abord, il peut répudier la totalité de sa dette. Les gouvernements de la zone euro, engagés directement à travers le Fonds européen de stabilisation financière, et la Banque centrale européenne (BCE), devront alors "prendre leurs pertes" (64 milliards d'euros pour la France). Il peut, dans le même temps, réquisitionner la banque centrale de Grèce et lui faire émettre autant d'euros que nécessaire pour couvrir ses besoins de financement à court terme. Cette mesure, illégale, n'en est pas moins techniquement possible. Pour l'essentiel, il s'agit de jeux d'écritures (…).

Le gouvernement grec a donc dans ses mains des instruments de rétorsion face aux menaces. Mieux vaudrait donc discuter et renégocier le mémorandum, ce qui est très précisément la position du chef de Syriza, le parti de la gauche radicale, Alexandre Tsypras.

Au-delà se pose la question de la compétitivité de la Grèce. Soit les pays de l'Union européenne sont prêts à investir dans l'économie grecque, lui permettant de combler une partie de son écart de compétitivité qui s'est accru de 35 % depuis 2002. Soit il faudra se résoudre à une sortie de la Grèce de la zone euro et à une lourde dévaluation (50 %) de la drachme. Cette solution, pour pénible qu'elle soit, sera préférable à la poursuite de la politique du mémorandum. La dévaluation est en effet une solution possible pour la Grèce. Le déficit de la balance commerciale représentait, en 2011, environ 20 milliards d'euros. Le déficit hors effets des hydrocarbures représentait 15 milliards. Les importations incompressibles, on le voit, ne représentent qu'une partie (25 %) du déficit commercial actuel. Une dévaluation permettrait à la Grèce d'augmenter ses exportations, qui représentaient en 2011 l'équivalent de 27 % du PIB, dont 12 % de ce dernier pour les exportations de biens. Cela est loin d'être négligeable.

Une telle solution sonnerait probablement le glas de l'euro. Mais ce glas sonne déjà avec la crise espagnole et le retour de la crise irlandaise. Une solution à la crise grecque est possible, à la condition que l'on cesse d'en faire un point d'honneur. Les femmes et hommes politiques européens doivent faire preuve de pragmatisme. Sinon, les réalités économiques trancheront pour eux.

Grèce : faut-il vraiment saigner un Etat qui n'a jamais existé ? (Le M, Guy Burgel, 24 mai)

Guy Burgel, géographe, professeur à l'université Paris-Ouest-Nanterre-la Défense, est l’auteur du "Miracle athénien au XXe siècle", CNRS Editions, 2002. Pour lui, "le mensonge et la paresse dont on accuse aujourd'hui le peuple grec sont des fables."

La crise grecque revient au galop, compromettant les premiers pas de la nouvelle présidence française. Il faut donc aussi revenir à la pédagogie élémentaire, dont la répétition, on le sait, est le premier principe. Si l'on veut voir dans le désastre qu'offre actuellement la Grèce la simple traduction de l'incurie gouvernementale et de l'insouciance sociale, justiciables de traitements d'austérité à doses de cheval, on tuera le malade, mais surtout on n'aura rien compris aux processus historiques des mutations, où les concomitances l'emportent sur les causalités directes. A cet égard, la saga grecque est démonstrative. Elle apparaît à la croisée de trois logiques autonomes : une crise de la société, une crise de l'Etat, une crise de l'Europe.

Pendant un peu moins de deux siècles de son histoire contemporaine, la Grèce a construit son développement économique sur un mode sociétal. A de très rares exceptions - la période d'Elefthérios Venizélos, pendant l'entre-deux-guerres, après la défaite contre la Turquie -, c'est aux initiatives de la société, individus et groupes unis par de fortes solidarités familiales, qu'est échue la responsabilité principale de bâtir les fondements matériels et spirituels de la nation : la petite exploitation agricole, l'entreprise artisanale, puis industrielle et touristique, le logement, et avant tout celui des millions de ruraux qui sont arrivés dans les grandes agglomérations dans la seconde moitié du XXe siècle, l'instruction des enfants à travers un réseau dense et populaire d'instituts privés. Pendant longtemps, cet "autoportage" du social a prospéré avec bonheur, faisant sortir la Grèce de la pauvreté, certes avec l'aide internationale - américaine avant d'être européenne -, mais surtout grâce au travail et à l'ingéniosité de ses citoyens. Le mensonge et la paresse dont on accuse aujourd'hui le peuple grec sont des fables. Mais ce système est à bout de souffle (…).

 

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8 mai 2012 2 08 /05 /mai /2012 18:16

Partout, en Europe, il faut le rassemblement de la gauche

 

Les élections législatives du 6 mai en Grèce ont mis en évidence le désespoir du peuple grec, la perte de confiance dans les partis politiques qui se sont succédés au pouvoir depuis des décennies et gouvernent ensemble depuis décembre 2011, étant les seuls à avoir accepté les politiques d’austérité imposées par l’Union européenne, la Banque Centrale européenne et le Fonds Monétaire International - voir Le Monde, Alain Salles, 8 mai En Grèce, l'austérité fatale aux partis historiques :

C'est comme si une bombe avait explosé dans les urnes grecques. Aucune majorité ne semble en mesure de pouvoir gouverner la Grèce en crise au lendemain des élections législatives du 6mai, qui traduisent un rejet des politiques d'austérité et des deux partis qui gouvernent ensemble depuis décembre 2011, le Pasok (Parti socialiste) et Nouvelle Démocratie (droite). Ils réunissent à eux deux moins de 33% des suffrages (contre plus de 77% en 2009) et 149 députés (sur 300). Autres leçons historiques du scrutin, la gauche radicale du Syriza dépasse les socialistes du Pasok et une vingtaine de députés issus d'un groupuscule d'extrême droite à tendance néonazie entrent au Parlement.

Le parti de droite Nouvelle Démocratie, arrivé en tête, d’abord chargé de rechercher une coalition majoritaire, a très vite renoncé, aucune autre formation représentée au parlement (en dehors des deux qui étaient associées au gouvernement) n’acceptant le plan de redressement de la « troïka » (UE, BCE, FMI).

Selon les règles en vigueur en Grèce, c’était au tour de Syriza, le parti de la gauche radicale -  l’équivalent du Front de gauche en France mais sans le KKE (parti communiste), celui-ci refusant d’entrer dans une coalition de gauche - arrivé en 2ème position, de rechercher une coalition rassemblant au moins 151 députés sur 300, après avoir posé ses conditions (Le Monde, 8 mai) : Tsipras exclut un gouvernement de coalition soutenant l'austérité  

Le chef du parti grec de la gauche radicale grecque du Syriza, Alexis Tsipras, propulsé deuxième parti grec après les législatives de dimanche, a exclu mardi 8 mai de participer à un gouvernement de coalition qui soutiendrait le plan de redressement du pays dicté par l'Union européenne et le Fonds monétaire international (FMI). La Grèce n'est plus liée par ses engagements envers l'UE et le FMI après le rejet par les électeurs des partis favorables aux plans de renflouement, a encore estimé le chef de file du Syriza. "Le verdict du peuple (...) exclut un gouvernement qui applique le mémorandum [la feuille de route d'austérité dictée à Athènes par ses bailleurs de fonds] et l'accord de prêt", a-t-il déclaré.

 

Le point de vue de Gérard Filoche (Marianne, 7 mai) - Voir le blog de Gérard Filoche :

Certes, la montée de l’organisation néo-nazie « Aube dorée » a de quoi inquiéter (…) Il faut ajouter à ce panorama de la droite de la droite les 10,60 % de voix (33 sièges) obtenus par la formation « Grecs indépendants », une scission de droite du principal parti de droit grec, Nouvelle Démocratie. Si les principaux médias mettent l’accent sur la montée de l’organisation néo-nazie, c’est pour ne pas mettre en évidence les trois éléments essentiels de ce scrutin.

Premier élément : la montée de l’abstention

En 2009, l’abstention s’élevait à 29,08 % des électeurs inscrits quand le Pasok de Papandréou avait été élu contre la « démocratie nouvelle » de Caramanlis. En 2010, elle avait atteint 70,92 % aux municipales de 2010 quand le Pasok avait capitulé devant les exigences des banques, de la troïka, de Merkozy… . En 2012, elle atteint 34,87 %. Ce qui indique que, malgré la crise aiguë que traverse la Grèce, un recul important de l’idée que la politique puisse changer la réalité.
Il est évident que le PASOK (Parti socialiste grec), qui était majoritaire au Parlement et dont le leader Georges Papandréou dirigeait le gouvernement grec jusqu’à ce que la Finance le chasse et le remplace par Lucas Papadémos, porte une très lourde responsabilité dans ce désarroi d’une partie de l’électorat grec.

Deuxième élément : la déroute des partis qui avaient accepté le « mémorandum », le diktat de la troïka UE/BCE/FMI

Le Pasok qui recueillait 43,92 % des suffrages en 2009 n’en obtient plus que 13,67 % en 2012. Il perd 30, 25 % de ses voix. Il ne détient plus que 41 sièges au Parlement, au lieu de 160. Une déroute complète.
La Nouvelle Démocratie (droite) qui atteignait 33,48 % des suffrages en 2009, plafonne à 18,87 % en 2012. Elle perd 14,51 % de ses voix. Une déroute limitée par l’attribution de 50 sièges supplémentaires au Parlement grec au parti arrivé en tête.
Les partis favorables au « mémorandum » signé avec la troïka par ne recueillent plus que 32,54 % des voix en 2012. Ces deux partis représentaient 77,4 % des voix en 2009. Une perte totale de 45 %.
Malgré la prime de 50 sièges supplémentaires, la Nouvelle Démocratie et la PASOK ne disposent que de 149 sièges au Parlement. Or, le Parlement compte 300 députés et il faut 151 députés pour obtenir la majorité. Il manque donc deux sièges aux deux partis favorables au mémorandum pour atteindre la majorité des députés (151 sur un total de 300).
La Grèce paraît être aujourd’hui un pays « ingouvernable », ce qui affole la Finance, les banques et les marchés boursiers.

Troisième élément : la montée de SYRIZA

Syriza est un parti à la gauche du Pasok qui s’oppose à la signature du mémorandum et veut qu’une partie de la dette grecque soit annulée. En 2009, il atteignait 4,60 % des voix. En 2012, 16,77 %. Il devient le 2e parti et gagne 12,17 % de voix.
Syriza est un parti proche du Front de Gauche Français, à une différence près, essentielle en l’occurrence : le parti communiste grec, le KKE n’en fait pas partie. Les conséquences de cette absence du KKE ne sont pas sans importance.
Le total des voix de Syriza et du KKE (8,67 %) atteint 25,44 % des suffrages et 78 sièges. S’ils avaient présenté une formation commune, elle aurait été la première formation grecque (loin devant Nouvelle Démocratie) et aurait obtenu la prime de 50 sièges supplémentaires réservée à la formation arrivée en tête.
Avec 128 sièges, ils n’auraient pas atteint la majorité, mais ils auraient pu passer un accord avec la Gauche démocratique (19 sièges) qui veut renégocier le mémorandum et, peut-être, réussi à faire bouger les députés du Pasok qui doivent sans doute commencer à comprendre combien leur orientation est suicidaire, pour eux-mêmes, leur parti, la gauche grecque et même la démocratie grecque. 

 

Partis représentés au Parlement            % de voix          Nombre de sièges   

  

Aube dorée                                                 6,97 %                             21   
Grecs indépendants                                   10,60 %                             33   

Nouvelle Démocratie                                  18,87 %                             58 + 50 (prime) = 108    
Pasok                                                       13,19 %                             41   
Gauche démocratique                                  6,10 %                             19   

Syriza                                                       16,76 %                             52   

KKE                                                           8,47 %                             26  

 

Le prix payé par le Pasok s’ajoute aux prix payés par les socialistes espagnols et portugais. Qui trahit son peuple et capitule devant les exigences des intégristes néo-libéraux, qui accepte l’austérité imposée par les requins des marchés et des banques, est sanctionné par son peuple. 

 

Papandréou n’a pas envisagé de résister et de défendre son peuple, il a même essayé de « profiter » de la crise pour liquider nombre de droits sociaux, sans oser s’en prendre à l’oligarchie qui, elle, était coupable de tout ce qui arrivait. Il a connu une forte résistance dans le Pasok, mais celle-ci après avoir rassemblé jusqu’à 60 députés, s’est usé, puis divisée : lorsque Papandréou a annoncé le « referendum » qu’il avait promis, lorsque Sarkozy et Merkel ont imposé le 9° plan de destruction social de la Grèce, il n’y a eu que 21 députés Pasok qui ont résisté. Ils ont été exclus par Papandréou qui été écarté à son tour, par Papedemos, puis par Venizelos ! C’est une tragique déroute qui doit servir de leçon. Car cela arrivera inéluctablement à tout autre parti membre du Parti Socialiste Européen (PSE) qui prendra la même voie. À quoi ça sert d’être socialiste, de gauche, de gagner les élections, de promettre le changement si c’est pour exécuter les volontés de Merkel, de la BCE, du FMI ? 

 

Voilà la leçon grecque. Ce n’est pas la montée d’un groupuscule nazi délirant, mais la poussée à gauche qui est le fait marquant. 44,52 % des voix c’est le total des voix des partis qui se réclament de la gauche. Mais le Pasok qui n’a rien compris se propose d’essayer de gouverner… avec la droite et continuer la destruction sociale du pays aux ordres de la troïka. On a aussi un exemple d’une autre gauche qui pourrait diriger si elle s’unissait, car elle dispose de 31, 33 % des voix et serait de loin le principal parti. Le refus de l’austérité, le refus de capituler devant les requins des banques et des marchés, vont de pair avec l’exigence de l’unité de la gauche, là-bas comme partout en Europe.

 

Rappel : Mikis Theodorakis : appel à l'union du peuple grec contre l'austérité - 23 février 2012 

Moody's et la Grèce : une histoire datant de 1931 selon Xavier Tracol - 16 février 2012 

Chevènement : l'Allemagne ne joue pas son rôle, il faut refaire l'Europe - 30 avril 2010 

 

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23 février 2012 4 23 /02 /février /2012 23:58

Les peuples européens doivent rejeter cette politique

Le compositeur Grec Mikis Theodorakis, ancien résistant et héros de la lutte contre le régime des colonels, aujourd’hui âgé de 87 ans, lance un appel à l’opinion internationale.

« Un complot international est en cours, visant à mener à terme la destruction de mon pays. Les assaillants ont commencé en 1975, avec comme cible la culture grecque moderne, puis ils ont poursuivi la décomposition de notre histoire récente et de notre identité nationale et aujourd’hui ils essaient de nous exterminer physiquement par le chômage, la famine et la misère. Si le peuple grec ne se soulève pas pour les arrêter, le risque de disparition de la Grèce est bien réel. Je la vois arriver dans les dix prochaines années. Le seul élément qui va survivre de notre pays sera la mémoire de notre civilisation et de nos luttes pour la liberté. »

Contre-Info, le 22 février, a publié le texte du compositeur (extraits), daté du 12 février 2012 :

Notre pays s’enfonce dans les ténèbres du Moyen Âge, par Mikis Theodorakis

(…) L’année passée, M. Juncker a déclaré qu’il avait remarqué lui-même l’hémorragie financière massive de la Grèce qui était due aux dépenses excessives (et forcées) pour l’achat de matériel de guerre - de l’Allemagne et la France en particulier. Et il a conclu que ces vendeurs nous conduisaient à un désastre certain. Hélas, il a avoué qu’il n’a rien fait pour contrecarrer cela, afin de ne pas nuire aux intérêts des pays amis !

En 2008, la grande crise économique est arrivée en Europe. L’économie grecque n’a pas été épargnée. Cependant, le niveau de vie qui était jusque-là assez haut (la Grèce se classait parmi les 30 pays les plus riches du monde), est resté pratiquement inchangé, malgré une augmentation de la dette publique. La dette publique ne se traduit pas nécessairement par une crise économique. La dette des grands pays tels que les États-Unis et l’Allemagne sont estimées à des milliers de milliards d’euros. Les facteurs déterminants sont la croissance économique et la production. Si ces deux facteurs sont positifs, il est possible d’emprunter auprès des grandes banques à un taux d’intérêt inférieur à 5%, jusqu’à ce que la crise soit passée.

En 2009, (en novembre), au moment de l’arrivée de G. Papandréou au pouvoir, nous étions exactement dans cette position. Pour faire comprendre ce que le peuple grec pense aujourd’hui de sa politique désastreuse, je cite deux chiffres : aux élections de 2009 PASOK - le parti politique de G. Papandreou - a remporté 44% des voix. Aujourd’hui, les sondages ne lui donnent plus que 6%.

M. Papandréou aurait pu faire face à la crise économique (qui reflétait celle de l’Europe) avec des prêts de banques étrangères au taux habituel, c’est-à-dire inférieur à 5%. S’il l’avait fait, notre pays n’aurait pas eu de problème. Comme nous étions dans une phase de croissance économique, notre niveau de vie se serait amélioré.

Mais M. Papandréou avait déjà commencé sa conspiration contre le peuple grec en été 2009, lorsqu’il a rencontré secrètement M. Strauss-Kahn, dans le but de passer la Grèce sous la tutelle du FMI. Cette révélation a été divulguée par l’ancien président du FMI (…).

Ensuite, M. Papandréou et le ministre des finances ont mené une campagne de discrédit pendant 5 mois, au cours de laquelle ils ont essayé de persuader les étrangers que la Grèce est, comme le Titanic, en train de couler, que les Grecs sont corrompus, paresseux et donc incapables de faire face aux besoins du pays. Après chacune de leurs déclarations, les taux d’intérêt montaient, afin que la Grèce ne puisse plus faire des emprunts et afin de donner un caractère de sauvetage à notre adhésion au FMI et à la Banque Centrale Européenne. En réalité, c’était le début de notre fin.

En mai 2010, un ministre, celui des finances, a signé le fameux Mémorandum (Mnimònio, en grec), c’est-à-dire notre soumission à nos prêteurs. D’après le Droit grec, l’adoption d’un tel accord nécessite d’être mis aux voix et d’être approuvé par les trois cinquièmes des députés. Donc, le Mémorandum et la Troïka qui nous gouvernent, fonctionnent illégalement - non seulement par rapport au Droit grec, mais aussi au Droit européen (…).

La production a été freinée, le taux de chômage a grimpé à 18%, 80’000 magasins ont fermé, tout comme des milliers d’usines et des centaines d’artisanats. Un total de 432’000 entreprises ont déposé leur bilan. Des dizaines de milliers de jeunes scientifiques quittent notre pays qui s’enfonce de plus en plus dans les ténèbres du Moyen Age. Des milliers de personnes qui étaient aisés jusqu’à un temps récent, sont maintenant à la recherche de nourriture dans les ordures et dorment sur le trottoir.

Entre temps, nous sommes censés vivre grâce à la générosité de nos prêteurs d’argent, les banques européennes et le FMI. En fait, l’intégralité du paquet de dizaines de milliards d’euros versé pour la Grèce, retourne à son expéditeur, tandis que nous sommes de plus en plus endettés à cause des intérêts insupportables. Et parce qu’il est nécessaire de maintenir en fonction l’Etat, les hôpitaux et les écoles, la Troïka charge la classe moyenne et inférieure de notre société de taxes exorbitantes qui mènent directement à la famine. La dernière fois que nous avons vécu une situation de famine généralisée dans notre pays était au début de l’occupation allemande, en 1941, avec près de 300’000 morts en six mois seulement. De nos jours, le spectre de la famine revient dans notre pays infortuné et calomnié (…).

La seule force capable de faire ces changements révolutionnaires, c’est le peuple grec uni en un Front de Résistance et de Solidarité pour que la Troïka (FMI et banques européennes) soit chassée du pays. En parallèle, il faut considérer comme nuls tous ses actes illégaux (prêts, dettes, intérêts, impôts, achats de la richesse publique). Bien sûr, leurs partenaires grecs - qui ont déjà été condamnés dans l’esprit de notre peuple en tant que traîtres -, doivent être punis.

Je suis entièrement concentré sur ce but (l’Union du peuple en un Front) et je suis persuadé que nous l’atteindrons. Je me suis battu les armes à la main contre l’occupation hitlérienne. J’ai vu les cachots de la Gestapo. J’ai été condamné à mort par les Allemands et j’ai miraculeusement survécu. En 1967, j’ai fondé PAM (Patriotikò Mètopo - front patriotique), la première organisation de résistance contre la junte militaire. Je me suis battu dans la clandestinité. J’ai été arrêté et emprisonné dans « l’abattoir » de la police de la junte. Finalement, j’ai encore survécu.

Aujourd’hui, j’ai 87 ans, et il est très probable que je ne serai pas vivant le jour du sauvetage de ma patrie bien-aimée. Mais je vais mourir la conscience tranquille, parce que je continuerai jusqu’à la fin de faire mon Devoir envers les idéaux de Liberté et de Droit.

 

Voir aussi Moody's et la Grèce : une histoire datant de 1931 selon Xavier Tracol - 16 février 2012 

L’Europe en route vers la dépression, par John Weeks

 

Le Portugal est la prochaine Grèce, par Ed Harrison

 

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16 février 2012 4 16 /02 /février /2012 16:40

De la république au fascisme, après une dégradation

 

Parmi les documents distribués le 9 février à l’entrée de la salle du Vieux Château à Laval par les membres du CAC 53 (collectif 53 pour l’audit citoyen de la dette) - voir Lancement du collectif local pour un audit citoyen de la dette (CAC 53), 15 février 2012 - il y en avait un, tiré du magazine Histoire(s) de la Dernière Guerre n°16 – janvier/février 2012 : d’hier à aujourd’hui « Moody’s et la Grèce » (page 84), signé Xavier Tracol.

 

Voici ce texte qui est utile pour comprendre la situation actuelle de la Grèce.

 

« En rétrogradant son rating de 19 places en deux ans, passant de A1 (qualité moyenne supérieure) à Ca (en défaut, avec peu d’espoir de recouvrement), Moody’s a grandement influencé les marchés, faisant fuir les investisseurs d’un pays qui, de 2000 à 2007, avait pourtant une des économies les plus dynamiques de la zone euro, avec un taux de croissance de 4,2%. Il existe d’autres agences de notation financière dans ce cas (Standard & Poors, Fitch Ratings Ltd.), mais Moody’s a un lointain passif avec la Grèce, puisqu’elle fut en partie à l’origine de l’arrivée au pouvoir du dictateur Metaxas, qui règnera sur le pays de 1936 à 1941.

 

En 1929, la crise boursière Wall Street touche l’Europe avec plusieurs mois de décalage. Mais en 1931, la jeune république grecque doit mener une série de réformes économiques en diminuant le nombre de fonctionnaires et en augmentant ses investissements pour relancer la consommation. C’est une erreur pour Moody’s Corporation, une agence d’analyse financière fondée en 1909 et qui a popularisé les symboles de notation « triple A to C ».

 

Moody’s dégrade alors la note de la Grèce, ce qui va avoir pour conséquence une funeste réaction en chaîne : les taux d’intérêt grimpent, faisant fuir les capitaux ; la drachme est finalement dévaluée et la dette nationale explose ; les banques étrangères (en particulier italiennes) ne peuvent bientôt plus récupérer leurs investissements et, début mars 1932, le pays fait défaut. Pour la population, c’est le début d’une longue et forte inflation. Malgré tous ses efforts, le gouvernement d’Elefthérios Venizélos – héros national depuis la révolte de Thérissos en 1905 – ne peut juguler la crise et doit bientôt faire face à une multiplication des émeutes. Fragilisé, il perd les élections de 1932, qui voient réapparaître sur le devant de la scène les mouvements royalistes et nationalistes  qui, trois ans plus tard, restaurent la monarchie. Pas pour longtemps : face à la montée du communisme, le nouveau roi Georges ii soutient en effet le coup d’Etat de son propre ministre  de la Guerre, le général Ioannis Metaxas. Le 4 août 1936, ce dernier décrète l’état d’urgence et suspend le Parlement sine die.

 

Fondateur d’un petit mouvement d’extrême droite, le Parti de la libre opinion, Metaxas  va s’inspirer du régime fasciste de Mussolini pour consolider sa dictature : salut romain, instauration d’organisations de jeunesse, fascination pour l’antiquité, censure, interdiction de la grève, etc. Environ 15 000 opposants vont passer par ses geôles durant les cinq années que durera son régime !

 

En 1936, la responsabilité de Moody’s est évidente dans l’effondrement politique grec. Devant une telle mauvaise publicité, la société s’empresse d’exprimer ses regrets et annonce qu’elle ne notera plus désormais les dettes des Etats… C’est un peu tard : en 1940, en effet, les relations entre Rome et Athènes se tendent et Mussolini prétextera le remboursement des sommes perdues en 1932 par ses banques pour attaquer militairement la Grèce à partir de l’Albanie

 

Histoire(s) de la dernière guerre - n°16 - janv. / fév. 2012

 

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9 janvier 2012 1 09 /01 /janvier /2012 10:55

Poussée de la pauvreté et des inégalités en Allemagne

 

Manif-Antilles-Laval-003-T.jpgL’ancien professeur d’allemand du Lycée Ambroise Paré, à Laval, excelle dans la mise à disposition d’informations précises sur l’Allemagne.

Ce qu’il a voulu faire en créant ce site : Mes Allemagnes : présentation :

Depuis un demi-siècle (eh oui...), l'Allemagne est pour moi une passion. Une passion que j'ai essayé de faire partager à mes élèves au cours de ma vie professionnelle. Une passion qui remonte à l'époque où j'étais moi-même lycéen. Une passion que je dois à un enseignant exceptionnel, Monsieur Chabert, que j'ai eu la chance d'avoir comme professeur d'allemand pendant toute ma scolarité secondaire à Brest. C'était dans les années 1960.

A l'époque, dans ma famille, comme dans beaucoup de familles françaises, on associait encore le mot "Allemagne" et le mot "Occupation". Mais, bien qu'élevé dans l'admiration de la Résistance et la haine du nazisme, bien qu'horrifié par les récits sur la déportation, je tombai immédiatement amoureux de la langue allemande. Fils de militants communistes, je considérais cependant l'Allemagne de l'ouest avec une certaine méfiance. Elle m'apparaissait comme un pays encore entaché par le passé nazi et comme le fer de lance du camp capitaliste face à une autre Allemagne, la République démocratique allemande, incarnation de l'antifascisme et du socialisme en construction sur le sol allemand. Je tombai donc également amoureux de la RDA, symbole tout à la fois de la langue et de la culture allemandes et de mon idéal politique. Et pendant quelques années je considérai la RDA comme ma "seconde patrie"...

Dès le départ, il y eut donc pour moi au moins deux Allemagnes. Je découvris plus tard qu'il y avait d'autres Allemagnes encore : celle du Nord, celle du Sud, celle du Rhin, celle de la mer du Nord et celle de la Baltique, celles des différents dialectes, celle des interdictions professionnelles et celle des militants écologistes, celle de l'humanisme de Weimar et, tout à côté, celle de l'horreur absolue, à Buchenwald....

Ce site se propose de faire partager ma passion pour l'Allemagne, pour "mes" Allemagnes. Il sera mis à jour régulièrement. Chacun, germaniste confirmé(e) ou personne simplement intéressée par les réalités politiques, sociales, économiques, culturelles, linguistiques allemandes, devrait pouvoir y trouver quelque intérêt. Il ne vise ni à l'exhaustivité, ni à la froide objectivité : le "mes" est aussi la revendication d'une approche personnelle. On comprendra donc, après avoir lu ce qui précède, que la RDA et l'actuelle Allemagne de l'est y tiennent une place non négligeable, tant il est vrai que près de vingt ans après la "réunification", il existe de fait encore au moins deux Allemagnes...

 

Le 4 juillet 2010, j’avais évoqué ce site : Allemagne : sur son site, Jacques Omnès évoque la vie dans ce pays. C’était au moment de l’élection du président de la République fédérale.

 

Le président élu par les parlementaires allemands est dans une situation peu confortable ces temps-ci. Jacques explique pourquoi dans l’éditorial daté du 7 janvier 2012. Par ailleurs, la vision de l’Allemagne qui ressort de cet édito diffère de ce qu’on entend le plus souvent. Elle prend en compte la pauvreté et les inégalités sociales croissantes, l’évolution du pouvoir d’achat des salaires, qui n’ont rien d’enviable par rapport à ce que nous connaissons en France.

Mes Allemagnes

Le mois de janvier est traditionnellement le mois des voeux. L'occasion de souhaiter aux membres de la famille, aux amis, aux voisins, aux collègues une "bonne année", dont on espère qu'elle apportera à chacun la santé et une vie un peu plus heureuse. Une vie plus heureuse qui, depuis quelques mois, semble se confondre pour certains hommes politiques français avec le "modèle allemand", qui représenterait l'avenir radieux vers lequel devrait tendre notre pays. Il est donc opportun de rappeler quelques données de la situation économique, sociale et politique en Allemagne qui viennent à tout le moins nuancer ce tableau idyllique

Si l'on en croit les statistiques officielles, la situation de l'emploi en Allemagne devrait nous faire pâlir d'envie. Avec un taux moyen de 7,1 % en 2011, le taux de chômage allemand est à son plus bas niveau depuis 1990. Il s'établissait à 6,6 % en décembre dernier. Mais ces chiffres sont sujets à caution, car un artifice fait sortir de la statistique de nombreux chômeurs de plus de 58 ans. En fait 9 millions d'Allemands seraient des précaires.

En ce qui concerne le pouvoir d'achat des salaires, il n'aurait progressé que de 1,2 % entre 2008 et 2011 (3,7 % en France). Les salaires bruts réels, donc corrigés de l'inflation, ont connu au troisième trimestre 2011 leur plus faible hausse en glissement annuel depuis fin 2009. Entre le troisième trimestre 2010 et le troisième trimestre 2011, les salaires réels n'ont augmenté que de 0,6%. C'est le pourcentage le plus faible depuis le quatrième trimestre 2009. Et encore ne s'agit-il là que de moyennes. Les salaires réels ont baissé dans la fonction publique, mais aussi dans les banques, l'hôtellerie et le commerce. Sans oublier que 2,5 millions d'Allemands travaillent pour moins de 5 euros de l'heure !

En fait, on assiste depuis le début des années 2000 à une forte poussée de la pauvreté. Entre 2005 et 2010, le pourcentage de pauvres est passé de  12,2 % à 15,6 %. Et les inégalités se sont creusées : au cours de la même période, le ratio entre le revenu des 20 % les plus riches et celui des 20 % les plus pauvres est passé de 3,8 à 4,5. En 2010, 19,2 % des Berlinois étaient menacés de pauvreté contre 17 % en 2006. Fait plus grave encore : depuis 2001, les plus pauvres ont perdu 2 ans d'espérance de vie (75,5 ans contre 77,5, il y a dix ans).

Et, pendant ce temps, le président fédéral Christian Wulff s'accroche à son poste. Au moment où j'écris cet éditorial, il refuse de démissionner, malgré la sombre affaire de crédits un peu trop avantageux dont il a bénéficié, malgré ses mensonges, malgré ses tentatives d'intimidation à l'égard de la presse pour étouffer l'affaire. Et il a, à l'heure ou j'écris, le soutien de Mme Merkel. On le voit, l'appât du gain, le goût du luxe, l'exploitation de positions de pouvoir pour des intérêts personnels, ne sont pas le propre de certains membres de la classe politique française. Rien d'étonnant à cela. Car des deux côtés du Rhin, c'est le même système, qui, avec quelques nuances, domine, au profit d'une minorité, la vie politique, économique et sociale.
Si "convergence" il doit y avoir entre la France et l
'Allemagne, ce n'est pas sur ces bases qu'elle doit se réaliser mais, au contraire, en prenant en compte les intérêts de la masse de la population de nos deux pays, donc en combattant ensemble les inégalités et l'exploitation dont elles sont victimes. Alors seulement il pourra peut-être y avoir une vie plus heureuse pour nos deux peuples.

Cet article est le 47ème sur ce blog dans la catégorie Etats Union européenne

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27 mai 2011 5 27 /05 /mai /2011 22:52

Les causes de cette « révolution espagnole » (Enrique Dans)

 

Retour sur le mouvement social d’un type nouveau en Espagne (voir Espagne : le chômage massif incite les classes moyennes à s'organiser - 25 mai 2011). Je propose un article capté sur le site du Monde, concernant les « indignés de Murcie ». Notre commune jumelée avec Saint-Berthevin, Ceuti, est très proche de Murcia, d’où mon intérêt pour cet article. Un coup de cœur aussi pour les explications données par Enrique Dans sur ce qu’il appelle la « révolution espagnole ». Très intéressant.

 

Dans le sud de l'Espagne, avec les "indignés" de Murcie (Le Monde, Audrey Garric, 26 mai)

 

C'est devenu le rendez-vous incontournable de la journée. Chaque soir à 20 h 30, ils sont entre 500 et 600 à rejoindre la place de la mairie, dans le centre de Murcie, dans le sud-est de l'Espagne. Des jeunes, en majorité, mais aussi leurs parents et même leurs grands-parents. Ces "indignés", tel qu'ils se qualifient, tiennent leur assemblée générale sur le parvis, qu'ils ont rebaptisé, à l'instar de nombreuses autres villes espagnoles, "place de la Révolution du 15-Mai". Devant un écriteau indiquant "Le micro est ouvert", tous prennent la parole à tour de rôle pour argumenter, proposer, s'offusquer, s'inquiéter. Dix jours après le début du mouvement de contestation sociale qui a soulevé le pays, ils éprouvent plus que jamais la volonté de voir le projet de société qu'ils ont esquissé aboutir.

"Je suis payé 5 euros de l'heure, au noir, dans un restaurant, alors qu'au gouvernement régional certains se voient proposer des Mercedes comme voiture de fonction", lâche un jeune, révolté. "On n'est pas des hippies. Seulement des gens dignes qui demandent un travail et une justice juste", renchérit une quinquagénaire, suscitant l'enthousiasme et l'adhésion de la foule. Plus tard, c'est l'émotion qui gagne l'assistance lorsqu'un retraité prend la parole : "A l'époque de Franco, je me suis battu pour cette démocratie. Depuis, on l'a dénaturée. Il faut reprendre le combat et ne pas s'arrêter."

 

CENTRES COMMERCIAUX VIDES OU INACHEVÉS

Pendant trois heures, c'est un flot ininterrompu de doléances et propositions. Le besoin d'expression et d'écoute des habitants est évident. Il faut dire que Murcie, agglomération de quatre cent mille habitants et petite province engoncée entre Valence et l'Andalousie, dans un paysage aride et brûlant, possède le troisième taux de chômage d'Espagne, derrière les Canaries et l'Andalousie. Un quart de la population n'a pas de travail, dont un jeune sur deux.

Dans les années 1990, la ville, encore plus que le reste du pays, a appuyé son développement sur une construction immobilière effrénée pour répondre à des besoins touristiques croissants. Mais, en 2008, la crise économique s'abat sur l'Europe et stoppe net l'activité locale. Partout, ce sont des pavillons, des immeubles ou des centres commerciaux vides ou inachevés. Dans le même temps, de nombreux ouvriers du bâtiment, dont une partie de jeunes sans études, se retrouvent sans emploi ni salaire, et donc de quoi payer leur loyer. "On est alors arrivés à une situation extrême et absurde, avec des logements inoccupés par milliers et des milliers de gens hypothéqués, qui risquent à tout moment d'être expulsés de chez eux, finissant, pour certains, par se retrouver à la rue", explique José Torrico Munoz, avocat d'une soixantaine d'années.

 

DÉFIANCE DANS LES INSTITUTIONS

Depuis lors, cette population, désabusée, s'est contentée de se désoler du malheur qui la touche, y voyant comme une fatalité. "La jeunesse d'ici est pessimiste et apathique. Elle considère que les études ne servent à rien et montre un désintérêt profond pour tout ce qui touche de près ou de loin à la politique", livre Juan Cerrano, doctorant de 27 ans.

"Les gens pensent que les choses ne peuvent pas changer, confirme Jorge-Luis Diez Urrea, 32 ans, directeur d'une compagnie de théâtre au chômage. Le parti populaire remporte chaque élection depuis seize ans. Les politiciens sont corrompus, de la même façon que les syndicats, qui leur sont très liés. Même les médias sont partisans, sans compter qu'ils ne s'intéressent que très peu à notre région. On est habitués à ne pas être représentés ni entendus."

 

Lorsque les premières manifestations ont débuté à Madrid, puis dans toutes les grandes villes du pays, le 15 mai, les Murciens se sont alors immédiatement saisis de l'occasion pour organiser leur propre mobilisation et s'exprimer, pour beaucoup d'entre eux, pour la première fois. "Mes parents préféreraient me savoir à la fac, mais moi, je ne veux rater cet élan de solidarité pour rien au monde. J'apprends bien plus ici, témoigne Margarita Carrillon Leon, 23 ans, étudiante en psychologie et philosophie. Je n'avais jamais vécu un tel mouvement intergénérationnel, une telle révolution. C'est notre Mai-68 à nous !"

 

"DÉMOCRATIE DIRECTE"

Aux Espagnols les plus vieux, qui qualifient cette "génération perdue" de "ni-ni", pour "ni études ni travail", les jeunes ajoutent maintenant un troisième "ni" : "ni peur". "Je ne pense pas que le mouvement me permettra de trouver du travail, mais il me redonne de l'espoir, l'envie de me battre", assure Andres, 26 ans, acteur. Comme beaucoup de parents, Maribel Bernarbeu, professeur de 51 ans, se dit "fière d'eux", "depuis le temps qu'elle attendait de les voir prendre leur destin en main, se battre pour leurs idéaux". "Maintenant, il faut néanmoins encore canaliser le mouvement, passer de la théorie aux actions concrètes", prévient-elle.

 

A Murcie, comme dans les autres villes, le mouvement des insurgés est structuré en commissions qui se créent au fur et à mesure des besoins : action, débats, conflits juridiques, logistique, cuisine ou encore hygiène. Dans chacune d'elles, les projets ne manquent pas. Alors que certains prennent possession, de manière pacifique, de l'espace public pour sensibiliser les citoyens, d'autres luttent contre les expulsions, engagent des procédures. Un groupe d'ouvriers du bâtiment au chômage envisage aussi d'aider à la reconstruction de la ville voisine de Lorca, détruite par le séisme du 11 mai.

 

Si les campements ne devraient pas pouvoir passer l'été sur la place, en raison de la chaleur, le mouvement, soudé et réactif grâce aux réseaux sociaux, perdurera, les "insurgés" n'en doutent pas. "C'est la première fois qu'une mobilisation de cette ampleur existe en Espagne, qui ne soit ni organisée par les partis politiques ni par les syndicats, mais par la base. Les gens ont donc envie de faire des propositions, et tous ceux qui sont au chômage ont le temps de le faire, assure José-Luis. Par ailleurs, si le mouvement a profité de l'échéance des élections locales pour mobiliser, il se veut apolitique. Il a pour but de faire entendre notre malaise et faire avancer les choses." "A notre niveau, on recrée une démocratie directe, sur la place publique", se félicite Antonio Pujante, ingénieur de 44 ans au chômage.

 

Les Espagnols veulent une démocratie éthique, par Stéphane Pelletier (Le Monde, 27 mai)

 

Comprendre la révolution espagnole (Enrique Dans, Owni, 18 mai)

Alors que l'Espagne fait sa révolution sous nos yeux, Enrique Dans, professeur et blogueur reconnu, nous donne les clefs pour comprendre ce soulèvement massif du peuple espagnol. Enrique Dans est professeur des systèmes de l’information à la IE Business School et blogueur reconnu en Espagne. Il s’intéresse notamment aux effets des nouvelles technologies sur les populations et les entreprises. Dans ce billet publié sur son blog le 18 mai, il explique en sept points les causes de ce soulèvement.

Cet article est le 46ème sur ce blog dans la catégorie Etats Union européenne

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