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  • : Michel Sorin
  • : Le MRC 53 est la structure mayennaise du Mouvement Républicain et Citoyen, qui a pour but de rassembler la gauche républicaine à partir, notamment, des idées de Jean-Pierre Chevènement, l'un de ses fondateurs, qui n'est plus membre du MRC depuis 2015. Le MRC a pris le relais du Mouvement des Citoyens (MDC) après les élections de 2002. En 2022, le MRC est devenu membre de la Fédération de la Gauche Républicaine avec quatre autres organisations politiques.
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16 octobre 2013 3 16 /10 /octobre /2013 21:47

Dix séances pour connaître les perspectives de l’UE

L’Association familiale Loisirs et Culture (AFLEC) est parmi les principales associations de Saint Berthevin. Chaque année, elle propose une session de formation d’économie politique avec Philippe Barrieu (professeur d’économie dans un lycée de Laval).
En 2013-2014, les dix Conférences (le mercredi, de 19h à 21h, une semaine sur deux) sont centrées sur les perspectives de l’Union européenne. La participation demandée est 60 euros. 50 à 60 personnes sont inscrites.

 

La première séance a eu lieu le 9 octobre 2013 (le résumé est accessible sur le site - voir Conférence).

1 - Le fonctionnement de l’Union européenne issue du Traité de Lisbonne

Depuis le 1er décembre 2009, l’Union européenne est régie par le Traité de Lisbonne qui a profondément remanié le fonctionnement des institutions de l’Union européenne, et souvent dans un sens plus démocratique. Pour autant, ces institutions, leur composition et leurs fonctions, restent largement méconnues du public, ce qui ne contribue pas à rendre l’Union européenne populaire, alors que se profilent pour 2014 les élections au Parlement européen, élections qui risquent de se traduire par un taux d’abstention très important.

 

Introduction : la primauté du droit européen

I) Les institutions de l’Union européenne : présentation générale

1 Le Conseil européen

2 Le Conseil des ministres de l’Union européenne

3 Le Parlement européen

4 La Commission européenne

  II) La gouvernance européenne

1 La règle de l’unanimité et les clauses d’exception

2 De la majorité qualifiée à la double majorité

3 Les coopérations renforcées

 

Conclusion : l’arbitre des institutions : la Cour de justice de l’UE

 

Les autres conférences

 

2- L’Union européenne entre rigueur et austérité (23 octobre 2013)
A la suite de la crise financière de 2008 et de la crise des dettes souveraines qui lui a succédé, l’Union européenne a globalement opté pour une politique économique visant à réduire les dépenses publiques et à équilibrer les budgets nationaux, contribuant ainsi à sauver l’euro, mais contribuant également à ralentir la croissance et à augmenter le chômage. Cette rigueur, qui était sans doute nécessaire, ne risque-t-elle pas à se transformer en austérité perpétuelle ?

 

3 – L’Union européenne et la réforme de la Politique Agricole Commune (6 novembre 2013)

Suite à l’accord du 26 juin 2013, la réforme de la PAC va progressivement entrer en vigueur à partir du 1er janvier 2014, et en particulier les quotas laitiers vont disparaître en 2015. Quelles seront les conséquences de cette réforme pour l’agriculture française et ses agriculteurs, et quelles en seront les implications pour l’industrie agroalimentaire si importante pour la France, et pour la Mayenne ?

 

4 – L’Union européenne et la politique industrielle et d’innovation (20 novembre 2013)

L’union européenne semble aujourd’hui prise entre deux feux, entre d’un côté la puissance d’innovation des Etats-Unis et du Japon, et d’un autre côté la puissance productive de pays à bas salaires à l’image de la Chine. L’Union européenne doit donc essayer de réinventer sa politique industrielle, et c’est à partir de l’investissement dans l’innovation qu’elle y parviendra. Mais pour cela, encore faudrait-il une cohérence européenne dans ce domaine.

 

5 – L’Union européenne à la recherche de la croissance économique (4 décembre 2013)

Alors que les pays émergents, malgré leurs récentes difficultés, connaissent des taux de croissance entre 5 et 10 %, alors que les Etats-Unis semblent eux aussi retrouver le chemin de la croissance, alors que l’Afrique elle-même commence à s’éveiller, l’Union européenne et sa faible croissance, entre 0 % et tout juste 2 %, fait peine à voir et est souvent considérée comme « l’homme malade » de la croissance mondiale. Quelles sont les initiatives qui peuvent permettre à l’Union européenne de retrouver une croissance plus dynamique, seule capable de nous permettre de financer nos besoins sociaux ?

 

6 – L’Union européenne peut-elle contribuer à réduire les inégalités ? (18 décembre 2013)

Au sein de l’Union européenne, les inégalités sont multiples et profondes, que ce soit à l’intérieur des pays ou entre les pays : en moyenne, les luxembourgeois sont, par exemple, 14 fois plus riches que les bulgares ! Ceci est d’autant plus préoccupant que l’on a l’impression que chaque nouveau pays entrant dans l’Union européenne est plus pauvre que le pays précédent. Et les inégalités ne sont pas que monétaires. Quelles politiques l’Union européenne peut-elle mener pour limiter ces inégalités ?

 

7 – L’Union européenne et la promotion des femmes et des jeunes dans la vie active (15 janvier 2014)

Pratiquement 25 % des jeunes actifs de l’Union européenne de moins de 25 ans sont au chômage, avec un très fort contraste entre l’Allemagne (7,5 %) et la Grèce (62,5 %) [chiffres de février 2013]. Les femmes également, à un degré moindre, sont plus affectées par le chômage que les hommes, et leur taux d’activité reste significativement plus bas que celui des hommes. Comment doit faire l’Union européenne pour promouvoir l’insertion des jeunes et des femmes dans la vie active ?

 

8 – L’Union européenne et ses rapports avec les pays émergents (29 janvier 2014)

L’affaire des panneaux photovoltaïques a mis crûment en lumière l’ampleur des problèmes que peuvent poser certains pays émergents à l’Union européenne : au nom du libre-échange, doit-on accepter de laisser massacrer nos industries par des par des pratiques de dumping ? Mais, d’un autre côté, les pays émergents sont également des clients : doit-on menacer les intérêts d’Airbus pour sauver d’autres industries ? Ou ne vaut-il pas mieux essayer  de négocier des accords équilibrés ?

 

9 – L’Union européenne et ses rapports avec l’Afrique (12 février 2014)

Le temps de « l’afro-pessimisme » semble un peu révolu, et de larges zones de ce continent se développent, offrant des opportunités à l’Union européenne dont les rapports avec ce continent sont anciens. Mais l’Union européenne est confrontée à deux défis : d’une part le défi migratoire, tant l’écart de niveau de vie reste important entre les deux continents, et d’autre part l’appétit de nouveaux pays pour l’Afrique, la Chine en particulier qui cherche à la fois des débouchés et la sécurité de ses approvisionnements énergétiques.

 

10 – L’Union européenne et ses rapports avec l’autre Europe (26 février 2014)

Toute ‘Europe géographique ne fait pas partie de l’Union européenne, loin de là. Et en particulier, quelles relations doit-on avoir avec la Russie et l’ensemble de l’ancienne URSS ? L’Union européenne est largement dépendante en matière énergétique. Doit-elle essayer de s’affranchir de cette dépendance, doit-elle forger un nouveau partenariat économique, doit-elle résister aux dérives peu démocratiques de la Russie de M Poutine ? Doit-elle s’appuyer sur les pays du « partenariat oriental » et les convaincre de rejoindre l’Union européenne ?

 

 Cet article est le 131ème paru sur ce blog dans la catégorie France et Europe

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15 octobre 2013 2 15 /10 /octobre /2013 18:27

1914-2014 : deux mondialisations et le déclin de l’Europe

 

MRC national 002Demandez à votre libraire de vous mettre de côté le nouveau livre - mis en vente le 16 octobre - de Jean-Pierre Chevènement. Voir 1914-2014 : l'Europe sortie de l'histoire?

 

A l’occasion de la sortie du livre, Jean-Pierre Chevènement était l’invité de France Info, ce 15 octobre (Un monde d'idées, Olivier de Lagarde). Voir, sur son site, la vidéo et l’essentiel de l’entretien (verbatim express) :

 

"L'Euro arrive au bout de son système"

 

La 1ère guerre mondiale marque le début du déclin de l'Europe

La relation entre la Chine et les États-Unis au XXIe siècle

Quelle place pour l'Europe au XXIe siècle ?

Le second décrochage économique de la France

Une Europe économiciste, désarmée, parce que construite contre ses nations

Transformer l'euro en monnaie commune pour retrouver un meilleur équilibre entre la France et l'Allemagne

La responsabilité de nos élites

Une Europe adaptée aux défis du XXIe siècle

Les chances de l'Europe au XXIe siècle

Le pari sur la France au XXIe siècle

Voir aussi, sur le site de France Info :

Chevènement : "La France a sacrifié sa souveraineté pour construire l’Europe

 

Jean-Pierre Chevènement, ancien ministre et ancien candidat à la présidence de la République, publie 1914-2014, l'Europe sortie de l'Histoire ? (Fayard). Une question à laquelle il répond par l'affirmative et qu'il explique par le rapprochement de deux mondialisations, la première, avant 1914, sous égide britannique, et la seconde sous égide américaine.

Le propos de départ du livre de Jean-Pierre Chevènement est de démontrer que l'Europe a été progressivement sortie de l'Histoire, en rapprochant ce qu'il considère être les deux mondialisations, la première, avant 1914, sous égide britannique, et la seconde sous égide américaine. "Je pense qu'il y a intérêt à une vue longue et large. Il faut regarder les continuités plutôt que les ruptures" explique l'ancien ministre. 

Pour Jean-Pierre Chevènement, président d'honneur du MRC, la brutale accélération du déclin de l'Europe ne tient pas seulement aux deux conflits mondiaux. Elle résulte aussi et surtout de la diabolisation de ses nations. "La France a accepté de sacrifier sa souveraineté pour construire une Europe qui au départ était une petite Europe qu'elle pouvait se flatter de dominer. Aujourd'hui, c'est une Europe élargie, avec une Allemagne réunifiée, bâtie sur l'idée que c'est sur le marché qu'on allait faire l'Europe."

On peut prédire, sans risque de se tromper, que la commémoration, en 2014, du déclenchement de la Première Guerre mondiale sera instrumentée à des fins politiques, juge Jean-Pierre Chevènement. Au nom du "Plus jamais ça !", il s'agira, pour les classes dirigeantes, de justifier la mise en congé de la démocratie en Europe au prétexte, de sauver celle-ci de ses démons. Une démarche qui indigne Jean-Pierre Chevènement.

Afin de ne pas être marginalisée dans la nouvelle bipolarité du monde qui s'esquisse entre la Chine et l'Amérique, écrit Jean-Pierre Chevènement, l'Europe a besoin de retrouver confiance dans ses nations pour renouer avec la démocratie et redevenir ainsi actrice de son destin.

 

Sur son blog, on peut lire la Présentation du livre par Jean-Pierre Chevènement

 

Voir aussi 1914-2014 : l'Europe sortie de l'histoire, nouveau livre de Chevènement - 21 sept. 2013

Chevènement : plan du livre "1914-2014 : l'Europe sortie de l'histoire?" - 6 oct. 2013.

 

Cet article est le 174ème paru sur ce blog dans la catégorie CHEVENEMENT

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14 octobre 2013 1 14 /10 /octobre /2013 22:03

Vers la fin de l’Europe néolibérale et le début de quoi ?

 

La politique néolibérale menée au niveau européen, avec diffusion quasi obligatoire dans les Etats membres de l’Union, se heurte aux intérêts des peuples, ce qui ne l’empêche pas de continuer, en l’absence de politique alternative clairement affirmée.

 

Vers un changement d’époque ? C’est ce que pense Frédéric Lebaron alors que Bernard Cassen semble ne plus croire à la possibilité de survie de cette idée européenne « qui avait un réel potentiel progressiste ».  

Les deux auteurs ont, chacun, écrit un article publié le 30 septembre 2013 par Mémoire des luttes dont la belle devise est "Pour nos combats de demain, pour un monde plus libre, plus juste, plus égalitaire, plus fraternel et solidaire, nous devons maintenir vivante la mémoire de nos luttes".

 

Pour Frédéric Lebaron, un changement se prépare, mais quel changement ?

 

L’impasse des fausses alternances entre néolibéraux de gauche et de droite

 

(…) Pourtant, plusieurs signes laissent entrevoir la fin d’un cycle politico-économique déjà bien long. Le premier élément, lié aux conséquences de la crise économique mondiale en Europe, tient au changement de climat idéologique. Pendant les années 1980 et 1990, et pour une partie de l’opinion, le projet européen est encore un projet politique mobilisateur et intégrateur. Il est fondé sur des espoirs de progrès et de convergence des nations, avec l’horizon d’une « Europe sociale » qui combinerait au plus haut niveau performances économiques et solidarité sociale. En 2005, la victoire du « non » au référendum sur le Traité constitutionnel européen (TCE) montre que les limites de l’utopie sont déjà atteintes.

Huit ans plus tard, après l’intensification de la crise de la dette publique et l’accélération de la dynamique de mise en concurrence au sein de l’Europe, l’utopie est en cours d’inversion : nombre de citoyens constatent que la construction européenne sous hégémonie néolibérale n’a pas apporté le surcroît de bien-être collectif annoncé ; la monnaie unique s’est traduite par des contre-performances macroéconomiques et sociales de plus en plus contraires aux promesses initiales ; aucun processus de convergence entre pays et régions ne semble en cours ; au contraire, les divisions s’accentuent entre les différentes zones de l’Union européenne (UE) et donnent même lieu à des tensions entre Nord et Sud, Ouest et Est, etc. L’alliance entre droite et social-démocratie à l’échelle européenne, incarnée notamment par la convergence idéologique française, les « grandes coalitions » allemandes et la cogestion du Parlement européen, n’offre aucune perspective d’amélioration à court terme. La perte de crédit de la construction européenne devient un élément clé de l’horizon politique (…).

Le « déclin » européen s’exprime non seulement par de faibles performances macroéconomiques depuis trente ans, qui contrastent singulièrement avec les « miracles » de l’après-deuxième guerre mondiale, mais aussi par une soumission (politique et culturelle) accrue aux Etats-Unis, et par une perte de sens des objectifs mêmes des politiques économiques et sociales en Europe. Les obsessions de la « compétitivité » (à l’intérieur et à l’extérieur), de la concurrence sans limite et de l’insertion concurrentielle dans la finance et l’économie mondialisées se sont substituées au projet d’une société nouvelle avec un Etat social développé et efficace.

L’incapacité de l’Europe à exister politiquement dans les arènes internationales, manifeste récemment lors de la crise syrienne, est un autre signe qui révèle de façon larvée l’échec d’un projet politique qui s’est adossé au capitalisme financier et n’a pas su aller au-delà de la poursuite, de plus en plus incertaine et impuissante, du destin impérial des Etats occidentaux. Or, la financiarisation a profondément dégradé l’esprit public et a contribué au développement d’une sphère spéculative et rentière, pathologiquement instable, qui fragilise les « vieilles puissances » en les rendant de moins en moins capables d’investir dans l’avenir.

Mais le signe le plus patent d’un changement possible est peut-être, tout simplement, que les « vieilles solutions » ne marchent plus ou du moins semblent grippées. Les dirigeants socialistes français, derrière François Hollande, pensent sans doute que l’éternel retour électoral les favorisera à nouveau un jour, pour peu qu’ils suivent calmement la pente qu’ils ont choisie, celle d’un néolibéralisme modéré, socialement corrigé. Les dirigeants de l’opposition pensent, quant à eux, mobiliser largement autour du « ras-le-bol fiscal » lors des prochaines échéances, et profiter ainsi de la radicalisation extrême de l’électorat et des militants en avançant une nouvelle fois, trente ans après les émules de Friedman, la « solution libérale » qu’ils ont déjà testée à de nombreuses reprises.

Dans les périodes de crise, les choix passifs et adaptifs dictés par le passé deviennent moins efficaces. Alors qu’ils sont censés favoriser le consensus, ils tendent même à accentuer les dissensions politiques. C’est le cas aujourd’hui de façon évidente au sein du PS et de ses actuels ou anciens alliés (Verts, PCF) : le sentiment d’un changement d’époque pousse à l’expression croissante de désaccords multiples, ce qui conduit l’espace politique à une forme de dislocation ou de fragmentation de plus en plus caractérisée.

A droite, la pression exercée par le Front National se traduit par des évolutions de plus en plus chaotiques, les plus « modérés » en apparence (comme l’ancien séguiniste François Fillon) devenant les plus « audacieux » dans les ruptures avec les « tabous ». Le déplacement du débat public vers l’extrême-droite, qui n’a cessé de s’accentuer depuis trente ans, produit ainsi des effets dans tout le champ politique, et bien sûr au sein du gouvernement socialiste, avec un ministre de l’intérieur largement converti à la rhétorique sarkozienne. L’éclatement idéologique ne cesse ainsi de s’accentuer de part et d’autre.

Chacun sent obscurément qu’il se passe quelque chose, mais il est bien difficile de comprendre les processus d’un changement d’autant plus opaque qu’il n’est pas clairement conscient dans les cerveaux de ses acteurs. Cette dynamique apparemment chaotique correspond bien aux traits de ce que l’on appelle une période de transition ou encore… un changement d’époque.

 

Pour Bernard Cassen, l’Europe actuelle ne peut survivre

 

Peut-on être encore « européens » ?

 

Dans les maisons d’édition, le constat est unanime : les livres sur l’Europe se vendent mal. Ce phénomène n’est pas nouveau, mais ses causes ont sans doute évolué au fil des années. Pendant quelques décennies, la construction européenne est apparue comme un dispositif lointain, que la masse des citoyens – quand elle était consciente de son existence – regardait de l’extérieur. Le sujet n’intéressait vraiment que les dirigeants politiques et administratifs, les industriels et les financiers, et certains universitaires dont les travaux – dès lors qu’ils restaient dans les limites de l’orthodoxie – étaient généreusement subventionnés par la Commission européenne. Le seul secteur d’activité dont pratiquement tous les membres étaient familiers des institutions de Bruxelles était celui de l’agriculture en raison de la mise en place, dans les années 1960, d’une politique agricole commune.

C’est seulement à partir du traité de Maastricht (1992) que les opinions ont commencé à prendre conscience d’une évidence : dans les domaines les plus importants, les politiques nationales ne sont rien d’autre que la déclinaison locale de politiques décidées au niveau européen par les gouvernements à partir des propositions de la Commission – institution n’ayant de comptes à rendre à personne –, et toujours dans une logique ultralibérale. La création de l’euro, sous la férule d’une Banque centrale européenne (BCE) indépendante, en a été la disposition la plus emblématique.

Une douzaine d’années plus tard, les débats autour du traité constitutionnel européen (2005) ont permis à un nombre croissant de citoyens de s’approprier encore davantage la question européenne. Et ils n’ont pas aimé ce qu’ils avaient ainsi appris à connaître… L’atteste, entre autres éléments d’appréciation, la victoire du « non » aux référendums français et néerlandais. Longtemps « objet politique non identifié » – pour reprendre la formule de Jacques Delors –, l’Europe s’est peu à peu installée dans les esprits non seulement comme un acteur central, mais surtout comme un acteur hostile aux aspirations populaires, suscitant en retour un rejet croissant.

Au cours des cinq dernières années, la gestion de la crise financière par les institutions et les gouvernements européens n’a fait qu’exacerber ce rejet. Le sauvetage des banques et de l’euro, avec la conversion massive des dettes privées en dettes publiques à la charge des contribuables, sont apparues comme leurs seuls objectifs, quel qu’en soit le prix social à payer, surtout dans les pays du Sud : explosion du chômage, baisse des salaires et des retraites, démantèlement de la protection sociale et des systèmes de santé, licenciements de fonctionnaires, privatisations des biens publics, etc.

Le prix démocratique n’a pas été moins élevé. En témoignent notamment, d’un côté, la création d’une nouvelle police européenne, la troïka (Commission, BCE, FMI) qui dicte déjà sa loi à une demi-douzaine d’Etats relégués au statut de républiques bananières, et, d’un autre côté, les pouvoirs exorbitants de censure des budgets nationaux confiés à la Commission par des gouvernements de droite ou prétendument « de gauche », comme celui de François Hollande. Parler aujourd’hui de souveraineté des peuples et de leurs élus au sein de l’Union européenne relève de la plaisanterie.

Alors, face à ce naufrage, comment rester encore « européens » ? L’extrême-droite, en ascension fulgurante dans plusieurs pays, a choisi de ne plus l’être du tout. Mais faute de remettre en cause les fondements de l’Europe réellement existante, les partis de l’arc démocratique, et en premier lieu ceux se réclamant de la gauche, auront, plus encore, contribué à enterrer une idée qui avait un réel potentiel progressiste.

 

Voir aussi : Bernard Cassen : la France peut construire un autre modèle européen - 10 oct. 2012 

 

Et, rappel : Le projet du MRC pour une autre Europe : réorienter ou tout changer - 7 août 2013 

Cet article est le 130ème paru sur ce blog dans la catégorie France et Europe

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13 octobre 2013 7 13 /10 /octobre /2013 15:32

Rechercher une solution politique à la guerre civile

L’action de la diplomatie française a été commentée par Julien Landfried, lors de la table ronde intitulée « Les leçons de la crise syrienne » pendant l’université de rentrée de « Maintenant la gauche », sensibilité de gauche, minoritaire au sein du Parti socialiste (Emmanuel Maurel, Jérôme Guedj, Marie-Noëlle Lienemann), le 12 octobre 2013.

 

Université d'été MRC 2011 004 TSyrie et Proche-Orient : pour une diplomatie d’équilibre de la France

(…) Que faut-il penser de l’action diplomatique de la France concernant le dossier syrien et plus particulièrement des orientations consécutives à l’attaque chimique d’un quartier de la banlieue de Damas le 21 août dernier, action commise selon une majorité d’observateurs par le régime syrien ?

1. La politique de « regime change »

Après l’élection à la présidence de la République de François Hollande, le gouvernement français n’a pas remis en cause la décision du Quai d’Orsay, alors dirigé par Alain Juppé, de fermer l’ambassade de France à Damas en mars 2012. Cette continuité ne pouvait être interprétée par les acteurs locaux et la Russie que comme un signe que la priorité de la France était de faire tomber, à terme, le régime de Bachar el-Assad. Cette politique de regime change (changement de régime), déjà mise en œuvre en Libye contre Kadhafi, est clairement d’inspiration néo-conservatrice, et traduit l’existence au plus haut niveau de la diplomatie française, d’un courant d’opinion que l’on pourrait, avec Jean-Pierre Chevènement, qualifier d’« occidentaliste ». C’est ce courant qui s’est opposé avec véhémence au refus de l’intervention en Irak de Jacques Chirac, et qui a puissamment œuvré à l’élection de Nicolas Sarkozy en 2007 puis à sa politique étrangère, même si celle-ci était par certains aspects profondément erratique. Il est pour le moins inquiétant que ce courant ait « résisté » à l’alternance politique en France.

 

2. L’opposition syrienne : faut-il armer les rebelles dit « modérés » ?

Si la France a reconnu très tôt le Conseil national syrien (le 10 octobre 2011), qui affirme représenter les différentes tendances de l’opposition nationale syrienne, force est de constater que près de deux ans plus tard, les éléments non islamistes des rebelles armés semblent marginalisés sur le terrain par des éléments radicaux ou djihadistes, souvent d’origine étrangère. Distinguer parmi les rebelles ceux qui sont modérés des extrémistes liés à Al Quaida est-il possible compte tenu de la fragilité de la situation sur le terrain et de la dégradation des conditions de vie des combattants et des populations civiles qui rendent les frontières floues et particulièrement sensibles aux arguments financiers ?
Le précédent de l’intervention en Libye devrait mettre en garde la France contre la tentation naïve de croire armer tel groupe plutôt que tel autre. L’exportation du djihadisme de la Libye vers le Mali n’est-il pas en bonne partie la conséquence d’une intervention franco-anglaise mal pensée et sous-estimant l’importance du « jour d’après » l’intervention militaire et la mort de Kadhafi ? Aussi,
les parlementaires du Mouvement Républicain et Citoyen ont-ils mis en garde le gouvernement en mars dernier contre une politique de livraison d’armes, qui est en réalité, incontrôlée dans son principe même.

 

3. Droit d’ingérence et droit international

Le droit d’ingérence, tel qu’il a été pensé et popularisé à partir des années 1980, masque souvent, derrière une conception extensive d’une diplomatie des droits de l’homme des objectifs politiques plus ambigus. Or, pour reprendre à nouveau les mots de Jean-Pierre Chevènement, on n’a jamais vu les faibles s’ingérer dans les affaires des forts. Si bien que le droit d’ingérence est toujours le fait d’une puissance régionale ou mondiale.
La France, qui est intervenue au Mali dans le strict respect de la légalité internationale, n’avait rien à gagner à intervenir militairement en Syrie, avec ou sans les Etats-Unis, dans le non respect du droit international. Dans un monde marqué par le développement des pays émergents et par l’existence d’antagonismes militaires bien réels, le rôle d’un pays comme la France, puissance militaire membre du Conseil de sécurité des Nations Unies, est de s’appuyer sur le droit international. La France est pacifique, mais n’est pas pacifiste. Elle ne doit pas s’interdire d’user de la force si le Conseil de sécurité lui en donne mandat. Mais elle n’a pas vocation à conduire des expéditions militaires unilatérales quand ses intérêts vitaux ne sont pas en jeu.
Dans le cas syrien, quels étaient les buts de guerre ? Infliger une punition à un dictateur sanguinaire ? Mais on sort là du cadre des affaires étrangères et du droit, pour rentrer dans celui de la morale.

 

4. Quel politique avec la Russie ?

La Russie a proposé, par l’intermédiaire de son ministre des affaires étrangères Sergeï Lavrov, un plan pour contrôler les armes chimiques syriennes, que les Etats-Unis ont, finalement, accepté. Cette initiative diplomatique a été prise sans que la France y soit associée. C’est le signe d’un échec de la diplomatie agressive qui a culminé pendant une dizaine de jours en septembre 2013.
La Russie est une grande puissance, et défend ses intérêts au Proche-Orient. C’est par un dialogue diplomatique ferme que l’on pourra faire avancer avec elle une solution politique négociée à la guerre civile qui fait actuellement rage en Syrie. Cette solution impliquant toutes les parties prenantes, ne peut se négocier que dans le cadre du Conseil de sécurité des Nations Unies. Croire trouver une solution en Syrie sans la Russie ou contre la Russie est tout simplement absurde, et relève soit de l’idéologie, soit d’une méconnaissance des équilibres régionaux.


5. Ne pas gâcher le gain politique de l’action au Mali, revenir à une diplomatie autonome

L’action résolue du président de la République au Mali a permis une stabilisation de la situation sur place et a évité une prise du contrôle du pays par des islamistes radicaux. Le crédit que la France a gagné grâce à cette intervention a été pour une large part perdu par son aventurisme momentané en Syrie. Bien que s’étant auto-promue « plus ancienne alliée des Etats-Unis », la France a dû assister impuissante à l’exercice de realpolitik du président Obama qui a accepté la proposition russe de contrôle des armes chimiques syriennes sans associer la France à sa démarche.
Quelle leçon en tirer ? En substance, que la « communauté internationale » n’existe pas. Il y a des Etats qui défendent leurs intérêts économiques et géopolitiques. D’où l’impérieuse nécessité d’une compréhension correcte des rapports de forces entre puissances et d’une vision stratégique qui permette de penser au « coup d’après » (cf. le colloque du 22 mars 2010 de la Fondation Res Publica,
« La France et ses stratèges » ).
C’est sans doute la leçon tirée par le président Hollande, à en juger par sa poignée de mains avec le nouveau président iranien Hassan Rohani le 24 septembre dernier. Il faut espérer que cette ligne « réaliste » soit réaffirmée et affermie dans les semaines et les mois à venir. C’est en recherchant une solution politique à la guerre civile syrienne que la France fera le meilleur usage de sa force
.

 

Voir aussi : Syrie: des armes, et après ? (Marie-Françoise Bechtel, MRC, 15 mars 2013)

Dialoguer avec l’Iran est de l’intérêt de tous (Marie-Françoise Bechtel, MRC, 24 septembre 2013)

 

Rappel : Syrie : différents enjeux et conflits rendent plus incertaines les solutions - 26 juillet 2012 (blog MRC 53) 

 

Cet article est le 33ème paru sur ce blog dans la catégorie Proche Moyen Orient.

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13 octobre 2013 7 13 /10 /octobre /2013 10:54

Revaloriser la dimension civique de cette journée

 

Comme me l’a signalé Serge Maupouet, le Haut conseil à l’intégration (voir le site) publiait, en septembre 2009, un rapport en deux volets, dont l’un était un avis relatif à "la connaissance des valeurs de la République". Voir Etudes et intégration - Faire connaître les valeurs de la République (La documentation française).

L’article 2 de la Constitution définit les attributs de la souveraineté républicaine : « La langue de la République est le français. L’emblème national est le drapeau tricolore, bleu, blanc, rouge. L’hymne national est La Marseillaise. La devise de la République est Liberté, Égalité, Fraternité. Son principe est : gouvernement du peuple, par le peuple et pour le peuple. ». Mais, d’autres symboles non inscrits dans le marbre constitutionnel incarnent également la République (…).

 

Après l’extrait concernant la laïcité (voir Intégration : connaître les valeurs de la République, notamment la laïcité - 9 octobre 2013), puis celui traitant de Marianne (voir Un symbole républicain : Marianne, figure allégorique de la République - 11 octobre 2013), de la Marseillaise (voir La Marseillaise, chant national patriotique, subit parfois des outrages - 11 octobre 2013), du drapeau national (voir Le drapeau tricolore, emblème national, l'un des symboles républicains - 12 octobre 2013) et de la devise (voir Liberté, égalité, fraternité : la devise de la République, idéal universel - 12 octobre 2013), voici l’extrait concernant la fête nationale.

 

Une fête nationale : le 14 juillet*

 

Il ne s’agit pas ici de revenir sur le déroulement de la journée révolutionnaire sur laquelle l’historiographie est imposante. On sait que c’est davantage le sens symbolique de la journée qui a compté a posteriori que l’importance politique de ce qui s’est joué avec la prise de la Bastille. Elle incarne la liberté et la lutte contre toutes les formes d’oppression et d’arbitraire. Mais le grand public continue d’ignorer que c’est davantage le 14 juillet 1790, à savoir la fête de la fédération, qui est célébrée. Commémorant le premier anniversaire de la prise de la Bastille, le Champ de Mars rassemblait le peuple, l’Assemblée et le roi réconciliés. Une messe avait été célébrée par Mg Charles-Maurice de Talleyrand sur l’autel de la patrie. La nation souveraine qui est au coeur de la démocratie républicaine prend donc naissance le 14 juillet 1790 et non 1789. Il est regrettable que le grand public ne soit pas mieux informé de cette distinction. Il est d’ailleurs observé que la Formation civique de l’OFII donnée aux étrangers ne retient que la date de 1789 et n’indique pas que le 14 juillet est devenue officiellement fête nationale le 6 juillet 1880 (sur une proposition de loi de Benjamin Raspail).

 

Le programme du premier 14 juillet officiel montre bien la volonté des parlementaires de l’époque de faire de cette fête un moment d’unité nationale autour de la République : « Distribution de secours aux indigents. Grands concerts au jardin des Tuileries et au jardin du Luxembourg. Décorations de certaines places, notamment de la place de la Bastille et de la place Denfert où l’on verra le fameux Lion de Belfort qui figurait au Salon de cette année, monument élevé au colonel Denfert-Rochereau, de glorieuse mémoire – illuminations, feux d’artifices – ajoutons les fêtes locales, comprenant des décorations, des trophées, des arcs de triomphe et le tout organisé par les soins des municipalités de chaque arrondissement avec le concours des habitants.

Deux cérémonies importantes doivent dominer toute la fête : la distribution des nouveaux drapeaux à l’armée et l’inauguration, sur l’ancienne place du Château d’eau, du monument surmonté de la figure de la République, monument qui a fait l’objet d’un concours ouvert l’année dernière par la Ville de Paris ».

Le 14 juillet tend à se résumer aujourd’hui, dans l’esprit des Français et des étrangers, au défilé militaire sur les Champs Élysée (depuis 1915) et aux bals populaires ponctués de feux d’artifice.

 

Le Haut Conseil estime que la dimension festive a peut-être trop pris le pas sur la dimension civique de la fête nationale. Le 14 juillet est aussi un moment politique pendant lequel tous les habitants du pays peuvent ressentir leur appartenance à la Nation, qu’ils en aient d’ailleurs ou non acquis la nationalité. C’est pourquoi le Haut Conseil souhaite que les élus locaux s’expriment solennellement avant les festivités auxquelles seraient officiellement conviés les nouveaux arrivants dans la commune, qu’ils soient Français ou étrangers.

 

Rappel : 14 juillet, fête nationale de la République française depuis 1880 - 14 juillet 2008

 Ce 14 juillet, la France fête la Nation, l'Europe se réunit à Strasbourg - 14 juillet 2009 

 14 juillet : en ces temps perturbés, une seule règle d'or, la République ! - 14 juillet 2011 

 

Cet article est le 65ème paru sur ce blog dans la catégorie République Parlement

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12 octobre 2013 6 12 /10 /octobre /2013 17:34

Des mots qui aident à lutter pour les droits fondamentaux

 

Comme me l’a signalé Serge Maupouet, le Haut conseil à l’intégration (voir le site) publiait, en septembre 2009, un rapport en deux volets, dont l’un était un avis relatif à "la connaissance des valeurs de la République". Voir Etudes et intégration - Faire connaître les valeurs de la République (La documentation française).

L’article 2 de la Constitution définit les attributs de la souveraineté républicaine : « La langue de la République est le français. L’emblème national est le drapeau tricolore, bleu, blanc, rouge. L’hymne national est La Marseillaise. La devise de la République est Liberté, Égalité, Fraternité. Son principe est : gouvernement du peuple, par le peuple et pour le peuple. ». Mais, d’autres symboles non inscrits dans le marbre constitutionnel incarnent également la République (…).

 

Après l’extrait concernant la laïcité (voir Intégration : connaître les valeurs de la République, notamment la laïcité - 9 octobre 2013), puis celui traitant de Marianne (voir Un symbole républicain : Marianne, figure allégorique de la République - 11 octobre 2013), de la Marseillaise (voir La Marseillaise, chant national patriotique, subit parfois des outrages - 11 octobre 2013) et du drapeau national (voir Le drapeau tricolore, emblème national, l'un des symboles républicains - 12 octobre 2013), voici l’extrait concernant la devise de la République.

 

Une devise : Liberté, Égalité, Fraternité

 

Née avec la Révolution française, la devise apparaît dans le débat public le 5 décembre 1790 dans un discours du député Maximilien de Robespierre « sur l’organisation des gardes nationales ». Antoine-François Momoro, membre du club des Cordeliers, partisan de Jacques-René Hebert, l’emploie le 29 mai 1791 et la tradition républicaine lui en a accordé la paternité. En avril 1792, la devise est publiquement invoquée lors de la « fête de la liberté ». En juin 1793, le maire de la commune de Paris, Jean-Nicolas Pache, fait peindre sur les murs : « Liberté, Égalité, Fraternité, ou la mort ». La devise est ensuite progressivement abandonnée avec la fin de la Révolution, tandis que le serment de haine aux monarchistes et aux anarchistes vient remplacer le serment de fraternité sous le Directoire de 1796 à 1799.

 

Avec la révolution de 1830, la devise fait son retour et sera popularisée par différents révolutionnaires comme Pierre Leroux, Alexandre-Auguste Ledru-Rollin mais également l’abbé ultramontain Félicité-Robert de Lamennais. C’est le 27 février 1848, sous l’impulsion de Louis Blanc que le triptyque « Liberté, Égalité, Fraternité » devient la devise officielle de la France. Elle est officiellement un symbole républicain sous la IIIe République et prend tout son sens avec l’adoption du suffrage universel. En 1880, la devise est systématiquement inscrite sur les frontons des édifices publics.

 

Au cours de la Seconde Guerre mondiale, la devise républicaine fut remplacée par la devise de l’État français de Vichy « Travail, Famille, Patrie ». La France libre reprend la devise républicaine quand, le 15 novembre 1941, lorsque le général de Gaule déclare : « Nous disons Liberté-Égalité-Fraternité parce que notre volonté est de demeurer fidèles aux principes démocratiques que nos ancêtres ont tirés du génie de notre race et qui sont l’enjeu de cette guerre pour la vie et la mort. ». Néanmoins, avant ce discours, la formule officielle « Honneur et Patrie » avait été préférée en juillet 1940. Il s’agissait, selon le général de Gaulle, de tenir compte des réticences du peuple français à l’égard de la démocratie parlementaire incarnée par la devise : « Si nous proclamions simplement que nous nous battons pour la démocratie, nous obtiendrions peut-être des éloges du côté américain, mais nous perdrions beaucoup sur le tableau français qui est le principal. La masse française confond pour le moment le mot démocratie avec le régime parlementaire tel qu’il fonctionnait chez nous avant cette guerre. Nos propres partisans, quel que soit leur origine politique et surtout nos combattants, en sont convaincus dans l’immense majorité » (8 juillet 1941).

 

C’est avec la Constitution de 1946 que la devise républicaine reprend sa place comme symbole national. Au cours des dernières décennies, la devise a fait l’objet de critiques au nom du principe de réalité. Certains invoquent que l’égalité n’est pas réalisée en France comme en témoigne l’existence de discriminations sociales, territoriales, racistes. D’autres proposent de remplacer fraternité par solidarité, notion qui leur semble moins abstraite. Il faut ici rappeler qu’une devise résume un idéal. Ce n’est pas une formule vide que l’on utiliserait uniquement pour la communication politique. Les idéaux démocratiques rassemblés dans la devise fixent à notre société un objectif qui n’ignore pas l’existence d’inégalités. L’usage aujourd’hui généralisé de l’expression « l’égalité des chances » pour définir le principe d’égalité montre cette évolution. Certes, entre idéal et réalité, la disjonction peut être criante et douloureusement ressentie. À cet égard, les nouveaux immigrants sont particulièrement exposés dans la mesure où beaucoup ont construit leur départ sur le rêve, l’idéal, d’une vie meilleure dans un pays de liberté.

 

Le Haut Conseil juge important d’expliquer aux nouveaux immigrants, mais également à tous les jeunes Français, le sens des valeurs inscrites dans la devise, les remettre dans la perspective d’un idéal politique de dimension universelle tout en insistant sur ce que les mots de la devise ont représenté pour des générations d’hommes et de femmes qui se battaient pour leurs droits fondamentaux. Il est utile de mieux leur faire comprendre le sens de cet idéal et de son imparfaite réalisation en expliquant que les inégalités sociales et territoriales qui perdurent peuvent mettre à mal cet idéal (surtout dans un contexte de crise), mais qu’elles ne le détruisent pas puisque, par la volonté politique de ceux qui gouvernent au nom du peuple, on s’attache à les réduire. On pourra également rappeler que l’égalisation des situations est un processus toujours inachevé, mais que la mise en oeuvre de l’idéal social de notre démocratie est l’affaire de tous ceux qui disposent de droits et de devoirs : élus, citoyens électeurs, étrangers.

 

Cet article est le 64ème paru sur ce blog dans la catégorie République Parlement

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12 octobre 2013 6 12 /10 /octobre /2013 15:05

Trois bandes verticales bleu blanc rouge d’égale largeur

 

Comme me l’a signalé récemment Serge Maupouet, le Haut conseil à l’intégration (voir le site) publiait, en septembre 2009, un rapport en deux volets, dont l’un était un avis relatif à "la connaissance des valeurs de la République". Voir Etudes et intégration - Faire connaître les valeurs de la République (La documentation française).

L’article 2 de la Constitution définit les attributs de la souveraineté républicaine : « La langue de la République est le français. L’emblème national est le drapeau tricolore, bleu, blanc, rouge. L’hymne national est La Marseillaise. La devise de la République est Liberté, Égalité, Fraternité. Son principe est : gouvernement du peuple, par le peuple et pour le peuple. ». Mais, d’autres symboles non inscrits dans le marbre constitutionnel incarnent également la République (…).

 

Après l’extrait concernant la laïcité (voir Intégration : connaître les valeurs de la République, notamment la laïcité - 9 octobre 2013), puis celui traitant de Marianne (voir Un symbole républicain : Marianne, figure allégorique de la République - 11 octobre 2013) et de la Marseillaise (voir La Marseillaise, chant national patriotique, subit parfois des outrages - 11 octobre 2013), voici ce qui concerne le drapeau national.

 

Un emblème : le drapeau tricolore

 

Le drapeau tricolore reprend les trois couleurs utilisées déjà sous l’Ancien Régime depuis Henri IV, premier roi à associer les trois couleurs. Le format tricolore sera repris le 14 juillet 1789 comme couleurs de la liberté. Durant la Révolution, c’est d’abord à travers le signe d’appartenance militaire de la cocarde que naît le futur emblème de la Nation. D’abord en bleu et rouge, elle s’impose car elle reprenait les couleurs de la populaire garde municipale parisienne. C’est La Fayette qui introduisit le blanc, couleur de la monarchie mais aussi présente dans la cocarde des colons américains luttant pour leur indépendance. Le sens de l’association des trois couleurs après le 14 juillet 1789 reste aujourd’hui encore discuté. C’est le 24 octobre 1790 que la Constituante crée un étendard national unitaire. L’agencement en trois bandes verticales d’égale largeur n’est alors pas unifié dans les troupes françaises. On trouve, en effet, des pavillons tricolores comprenant des losanges, des carrés, des croix, des superpositions de couleurs.

 

C’est en 1804 que Napoléon uniformise les drapeaux des régiments. Le drapeau national n’existe pas encore officiellement, mais apparaît un pavillon officiel de la Nation en application du décret du 27 pluviôse an II (15 février 1794) qui déclare que « le pavillon national sera formé des trois couleurs nationales, disposées en bandes verticalement, de manière que le bleu soit attaché à la gaule du pavillon, le blanc au milieu et le rouge flottant dans les airs ». En 1812, une ordonnance impériale décrète que le pavillon de 1794 devient drapeau national et l’impose comme pavillon militaire unique.

 

Le drapeau tricolore est également visible sous la forme de blason (accompagné du sigle RF), de l’écharpe tricolore (que tous les élus ne portent pas systématiquement), de cocarde (armée, police), le ruban lors des inaugurations, enfin le logotype de la République française obligatoire sur tous les documents administratifs depuis 1999. Le grand public est également amené à se familiariser avec le drapeau tricolore lors d’évènements sportifs au cours desquels la France est engagée, ainsi la tenue de l’équipe de France de football fait référence au drapeau (maillot bleu, short blanc, chaussettes rouges).

 

Ainsi est soulignée l’importance de ce type de rassemblement populaire quant à la familiarisation aux symboles républicains, en particulier chez les plus jeunes. Le drapeau tricolore et La Marseillaise sont les deux symboles obligatoirement convoqués lors de ces évènements d’ampleur nationale ou internationale. Il est donc essentiel que les marques d’honneur qui leur sont faites soient collectives, partagées dans l’enthousiasme tout en demeurant empruntes d’une forme de solennité.

On a pu remarquer lors du match France-Lituanie du 1er avril 2009 au Stade de France, l’effet impressionnant des milliers de drapeaux agités par les spectateurs pendant La Marseillaise. Cette animation de match a été initiée et financée par la Fédération française de football. Depuis 2008, elle a souhaité favoriser cette animation tant pour son apport visuel que symbolique dans le cadre d’un programme « d’actions de civilité » plus large.

 

Aussi, le Haut Conseil invite-t-il les organisateurs de ces rassemblements (fédérations sportives, médias, sponsors, etc.) à poursuivre leurs efforts de préparation de ces moments d’union collective autour des symboles républicains comme la distribution de milliers de petits drapeaux tricolores à l’occasion des manifestations sportives par exemple.

 

Cet article est le 63ème paru sur ce blog dans la catégorie République Parlement

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11 octobre 2013 5 11 /10 /octobre /2013 22:31

C’est l’honneur de tous les citoyens qui est alors mis en cause

 

Comme me l’a signalé récemment Serge Maupouet, le Haut conseil à l’intégration (voir le site) publiait, en septembre 2009, un rapport en deux volets, dont l’un était un avis relatif à "la connaissance des valeurs de la République". Voir Etudes et intégration - Faire connaître les valeurs de la République (La documentation française).

L’article 2 de la Constitution définit les attributs de la souveraineté républicaine : « La langue de la République est le français. L’emblème national est le drapeau tricolore, bleu, blanc, rouge. L’hymne national est La Marseillaise. La devise de la République est Liberté, Égalité, Fraternité. Son principe est : gouvernement du peuple, par le peuple et pour le peuple. ». Mais, d’autres symboles non inscrits dans le marbre constitutionnel incarnent également la République (…).

 

Après l’extrait concernant la laïcité (voir Intégration : connaître les valeurs de la République, notamment la laïcité - 9 octobre 2013), puis celui traitant de Marianne (voir Un symbole républicain : Marianne, figure allégorique de la République - 11 octobre 2013), voici ce qui concerne l’hymne national.

 

Un chant national : La Marseillaise*

 

Écrite par Claude-Joseph Rouget de Lisle dans la nuit du 25 au 26 avril 1792 à la suite de la déclaration de guerre de la France à l’Autriche, l’hymne national fut composé pour l’armée du Rhin, avant d’être entonné par les volontaires du Midi montant vers le front au cours du mois de juillet 1792 sous la conduite du docteur François Mireur qui en avait diffusé les paroles au préalable. C’est le 14 juillet 1795 que La Marseillaise devient hymne national.

 

Après avoir été interdite sous l’Empire et la Restauration, elle réapparaît après la Révolution de 1830 mais c’est la IIIe République présidée par Jules Grévy qui l’impose comme hymne officiel de la République en 1879.

La relégation de La Marseillaise au rang d’instruments d’un nationalisme guerrier due à la fois à la méconnaissance du contexte historique qui l’a vue naître et à la posture idéologique des années 1960 a contribué à l’accaparement, dans les années 1980, par l’extrême droite nationaliste de l’hymne et à la confiscation de son sens profond, à l’instar d’autres symboles comme le drapeau tricolore. Le compositeur-interprète Serge Gainsbourg avait précisément voulu contrer cet accaparement en montrant le caractère universel et moderne de l’hymne national à travers une version reggae en 1979. Cette initiative fut hélas incomprise et violemment attaquée par des groupes de parachutistes. Ce n’est qu’au milieu des années 1990, dans le contexte de réappropriation du patrimoine républicain, que La Marseillaise reprend ses droits et commence à être entonnée régulièrement et de façon « déculpabilisée »

à l’occasion de cérémonies publiques en particulier lors de rassemblements politiques de partis démocratiques.

 

L’insistance posée par la lettre de mission du ministre chargé de l’Intégration au Haut Conseil à la connaissance et au respect de La Marseillaise nécessite d’aborder la question de l’outrage et de son sens. Nous l’aborderons plus spécifiquement dans la quatrième et dernière partie de l’avis puisque l’outrage en question ne concerne pas, bien entendu particulièrement, les immigrés, mais une fraction minoritaire de la jeunesse**. Il convient d’abord de revenir à la question de l’attachement des citoyens à leur hymne. L’idée reçue pourrait laisser croire qu’ils y sont indifférents, or les condamnations unanimes, à la suite de sifflets lors des manifestations sportives prouvent le contraire. En 2005, un sondage révélait que 72 % des Français étaient attachés à La Marseillaise et 64 % déclaraient en connaître les paroles (le refrain). Les sondés la qualifiaient de patriotique (89 %) et porteuse d’un sens symbolique fort (82 %) représentant bien la France (80 %). L’accusation de violence souvent faite aux paroles de l’hymne n’était retenue que pour 41 % des sondés. Ils étaient 72 % à estimer important d’en connaître les paroles, alors que l’obligation faite par la loi du 23 avril 2005 de l’apprendre aux élèves des écoles primaires avait suscité une large opposition des syndicats d’enseignants et de certaines fédérations de parents d’élèves.

 

La question de l’outrage au symbole est ainsi posée dans la mesure où ces actes ou paroles portent atteinte aux principes politiques fondant le pacte républicain admis et respecté par les citoyens. D’une certaine manière, c’est l’honneur de tous les citoyens qui est mis en cause. Il faut, toutefois, relever la présence de dépositaires de l’autorité publique lors des évènements au cours desquels sont survenus ces incidents ; on peut penser, sans que cela ne légitime ces manifestations d’hostilité, que c’est davantage l’État comme autorité de gouvernement que la France comme nation qui était visée par les sifflets.

Dans la continuité de cette réflexion, la pénalisation de l’outrage est posée. Elle doit faire l’objet d’une explication contextualisée auprès des nouveaux immigrants lors des sessions de formation qu’ils peuvent recevoir. C’est à la suite aux incidents de 2001 (match France-Algérie) et 2002 (match Lorient-Bastia), qu’une loi a été votée le 18 mars 2003 dans le cadre de la loi sur la sécurité intérieure (LSI) : « Le fait, au cours d’une manifestation organisée ou réglementée par les autorités publiques, d’outrager publiquement l’hymne national ou le drapeau tricolore est puni de 7 500 euros d’amende. Lorsqu’il est commis en réunion, cet outrage est puni de six mois d’emprisonnement et de 7 500 euros d’amende » (loi no 2003-239 du 18 mars 2003, article 433-5-1 du Code pénal). La difficulté à faire appliquer cette nouvelle disposition est réelle comme cela s’est vu lors de la réitération de ces incidents en 2007 et 2008. Il est, en effet, fort difficile d’identifier au sein d’une foule de supporters les auteurs de ces actes et le risque d’arbitraire est grand à vouloir faire un exemple en faisant condamner quelques contrevenants.

 

Le Haut Conseil considère qu’il revient aux fédérations sportives amateurs comme professionnelles, de sensibiliser plus encore leurs publics à la dimension civique des rassemblements sportifs, sur le modèle, par exemple, du « passeport » de la Fédération française de football qui incite les joueurs à chanter l’hymne national à travers un outil distribué depuis six mois à tout joueur de plus de 16 ans sélectionné en équipe de

France. De même, le Haut Conseil recommande qu’à l’occasion des cérémonies officielles, la Marseillaise soit jouée, voire chantée.

 

* Rappel : Les paroles de La Marseillaise sont à resituer dans leur contexte historique - 28 juillet 2007

Match de foot à St-Denis : Marseillaise sifflée, République outragée - 18 octobre 2008

 

** L’école : un lieu primordial de la transmission des valeurs républicaines

 

Ceci étant posé, il est clair qu’on observe, depuis bientôt trois décennies, le retour du questionnement de la République sur la problématique de la transmission des valeurs civiques fondatrices de la Nation française dans l’héritage des réflexions des années 1880 portées par la IIIe République puis dans la République d’après-guerre (1945-1950). L’éclipse de l’instruction civique au primaire, dans les années 1970, diluée dans les activités dîtes d’éveil s’achève en 1984 lorsque Jean-Pierre Chevènement, alors ministre de l’Éducation nationale, la rétablit officiellement. Il apparaît donc bien qu’en vertu de la tradition républicaine française, c’est à l’école publique qu’incombe principalement la responsabilité de la formation civique. Dans le même ordre d’idée, la loi du 23 avril 2005, dite loi Fillon, inscrit clairement la dimension de formation civique de l’école : « Outre la transmission des connaissances, la Nation fixe comme mission première à l’école de faire partager aux élèves les valeurs de la République. Dans l’exercice de leurs fonctions, les personnels mettent en oeuvre ces valeurs ». L’article 15 bis de la loi précitée, issu de l’amendement du député Jérôme Rivière, prévoit l’apprentissage obligatoire de La Marseillaise et le rappel de son contexte historique. La circulaire de rentrée datant du 31 août 2005 reprend l’article modifié du Code de l’éducation L. 321-3 précisant, qu’aux côtés de la famille, l’école élémentaire « assure l’éducation morale » et « offre un enseignement d’éducation civique qui comporte obligatoirement l’apprentissage de l’hymne national et son histoire ».

 

À ce jour, il est bien difficile d’évaluer l’application de cette loi qui avait suscité la polémique et l’opposition de la plupart des syndicats enseignants. Si l’école est le lieu de construction primordial de la citoyenneté politique qui s’acquiert à la majorité, il est évident que l’éducation à la citoyenneté ne peut faire l’économie d’un passage par la transmission théorique des valeurs et symboles républicains. La citoyenneté n’existe qu’à travers des actes exprimant un engagement, un désir de participer à la vie publique parce que l’on partage un projet politique avec le reste de la communauté citoyenne à laquelle on décide d’appartenir à sa majorité. La question se pose alors de savoir si les actes d’incivisme sont le signe d’un rejet de la citoyenneté ou d’une quête de citoyenneté différente ?

 

Afin que le citoyen participe pleinement et concrètement aux affaires publiques qui le concernent dans le cadre démocratique républicain, il y a des notions indispensables à maîtriser. Elles viennent expliciter le sens des valeurs et symboles auxquels la République est attachée. Ces notions relèvent du droit, de la philosophie du droit et d’une culture historique dont la transmission incombe pour l’essentiel à l’école républicaine. C’est lorsque ses notions sont connues, comprises et intériorisées que la citoyenneté politique prend un sens. L’apprentissage scolaire éduque au respect des valeurs et symboles de la République, mais c’est l’intériorisation découlant de la continuité de ce parcours civique tout au long de la scolarité qui conduit à l’adhésion aux valeurs. Il est regrettable de constater que la pédagogie civique scolaire fasse parfois passer l’apprentissage de la citoyenneté politique (droit de vote, etc.) avant l’exposé historique et philosophique des valeurs et symboles.

 

Il est utile de distinguer deux espaces de transmission à la jeunesse des valeurs républicaines. Tout d’abord, l’espace privé relevant de la famille et de l’environnement du jeune. Le rôle des parents dans cette éducation citoyenne est important et doit se faire en cohérence avec ce que la société a défini comme valeurs, au fil des générations.  Dans le cas des publics migrants, il est indispensable de tenir compte de l’éventuelle disjonction existante entre ce que l’école dit des valeurs et ce que les familles peuvent en dire pour comprendre les conflits intérieurs de certains jeunes. Cette disjonction ne concerne d’ailleurs pas que les familles immigrées. L’existence de plus de quarante associations fédérées depuis 1970 au sein de l’École des parents et des éducateurs (EPE) mérite d’être signalée. En effet, ces structures, ayant pour objet de favoriser de façon concrète (suivi, soutien, projets collectifs, etc.) les interactions éducatives entre parents, professionnels de l’éducation et jeunes doivent être encouragées.  

 

Cet article est le 62ème paru sur ce blog dans la catégorie République Parlement

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11 octobre 2013 5 11 /10 /octobre /2013 17:08

A l’origine, une chanson populaire « La guérison de Marianne »

 

En septembre 2009, le Haut conseil à l’intégration (voir le site) publiait un rapport en deux volets, dont l’un était un avis relatif à "la connaissance des valeurs de la République".

Voir Etudes et intégration - Faire connaître les valeurs de la République (La documentation française).

 

L’article 2 de la Constitution définit les attributs* de la souveraineté républicaine : « La langue de la République est le français. L’emblème national est le drapeau tricolore, bleu, blanc, rouge. L’hymne national est La Marseillaise. La devise de la République est Liberté, Égalité, Fraternité. Son principe est : gouvernement du peuple, par le peuple et pour le peuple. ». Mais, d’autres symboles non inscrits dans le marbre constitutionnel incarnent également la République (…).

 

Après l’extrait concernant la laïcité (voir Intégration : connaître les valeurs de la République, notamment la laïcité - 9 octobre 2013), en voici un autre, relatif à Marianne, l’un des symboles républicains.

Le mot symbole est dérivé du grec sumbolon traduisible par «signe de reconnaissance». Le symbole est un signe (texte, objet, etc.) qui par son caractère imagé conduit spontanément à une association d’idées dans un groupe social donné avec quelque chose d’abstrait ou d’absent. Ici, la présence physique du symbole rappelle que nous vivons dans une République héritière et porteuse d’un ensemble de principes et de valeurs incarnées par ces symboles (…).

 

Un visage : Marianne

 

Marianne est la figure allégorique de la République. Elle représente autant l’idée abstraite d’une forme politique que la notion morale de liberté à laquelle elle se rattache et qui fonde l’idéal républicain. Si elle apparaît, depuis la IIIe République, quasi exclusivement sous forme de buste, la Marianne est d’abord un personnage entier porteur d’attributs symboliques qui lui donnent tout son sens :

– le bonnet phrygien incarne l’esclave affranchi et le peuple de Paris de la Révolution de 1789 ;

– la couronne signifie le pouvoir ;

– le sein nu : la mère nourricière ;

– les chaînes brisées : la liberté ;

– le triangle : l’égalité ;

– les faisceaux : l’autorité étatique ;

– la balance : la justice.

 

L’origine de la dénomination de Marianne comme symbole de la République date de 1792. Une chanson populaire en langue occitane, la Guérison de Marianne, racontait les premiers jours bouleversés du nouveau régime et Marianne y représentait la revanche des servantes contre les nobles.

Mais c’est la IIIe République qui va imposer le symbole de la Marianne par des campagnes d’exposition publique d’abord dans les mairies servant souvent d’école dans une France encore largement rurale. Les succès électoraux des Républicains à la fin du XIXe siècle ont contribué à la diffusion de l’imagerie républicaine dans les mairies. La Marianne de la IIIe République est plus sage, elle porte plus fréquemment la couronne que le bonnet phrygien rappelant davantage la violence révolutionnaire. À la fin des années 1960, dans le contexte du développement de la culture de masse, s’initie cette connivence entre République et show- business. Il est intéressant de relever cette mutation du politique dans sa conception des vecteurs de communication créateurs de lien avec les citoyens : la star de cinéma Brigitte Bardot, mondialement connue et célébrée, est ainsi devenue en 1968 la première célébrité désignée comme Marianne. Suivront Mireille Mathieu, Catherine Deneuve, Inès de la Fressange. Les polémiques commencèrent avec le choix du mannequin Laetitia Casta et surtout celui d’une animatrice de télévision fort populaire à l’époque, Évelyne Thomas. Beaucoup critiquèrent la dimension « démocratie médiatique d’opinions » incarnée par ces initiatives.

En 1999, l’État a adopté le logotype représentant le profil de Marianne reprenant les couleurs du drapeau puisqu’elle est dessinée en blanc sur un fond bleu et rouge ; la devise et la mention « République française » figurent également sur ce logotype.

 

Le Haut Conseil demande que le logotype républicain figure sur tous documents et objets émanant des services de l’État, mais également des collectivités territoriales qui sont le plus au contact de la population. Cela permettrait de familiariser le public avec les symboles républicains. Le Haut Conseil recommande également que le buste de la Marianne soit présent de façon plus systématique dans les écoles, mairies et préfectures.

 

* Rappel : L'origine des trois couleurs du drapeau français, selon Xavier Dumoulin - 30 mars 2007

Les paroles de La Marseillaise sont à resituer dans leur contexte historique - 28 juillet 2007

14 juillet, fête nationale de la République française depuis 1880 - 14 juillet 2008

 

Cet article est le 61ème paru sur ce blog dans la catégorie République Parlement

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9 octobre 2013 3 09 /10 /octobre /2013 22:55

Réguler les tensions identitaires et communautaires

Ayant lu les articles relatifs à la Marseillaise (voir Les paroles de La Marseillaise sont à resituer dans leur contexte historique - 28 juillet 2007 et Match de foot à St-Denis : Marseillaise sifflée, République outragée - 18 octobre 2008), Serge Maupouet a eu la bonne idée de me signaler les travaux du Haut Conseil à l’intégration, publiés par la Documentation française en septembre 2009.

Voir Etudes et intégration - Faire connaître les valeurs de la République.

Extrait concernant la laïcité.

 

La République française a fondé un modèle de laïcité singulier qui a servi et sert encore de modèle ou de contre modèle. La dimension multiculturelle de sociétés modernes actuelles justifierait pour certains la remise en question de ce modèle, auquel pourtant l’immense majorité des Français demeurent attachés. Le premier article de la Constitution de 1958 place la laïcité en deuxième rang des principes qui fonde la république : « La France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale ».

 

Pour faire comprendre aux nouveaux venus dans la République pourquoi la France est si attachée à sa laïcité, il faut en retracer l’histoire et dire en quoi elle est un élément essentiel de la pacification de l’espace social.

Portée par les idées des Lumières, elles-mêmes héritées de l’Angleterre et de la jeune démocratie américaine, la Révolution française constitue le départ de l’aventure laïque française. Le cheminement vers la laïcité de l’État propre à l’histoire nationale est un récit des conflits internes à la société et met en lumière la construction identitaire républicaine et démocratique.

 

Avant que l’on parle du « pacte » laïque français, il y eut une guerre idéologique et politique de

la Révolution à la veille de la Première Guerre mondiale.

Le 26 août 1789, l’article 10 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen affirme que « nul ne peut être inquiété pour ses opinions, mêmes religieuses, pourvu qu’elles ne troublent l’ordre public établi par la loi ». La rupture de l’alliance entre le trône et l’autel est affirmée par l’article 3 : la Nation est désormais seule détentrice de la souveraineté. La France est devenue un État multiconfessionnel où le catholicisme perd son monopole. L’offensive révolutionnaire a eu une motivation économique (abolition des dîmes, nationalisation des biens du clergé, interdiction des ordres religieux dont la propriété foncière revient à l’État 1789-1790), mais aussi politique avec l’obligation du serment constitutionnel en novembre 1790 et la suppression des ordres religieux et des congrégations qui s’occupaient largement d’éducation est un autre moment important de l’histoire laïque française.

 

La Constitution de 1791 va mettre fin au monopole de l’Église catholique sur l’enregistrement de l’état-civil. Naissance, mariage et décès ne sont plus considérés comme prioritairement liés à un sacrement. Les étapes de la vie du citoyen, qui n’appartient à aucun groupe communautaire, doivent être enregistrées par un agent de l’État. Le mariage devient un contrat civil susceptible d’être rompu, le divorce est ainsi reconnu. En septembre 1792, un décret imposera aux autorités municipales de se charger de l’enregistrement et de la conservation de ces données. La laïcisation de l’état civil est une étape fondamentale dans la construction d’une société émancipée des pressions et des exclusivismes religieux.

 

Après la Terreur, le régime du Directoire doit réagir face à la progression des opposants à l’affaiblissement du pouvoir de l’Église. La séparation de l’Église et de l’État est déclarée : « Nul ne peut être empêché d’exercer, en se conformant aux lois, le culte qu’il a choisi. Nul ne peut être forcé de contribuer aux dépenses d’un culte. La République n’en salarie aucun » (article 354).

Le conflit avec la papauté est insurmontable. C’est Bonaparte en signant le Concordat de 1801 avec Pie VII qui apaise les tensions en faisant du catholicisme la religion « de la grande majorité des Français » et la charte de 1814 rétablira le catholicisme religion d’État. Jusqu’en 1905, le Concordat de 1801 organisera les relations entre l’État et l’Église catholique, il reste encore en application dans les deux départements de l’Alsace et la Moselle.

 

Le refus de la modernité incarnée par les Ultras qui veulent renégocier un nouveau concordat structure la réaction anticléricale de la seconde moitié du XIXe. Pour les républicains et les libéraux français, le catholicisme n’est pas qu’une foi, c’est une structure politique aux objectifs avérés : la prise de contrôle du corps social et la mainmise sur l’État. Le camp de l’anticléricalisme ressent l’activisme de l’Église, en particulier des congrégations jésuites, comme une menace envers l’unité nationale. Ce combat contribue à l’entrée en 1871, du mot « laïcité » dans son acception moderne dans le dictionnaire.

 

Le 16 mai 1877, la victoire électorale des républicains anticléricaux permet un renforcement de la IIIe République qui revendique son projet de laïcisation de l’espace public. Ainsi, entre 1878 et 1891, des mesures sont prises pour laïciser les hôpitaux de Paris. En 1880, le repos dominical n’est plus obligatoire et en 1881 le caractère religieux des cimetières est aboli. À partir d’août 1884, les prières publiques lors de l’ouverture de la saison parlementaire sont supprimées.

En 1899 et 1905, deux lois obligent les séminaristes à effectuer leur service militaire. Le 1er avril 1904, le ministère de la Justice par voie de circulaire ordonne le retrait des crucifix dans les tribunaux. À partir de 1881, le combat laïc va se jouer sur le terrain scolaire.

 

Le 1er juillet 1901, la loi Waldeck-Rousseau peut être vue comme une réaffirmation du socle laïque républicain après l’ébranlement de l’affaire Dreyfus. Cette loi soulève l’opposition du Vatican car si la liberté d’association est facilitée de façon inédite, l’article 3 de la loi soumet les congrégations religieuses à une autorisation législative permettant leur mise sous contrôle par l’État. Le gouvernement d’Émile Combes, issu du Bloc des gauches, résiste à l’opposition violente des cléricaux et applique avec rigueur la loi de 1901. Les ordres religieux sont même expulsés et en juillet 1904 l’interdiction faite aux congrégations d’enseigner entraîne la rupture des relations diplomatiques avec le Vatican. Le Concordat de 1801 est caduc. Le projet de loi de séparation nette entre Églises et État préparé par le gouvernement Combes est mis en débat devant l’Assemblée par le gouvernement Rouvier. Aristide Briand et Jean Jaurès présentent la loi comme un texte pouvant concilier les catholiques modérés puisqu’en ne reconnaissant et en ne salariant aucun culte, l’État accorde toute liberté aux institutions religieuses pour s’organiser sous la forme d’association cultuelles.

 

Le 11 décembre 1905, la loi est promulguée. Elle sera condamnée par le pape Pie X en février 1906 et il faudra attendre 1921 pour une reprise des relations diplomatiques avec le Saint-Siège.

Après la période du gouvernement de Vichy qui remet en cause la nature laïque du régime en subventionnant les écoles confessionnelles et en supprimant la réglementation imposée aux congrégations pour obtenir l’autorisation d’exercer, la Constitution de 1946 puis celle de 1958 vont réaffirmer la nature laïque de la République en en faisant un principe constitutionnel.

 

Les combats pour la paix religieuse et sociale ont été peu rappelés aux générations d’après-guerre. Le principe de laïcité, considéré comme un acquis incontesté, se trouva mal défendu lorsqu’il fut remis en cause dans les années 1980 autour du débat sur la visibilité d’un islam radical prosélyte. La prise de pouvoir politico-spirituel sur la jeunesse française de culture musulmane en situation de relégation sociale et économique dans des quartiers abandonnés par les pouvoirs publics complétée par la volonté d’une mainmise sur le corps de la « femme musulmane » au mépris de ses droits de citoyenne ont fait l’objet d’une réponse politique qui n’a pas tout de suite été appropriée. Au milieu des années 1980, quand ces phénomènes vont émerger, on pensait qu’ils seraient rapidement défaits, à l’instar de la réaction catholique quelques décennies plus tôt.

 

Le principe de laïcité va au-delà de la sécularisation de l’espace publique, il induit une profonde relativisation sociopolitique du fait religieux. Il s’agit là d’un bouleversement philosophique auquel aucune religion ne consent. IL faut donc bien expliquer comment la France a structuré ce bouleversement et l’a imposé à l’Église en 1790 puis 1905. On peut aussi de quelle façon Napoléon 1er l’impose aux juifs français lors de l’Assemblée des notables de 1807 puis du

Grand Sanhédrin de 1808. L’islam, nouvelle communauté religieuse entrée dans la communauté nationale au milieu des Trente Glorieuses, n’hérite pas de cette même histoire. Les populations migrantes de culture musulmane des années 1950-1970 sont majoritairement d’origine africaine et en particulier maghrébine, le lien historique avec la France ramène à la période coloniale. De plus, jusqu’à la fin des années 1970, la classe politique française considère que leur présence en France n’est que temporaire et qu’après avoir travaillé, ils retourneront dans leur pays d’origine.

 

Au fil du temps, la législation évolua favorisant logiquement le regroupement des familles de migrants. Les pouvoirs publics continuèrent pourtant à mal évaluer la nécessité d’une véritable politique d’intégration. On peut en trouver une illustration dans la poursuite au sein même des écoles publiques des enseignements de langue et culture d’origine (ELCO) dispensés par des enseignants souvent envoyés des pays d’origine sur lesquels ils étaient difficile de porter une évaluation. Crée en 1925, c’est une réglementation datant de 1939 qui en fixe toujours le fonctionnement (en dehors du temps scolaire, dans les locaux scolaires, des cours de langue, d’histoire et géographie du pays d’origine).

 

La laïcité est un principe mettant en oeuvre un ensemble de règles organisant la vie publique. Ces règles communes à tous incarnent les principes républicains d’égalité et de liberté en régulant les tensions identitaires et communautaires dans une société démocratique reposant sur le respect du pluralisme.

Par la neutralité politico-religieuse de son espace public, la République garantit la libre expression et le principe citoyen qui veut que l’on reconnaisse l’individu pour son mérite et non pour son origine sociale, ethnique ou religieuse. Ce principe est de plus en plus brocardé au motif qu’il demeure, en France, des discriminations contredisant cet idéal. Mais comme nous l’avons déjà dit, le réel ne limite ni la portée ni le combat pour atteindre un idéal fondateur du pacte social. Le volontarisme partagé par tous doit permettre d’y parvenir.

 

Le Haut Conseil recommande que, dans la formation civique, soit traitée avec une particulière attention la question de la laïcité. Il souhaite qu’au-delà de l’histoire de la conquête de ce principe républicain, soit rappelée l’égalité de valeur entre la liberté de conscience et la liberté religieuse d’une part, et la laïcité de l’État et des services publics, d’autre part. Il observe en outre que les formateurs doivent mieux distinguer la laïcité de la sécularisation de la société française et notamment son lien avec les droits de l’homme et l’égalité.

 

Cet article est le 60ème paru sur ce blog dans la catégorie République Parlement

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